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Elle était de onze mois l'aînée, et pourtant, parce qu'en comparaison on la voyait nettement moins brillante, voire un peu lente si ce n'est légèrement attardée, elle était pour tous la petite soeur de Mika. Elle doit maintenant en parler au passé, parce que ce frère extraverti jusqu'à la flamboyance, aussi protecteur que cruel, qu'elle aimait et admirait aveuglément, tout au moins dans l'enfance et jusqu'à leur brouille il y a sept ans maintenant, vient de mourir à vingt-huit ans, en lui léguant ses cendres : un geste accablant pour Alice, dont la mémoire encadre précisément sa relation avec son frère de deux souvenirs au goût de cendres, emblématiques du début et de la fin de son emprise sur elle.


Car, si elle est la seule à s'en apercevoir maintenant, c'est bien une relation toxique qui s'est développée dès la petite enfance entre le frère et la soeur. Elle qui n'en a jamais parlé sait qu'il est temps de faire face à cette réalité et que, pour enfin tenter de s'en affranchir, il va lui falloir la mettre en mots. Une petite annonce lui permet de partir habiter quelques semaines chez un inconnu obligé de s'absenter sans son chat, et la voilà bientôt, avec pour seule compagnie Vanessa, une florissante plante carnivore, et Ulysse, un invisible félin, libre de confier à ses carnets une histoire qui, au fil de réminiscences d'abord désordonnées, et grâce aux bienveillants conseils littéraires de sa tante, prend peu à peu la forme d'un roman autobiographique.


Allégée par un discret humour sous-jacent et par la touchante tendresse de personnages secondaires, la narration se met en place sans pathos ni auto-apitoiement, alignant faits et souvenirs pour laisser apparaître en filigrane ce dont Alice prend douloureusement conscience en même temps que le lecteur : tout, depuis le début, était tordu dans cette famille, le garçon développant dès le plus jeune âge les comportements cruellement et sournoisement manipulateurs du pervers narcissique, les parents aveugles entretenant inconsciemment la domination du fils si brillant sur sa soeur si fragile et si terne, la fille intégrant son infériorité et sa dépendance à son frère jusqu'à presque passer pour inadaptée et tomber toujours plus bas sous une emprise totale et destructrice. le processus est implacable et pernicieux, d'autant plus terrifiant que, sous les apparences d'une fratrie unie et d'une famille aimante, se cache une violence des plus absolues parce qu'elle s'attaque au développement-même d'une personnalité, empêchée dès la plus tendre enfance, poussée vers une auto-destruction téléguidée par une cruauté déguisée en amour.


Avec ses mots d'une sincérité et d'une innocence désarmantes, décrivant de la manière la plus ordinaire et naturelle qui soit des situations horrifiantes, vécues sans la moindre conscience d'en être la victime, Alice nous plonge dans un récit douloureux et bouleversant, souvent troublant et dérangeant, qui, paradoxalement, ne se dépare jamais d'une fraîcheur et d'une légèreté entretenues par une plume fluide, pleine d'entrain et de spontanéité. Intrigué, attaché à cette fille si vaillamment perdue, c'est totalement captivé que l'on dévore ce roman très habilement construit. Coup de coeur.

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Le roman s'ouvre sur une histoire de deuil. Alice vient de perdre son frère. Son quasi-jumeau, son cadet plus jeune de treize mois et qui pourtant l'appelait petite soeur. Mais pourquoi Alice refuse t-elle de se rendre à la cérémonie de crémation ? Pourquoi ne l'a t-elle pas revu depuis tant d'années, ce frère avec qui la relation fut fusionnelle, étrange, faite de protection et de provocation, de rires et de larmes ?

Alice doit s'éloigner, s'isoler et la proposition de garder un appartement tout en prenant soin du chat et des plantes carnivores lui offre cette occasion rêvée. Sur les conseils de sa grand-mère, personnage fantasque mais futé, la jeune femme écrit. Elle écrit l'histoire que nous sommes en train de lire, dans une mise en abîme réjouissante.

Au cours de cette retraite, les souvenirs remontent, et Tonio l'artiste l'aide à exorciser ses démons.

