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EAN : 9782370320889
492 pages
Fondation Varenne (20/12/2016)
5/5   1 notes
Résumé :
À la fin des années 2000, l'image de la velina - soubrette hyper-érotisée de la télévision italienne - endosse dans les discours de la critique anti-berlusconienne le rôle de symbole de la marchandisation des corps féminins et de la subalternité féminine dans l'espace public, qui caractérise le ventennio berlusconien. Puisant ses outils dans l'épistémologie des Visual Studies anglo-saxons et dans la culture visuelle italienne contemporaine, ce livre vise d'abord à a... >Voir plus
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Préface

Cet ouvrage, issu d’une thèse remarquable, nous transporte à la fois sur la scène et dans les coulisses de la poursuite du pouvoir par Berlusconi. Pour passer en poli-tique, cet homme de communication et de médias avait décidé de conquérir le public italien par la séduction. De façon toute délibérée, il a construit son charisme sur le plateau des télévisions où il a inventé une figure aussi charmante que déshabillée, la velina, type de jeune femme destinée à animer les émissions en une sorte de cadeau offert à la population italienne par celui qui entendait la gouverner.

L’ouvrage de Francesca Martinez Tagliavia raconte cette histoire. Il appartient à la famille universitaire des « visual studies ». Il s’agit d’une discipline nouvelle en France qui s’attache à analyser la culture et les pratiques visuelles et à prendre la mesure de leur importance dans le monde actuel. Cette approche est d’autant plus judicieuse que Berlusconi est un professionnel de l’image et que c’est par l’image télévisée qu’il agissait en tout premier lieu. On trouvera ainsi des études de tableaux, affiches, bro-chures, photographies, films et d’émissions de télévision où le corps des soubrettes éro-tisées tout comme celui de Berlusconi lui-même, aussi féminisé que faire se peut, sont mis en scène. Pour la première fois, une étude présente les liens étroits entre médias, culture visuelle, fabrique des corps féminins et charisme à l’occasion de l’entreprise si surprenante qu’a représentée la prise de pouvoir répétée de Berlusconi dans une Italie transformée en véritable laboratoire de l’image politique.

La recherche comporte également une dimension d’étude de genre. Un homme qui se présente comme tout-puissant ordonne en permanence la mise en scène de ses relations viriles avec les femmes, sexualise intensément la politique et introduit un personnage vivant dans ses techniques de propagande sous l’espèce de la velina. L’auteure montre de façon très convaincante l’instrumentalisation des jeunes femmes dans cette entreprise qui dure une vingtaine d’années. Elle démontre en même temps qu’il ne faut pas considérer Berlusconi comme le démiurge isolé de ce dispositif. Il est au contraire l’animateur de pratiques auxquelles participent de nombreux profession-nels, gens de télévision, spécialistes de la communication, photographes, journalistes, amis-complices et donc aussi jeunes femmes au destin spectaculaire, professionnalisées elles-mêmes dans l’exposition de leur corps.

Une des originalités les plus fortes du livre que vous vous proposez de lire est que, pour sa part, il ne considère pas ces jeunes femmes comme des instruments mais bien comme des personnes. Ce sont des personnes auxquelles il est offert le travail de s’afficher de façon très déshabillée dans des relations parfois humiliantes avec les organisateurs des manifestations, hommes pour la presque totalité. Car c’est elles qui décident de faire ce qu’elles font, choisissent leur rôle, se composent une destinée propre, jugent ceux qui en usent et les abusent, se jugent elles-mêmes dans ce qu’elles acceptent de faire, bref les veline, dominées, agissent et pensent. Elles n’acceptent pas de façon passive un rôle composé pour elles, elles en sont un partenaire comme le montre en particulier un long entretien avec l’une d’elles.

Remarquablement écrit, ce livre est novateur. Il ouvre des pistes de réflexion sur notre univers dont il défait les évidences. Il invite à trouver la vérité des images dans leur confrontation les unes avec les autres, dans la logique collective et politique de leur fabrique et dans l’abandon d’une naïveté qui nous empêche souvent d’identifier les entreprises auxquelles nous sommes soumis.

Yves COHEN
Directeur d’études à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, Paris
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