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Ethno-roman, annonce le titre. Rien de tel ! Ni essai ethno- (logique/graphique), ni roman - puisqu'il ne s'agit pas d'un 'récit de fiction'.
L'auteur a jeté éparses quelques réflexions sur l'ethnopsychiatrie, sur fond d'autobiographie et de biographie familiale. Dans cet ouvrage bordélique, répétitif et interminable, Tobie Nathan parle surtout de lui, évoquant ses origines juives et égyptiennes, les prénoms de ses ancêtres dans différentes traductions et leur transmission entre générations, l'exil de sa famille vers l'Europe en 1958 (en Italie quand il avait neuf ans, à Gennevilliers un an plus tard), "son" mai 68, sa thèse avec Georges Devereux, sa psychanalyse, ses conquêtes féminines, ses collègues, ses inimitiés professionnelles...
Quid de l'ethnologie, de ses expériences en la matière ? Quelques brèves scènes spectaculaires de soins par des guérisseurs dans des contrées exotiques, quelques allusions à sa pratique de la psychothérapie, guère plus.

J'attendais des réflexions fouillées sur les difficultés rencontrées par les immigrés, sur les problèmes identitaires des étrangers confrontés à la culture de leur nouveau pays. Peut-être que les lecteurs ayant vécu l'expérience de l'exil s'y retrouveront. Pas moi. Je suis très déçue par cette espèce d'autobiographie mal fichue, qui montre que Monsieur Nathan a réussi à s'intégrer, lui, contrairement aux gamins d'Europe séduits par l'islamisme - je suis contente pour lui...
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L'ethnopsychiatrie a un très grand mérite, elle a fait sortir l'Occident de son nombrilisme freudien. Tobie Nathan avec sa faconde et sa nature chaleureuse nous a fait découvrir une façon d'analyser et de soigner les troubles psychiques qui s'éloignait du sempiternel triangle oedipien. D'ailleurs, que viendrait faire oedipe dans ces groupes humains d'Afrique, d'Asie, d'Océanie qui ne ressemblent en rien à notre petite cellule familiale. Peut-on dire d'un chaman en transe qu'il est psychotique ? La liste est longue de ces rapports au monde différents des nôtres qui produisent des symptômes exprimant d'autres réalités mais que notre médecine psychiatrique s'évertue de soigner en feignant de l'ignorer. Cependant, le sujet d'Ethno-roman ce ne sont pas les bambaras ou les créoles mais Tobie lui-même. le sujet aurait pu être passionnant mais il me paraît traité de façon convenue. Une trop longue partie sur ses années de fac. soixante huitarde à Nanterre où ses souvenirs n'apportent aucun éclairage nouveau à ce que l'on connaît depuis longtemps. Il se dépeint avec une certaine complaisance même s'il est vrai que l'on devine un homme cultivé, curieux avec un talent à percevoir le sens profonds des situations. On sent aussi avec quelle violence les juifs Égypte, dont il est, ont vécu leur expulsion. Il dit à juste titre que le vrai départ Égypte n'est pas celui de Moïse mais celui qui en 1958 a chassé des milliers de juifs d'une terre ancestrale. Au travers de son histoire personnelle, qui débute comme le dit la quatrième de couverture, au Moyen-Age, Tobie Nathan raconte celle de ses ancêtres juifs du Moyen-Orient, sa découverte de la psychanalyse et son orientation naturelle vers ethnopsychiatrie.
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Au fil de l'actualité plutôt tragique de ces derniers temps, je repense souvent à ce roman/autobiographie (roman autobiographique ?) ; l'auteur est assez lucide, pour ne pas se laisser abuser par tous ses souvenirs. Il est psychiatre, et même ethnopsychiatre. Pour la majorité d'entre nous élevés dans un milieu plutôt cartésien, souvent laïc et rarement déracinés (enfin je crois), ça ne parle pas forcément. Donc l'ethnopsychiatrie : partir du principe que tout le monde n'est pas né et élevé dans un environnement comme celui existant en France et que l'émigrant (réfugié politique, de guerre, migrant économique et tout ce que vous voulez) amène avec lui tout un arrière plan mental. Mais que la confrontation avec une autre culture est parfois douloureuse, en plus des autres souffrances qui poussent à l'exil.
Si l'auteur a pu développer cette théorie, c'est qu'il fut lui-même dans ce cas, obligé de quitter l'Égypte tout petit, pour s'installer en Europe. Il a pu voir ce que faisait cette confrontation et a essayé de la théoriser, de la développer pour aider les migrants.
Et si je dis que ce roman fait écho actuellement, c'est en pensant à ces coups de folie de 3 jeunes, d'origine africaine et moyen-orientale qui ont récemment tué des personnes et qui été reconnues comme psychotiques. N'allez pas croire que je les excuses de leurs actes, mais peut-être que s'ils avaient eu l'opportunité de discuter avec un ethnopsychiatre, peut-être les choses se seraient-elles passées différemment. Peut-être.
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Cet ouvrage est une autobiographie plutôt singulière : il mêle à la fois souvenirs biographiques, récits familiaux qui remontent à de nombreuses générations passées, donc réflexions identitaires personnelles d'une part, et une narration du parcours intellectuel de son auteur, en particulier eu égard à son affiliation (puis désaffiliation) à la psychanalyse ainsi qu'à son objet d'études transformé par lui en pratique clinique, l'ethnopsychiatrie. La construction du livre rejette clairement la chronologie, sans doute parce que, dans son cas, l'ethnopsychiatrie n'a pas succédé à et remplacé la psychanalyse dans une trajectoire linéaire ; par contre, elle privilégie des personnages-clefs ou des événements fondamentaux, encodés souvent sous un nom dont le mystère se révèle au cours du chapitre ou beaucoup plus tard – ex. Tyrone Power (le père de l'auteur), George Sand (sa mère), Anthony Perkins (son frère), Dobó (et, je crois comprendre, également Weissmuller) Georges Devereux, son maître et directeur de doctorat, ainsi que « S'asseoir par terre » pour Mai 68 et « Jour de fête » pour sa généalogie. La rupture de toute chronologie est renforcée par l'insertion, à l'intérieur de presque tous les chapitres, de récits, parfois intégralement en italiques, intitulés d'après un lieu et une année, dont le rapport au corps du chapitre n'est certainement pas celui que ces repères indiquent...