On est donc loin d'une histoire d'absence, de manque. Au contraire, le frère disparu est omniprésent dans le discours qui révèle les moments de bonheur de cette relation mais aussi peu à peu le drame caché et la raison de la rupture. C'est le récit d'une reconstruction et d'une libération créatrice, rythmé par une quête d'un chat évanescent.

Le roman est loin d'être sombre, malgré la gravité des faits. Marie Nimier entraîne le lecteur vers la lumière au cours de ce roman superbe et lumineux.

240 pages Gallimard 25 Août 2022

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« On n'a pas toujours besoin d'une chambre à soi pour écrire, il arrive que l'on préfère une chambre chez les autres. Un endroit où aller, pas forcément très loin. Un endroit où se perdre, un endroit où se rendre, comme on dit rendre gorge ou rendre l'âme, pour solde de tout compte.
Une cage. Un enclos. »

Pour faire le deuil de son frère Mika décédé à 28 ans et écrire leur histoire, Alice accepte de s'occuper d'un appartement le temps de l'absence de son propriétaire. Ce temps suspendu va lui permettre de verbaliser et de raconter la relation fusionnelle qu'elle entretenait avec ce frère flamboyant, à qui elle n'avait plus parlé depuis 7 ans.
Une relation forte, d'amour et d'emprise, qui s'est finie brutalement autour d'une table de restaurant.
Dans ce nouveau roman, l'autrice explore avec minutie et subtilité les relations fraternelles, dans un patchwork de scènes très justes. La plume toujours délicate, le ton fantaisiste, et la fin résolument heureuse parsèment de lumière ce texte parfois douloureux, et toujours prenant.
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" Petite soeur"... Ce tendre titre renferme en lui-même toute la complexité de la relation d'Alice et son frère Mika, mais seule la lecture du roman lui donne sens. Pendant la majeure partie de cette lecture,je suis restée à distance d'Alice,la narratrice,me sentant étrangère à elle. Pas d'hostilité mais pas d'attachement non plus. Et puis, j'ai accédé au coeur de cette femme un peu comme si j'avais suivi un chemin trop balisé et que je l'ai enfin quitté pour me retrouver au beau milieu de la forêt avec ce qu'elle représente de séduction mais aussi de peurs primitives.
L'histoire s'ouvre par la mort de Mika et l'ambivalence d'Alice quant à ce drame. le choc est immense,il lui est impossible d'assister à la crémation. Sur conseil de sa grand mère,elle se réfugie dans un appartement qui n'est pas le sien, avec l'idée de s'éloigner symboliquement d'elle même et écrire...
L'absence de Mika est envahissante,voire obsédante. L'écriture mais aussi une rencontre salvatrice va permettre à Alice non pas de franchir le miroir ( quoique !) mais de revisiter son enfance et surtout ce partage si singulier de son histoire avec Mika. C'est un chemin libérateur qui donnera naissance à " la grande soeur"...
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Alice a perdu son frère quelques mois auparavant. Elle est encore sous le choc, elle n'a pas pu se rendre à ses funérailles, elle en parle encore au présent, elle n'a pas fait son deuil.
Pourtant ils étaient brouillés depuis sept ans, depuis un diner au restaurant où, pour une raison que nous ne connaissons pas, elle s'est levée et est partie sans se retourner.
Pour tenter de se relever, elle projette d'écrire le livre de leur enfance, mais pour cela elle doit changer de paysage. Elle trouve un appartement à garder loin de chez elle, en échange de bons soins à Vanessa - une plante carnivore - et Virgile - un chat très mystérieux. Installée, elle va retourner douloureusement dans son passé, exhumer sa relation fusionnelle et tumultueuse avec son petit frère adoré, Mika, le rôle de ses parents, comédiens facétieux et iconoclastes, et surtout sa grand-mère Georgia. Cette dernière, excentrique mais clairvoyante, va l'aider à sortir tout ce qui obstrue ses sentiments violents et contradictoires.
C'est clairement le livre de la rentrée!
Il est beau, intelligent, et nous fait ressentir toutes les sortes d'émotions violentes qu'il est possible d'avoir par procuration! L'histoire est très forte, entre cette grande soeur que quasiment dès sa naissance, son petit frère solaire prend sous son aile, lui qui a toutes les qualités de beauté, d'intelligence et de facilités, elle qui ne les a pas, qui est malhabile, qui a du mal à suivre, qui est effacée. Ce roman est vraiment vertigineux de subtilité car si l'autrice nous raconte l'histoire de ces deux enfants, ce n'est que lentement que nous comprenons que ce n'est pas de la mort de Mika dont Alice doit faire le deuil, mais de la relation qu'ils avaient et qui a pris fin sept ans plus tôt dans ce restaurant, et qu'elle n'a jamais faite.
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Voilà un sujet bien peu abordé dans la littérature.
La relation frère-soeur.

