Le bouc émissaire

Le fait qu'ils étaient les victimes inconscientes d'une farce n'avait plus rien de drôle. Dailleurs, je n'étais pas sûr que ce fût une farce. C'était une étrange épreuve de force, un concours d'endurance, comme si Jean de Gué m'avait dit : " D'accord. Je me suis laissé envahir par ma famille. Feriez-vous mieux à ma place ?".

"Nous sommes tous des ratés. Le secret de l'existence, c'est de reconnaître ce fait assez tôt et de s'y résigner. Ensuite, ça n'a plus d'importance"

Le mariage devient une habitude. Tout s’use, c’est inévitable.

Il commençait à pleuvoir et il s’éloigna sous un énorme parapluie comme un lutin sous un champignon.

Ce ne fut pas ma main brûlée qui m’empêcha de dormir – elle ne me faisait plus mal – mais ma découverte que l’aspect était tout, que la peau et les traits de Jean de Gué leur suffisaient à tous.

Mon papa, tu m'as dit que tu ne partirais pas et je te crois. Mais tu n'es pas venu me dire bonsoir et ta porte est fermée. La Sainte Vierge me dis que tu souffres en ce moment pour les torts que tu as eus par le passé, alors je vais prier pour prendre sur moi tous tes pêchés parce que moi je suis jeune et forte et je pourrai les supporter mieux. Dors bien et aie confiance en Marie-Noëlle qui t'aime très fort.

Je ne pouvais pas demander pardon d'une chose que je n'avais pas faite. Le bouc émissaire ne peut que porter la faute.

On dit : Maintenant que je suis au fond du trou, je ne tomberai pas plus bas. Oui mais voilà, ce n'est pas vrai : On peut toujours tomber plus bas.

Accroupie par terre, elle ouvrit son livre, devant elle, et je me rappelai vaguement que lorsqu'on est enfant on ne s'assied jamais à la manière des adultes, mais qu'on lit toujours à plat ventre, dessine debout et mange de préférence en marchant.

Comment ouvrir la porte ? Quel levier libérerait l'autre moi ? Je ne connaissais pas de réponse à cette question, en dehors de l'apaisement trouble et passager que m'apporteraient une halte dans un café et une bouteille de vin; après quoi je reprendrais le volant et ma route vers le nord. Pourtant, il existait peut-être une autre réponse, et dans cette église même : la prière. Mais pourquoi prier ? Pour confirmer la décision déjà à demi prise en moi-même d'aller à l'abbaye dans l'espoir d'y découvrir ce qu'on pouvait faire d'une vie ratée ?