Si les thèmes récurrents de l'oeuvre sont donc le judaïsme (égyptien), l'exil, la sexualité, les dieux et autres « êtres », les différentes pratiques thérapeutiques, cette « révolution culturelle française » qu'a été Mai 68, et toute une pensée de l'identité faite de volonté et d'appartenances, selon une dialectique que les cit. choisies indiqueront, si, de plus, mes propres intérêts vont évidemment vers cette autre dialectique entre psychanalyse et ethnopsychiatrie (mes cit. en témoignent aussi...), je dois avouer que l'étrange construction du livre m'a longtemps un peu frustré. Je trouvais des redites, quelques longueurs, plusieurs idées déjà rencontrées dans d'autres ouvrages de Nathan (découvrir quelle est réellement la part des récits familiaux personnels dans Ce pays qui te ressemble !). Ensuite, pris dans la mélodie d'une longue histoire de vie orale, comme dans l'intimité d'une conversation privée, et presque en savourant ces redites, gage d'une connaissance qui se développe et qui ne peut se passer de revenir sur les soucis individuels de celui qui se raconte, à l'instar d'une déambulation autour d'un dolmen, j'ai fini par penser que cette forme était la meilleure possible, la plus sincère et accueillante, et ce livre le mieux adapté pour se familiariser avec la pensée d'un auteur que j'apprécie de tout coeur.

« Le métier d'homme n'est rien d'autre que la tentative toujours répétée de percevoir ses propres singularités et de les apprivoiser. » (pp. 217-218)

« L'identité n'est pas une nature, mais une volonté » (p. 219)

« Je crois que c'est de […] cet éventail des possibles inscrits dans notre histoire que nous gardons à la fois un doute sur notre identité et une conscience aiguë de sa contingence. Certains que notre "soi-même" a été le fruit du hasard, il nous est impossible d'être fiers de nous-mêmes. Il nous reste une angoisse fondamentale, une sorte de peur à être. Et cette dérision qui rend pensables les théories les plus invraisemblables. » (p. 265)

« Je me disais aussi, bien sûr, que si les guérisons tardaient à venir, c'est que je ne savais pas m'y prendre, trop impétueux, trop plein de références, trop interventionniste, trop désireux de réussir mes cures.. trop... […] Les patients se portaient mieux en règle générale – ou plus exactement ils étaient portés par le déroulement de la cure qui leur insufflait à un rythme régulier, comme en une transfusion, goutte à goutte, leur dose d'espoir. Mais je ne voyais pas poindre les transformations radicales que j'attendais. » (pp. 295-296)

