Le sultan maure, nous raconte l’évêque du Léon, accompagné d’une centaine d’hommes dans leurs plus beaux vêtements, à dos de cheval, s’avança pour embrasser la main de leurs Majestés. Selon les termes de l’accord de capitulation, Isabelle de Castille comme Ferdinand d’Aragon déclinèrent l’offre, et la clé de Grenade passa à l’Espagne sans que Boabdil n’ait à embrasser la main de ses vainqueurs. Son indomptable mère avait insisté pour épargner à son fils cette humiliation finale !” Fidèle à elle-même, ‘Aisha al-Hurra a ainsi sauvé l’honneur de son fils et de sa dynastie en leur assurant une sortie digne et la tête haute, entourés du faste dont ils étaient coutumiers... (...) À quelques kilomètres de Grenade, au col qui prendra le nom évocateur de “Soupir du Maure” et qui marque le point de passage principal entre la capitale du royaume nasride et la côte méditerranéenne, Boabdil retient son cheval sur le promontoire rocheux et lance un dernier regard ému sur la sublime cité, sa fertile vallée et les somptueux palais qu’il laisse derrière lui. C’est là que, selon la légende, ‘Aisha al-Hurra l’aurait giflé avant de lui lancer cette phrase gravée dans l’Histoire : “Pleure comme une femme ce que tu n’as pas su défendre comme un homme !” Cet instant de mélancolie du sultan déchu entrera dans l’imaginaire collectif et sera, bien plus tard, immortalisé par un célèbre tableau de Francisco Pradilla y Ortiz... La punchline de sa mère, quant à elle, réelle ou inventée, inspirera écrivains et romanciers des siècles durant.
Présentation du livre par Thomas Sibille de la Librairie al-Bayyinah "Le Roman des Andalous" de Issâ Meyer aux Editions Ribât.