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3,4

sur 101 notes
Illska comprend trois parties : la première début avec la rencontre entre Omar et Agnes sur une aire de taxi, et le début de leur tumultueuse histoire d'amour. En même temps, on suit les réflexions de l'auteur sur des sujets aussi variés que le point Godwin, les étrangers en Islande ou la montée des partis populistes en Europe. Tout en programme.

Cette structure très inattendu du roman, on l'aime ou on ne l'aime pas. Un paragraphe sur Agnes et Omar, un paragraphe de l'auteur sur un sujet autre et hop, on recommence. J'ai bien aimé suivre l'histoire de Omar et Agnes, bien que le texte soit dès fois difficile à suivre, les dialogues n'ont pas de démarcation. Très déstabilisant. Étant été pris au jeu, j'ai appris beaucoup de choses sur le racisme inhérent en Europe.
La deuxième partie raconte l'histoire des deux grands-pères d'Agnes, pris dans la tourmente de la Seconde Guerre mondiale dans un petit village lituanien. A travers leur histoire compliquée, on suit aussi une partie de l'histoire de cette Europe dans la Seconde Guerre mondiale. C'est plus qu'une histoire de nazis contre des juifs. Bien plus. Cette partie m'a intéressée de part sa structure particulière aussi. Rien n'est chronologique, comme si l'auteur se souvenait de partie de l'histoire au fur et à mesure. C'est pas toujours très agréable à lire.
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Glaçante et hilarante traque échevelée de la nature du racisme populiste européen et du point Godwin.

Sur mon blog : http://charybde2.wordpress.com/2015/08/14/note-de-lecture-illska-eirikur-orn-norddhal/

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IIlska, le Mal, Eirikur Orn Norddahl, trad. de l'islandais par Eric Bouty

On annonce en E. O.Norddahl un futur très grand écrivain. de plus, la littérature islandaise est en plein boom. Il faut lire Illska.
Le rythme est allègre, l'écriture est drôle et décalée. C'est engageant pour le cours de la lecture d'un livre de presque six cents pages. le décalage détend, quand il faut parler d'horreurs, et il faut qu'on comprenne bien celui qui parle (vous allez croire que ces écrits visent à absoudre les actes des nazis, or on ne badine pas avec le politiquement correct et me voici déjà en train de m'excuser). On croit réentendre les critiques adressées à La Vie est belle traitée avec légèreté, et on se demande aussi si cette précision n'est pas là pour faire ressortir davantage l'indifférence à l'humain.
Car le sujet est chargé de tension. On parlera de l'Holocauste, ou de la Shoah, La Catastrophe pour les Juifs. Seulement eux? "Nous sommes morts avec vous. Et avec vous, nous continuons de mourir."
Mais on n'oubliera pas les Musulmans, les Tziganes, les communistes, les handicapés. Qui "on"? le narrateur, et deux de ses personnages, une jeune femme islandaise Agnès originaire, alias Agné, de Lituanie, d'ascendance juive, et à l'histoire familiale tragique, et un jeune (pur) Islandais, néonazi cultivé, quasi nain et cependant attirant, et très librement entreprenant, Arnor. Dans une moindre mesure, un jeune Islandais, "mou", irrésolu, étudiant malgré lui sa langue, Omar, qui vit en couple avec Agnès, et épouse donc ses préoccupations, et enfin le lecteur que le narrateur emmène, avec détermination et ruse dans son récit ( Agnès rêve qu'Arnor a une croix gammée tatouée sur son sexe, le narrateur interrompt le rêve et les conséquences de celui-ci: "Mais nous parlions des nazis."; des phrases reviennent aussi frappant comme des coups de massue: est-ce que ça aussi, nous l'aurions déjà mentionné? pour qu'on mesure l'importance du fait). Agnès, qui rédige une thèse sur l'extrême droite et les populistes dans les partis politiques d'aujourd'hui, tête et coeur obsédés, et sans doute le narrateur s'inquiètent que les partis nationalistes progressent et constatent que l'Islande, qui se dit ni raciste ni xénophobe, a l'âme nationale, et que les Islandais commettent aussi des crimes nazis. Il s'agit que les Islandais, et le reste des gens, lecteurs ou non, aient un regard ouvert et profond.
