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EAN : 9782951459489
Garamond (15/12/2012)
5/5   1 notes
Résumé :


Après les chroniques parues sous le titre De La Révolution aux années molles (2006) et les Carnets de la guerre secrète (2010), Jean-Claude Masson poursuit avec Le Dernier Carré de Pythagore une réflexion critique sur notre époque, ponctuée de méditations sur la Grèce ancienne et celle d'aujourd'hui.

Rédigé pendant la crise qui secoue l'Europe, ce parcours historique et littéraire interpelle le lecteur et l'invite à partager un questi... >Voir plus
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Miracle que ce regard des Cariatides, à la fois intact et voilé. Guettant le navire au retour de Délos. Va-t-il enfin doubler le cap Sounion ? Alors, on allumera les feux sur les hauteurs, et toute la ville d’Athènes bourdonnera de la nouvelle.
Aussi miraculeux, ce regard, que le petit temple d’Athéna Nikè : la Victoire aptère, dont on coupait les ailes de crainte qu’elle ne s’envole… Demeure, Athènes.
Et puis, en plein hiver, il y a le myrte, et le pin, et le mimosa. Et les eucalyptus.
Quand la nef sera rentrée de l’île d’Apollon, les flancs lourds, Socrate pourra s’en aller pour les champs d’asphodèle.
Je broyais deux ou trois idées noires comme la ciguë - cette plante des décombres - quand, tout à coup, dans le petit musée de l’Ancienne Agora, abrité par la Stoa d’Attale, la porte de sortie, grand ouverte, m’a reconduit à mes vingt ans. L’air quasi printanier de cette fin décembre - alors qu’il neige abondamment sur une grande partie de l’Europe -, joint aux essences de Méditerranée et à l’ombre portée des colonnes - telle que l’a photographiée Jean-François Bonhomme, et telle que je l’ai photographiée à mon tour pour lui en faire présent -, entre la tête sculptée d’Hérodote et le buste d’Antonin le Pieux (le Nîmois fils adoptif d’Hadrien l’Espagnol), exposés à la porte du musée, ont produit en moi la même émotion, en l’approfondissant encore, le même étrange sentiment familier que, fraîchement débarqué à l’aéroport, j’avais éprouvé devant le mot Exodos en caractères grecs, Εξοδοσ, qui ne m’indiquait pas simplement la sortie, mais l’odos, la voie, le chemin, le voyage par mer ou par terre, et l’odè, le chant (ou le poème, dérivé du verbe chanter) et encore, par transparence, la Bible, oui : l’Exode.
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"Pour Voegelin comme pour Schelling ou Herder, ce n’est pas l’histoire qui crée le mythe, mais le mythe qui génère l’histoire, qui la sécrète. Beaucoup de poètes le savent d’instinct. Et quand la dimension mythique est oubliée, voire bafouée, la barbarie n’est jamais loin. Tel fut le sentiment éprouvé par un Delphien d’adoption, Anghélos Sikélianos (1884-1951)*. Bouleversé par son expérience de la Première Guerre mondiale, puis par l’incendie de Smyrne (de nos jours Izmir) et l’exode des Grecs de l’ancienne Ionie (dont faisait partie la famille de Séféris), Sikélianos ressentait l’urgente nécessité d’un renouveau spirituel de l’Europe, si l’on voulait éviter le naufrage définitif. Il partageait ainsi les vues d’un certain nombre d’intellectuels de l’entre-deux-guerres, à commencer par Romain Rolland. Dans cette optique, avec sa compagne américaine, Eva Palmer*, le poète crée le festival de Delphes, en 1927, qui compte sur l’appui de diverses personnalités, dont le mécène Benakis (fondateur du musée athénien qui porte son nom). Mais il rencontre aussi de nombreux obstacles, voire une sourde animosité, dans sa dénonciation du matérialisme et de l’athéisme comme agents corrupteurs de la civilisation occidentale. A la fin de sa pièce Sibylle, Sikélianos prête ces mots à la devineresse :

le Sud, le Nord, l’Est et l’Ouest
sont une grande Croix : sur elle je vois
l’esprit de l’homme toujours cloué."
(p. 64-65).

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Mais cela même qui est si précieux, si rare, cette lumière incorporelle et qui devient le corps de tout, insubstantielle et qui devient l’essence des choses, impondérable et qui donne au monde tout son poids, cela même, pour se goûter, s’apprécier à son juste prix, doit d’abord se préserver, se protéger. Les Grecs de l’âge classique n’avaient pas de complexe en ce domaine, pas plus que d’autres civilisations dans leur maturité : une culture est morte qui ne se défend plus. La poésie amoureuse des Grecs - idyllique ou érotique - est inséparable des chants guerriers ou patriotiques, tout comme Hector est indissociable de la défense de Troie et de son Andromaque, tout comme Ulysse de ses innombrables travaux, épreuves et exploits, inséparable de ses mille tours d’adresse et de sa patiente et endurante Pénélope. D’où le succès, que ce fût à Sparte, à Olympie ou à Ephèse, de poètes comme Tyrtée (tant apprécié de Jean Richepin) ou de Callinos (qui vécut peu après Homère)
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"Œdipe, Othello, Sartoris : c’est dans la confrontation à ces images mythiques que le moderne, au sens actuel, révèle toute son inconsistance - et toute son impuissance. Dans sa variation sur la problématique d’Erostrate, Pessoa écrivait (vers 1925 !) : « Les Grecs s’efforçaient d’être parfaits dans tout ce qu’ils entreprenaient - au jeu et dans les sports comme en poésie et dans le raisonnement. Nos poètes écrivent de la poésie n’importe comment ; nos penseurs pensent n’importe comment. Seuls nos coureurs courent vraiment, parce qu’ils ne courent nulle part ». Quant à nos héros de cinéma, disait le poète portugais en paraphrasant T. S. Eliot qui venait de publier un de ses poèmes fondateurs, ce sont des « hommes creux » (hollow men). Et il ne restera rien de notre peinture… Déjà les banquiers s’inquiètent, devant leurs stocks de croûtes achetées à prix d’or. Et notre roman light s’écroule sous ses propres déchets" (p. 39-40).
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"Au fronton du grand marché d’Athènes et en d’autres lieux, parfois inattendus, on peut lire : Dèmos Athénaiôn (le peuple des Athéniens). Les Anciens distinguaient clairement le peuple dans ses diverses acceptions : le laos (le peuple comme ensemble de personnes, d’où qu’elles viennent, ou la foule) n’était pas l’ethnos (le peuple comme race ou comme tribu) et encore moins le concept politique de dèmos (le peuple comme assemblée d’hommes libres). Ce peuple-là a disparu depuis longtemps - et les Athéniens n’ont plus voix au chapitre, pas plus qu’ailleurs. Ce type de mention est devenu anecdotique - voire folklorique -, à l’image du sigle SPQR (le Sénat et le Peuple de Rome), qui couronnait les arcs de triomphe et figure de nos jours sur les bouches d’égout de la Ville éternelle" (p. 34).
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