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L'héroïne du roman de Louise Mey, Alexandra Dueso est OPJ à la BDCS, « la Brigade des crimes et délits sexuels (basée) dans le nord de Paris (et intervenant) dans toute l'agglomération ; jusqu'à la Grande Couronne et bien sûr dans tout le pays, si les services de gendarmerie (y) font appel. La BCDS intervient dans tous les cas d'agression sexuelle, de viol, de harcèlement… »
A la tête de la BDCS, le commissaire Blondeau, « un air de Droopy, la bajoue légèrement tombante et l'oeil épuisé. »
Les collègues d'Alex sont, Elise Wantz et Martin, Polaski, Fatia Favier et Clémence Audain, Aubrey, Laetitia Eliès et Sébastien Daumet, son partenaire et compagnon Marco Cantera.
Le préfet de police Debreuil, les tient à l'oeil.
Pour ces policiers, « Travailler aux Crimes et Délits Sexuels, c'était côtoyer au plus près la laideur de l'envie brute, là où le pouvoir et la cruauté prenaient le pas sur tout ; et les membres de la brigade avaient tendance à se serrer les uns contre les autres pour éviter la noyade. » « L'équipe de la BCDS était à l'image des murs de pierre qu'on décapait sans tendresse : il fallait creuser loin pour trouver l'apparence du neuf. »

Le lecteur se retrouve face à la même réalité que les agents de la BDCS et la lecture n'est pas toujours facile tant l'auteur apporte des éléments factuels bruts tirés d'une réalité que l'on ignore souvent :

Allemagne, Canada, États-Unis : « 61 % à 91 % des personnes prostituées interrogées avaient déjà été physiquement agressées. de 63 % à 76 % avaient déjà été violées dans l'exercice de leur activité »
« 90 % des personnes prostituées en France étaient étrangères, souvent en situation irrégulière) »
« Seuls 10 % des viols faisaient l'objet d'une plainte. »
« 67 % des viols avaient lieu au domicile de la victime ou de l'agresseur ; et 37 % étaient commis par le conjoint. »
« En France, on estimait que près de 230 femmes étaient violées chaque jour, »
« Savoir qu'on tuait les femmes pendant que la tour Eiffel clignotait sous les yeux des touristes laissait toujours à Alex une impression étrange. » 
Dans leur travail quotidien les agents de la BDCS sont confrontés aux clichés sur le viol. Les juges sont parfois « compréhensifs » avec les agresseurs :

« le problème de Groyon… enfin notre problème à nous avec le juge Groyon, c'est qu'il a visiblement décidé que le XXIe siècle était surfait. Il a dû s'arrêter en 1960, peut-être un peu avant. Quand le viol conjugal n'était pas reconnu. Quand les femmes avaient besoin de l'autorisation écrite de leur mari pour ouvrir un compte en banque.
— Il a quel âge ?
— Oh, il est pas vieux. 50 ans, par là. »

« La victime des quatre jeunes gens avait attendu son procès pendant près de trois ans. le procureur de la République venait de requérir des peines allant de huit à quinze mois de sursis. »

« — Nous parlons, encore une fois, de 355 000 atteintes sexuelles, agressions sexuelles et viols chaque année, d'un côté. de l'autre, une moyenne de 5 000 à 7 000 condamnations annuelles pour violences sexuelles. Ces chiffres proviennent du ministère de la Justice. »

Et même lors d'une conférence intitulée « les 10 mythes sur le viol », Alex remarque parmi les participants une tablée estimant « que la priorité d'une femme parlant du syndrome de sidération qui touchait les victimes de viol et du choc profond que l'agression entraînait dans leur psyché, dans la chimie même de leur cerveau, était, non pas d'être claire ou pédagogue, mais de paraître attirante. Trois hommes, deux femmes, blancs, la trentaine, rien de spécial. »

La BDCS subit le manque de moyens, « Les enregistrements d'une des caméras de surveillance dont ils demandaient en vain les images avaient pu être saisis. Tout comme les analyses de leurs prélèvements, les commissions rogatoires que demandaient Eliès et Daumet, même dûment validées par Blondeau, étaient tout en bas sur la liste des priorités »

Dans les cas de cyber harcèlement, l'hypocrisie des hébergeurs de sites et de services confine au cynisme :
« — Il faudrait une vraie modération. Des bannissements systématiques en cas de propos violents, des filtres automatiques sur certains mots-clés. Mais dans ce cas, le risque, c'est qu'une partie de tes abonnés se barre. D'où une communauté plus faible. Et une perte d'argent. Donc concrètement, le noeud du problème, c'est que ça arrange bien Allcom que les choses restent comme elles sont.
On y était. le nerf de la guerre. Des femmes harcelées d'un côté, de l'argent de l'autre. »

Au quotidien, l'accueil des femmes victimes de cyber harcèlement se résume souvent à :
« Quelqu'un vous a frappées ? Quelqu'un vous a suivies ? Quelqu'un vous a agressées ? Non, ben partez et laissez-nous bosser tranquilles, alors. »

Les pouvoirs publics ont renoncé depuis longtemps à considérer cette réalité nouvelle : « Mais au-delà de cela, Internet contribue à démocratiser et normaliser des idées dont l'expression, selon les lois françaises, relève de l'illégalité.
Car en théorie, la tenue de propos racistes, sexistes, homophobes était interdite. »

Le roman policier de Louise Mey répond aux codes du genre : personnages attachants, enquêtes à rebondissement, inspecteurs submergés par le travail qui déborde sur leur vie privée, guerre police justice, poids de la hiérarchie, pétages de plombs, tout y est et y est conforme.
Louise Mey a également fait le choix d'en faire un roman didactique, pédagogique et engagé qui reflète avec justesse le débat actuel sur la relation hommes femmes mais aussi sur la façon dont notre société accueille les orientations différentes de la norme hétérosexuelle.
Dans les affaires que traite Alexandra Dueso, les agresseurs, ceux qui forment les « Hordes invisibles » « pensent sincèrement vivre dans un monde post-féministe. Pour eux, les femmes ont gagné la « guerre des sexes », et ils sont dans une sorte de… de reconquête du statut de dominant. »
Argument défendu par quelques débatteurs dont on mesure chaque jour les dégâts dans l'opinion.
Livre à lire. Autrice à découvrir.
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