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Citations sur Vies Minuscules (91)

...sans doute épuisa-t-il sa vie en recherches de bouts de ficelles à lier en place de ce chaînon manquant ; et peut-être fut-ce aussi pour combler ce vide-là que l'alcool entra dans son corps et sa vie - avec la place qu'on sait, celle de la plénitude toujours empruntée et toujours évanouie...
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Qu’est-ce donc que quelques années encore de vie, quand on est riche de tant de pertes ?
Il lui restait sa faux, le luxe débridé de sa cuisine, le puits, l'horizon invariable.
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Dufourneau avait sans doute été d'autant plus impitoyable envers les humbles qu'il se défendait de reconnaître en eux l'image de ce qu'il n'avait jamais cessé d'être ; ces travaux de nègres s'enfouissant avec la graine et peinant avec la sève vers le fruit, ces bottes de boue que le soc vous verse, cet air inquiet quand vient l'orage ou l'homme en cravate, tout cela avait été son lot, et il l'avait aimé peut-être comme on aime ce qu'on connaît ; cette incertitude d'un langage mutilé qui ne sert qu'à dénier les accusations et parer les coups, avait été sienne ; pour fuir ces travaux qu'il aimait et ce langage qui l'humiliait, il était venu de si loin ; pour nier avoir jamais aimé ou craint ce que ces nègres aimaient et craignaient, il abattait la chicotte sur leurs dos, l'injure à leurs oreilles ; et les nègres, soucieux de rétablir la balance des destins, lui arrachèrent une ultime terreur équivalant leurs mille effrois, lui firent une dernière plaie valant pour toutes leurs plaies et, éteignant à jamais ce regard horrifié dans l'instant qu'il s'avouait enfin semblable aux leurs, le tuèrent.
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Avançons dans la genèse de mes prétentions.
Ai-je quelque ascendant qui fut beau capitaine, jeune enseigne insolent ou négrier farouchement taciturne ? À l’est de Suez quelque oncle retourné en barbarie ous le casque de liège, jodhpurs aux pieds et amertume aux lèvres, personnage poncif qu’endossent volontiers les branches cadettes, les poètes apostats, tous les déshonorés pleins d’honneur, d’ombrage et de mémoire qui sont la perle noire des arbres généalogiques ? Un quelconque antécédent colonial ou marin ?
La province dont je parle est sans côtes, plages ni récifs : ni Malouin exalté ni hautain Moco n’y entendit l’appel de la mer quand les vents d’ouest la déversent, purgée de sel et venue de loin, sur les châtaigniers. Deux hommes pourtant qui connurent ces châtaigniers, s’y abritèrent sans doute d’une averse, y aimèrent peut-être, y rêvèrent en tout cas, sont allés sous de bien différents arbres travailler et souffrir, ne pas assouvir leur rêve, aimer peut-être encore, ou simplement mourir. On m’a parlé de l’un de ces hommes ; je crois me souvenir de l’autre.
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La chandelle s'éteint, un rossignol s'évade du sureau; peut-être vers Saint-Goussaud entend-on grincer la porte vermoulue de l'église- mais c'est aussi bien celle d'une étable, ou deux branches ennemies dans un fourré. Des étoiles fuient, ou des salamandres d'or quand on bat le briquet derrière les vitraux baignés d'herbe.
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... l'informe gêne à laquelle le trop grand âge ne peut plus même accorder l'ultime coquetterie de passer pour propre.
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... le soir de fin d'été courait sur les rails éclatants, les trains brûlants rutilaient. J'hésitais vaguement entre plusieurs destinations ; un sort farceur ou blasé jeta les dés, je montais dans un wagon, les aiguillages firent le reste ...
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Parmi les palabres patoises, une voix s'anoblit, se pose un ton plus haut, s'efforce en des sonorités plus riches d'épouser la langue aux plus riches mots. L'enfant écoute, répète craintivement d'abord, puis avec complaisance. Il ne sait pas encore qu'à ceux de sa classe ou de son espèce, nés plus près de la terre et plus prompts à y basculer derechef, la Belle Langue ne donne pas la grandeur mais la nostalgie et le désir de la grandeur. Il cesse d'appartenir à l'instant, le sel des heures se dilue, et dans l'agonie du passé qui toujours commence, l'avenir se lève et aussitôt se met à courir.
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A l'automne de 1972, Marianne m'abandonna. Elle répétait au théâtre de Bourges un médiocre Othello ; j'étais depuis plusieurs mois chez ma mère, aspirant sottement à la grâce de l'Ecrit et ne la recevant pas : grabataire ou de drogues diverses m'exaltant mais toujours distrait au monde, indolent, furieux, et une hébétude forcenée me rivant satisfait à la page infertile sans qu'il me fût besoin d'écrire un seul mot (p. 161 Folio).
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Vers cette époque, dans les bistrots de Chatelus, Saint-Goussaud, Mourioux,
dans les dires nés du vin que la fatigue décuple, dans les palabres des journaliers, et
de là dans les maisons où les hommes les rapportaient avec la nécessité de parler
querelleuse, affrontée à la femme, passéiste et inéluctable des soirs d’ivresse, Antoine
ressuscita.
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