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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Quand on tutoie la misère, on peut bien tutoyer Dieu... Pourtant ni Dieu ni Karl Marx ni les grands dirigeants n'auront que faire de cette famille de laissés pour compte à travers Aline et Christophe tous deux ouvriers dans une usine en proie aux fracas économiques.
Avec leurs deux salaires, ils remboursent le crédit de la maison, celui de la voiture, remplissent le frigo, paient l'électricité, l'eau, ils arrivent même à épargner un peu pour les loisirs et les vacances. Pourtant, sans crier gare, l'usine de textile d'Aline est délocalisée, même un salaire de misère c'est encore trop pour ces ogres de dirigeants. Quant à Christophe, le profil de son usine n'est pas meilleur et la grève gèle le salaire des ouvriers. Comment continuer à vivre avec un seul salaire minimal, un salaire indécent qui conduirait n'importe qui aux portes de la misère.

Ventres affamés, coeurs décharnés, rêves enterrés, chaque minute sonne le glas de la survie pour redresser cette famille à la dérive. Il faudra compter, oublier la quatre roues, mettre un masque parce que les enfants dans ce monde de prolétaires restent la seule richesse, alors il faut se taire, faire semblant, faire comme avant même si plus rien ne sera comme avant. Léa prépare ses études économiques. Elle se questionne, repense à son grand père Staline pour qui les ouvriers méritaient tout. Elle poursuit sa route vers le paradoxe d'Anderson sans s'imaginer la toile nauséabonde qui se tisse sur les siens. Mathis, le benjamin souffre d'une maladie mal définie, il s'étouffe dans des crises d'asthme qui nécessitent une surveillance quotidienne. Son salut, c'est l'arbre de Tarzan sur lequel il aime se balancer. Arbre qui aura plus d'une symbolique ici, entre insouciance et désespoir.

Le paradoxe d'Anderson de Pascal Manoukian est un roman brillant où l'auteur n'aura de cesse de dépeindre la société où les pauvres doivent être toujours plus pauvres quand les poches des riches débordent de tout ce qui est pris aux pauvres. Triste réalité noire et amère sous une excellente plume vivante et combien réaliste.
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Ce roman se déroule dans l'Oise, de nos jours, dans une région durement touchée par la mondialisation, les délocalisations d'entreprises, le chômage, la misère, le désert culturel....Un cadre qui, hélas , aurait bien pu, lui aussi, être délocalisé sur une grande partie de notre territoire.
Aline et Christophe travaillent tous deux en usine. Si leur vie ne respire pas l'aisance, ils réussissent à payer les crédits, celui de la maison, celui de la voiture, tout ne va pas trop mal pour eux mais l'épée de Damocles pend toujours au-dessus de leur tête. Ils ont deux enfants, Mathis, atteint d'une maladie mal définie et Léa, bonne élève de terminale qui s'apprête à passer son bac ES, un bac qui la conduit à analyser en permanence les théories et pratiques économiques du monde actuel.
Soudain, sans préavis , la catastrophe: Aline perd son emploi et, un malheur ne venant jamais seul, la grève paralyse l'entreprise de Christophe. Commence alors une autre histoire, une histoire dans laquelle Christophe et Aline vont se débattre contre le malheur qui les accable et se lancer dans une lutte dont on aimerait bien qu'ils sortent vainqueurs.....
L'auteur a connu, par ses parents, le monde ouvrier, il sait de quoi il parle quant au contenu, aux descriptions, à l'analyse des peurs, de la colère , de la désespérance. On "plonge, on se débat, on appelle au secours, on se noie , avec ces deux personnages émouvants de dignité.
Et dire que nous connaissons TOUS des gens qui se trouvent dans cette situation désespérée alors que leur seul souhait est de vivre décemment.
Je regrette un peu l'épisode dans lequel on voit évoluer "Bonux and Tide"( je vous laisse découvrir ) un peu "tiré par les cheveux"si je puis m'exprimer ainsi.
J'ai été atterré par certaines méthodes d'embauches et la brutalité des démarchage à domicile...
Ce roman social est sans concession , hélas.. Sans concession car je crois qu'il décrit avec justesse la vie désespérante du monde ouvrier. C'est un livre dur qui devrait nous interpeller sur le monde qui est le nôtre aujourd'hui. Pas vraiment beau, tout ça, pas très encourageant non plus. Et nous sommes au XXIème siècle ,ce livre n'a pas été écrit par Zola,et pourtant...
Il ne faut pas faire l'impasse sur ce livre, pas fermer les yeux, respecter le courage de l'auteur, ne pas baisser les bras...