Deux autorités sont convoquées: Adorno qui a déclaré qu'on ne pouvait plus écrire de poésie après Auschwitz, et Lévi qui a dit que nous avions le devoir de ne jamais comprendre l'Holocauste.
Comment donc Norddahl s'y prend-il pour nous parler du Mal? Celui qui nous prive d'humanité, soit qu'on le fasse, soit qu'on le subisse. Il imbrique deux histoires, la petite et celle qui porte une majuscule. Deux jeunes gens qui se sentent vides se mettent ensemble, mais la fille tombe sous la fascination d'un néonazi . Sa thèse piétine, parce qu'elle a peur d'écrire en se laissant dominer par la colère. Elle est enceinte, ne sait qui est le père. L'enfant naît. Omar assume le rôle de père, conduit sa petite famille en Lituanie pour que son amie puisse reprendre sa thèse, est amené à s'interroger sur les anciennes absences de sa compagne, devient comme fou, met le feu accidentellement à leur maison, et s'enfuit. Son errance a pourtant une ligne directrice, il va là où sont passés les nazis. On le retrouve portant un tee-shirt à l'effigie d'Hitler. Il finit son errance en Lituanie où elle, qui a vécu comme elle a pu, le rejoint. On ne saura pas qui est le père, bien que l'enfant apprenne très rapidement l'allemand, l'enfant, qu'on interpellera par le pronom "tu", et qui occupera une place (trop)importante et dans le livre parce qu'il aura à découvrir que la vie n'est pas si belle que ça, ou qu'il représente l'avenir.
La Lituanie est un lieu d'arrivée mais aussi un lieu de départ -les parents d'Agnès en sont partis pour s'établir en Islande, premier pays à avoir reconnu l'indépendance des pays baltes, après un séjour en Israël qu'ils ont quitté à cause de l'OLP, la colonisation, Gaza; ses arrière-grands-parents, un couple juif, et un couple communiste, y ont vécu et y sont morts. C'est leur histoire qui sera contée, histoire de sang, d'humiliation, de folie, de désespoir, de culpabilité, de quasi-fratricide, d'idéologie, d'inhumanité et d'humanité -des scènes folles de tuerie. du sang partout, des morceaux de cervelle, des tendons, des veines, des muscles. Personne ne s'en souciait, et le soir le meurtrier joue de l'accordéon au milieu de ce champ de bataille à vomir.". Et qui mettra en cause les nazis allemands qui ont donné les ordres, les Lituaniens qui étaient miliciens, déshumanisés par une idéologie à défendre ou par la folie d'un pouvoir à exercer, les habitants qui ont laissé faire, les lécheurs de bottes des nazis, les Soviétiques qui ont assassiné des enfants, les Juifs eux-mêmes qui n'ont rien tenté pour se défendre, et tous ceux qui aujourd'hui haussent les épaules, parce qu'on ne change pas le monde en haussant les épaules. Et le pire, c'est que les nazis espéraient l'avènement d'un monde meilleur, qu'Arnor fascine parce qu'il conçoit de l'espoir en un avenir meilleur: l'être humain avait au fond de lui toutes les ressources pour tendre vers le sublime; il suffisait qu'il renonce à l'hypocrisie et à la bêtise; il pourrait ainsi devenir humain" et certains Islandais sont fiers d'eux parce qu'ils sont mieux que les Aryens, les filles sont belles et les hommes sont forts. Des preuves d'hypocrisie?: Ici, on ne parle de l'Holocauste que pour vendre des livres. Les Européens ne pouvant plus exprimer leur antisémitisme naturel, ils le déguisent sous des prétextes humanitaires, de la même manière que la droite conservatrice devient féministe dans son discours sur l'Islam. Les élèves islandais apprennent le danois de longues années, réussissent leurs examens en cette matière, et sont incapables de parler la langue. Omar accepte un boulot qui l'ennuie, relatif à la pureté de la langue. Au lieu d'études de lettres qui font lire, on apprend des choses fastidieuses sur la grammaire de la langue. L'université est sérieusement égratignée.