« Je crois aujourd'hui que [la naissance de mon fils] Michaël est venu[e] me délivrer d'une idée folle qui découlait nécessairement de la pratique de la psychanalyse, celle de croire à l'existence d'un homme nu, individu désirant, mû par sa seule volonté, n'appartenant qu'à lui seul. J'ai soudain pris conscience d'une immense solitude, moi qui vivais dans un nouveau pays, la France, sans mes anciens, sans mes lieux de culte, sans mes morts, sans les objets, les "choses" des ancêtres, sans les rites qui venaient scander l'ordre du monde... » (p. 303)

« Dans mes réflexions théoriques, l'intérêt pour "l'inconscient" commençait doucement à se diluer, remplacé par mes interrogations, de plus en plus complexes et documentées, sur les esprits. Les esprits étaient partout, dans tous les mondes, toutes les cultures, sous toutes les latitudes. Je les percevais très lointains, à travers les prismes des condamnations rationalistes, et très proches, enchâssés dans l'histoire de ma famille, dans les traditions du monde où j'étais né. Les esprits commençaient à me paraître plus intelligents que l'inconscient, leur poursuite moins rébarbative, leur connaissance plus complexe et plus riche. Car après tout, devant une "manifestation de l'inconscient", on n'avait qu'une seule solution : se soumettre à sa loi. » (pp. 322-323)

[Réf. À noter : Médecins et sorciers, coécrit avec Isabelle Stengers]

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Ce livre s'écoute comme une conversation que l'on surprendrait dans un train. C'est très agréable. Avec beaucoup de tendresse et d'humour, l'auteur nous livre certaines pages de son existence. Sa famille, ses ancêtres y tiennent une place prépondérante. Son parcours est celui d'un émigré, qui pose les pieds d'abord en Italie puis en France à Gennevilliers. Les souvenirs et les réflexions s'enchainent entre une mère qu'il dépeint comme un fragment d'intelligence pure, un père qui demeure une énigme et un frère qu'il aime " tout simplement".
Sa curiosité intellectuelle et son besoin de comprendre le monde en effervescence le conduisent à ouvrir ses premiers livres de psychanalyse et ensuite à s'inscrire en fac de sociologie, quand résonne les slogans de Mai 68. Grâce à la plume de Tobie Nathan, il devient facile de respirer quelques uns de ses parfums entêtants.
Son récit est fait de nombreux allers-retours. Comme les brodeuses, qui connaissent l'art de raconter sans jamais quitter leur ouvrage, il revient à plusieurs reprises sur son enfance égyptienne. Il s'y ressource.Cela résonne comme un leit-motiv.C'est là que s'enracine sa compréhension des traditions orales. Alors quand il rencontre Georges Devereux, il y a comme une reconnaissance naturelle , évidente, tacite que l'un devient le maître et l'autre l'élève qui lui succédera.
Cette spécialité est encore jeune. Tout est à inventer. A Bobigny, ce sera Serge Lebovici qui en lui donnant carte blanche, lui permet d'ouvrir le premier centre Georges Devereux à St-Denis . Seul un homme déraciné et curieux est à même d'entendre derrière les souffrances et les errances des patients qu'il reçoit, l'impact de la culture d'origine sur les processus d'adaptation et d'insertion ; seul un homme qui n'ignore pas la force des mythes et des rituels ancestraux, de la force de la "pensée magique" est à même de soulager et guérir.

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Ethno-romanTobie Nathan
Malgré ce titre, le livre de Tobie Nathan n'est pas un roman mais le récit d'une vie, d'un itinéraire passionné, débuté au sein d'une famille juive d'Egypte et entraînant le lecteur en Italie, en France et en bien d'autres lieux, à la recherche d'un accomplissement intellectuel et spirituel. Cette quête, débutée au début des années 70, sur les sentiers -décevants- de la psychanalyse, va conduire Nathan à se donner pour maître Georges Devereux, fondateur de l'ethnopsychiatrie, démarche psychothérapeutique fondée sur le recours aux traditions de la culture originelle du malade. C'est à l'exploration de cette voie que nous convie Tobie Nathan, en tissant un subtil réseau de liens entre ses propres racines familiales et celles des patients qu'il entreprend de délivrer de leurs troubles mentaux en affrontant les "esprits" qui les possèdent. Passionnant comme un roman d'aventure, moteur enthousiaste d'ouverture sur la richesse des cultures traditionnelles. Pour lire autrement le monde autour de nous.
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Tobie Nathan retrace son itinéraire personnel et intellectuel qui le conduisit à dépasser la psychanalyse au profit de l'ethnopsychiatrie...