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Pascal Manoukian, ex-reporter, sort sa loupe et son crayon, et nous décrit ce qui se passe derrière les "plans sociaux" (puisqu'on ne dit plus "licenciements") annoncés par la presse.
Sur 10 mois et autant de chapitres, il raconte le déclassement d'une gentille famille de la classe moyenne. Les parents occupent des postes de contremaitres à l'usine, leur fille va passer le bac, leur fils se prend pour Tarzan, et tous mènent une vie modeste mais heureuse dans une jolie maison d'un tranquille village de l'Oise. Rien d'extraordinaire, mais c'est déjà trop prétentieux et ringard pour une start-up nation comme la nôtre : les usines qui emploient les parents ferment l'une après l'autre, et à charge pour eux de rebondir, à 40 ans passés, sans diplômes et avec tous leurs crédits en cours, dans une région désindustrialisée ; bah, comme dirait l'autre, il suffit de "traverser la rue" pour retrouver du travail.
De façon un peu plus réaliste, Manoukian raconte comment on gère une situation aussi pourrie -ou plutôt, comment on ne peut pas la gérer, et comment on s'enfonce dans le mensonge pour épargner ses enfants, comment on sacrifie tout ce qu'on a aimé pour se chauffer et manger, comment on apprend à arnaquer des plus pauvres que soi pour gagner quelques euros, comment on jette ses rêves par-dessus bord pour rester à flot. Comment on se révolte, aussi. Mais surtout, Manoukian raconte la France de ce début du XXIe siècle, ravagée par le néolibéralisme et rongée par le RN, résignée sous le joug de l'obsolescence des compétences (sur les 25 dernières années, la durée de vie d'une compétence professionnelle est passée de 30 à 2 ans, et cette durée se réduit encore).
C'est donc un roman social qui fait mal à lire, qui frappe en plein plexus et qui pourtant raconte une histoire devenue tellement banale que je m'étonne de m'en émouvoir encore (au moins, cela me rassure sur mon humanité). Je pense que chacun peut s'y retrouver, ou y retrouver une personne de sa connaissance, et en cela ce livre apporte une espèce de réconfort en forme d'hommage à la classe ouvrière. Mais la teneur est désespérément sombre et lucide, on n'en sort pas indemne.
A lire, pour mieux comprendre ce qui arrive à notre pays. Prévoir ensuite une p'tite vodka pour s'en remettre.
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Prolétaires : Citoyens de la plus basse classe, dont les enfants sont la seule richesse

Aline habite dans l'Oise, près de Beauvais avec son mari Christophe et leurs deux enfants Matthis et Léa. Mathis, parfois l'air lui manque, il quitte brusquement le monde et il revient chaque fois sans l'ombre d'un souvenir. Léa passe le bac cette année et rêve d'aider le monde à changer, d'en arrondir les angles afin qu'il ne blesse plus personne.
Les communistes ont disparu depuis longtemps et le travail aussi laissant la place à des friches industrielles, la commune ne compte pas d'école, pas de café non plus, il ne reste que des fermes. Les lettres de licenciement, les dettes, les pièces jaunes que l'on compte à la caisse du supermarché, l'huissier. le déjeuner sur l'herbe qui se transforme en radeau de la méduse. Deux bouteilles de Meursault, du foie gras, s'offrir une dernière soirée de riches avant de devenir pauvres. Une seule issue, le seul courage qu'il leur reste : se soustraire à la vie.
Une chronique sociale, un livre militant sur la détresse du monde ouvrier face à la mondialisation et aux délocalisations. « Il n'y a pas mieux aujourd'hui pour enseigner la géographie aux enfants que de leur apprendre où sont passées les usines de leurs parents. » Un roman profondément humain qui m'a beaucoup touché. Des portraits saisissants comme Léon, le grand-père, tout le monde le surnomme Staline à cause de ses colères rouges chaque fois que quelqu'un s'en prend aux ouvriers. Il berce sa petite fille en lui chantant tout bas « l'internationale ». Il est mort à 85 ans, d'une crise cardiaque en voulant en découdre avec un militant du Front national, ses derniers mots avaient été « Va te faire foutre ! », il était mort comme il avait vécu, sans mâcher ses mots.
La langue est vivante, simple comme le sont les ouvriers, l'humour fait oublier la triste condition. Pascal Manoukian peint avec justesse la détresse des ouvriers licenciés, perdus comme des abeilles dont on vient de détruire la ruche. Leur seul rêve la réussite de leurs enfants : « C'est pour ça que l'on fait des enfants, pour les hisser sur ses épaules, le plus haut possible, les aider à atteindre ce que l'on n'a pas pu atteindre soi-même. »
Des passages m'ont mis mal à l'aise comme le cynisme dont fait preuve le responsable du recrutement de vendeurs à domicile auquel Aline participe. « Ma cible, ce sont les pauvres, et c'est pour ça que vous êtes là. Parce qu'il n'y a pas mieux que d'autres pauvres pour leur fourguer des choses dont ils n'ont pas besoin. »