Agnès est marquée par l'histoire de ses aïeux, Omar par l'instabilité sentimentale de ses parents, Arnor par son enfance esseulée, marquée par les Figures Tutélaires et la bande éponyme qu'il dirigera aura pour mission de défendre la patrie contre les attaques de l'hégémonie américaine et tous les autres périls venant de l'étrange, et son adolescence nourrie à Imperium.
Et si l'amour était le chemin vers le Bien? En effet les SS sont toujours malheureux, défigurés, jamais contents, jamais heureux et jamais satisfaits du moindre moment, mais toujours apeurés et haineux: défigurés. N'est-il pas écrit dans le Talmud, Vous ne voyez pas le monde tel qu'il est. Vous le voyez tel que vous êtes. C'est peut-être pour cela que le narrateur parle du caca sale et odorant des adultes, de sexe volé et Omar est une fois violé, une autre violeur, d'Agnès dans les cabinets sans que la porte soit fermée, de femmes qui se battent et l'une perd un oeil, des Juifs obligés de se frapper entre eux, d'un arrière-grand-père (le communiste) qui doit tuer, sur l'ordre de ses propres fils, l'autre arrière- grand-père, et il espère qu'il sera déjà mort. Arnor meurt on ne sait comment, Agnès a mention très bien à sa thèse, Omar parle comme il le veut de sa langue, et l'enfant, fils aimé de ses parents mariés et unis, grandit. En humanité?
le lecteur est sonné à la fin du livre. Mais il a réfléchi. Et donc tendu vers le sublime?
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C'est un roman étrange (et un peu difficile d'accès au premier abord, mais il ne faut pas se décourager) qui rappelle combien la vie peut parfois être compliquée. C'est remarquablement bien écrit, et très riche sur le plan culturel ; on apprend beaucoup de choses sur l'Holocauste, la Lituanie et l'Islande en le lisant, mais de façon très "légère", tant l'auteur est un virtuose du style. L'histoire (pour la partie islandaise) laisse perplexe, mais les personnages qui la vivent et la construisent ont bien le droit d'être tels qu'ils sont, et d'en faire ce qu'ils veulent. Par contre, le récit de l'occupation nazie dans la petite ville de Lituanie est d'une terreur implacable : Eirikur Orn Norddahl nous force à ouvrir les yeux sur toutes les saloperies de la Nature humaine, et surtout il nous force à les garder ouverts. Il n'y a pas d'échappatoire à sa lecture.
Cet auteur est extraordinaire : il rend ses personnages vivants jusqu'à la médiocrité, et il considère ses lecteurs comme ses égaux intellectuels en leur déployant son immense talent, sans pour autant s'imposer. J'en reste béate d'admiration.
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Illska est pour moi un petit Ovni. Ilkska raconte l'histoire d'Agnès qui aime Omar. Elle tombe également amoureuse d'Amor un neo nazi. Difficile de qualifier leur relation... Elle l'intrigue, ne peut pas se passer de lui.... Illska c'est l'histoire aussi de l'Holocauste, de relations amoureuses complexes, de la montée du nėonazisme, de la crise économique.
C'est un roman assez surprenant qui bouscule le lecteur. On peut parfois être un peu perdu dans l'histoire et le retour dans le passé. Mais l'auteur sait nous ramener dans le fil de l'histoire. Intriguée, je n'ai pas pu résister à le lire d'une traite!!
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Voici surement un des romans les plus ambitieux et inhabituel de la rentrée littéraire 2015.