J'ai d'autant plus apprécié ce livre que j'ai moi-même une relation très fusionnelle avec mon frère, mon petit frère, devenu parfois mon grand frère et n'ayant sans doute pas autant assumé ce rôle qu'il lui aurait fallu jouer, parce que petit frère...

Ici la narratrice, Alice nous confie au fil des pages, la relation qu'elle a avec ce frère, rêveuse, lente, transparente, bien que l'aînée elle n'occupe que bien peu ce rôle de grande soeur et se laisse modelée, protégée, eduquée par ce frère àla forte personnalité. . Elle suit, elle observe, elle subit sans se rendre compte de l'impact qu'aura sur sa vie, le rôle de ce frère et l'absence des adultes.
Nous savons dès le début du roman, qu'il y a eu drame, mais ce que nous ne savons pas c'est que le vrai drame est bien plus insidieux.
Nous le sentons peu à peu envahir l'espace, de ce couple, qui n'en est pas un...
cette lecture m'a beaucoup fait réfléchir sur ma propre relation, même si les points communs sont sans comparaison, mais la relation que l'on a avec un frère, avec lequel on partage tout, la chambre, les jeux est une relation très particulière et un sujet à exploiter...

L'écriture est très plaisante, juste et poétique, le roman pourrait se définir en 3 parties.
J'aurais aimé je crois que le côté psychologique soit mis un peu plus en avant...
Cependant l'écriture de ce livre est un peu la thérapie d'Alice et une thérapie, bien souvent est lente.
La prise de conscience n'est jamais évidente.
Je recommande franchement cette lecture.
je découvre ainsi une nouvelle auteure grâce aux éditions Gallimard que je remercie.
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L'ambiguïté des relations entre frère et soeur, liés par une profonde complicité, est un sujet riche pour la littérature. Surtout lorsque la disparition de l'un des deux vient rebattre les cartes.
Alice, la grande soeur est sous l'emprise de Mika le petit frère. Au point que tous traitent Mika comme l'aîné et qu'il donne l'impression d'avoir pris sa soeur sous sa protection. Sauf qu'il est tout aussi dépendant qu'elle de la relation fusionnelle qui les lient.
Et qu'Alice doit rompre les liens pour se préserver.