Ce pourrait être le récit désincarné de la naissance d'une nouvelle discipline parmi les sciences humaines et c'est l'exact contraire. Ethno-Roman relate la rencontre d'une existence singulière avec une théorie, l'ethnopsychiatrie.

Chassé d'Egypte en 1958 parce qu'il était juif, Tobie Nathan atterrit en France, à Gennevilliers, selon le désir de sa mère, pédagogue idéale, qui voulait connaître le pays de Hugo. Il y grandit au contact des espoirs de la Gauche, eut vingt ans en 1968 et surtout, forma ce projet dès l'adolescence : devenir psychanalyste.
Nathan restitue le mélange d'enthousiasme et de désarroi qui fut le sien ; déçu par l'Université et taraudé par le désir de savoir, qu'il lie indissolublement au désir des femmes. Il fut sauvé par la rencontre d'un maître atypique, Georges Devereux, ethnologue asocial et génial, qui adoubait puis excommuniait ses élèves.

La vie s'écoule de chaque page de cette autobiographie, que l'on suive l'étudiant fiévreux, le thérapeute opiniâtre ou le fils dans l'exploration de sa généalogie et de son héritage religieux.

Nathan obéit à une volonté farouche de ne pas penser banalement, ne pas prêter sa voix aux évidences persécutrices. On relève aussi chez lui un penchant peu commun chez les adeptes de sciences humaines, épris de concepts, pour la chatoyance et la multiplicité du sensible. C'est presque un sensualiste. Il est attentif aux inflexions d'une voix et à l'affectation d'un mouvement comme à la cosmogonie mandingue ou aux subtilités des rites des juifs d'Egypte.

C'est ce tempérament, impossible à corseter dans l'orthodoxie freudienne, qui forgea l'ethnopsychiatrie. Nathan est convaincu qu'il est ruineux de soigner un sénégalais en le considérant aux prises avec le même monde intérieur qu'un viennois. C'est cette thèse, qui veut que l'inconscient varie en fonction des cultures qui fonde la pratique de Nathan. Il s'ensuit une réhabilitation des représentations et des traditions du patient qui ne sont plus évacuées comme superstitieuses ou névrotiques. Nathan nous convie alors aux rites de guérison qu'il a observé partout dans le monde, de la guérisseuse réunionnaise au marabout aux prises avec les djinns et les sheytanés.

Et c'est le moment où la discipline de Nathan nous interroge le plus. Jusqu'où prêter foi aux guérisons ésotériques qui défient la raison pratique et donnent la voix aux esprits ? Est-on prêt à accepter ce ré-enchantement du monde par la croyance aux esprits, à la visitation des vivants par les morts ?
de la fréquentation de ce livre, on ressort rendu à l'exigence de penser sans révérence mais avec une attention redoublée à ce qui se présente à nous.

Fabien LACOSTE
Lien : http://bit.ly/HuDPMV
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Autobiographie, récit d'une formation,ce livre retrace aussi l'histoire d'une famille et d'un peuple d'exilés, les Juifs. La deuxième partie qui rend compte de la mise en place et des progrès de l'ethnologie est la plus riche de réflexions et d'analyses. Elle met à distance nos certitudes occidentales et les bases freudiennes de la psychologie.
Pourquoi "roman" dans le titre? on aimerait connaître la part de fiction dans ce qui est écrit, notamment les passages en italiques, rapports de consultations et compte rendu de visites à des "guérisseurs" d'autres contrées.
Tobie Nathan est un habitué de France Culture mais je ne l'avais jamais lu.
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J'ai connu la démarche de Tobie Nathan à travers quelques articles sur l'ethnopsychiatrie et les marabouts. Sa démarche est irremplaçable, dans le sens ou, bien évidemment, on doit soigner les gens (et, plus généralement, parler avec les gens) en tenant compte de leur culture et de leur contexte. C'est valable non seulement pour les cultures "exotiques",mais aussi au sein même de la population de "notre" culture, qui est multiple !
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Un ethno-psychologue d'origine juive ayant quitté l'Egypte nous raconte sa vie.
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