Ce tome comprend les épisodes 852 de "Detective Comics", 685 de "Batman" et 1 à 4 de "Streets of Gotham".
Thomas (ou Tommy, aussi connu sous le nom de Hush) Elliot a tout perdu : Batman lui a encore flanqué une pâtée (dans Heart of Hush) et Catwoman s'est emparée de sa fortune (avec un peu d'aide). L'histoire commence alors qu'il se suicide en se jetant dans le fleuve qui passe à Gotham. Vraiment pas doué, il se rate et se rend compte que grâce à son opération de chirurgie esthétique le commun des mortels reconnaît en lui Bruce Wayne. Elliot va profiter de cet avantage qu'il n'avait pas encore envisagé pour se renflouer. Pour commencer il séduit une riche héritière en mal de chair fraîche. Puis il part récupérer 1 million de dollars par ci, 1 autre par là en faisant le tour des succursales étrangères de Wayne Entreprises avant d'être repéré et pris en main par Selina Kyle qui lui en veut encore.
Rapatrié de force à Gotham, il est emprisonné par Batman et Robin et placé sous la surveillance d'Alfred Pennyworth. Il ne lui faut pas longtemps pour profiter de la résurgence des monstres à Gotham (Harley Quinn, Black Mask, Firefly) et fausser compagnie à Alfred. Il change alors de tactique et choisit d'adopter pour de bon le rôle de Bruce Wayne en distribuant ses millions à des oeuvres de charité de manière ostentatoire et télévisée, tout en récupérant les miettes (à coup de centaines de milliers de dollars par ci, par là). Batman et Robin ont déjà plus de mal à limiter les dégâts.
Paul Dini a prouvé qu'il a une grande affection pour la faune de Gotham et qu'il sait mettre en scène ces personnages pour des histoires divertissantes (il avait commencé à écrire les scénarios de la série "Detective Comics" à partir de Batman : Detective). le premier épisode est magistral, avec une séquence d'ouverture qui plonge le lecteur dans les pensées d'Elliot en donnant son état d'esprit tout en offrant un résumé rapide et efficace. Dini nous invite à suivre le retour aux affaires d'Elliot grâce à des manoeuvres délictueuses et même criminelles. Seul élément difficile à avaler : Elliot est supposé être un fin stratège et il semble peu probable qu'il n'est pas pensé tout seul à usurper la place de Bruce Wayne.
Paul Dini a toujours une pensée émue pour des personnages de second plan, enfin plutôt oublié, et il nous offre une apparition de Hugh
Dawkins (Tasmanian Devil) avant que l'on apprenne son décès dans Cry for Justice. le deuxième épisode permet de clore le périple vietnamien et de mettre en place Elliot sur l'échiquier de Gotham.
De retour à Gotham,
Paul Dini continue de construire une agréable tapisserie reposant sur des personnages plus ou moins à la marge des séries principales de Batman, toujours formidablement incarnés en quelques lignes de dialogue. En particulier les 4 pages consacrées à Harley Quinn font honneur au personnage et donne envie de plonger dans Gotham City Sirens 1 : Union. La brève apparition de Zatanna donne également envie d'aller lire ses aventures (aussi écrites par lui). Dini a choisi de donner au lecteur une vision polyphonique des événements survenant à Gotham. Les scènes changent donc de centre d'intérêt très régulièrement passant du criminel du moment (Black Mask, Firefly, Penguin, Victor Zsasz, etc.) au tandem Batman & Robin, à Alfred, à James Gordon, etc. du coup ce récit présente un aspect parfois un peu décousu avec un développement plus ou moins aléatoire de plusieurs fils narratifs qui n'aboutissent pas à une conclusion dans ce tome. Un autre aspect déstabilisant du récit réside dans l'incapacité de Batman & Robin à gérer l'imposture d'Elliot lors qu'il dispose de l'appui de la JLA pour le contrecarrer.
Dustin Nguyen (encré par Derek Fridoles) illustre l'intégralité des épisodes. Ses dessins présentent un style très affirmé composé de traits simples, voire parfois simplistes pour délimiter les contours des visages ou des décors, et de gros à-plats de noir aux contours souvent anguleux qui donnent du poids aux différents éléments du dessins (personnages, accessoires et décors). le tout donne une impression partagée entre du brut de décoffrage mal dégrossi et, par moments, du simpliste mal conceptualisé (je pense en particulier à Zsasz dont les cicatrices apparaissent à peine). C'est donc une expérience graphique qui peut ne pas plaire à tout le monde. Pour ma part, j'apprécie ce parti pris tranché, mais mon immersion dans ce monde subit parfois des coupures quand le brut et le simpliste ne s'équilibrent pas.
Ce tome m'a laissé une bonne impression due en partie au plaisir de retrouver des personnages qui ont un caractère discernable, teintée de regret du fait de quelques situations trop dures à avaler et d'illustrations parfois maladroites.