Le roman se lit facilement. Mais cette littérature du je, de l'intime, si terriblement française, finit par lasser. On a l'impression de lire toujours le même livre, avec les mêmes atermoiements, les mêmes états d'âme, les mêmes petits ressorts pour faire avancer l'action.
Comme s'il suffisait de choisir un personnage un peu hors du commun ( la grand mère) pour donner de la personnalité à un roman qui n'en a aucune.
Bref, un classique du genre sans la moindre épaisseur.
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Peut-on aller bien en lisant quelqu'un qui ne va pas bien ?
Quand on sait combien Marie NIMIER sait décortiquer et mastiquer mots et émotions, souvenirs et déroulements en les mêlant, le doute est permis sur la menée vers des voix qui se fourvoient. L'arme salée des larmes semble bien parvenir à cautériser un chagrin qui, vu à la mesure appréciée et au regard aigu sur l'immense potentiel du temps présent, aide à transposer et à composer une nouvelle partition de la vie.
Comme la personne d'Alice qui , en s'isolant, fera vibrer tout ce qui la peuple, en quelque sorte nous sommes conviés à recueillir ce que nous recevons des personnes jalons de nos parcours, pour regarder autrement et intensément.
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Un livre étrange, dont l'étrangeté ne se dissipe pas facilement. Un livre qu'il n'est pas simple de chroniquer.
Alice surnommée Lilou par son frère Mika est la narratrice. Après la mort brutale de Mika à 28 ans (dans des circonstances à peine effleurées) elle va, sur le conseil de sa grand-mère Georgia, s'installer pour 10 semaines dans un appartement prêté en échange de services ( arroser des plantes et s'occuper d'un chat) dans une ville qui n'est pas la sienne pour écrire ses souvenirs avec ce frère adoré. On sait dès le départ que Lilou et Mika ne se sont pas vus depuis 7 ans suite à une rupture qui ne sera explicitée qu'à la toute fin du livre. Un mystère est entretenu à ce sujet qui maintient une certaine tension narrative.
Lilou décrit au travers de petites scènes très incarnées de quoi était faite la relation frère/soeur. Mika est le plus jeune des deux, mais il a pris Lilou sous son aile et semble mener la danse. Elle se repose entièrement sur lui jusqu'à cette rupture nécessaire lorsque l'ambiguïté de leur lien lui saute à la figure.
Lilou souffre en écrivant mais cette exploration du passé a des vertus d'éclaircissement comme si les choses arrivaient peu à peu à reprendre leur place.
Dans la forme, le roman alterne les récits de souvenirs et le vécu de ces 10 semaines, avec le mystère du chat qui a disparu les soins donnés à la plante carnivore, les coups de téléphone avec la grand-mère qui donne des conseils d'écriture, la rencontre avec le peintre Tiago qui devient son confident et son amant.
Ce livre est un patchwork plein de charme, j'ai aimé l'écriture sensible sur un mode associatif que j'avais déjà apprécié dans certains livres de l'auteure.
Je me suis attachée à Lilou et je l'ai quittée en étant rassurée sur son devenir qui semble s'alléger. Pour moi, un bon cru de cette rentrée littéraire !
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"Petite soeur", dernier roman de Marie Nimier, fait partie de ces ouvrages que j'ai eu le bonheur de lire en avant-première dans le cadre de ma participation au jury pour le Prix de Roman Fnac. Et le mot bonheur n'est pas ici galvaudé tant j'ai aimé ce roman à la fois pour le fond et pour la forme.

"Petite soeur", c'est ainsi que Mika appelait Alice "…en plissant les yeux, alors qu'[elle] était sa grande soeur…". Mais aujourd'hui, Mika n'est plus, il est mort, il avait vingt-huit ans. Et Alice est dévastée, bien qu'elle ne l'eût pas revu depuis de longues années. Sur les conseils de sa grand-mère Georgia, elle part dans une ville inconnue, "…dans un appartement calme et lumineux avec… une vue imprenable sur le fleuve", celui "d'un certain Monsieur Tournon qui cherchait de façon urgente quelqu'un pour nourrir son chat et s'occuper de ses plantes…"

L'auteure analyse avec force, élégance et subtilité le mystère des relations fraternelles, des relations particulières abordées avec une infinie délicatesse. L'écriture est ciselée et magnifique qui apporte au texte douceur et sensibilité. le personnage d'Alice passe du présent au passé et réveille chaque seconde de cette vie à deux, deux enfants, deux adolescents jusqu'à cette rupture dont elle n'a jamais fait le deuil.
Dans ce roman, j'ai apprécié de ressentir, comme s'il s'agissait de ma vie, toutes les émotions évoquées "…l'humide, le mouillé, le salé, le serré." J'ai apprécié les personnages annexes : le chat "Virgile [qui] a refait surface." après avoir déserté l'appartement avant même l'arrivée d'Alice, mais aussi la plante carnivore. Et j'ai adoré Tiago le "joggeur-crabouilleur" qui "[la] caresse avec un pinceau." Et lui apporte tant d'amour.

La fin est belle, emplie d'espoir et d'amour. le chemin fut difficile mais au bout demeure le petit Mika, celui qu'elle aimait tant. Quant au grand, "Que son fantôme aille au diable, [elle] n'en a plus besoin."

"Petite soeur" un roman d'une extrême beauté, touchant, émouvant, bouleversant. Un moment de lecture particulièrement intense.

Lien : https://memo-emoi.fr
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