A Heidelberg, Schumann se remit au droit. « Je ne joue plus que très rarement et très mal du piano, écrit-il à sa mère. Le grand génie du son a doucement éteint sa torche. Tout ce que j'ai fait de musique me semble comme un beau rêve et je peux à peine m'imaginer que ce rêve a existé. Cependant, croyez-moi bien, si jamais j'arrivais à faire quelque chose de bon ici-bas, ce serait dans la musique. Je suis sûr, sans me vanter, que j'ai une puissance créatrice. » C'était le cri décisif de son âme. Il n'en continua pas moins à étudier les Pandectes, tout en apprenant le français et en supprimant un repas par jour pour payer les leçons et la location d'un piano.
Le professeur Carus étant venu à Leipzig, Schumann fit chez lui la rencontre qui devait changer toute son existence, celle du pianiste Frédéric Wieck et de sa fille Clara qui, à l'âge de six ans, chantait, jouait du violon, et avait déjà, dans une série de concerts, révélé un talent de pianiste exceptionnel. Schumann, enthousiasmé, demanda des leçons à Wieck. Chez cet artiste remarquable, son culte ardent de la musique se raviva ; il composa un quatuor en mi mineur et des polonaises à quatre mains que nous ignorons. Il s'initia au génie formidable de J.-S. Bach qui devait laisser dans son art futur une trace si profonde et lui fournir toute la substruction de son style. A ce moment même mourait Schubert.