Je regrette cependant que l'auteur transforme peu à peu son livre en une sinistre farce lorsqu'Aline et son mari avec l'aide d'autres pieds nickelés décident de braquer le supermarché. La puissance et l'émotion des premiers chapitres retombent un peu et le récit perd de sa crédibilité. Reste un roman qui nous fait réfléchir sur les dérives de notre société où l'auteur aborde des thèmes auxquels je suis très sensible. Malgré une fin terrible, magnifiquement écrite, il faut garder espoir dans notre jeunesse, la génération « 0 » qui saura reconstruire un monde plus juste.


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Amis un peu déprimés en ce dèbut de mois de novembre pluvieux et devant supporter l'heure d'hiver, passez votre chemin si vous voulez vous remonter le moral avec "La paradoxe d'Anderson".
Les parents ouvriers vont perdre leur emploi, la fille passe son bac et il faut lui cacher pour ne pas lui ôter ses rêves, le petit dernier est malade.
Le grand-père surnommé "Staline" les avait pourtant prévenu de ne pas se laisser endormir.
Ils avaient fait tout ce qu'il fallait, n'avaient pas compté leurs heures, avaient pu acquérir leur pavillon et les voila embarqués, emportés, dévastés dans un engrenage que rien n'arrête.
C'est un livre brillant, poignant, bouleversant qui empêche de respirer.
Certes ce n'est pas gai mais ce roman fait partie de ces livres émouvant, bien écrit qui nous rappelle à la réalité.
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Beaucoup d'émotions dans ce roman qui met en scène une ville ouvrière du Nord avec des hommes et des femmes qui ont réussi à vivre correctement, qui espèrent même que leurs enfants feront des études et vivront mieux qu'eux.
Mais le jour où les deux usines ferment, quelle solution trouver ?
La banque refuse d'échelonner les échéances du prêt de la maison, les revenus, déjà justes, diminuent. le père continue la lutte et la grève.
La mère cherche du travail mais sans succès.
Et tout cela ils le cachent à leur fille qui va passer son bac, pour ne pas trop la perturber.
Même faire les courses alimentaires quotidiennes pose problème.

J'ai lu ce livre en décembre en plein mouvement des gilets jaunes et j'ai été particulièrement réceptive à ces vies brisées sans qu'aucune solution puisse être apportée.
Certes l'histoire est un peu manichéenne et parfois invraisemblable, mais l'auteur a su donner de la chair à ses personnages en rappelant qu'eux aussi avaient des rêves et des espoirs.
Elle voulait voyager, il voulait travailler ailleurs qu'à l'usine.
Et ces rêves reviennent pendant cette période dramatique avec le personnage de leur fille qu'ils essaient de tenir loin de tout cela pour qu'elle au moins ait un avenir meilleur.
Mais il y a le « paradoxe d'Anderson » hélas qui rappelle que «  l'acquisition par un étudiant d'un diplôme supérieur à celui de son père ne lui assure pas, nécessairement, une position sociale plus élevée."
Un livre à lire pendant cette période où on ne doit pas fermer les yeux sur cette misère sociale.
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Un livre détonnant qui me touche forcément puisque je viens, moi aussi, d'une famille d'ouvriers. C'est l'histoire d'un couple qui perd son boulot, des usines qui se vident, des machines qui partent en une nuit. C'est l'histoire d'un bouleversement familial. Que faire avec des crédits à tour de bras ? Des enfants à élever ? Une maison à payer ? Pascal Manoukian tente avec humour de masquer ce terrible dénuement mais la réalité rattrape bien vite ce foyer. Je me suis souvent demandé ce que devenaient toutes ces familles qui perdent leurs emplois ? On ne peut être qu'écoeuré devant ce désastre humain. Évidemment l'auteur enfonce des portes ouvertes mais il est bon de rappeler que nombre d'entre nous vit dans la peur du déclassement alors que la France est la 5ème puissance économique au classement mondial du PIB (enfin 7ème en 2019).
3.7 car le thème me touche.
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En pleine crise des gilets jaunes, voici un roman glaçant d'Actualité...
Un roman vraiment ? Dans un environnement social défavorisé, Christophe et Aline ont réussi à se hisser un peu au-dessus de la condition sociale de leurs parents et croient ferme en un avenir meilleur. D'ailleurs ils ont réussi à acheter une jolie maison et leur fille aînée, la première de la famille, va passer le Bac cette année. Oui mais quand les multinationales et les grands patrons sont tributaires de leurs actionnaires et du rendement, ils ne font pas dans la dentelle et les emprunts des ouvriers ne pèsent pas lourd dans la balance : Christophe et Aline voient brutalement leurs rêves s'envoler et leur avenir s'obscurcir quand leurs usines licencient ou délocalisent.
Mais Léa doit passer son bac et ils décident de se taire, d'espérer en des jours meilleurs...
Sans misérabilisme, Manoukian retrace avec une précision cruelle la précarité extrême qui affecte ces ouvriers de l'Oise, complètement dépendants de l'usine qui les aura employés toute leur vie, à la merci de l'économie de marché et de décisions arbitraires et cruelles.
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A la fac, on vous apprend que le but de l'entreprise est la maximisation du profit. Christophe est ouvrier et n'a pas de telles pensées. Que sa fille obtienne son bac ES et aille à la fac est son objectif à lui. Quand sa fille lui parle du Paradoxe d'Anderson, le principe passe au-dessus de lui.

