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Citations sur Jeunesse perdue (64)

« Je voudrais, dit-elle, je voudrais qu'on puisse se marier.
- Oh ! chérie. » Je la regardais stupéfait. « Tu ne peux pas vouloir dire cela. Mais le mariage est une chose horrible. Tu sais bien. Nous en avons parlé souvent.
- Oui, dit-elle, mais maintenant ça ne me paraît plus si horrible que ça.
- C'est impossible, continuai-je, pas nous. Nous ne nous aimerions plus la moitié autant. Être avec toi ne serait plus une chose passionnante. Tu serais ma femme et voilà tout. Nous trouverions ça tout naturel.
- Je ne crois pas que ça ait tant d'importance, dit-elle.
- Chérie, tu n'as pas vraiment envie de te marier. Tu n'as pas réfléchi à ce que ce serait. Allons, sérieusement, y as-tu réfléchi ?
- Oui, dit-elle.
- Non, Hesta, ce n'est pas possible. Voyons, tout d'un coup la vie devient terne, ordinaire, pareille tous les jours. Tu ne t'es pas mise tout d'un coup à avoir des scrupules moraux ?
- Oh ! Dick. Tu es fou.
- Mon cœur, non, je ne suis pas fou. Mais le mariage... tu te sentirais liée et moi aussi. Ce qu'il y a de respectable là dedans me tuerait. C'est parfait d'être comme nous sommes, jamais sûrs.
- Jamais sûrs de quoi ?
- De la vie, de l'amour, l'un de l'autre... Je ne sais pas. Écoute, est-ce que tu veux vraiment te marier ?
- Non, si tu ne le veux pas.
- Tu ne vois pas que ce serait affreux ?
- Peut-être...
- Tu ne le vois pas ?
- Tu dois avoir raison, Dick.
- Et c'est tellement inutile ! Nous n'avons pas à nous soucier des autres gens. Tu es indépendante, moi aussi. Ton tuteur, tu t'en moques, n'est-ce pas ?
- Oui.
- Ce n'est pas comme si tu étais pauvre
- Bien sûr.
- Qu'est-ce qui t'a mis ça dans la tête ?
- Rien, une idée comme ça. N'en parlons plus, Dick.
- Chérie, c'est merveilleux quand même que tu y aies pensé, c'est la preuve que tu tiens un peu à moi. Mais ça serait affreux, tu le sais bien ?
- Oui.
- Non, ce qu'il faut, c' est que tu quittes la pension et viennes habiter ici avec moi. »
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J'entrai dans une boutique et achetai le livre de mon père puis remontai dans ma chambre d'hôtel pour le lire tout seul. Et quand je le lus, je vis que tout ce que les journaux en disaient était vrai. Il ne servait à rien de lui résister, car là s'imposait une beauté nue et le sens de ses rêves, et l'angoisse, et l'extase, et tout ce que j'avais jamais pu connaître. Là était le frémissement même de la vie, le doute et la douleur, la voix d'une âme solitaire perdue dans le désert, et il m'appelait du fond de ce désert, non comme un père et un homme, mais comme un esprit frère du mien, sans âge, un être semblable à moi, et je le connaissais ainsi comme je n'aurais jamais pu le connaître dans sa chair, penché vers moi du haut d'un inaccessible sommet et m'amenant jusqu'à lui.

Deuxième partie: Hesta
Chapitre VIII
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Je ne parlais pas de ces choses à Hesta. Elles n'appartenaient qu'à moi et ne la regardaient pas. Hesta était une femme et nous suivions des chemins différents. Je crois qu'elle avait fini par le comprendre car elle avait renoncé à essayer de pénétrer ma pensée. Elle ne m'interrogeait plus. Elle m'acceptait tel que j'étais et se contentait de ce que je lui donnais. Elle était là, élément du décor de ma vie, là où j'avais besoin d'elle. J'avais mon travail et je l'avais elle. Cela me suffisait.
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Et moi, debout sur la pelouse bien tondue, je regardais vers la grande porte-fenêtre de la bibliothèque et je voyais la silhouette de cet homme qui était mon père, debout un instant, les mains derrière le dos, jetant un coup d'oeil vers le fils dont il avait si piètre opinion puis, retournant à son grand bureau où la brise qui remuait le rideau éventait ses paniers étalés, s'asseyant, la tête plus basse que ses épaules voûtées, tandis que seuls rompaient le silence de la pièce, le grincement régulier de sa plume et le battement du cordon du store contre la vitre.

Chapitre 3
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Tous couraient dans tous les sens sur le pont, sanglotant, criant, petits bonshommes aux visages gris d'épouvante. Je courais avec eux. J'étais l'un deux. Nous tirions sur les amarres d'un canot de sauvetage. Le second passa devant moi, les mains levées en me criant quelque chose dans l'oreille. Je lui donnai un coup de poing qui le fit tomber et je l'enjambai. Quelqu'un me prit à la gorge, s'accrocha à moi en balbutiant comme un enfant idiot. Je me secouai pour me dégager, fonçai en avant et me frayai un chemin entre les épaules des autres qui se bousculaient désespérément pareils à des animaux en cage sans plus rien d'humain.
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Une paysanne lavait son linge dans un étang, un chien s'étirait sur le seuil d'une maisonnette et secouait la queue pour chasser les mouches. Les choses se succédaient, inévitables et paisibles, mais je ne voyais pas comment je m'y réintégrerais jamais. On eût dit que le murmure et l'émotion de la vie continuaient autour de moi, tout près, sans me toucher, et que je demeurais isolé dans le canal de mon existence sans communication avec le grand fleuve qui coulait devant moi. Peu importait. Je m'étais trouvé, un jour, sur un pont devant la certitude de la mort et, à ce moment, l'appel de la vie et l'attrait de l'aventure m'étaient apparus plus forts que jamais. Du haut d'un seuil mystérieux, j'avais regardé la terre et vu qu'elle était bonne. Quelque chose en moi avait aspiré à une libération, à une satisfaction. L'air qui soufflait sur mon visage, la poussière éparse sous mes pieds, le passage des femmes et des hommes chers et familiers, jusqu'à la sueur de leur corps et l'odeur de leurs vêtements m'avaient attiré dans un appel suprême et définitif.

Deuxième partie: Hesta
Chapitre I
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Le spectacle de la péniche m'avait distrait, et, maintenant qu'elle m'avait abandonné, je retombai dans ma mélancolie, ne voyant plus que l'amertume de mon sort, ne désirant plus que la nuit pour pouvoir disparaître.

Chapitre I
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Finale du livre:

De ma fenêtre, je regarde la petite place. Les arbres du jardin sont verts. On respire l'odeur fraîche et propre du soir après la pluie. Sur une branche d'un des arbres j'entends un oiseau chanter. C'est une note qui paraît venir de loin, douce et claire comme un soupir dans l'air. Et il y a quelque chose de beau et quelque chose de triste. On dirait d'abord un cœur perdu, puis il retrouve le bonheur; parfois pleins de regrets, parfois plein de joie.
Il semble dire:"je ne serais plus jamais jeune...Je ne serais plus jamais jeune.
p.315
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Que je te désire moi c'est très bien, mais toi, en tout cas, tu ne devrais jamais le dire. C'est affreux, chérie.
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Je n'avais pas le droit de rester là perdu dans un rêve. Je devais arracher ma pensée de cette image, la recouvrir, tristement, respectueusement, la cacher dans les lieux d'ombres intacts de ma mémoire.

Deuxième partie: Hesta
Chapitre I
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