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Citations sur La ronde de nuit (27)

Mon front bute contre le volant. La route est bordée de peupliers. Il suffirait d'un geste maladroit. Je continue d'avancer dans un demi-sommeil.
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J’ouvrais la fenêtre. Une nuit d'été si bleue, si tiède qu'elle paraissait sans lendemain et que les mots « rendre l'âme » « exhaler un dernier soupir » me venaient aussitôt à l'esprit. Le monde mourait de consomption. Une très douce, très lente agonie. Les sirènes, pour annoncer un bombardement, sanglotaient. Ensuite, je ne percevais qu'un roulement de tambour étouffé.
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Place de l'Étoile. Neuf heures du soir. Les réverbères des Champs-Élysées étincellent comme autre-fois. Ils n’ont pas tenu leurs promesses.
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Curieuse époque.
Elle aura fait de moi un individu "peu reluisant". Indic, pillard, assassin peut-être. Je n'étais pas plus méchant qu'un autre. J'ai suivi le mouvement, voilà tout.
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"Surtout, ne fléchissez pas, mon petit. Je sais, les temps sont tristes. Les gangsters tiennent le haut du pavé. Il y a une odeur de pourriture dans l'air. Cela ne durera pas. Ayez de la force d'âme, Lamballe."
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Ne me sentant aucune vocation particulière, j'attendais de mes aînés qu'ils me choisissent un emploi. A eux de savoir sous quels aspects ils me préféraient. Je leur laissais l'initiative. Boy-scout? Fleuriste? Tennisman? Non : Employé d'une pseudo-agence de police. Maître chanteur, indic, racketteur. Cela m'a étonné tout de même. Je n'avais pas les vertus qu'exigent de tels travaux : la méchanceté, le manque de scrupules, le goût des fréquentations crapuleuses. Je m'y suis mis courageusement comme d'autres préparent leur CAP de chaudronnier. Le plus curieux avec les garçons de mon espèce : ils peuvent aussi bien finir au Panthéon qu'au cimetière de Thiais, carré des fusillés.
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Je revis le visage de maman. Elle se penchait vers moi et, comme chaque soir, avant d'éteindre la lumière, me glissait à l'oreille : "Tu finiras sur l'échafaud !"
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Le lieutenant, par exemple, est un causeur époustouflant. Chaque fois que j'entre dans son bureau, il se lève et commence son discours par "mon jeune ami" ou "mon petit gars". Ensuite les mots se succèdent à une cadence frénétique, sans qu'il prenne le temps de les articuler tout à fait. Il ralentit son débit, mais c'est pour mieux me submerger la minute suivante. Sa voix prend des intonations de plus en plus aigües. A la fin, il piaille et les mots s'étranglent dans sa gorge. Il tape du pied, agite les bras, se convulse, hoquette, se rembrunit tout à coup et reprend son discours d'une voix monocorde. Il conclut par un "du cran, mon vieux" qu'il chuchote à la limite de l'épuisement.
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Mon ombre se projetait jusqu’au seuil de la rue Royale, ma main gauche atteignait le jardin des Champs-Elysées, ma main droite la rue Saint-Florentin. J’aurais pu me souvenir de Jésus-Christ mais je pensais à Judas Iscariote. On l’avait méconnu. Il fallait beaucoup d’humilité et de courage pour prendre à son compte toute l’ignominie des hommes. En mourir. Seul. Comme un grand. Judas, mon frère aîné. Nous étions l’un et l’autre d’un naturel méfiant. Nous n’espérions rien de nos semblables, ni de nous-mêmes, ni d’un sauveur éventuel.
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Les gens avaient quitté Paris au mois de juillet. Le soir ils se rassemblaient une dernière fois aux terrasses des Champs-Elysées et du Bois de Boulogne. Jamais mieux qu’en ces instants, je n’avais goûté la tristesse de l’été. C’est la saison des feux d’artifice. Tout un monde prêt à disparaître jetait ses derniers éclats sous les feuillages et les lanternes vénitiennes. Les gens se bousculaient, parlaient très fort, riaient, se pinçaient nerveusement. On entendait les verres se briser, des portières claquer. L’exode commençait. Pendant la journée, je me promène dans cette ville à la dérive. Les cheminées fument : ils brûlent leurs vieux papiers avant de déguerpir. Ils ne veulent pas s’encombrer de bagages inutiles. Des files d’autos s’écoulent vers les portes de Paris, et moi je m’assieds sur un banc. Je voudrais les accompagner dans leur fuite mais je n’ai rien à sauver.
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