Quel imbécile cet Anderson : « malgré un niveau de diplôme supérieur à celui de leurs parents, les enfants ne parviennent pas à atteindre un statut social plus élevé que le leur. Par exemple, imagine que moi, après trois ans de fac ou cinq ans d'école de commerce, je finisse caissière chez Simply… »

Puis la mondialisation arrive, et aussi les cadres aux dents longues qui veulent faire leurs preuves : une délocalisation réussie est le passage obligé vers les hautes sphères.

Aline la maman perd son boulot, Christophe perd ses revenus suite à une grève, Léa est amoureuse du fils du riche voisin et Mathis a parfois la tête à côté de ses épaules. C'est fou comme la descente aux enfers est rapide, les montagnes russes, c'est de la gnognotte à côté ! Et on a son honneur : on n'en parle pas à ses enfants.

Le scénario est peut-être classique, mais l'histoire vous prend aux tripes tant elle est réaliste. Et partout plane l'esprit de Léon, dit Staline, le grand-père communiste qui les avait pourtant alertés : « Les usines ne poussent qu'une fois et n'engraissent que ceux qui les possèdent. »

Un livre à la Gérard Mordillat où tout est non seulement plausible mais véridique. Toute ressemblance à des faits réels est voulue et assumée.

Quelques phrases incisives :

« Quand on tutoie la misère, on peut bien tutoyer Dieu », pense Aline. »
« Dieu, Karl Marx, Mark Zuckerberg se moquent bien d'eux. Les pauvres n'ont pas plus de chances de s'en sortir qu'un taureau dans l'arène. »
« Vivre sans usines, c'est vivre sans poumons. C'est par là qu'un pays respire, les gars. Sans elles il s'essouffle, contraint d'être en permanence sous assistance. La désindustrialisation, c'est le cancer. »
« Les années ont épaissi sa silhouette. le chômage et les acides gras sont saturés. (…) Désormais, plus on se serre la ceinture et plus on grossit. »
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Dans l'Oise, comme partout ailleurs en France, les usines ferment, laissant sur le carreau des familles entières.
C'est ce qui va arriver à Christophe et Aline (la coïncidence est trop belle). Piquet de grève pour l'un et licenciement pour l'autre. Mais il y a Léa qui prépare le bac et a qui ils refusent d'annoncer le pire.
Pascal Manoukian vise juste, il décrit le monde ouvrier avec précision et délicatesse. Pas de caricatures ni d'angélisme, le monde ouvrier est ce qu'il est, et il est surtout en voie de disparition. Il est loin le temps du grand-père que l'on surnommait Staline, qui a perdu au Jeu des 1000F pour avoir refusé de citer De Gaulle.
C'est d'ailleurs cette mélancolie qui m'a touché, le portrait d'une époque disparu où tout le village attendait l'émission de Lucien Jeunesse, où CGT et PCF ne faisait qu'un, où l'entrée à l'usine était vu comme une promotion sociale pour un bon nombre d'enfants de paysans.
Un livre qui m'a touché, mais je mets un bémol à la fin du roman, un peu trop attendue à mon goût. Mais ça n'a pas gâché mon intérêt pour l'histoire dans son ensemble.
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