Eirikur Orn Norddahl nous raconte la Seconde Guerre mondiale et l'Holocauste à travers le personnage de Agnes, une étudiante islandaise travaillant sur son mémoire de licence traitant de la collaboration des habitants de Jubarkas en Lituanie avec les nazis pour l'assassinat de masse des Juifs qu'abritait la bourgade. Ainsi que de la montée du populisme dans les pays d'Europe du Nord et, plus particulièrement en Islande.
Agnes Lukauskaite est d'origine lituanienne, d'où son sujet de mémoire, ses grands parents paternels servaient l'Einsatzkommando Tilsit aux cotés des SS tandis que ses grands parents maternels étaient juifs et subissaient l'Holocauste. Parallèlement à l'histoire de sa famille et à la rédaction de son étude Agnes est dans une situation délicate qui n'est pas sans lui rappeler le paradoxe de ses origines: elle est à la fois amoureuse de son petit ami, Omar, et d'un néonazi islandais nommé Arnor.
Nous, lecteurs, traverserons une partie sombre de l'histoire sur fond d'un triangle amoureux plus que tortueux. de quoi donner une dimension différente, dérangeante mais surtout très originale à ce passé commun.
C'est un texte profondément riche qui aborde nombre de sujets liés à l'ascension de l'extrême droite dans nos pays occidentaux, tels que la crise économique actuelle, l'identité nationale et le devoir de mémoire. C'est aussi un roman passionnant et maîtrisé, rythmé par des discours qui s'alternent parfaitement, un véritable coup de coeur !
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Si pour vous l'Islande c'est ce pays magnifique, avec des gens beaux, respectueux des autres, solidaires entre eux et qui font tomber pacifiquement et de manière démocratique leur gouvernement à la suite de la crise de 2008, ou que ce sont ces merveilleux viking qui ont tenu face aux plus grandes nations lors des deux derniers mondiaux de foot, et dont les supporters mettaient une ambiance que nous avons tous envié, ou encore que c'est le pays de la poésie délicate et absolue et que vous voulez retrouver tout ça dans Illska.....passez votre chemin. Illska c'est le Mal. le mal à l'état absolu, non pas en tant qu'opposé au bien, mais comme entité à part entière, sorte de créature, de fluide, qui existe dans l'univers s'insérant dans tout organisme et existant à travers lui, s'exprimant à travers lui, et ça donne naissance aux monstres célèbres et moins célèbres, aux petites et grandes actions maléfiques que connait le monde depuis sa création , et que l'humanité tente d'éradiquer, par la morale, la justice, la religion ou la philosophie, et quand elle n'y arrive pas, tente d'expliquer et si possible, d'en justifier une partie afin de pouvoir vivre avec et d'avancer. C'est le mal de l'antisémitisme du nazisme et du populisme que Agnès étudie, en fait son sujet de thèse et à travers lequel elle explore l'histoire de sa famille, de ses grands parents notamment dont une partie était juive et l'autre non, et qui finit par s'entre tuer. Pour celà, elle fait la connaissance de Arnor, un nazi, très intelligent et très cultivé.Elle l'envisage comme "échantillon" de son sujet d'étude, mais très vite, il devient plus que ça, un amant, un amoureux peut être, et bien que consciente de l'horreur que représente Arnor, elle n'arrive pas à expliquer ni à contrôler l'attrait, voire la fascination qu'il exerce sur elle, quitte à mettre en péril le couple qu'elle forme avec Omar. Omar si gentil, si tranquille, si....banal et qui l'aime profondément. de plus, le roman a une structure singulière. Ce n'est un bloc homogène mais un magma de styles différents.La première partie où il est question de présenter les protagonistes est une suite effrénée de courts chapitres qui alternent entre nos personnages et des digressions sur l'holocauste,le populisme et le nazisme, avec un va et vient dans l'histoire. C'est déroutant et il faut s'accrocher.Ensuite, le style est plus classique, plus reposant, mais ce repos est de courte de durée à cause du sujet abordé, à savoir comment, au début de la seconde guerre mondiale, un village de Lituanie- berceau des ancêtres d'Agnès- subit l'invasion allemande, et où toutes les consciences se révèlent pleinement.Partie éprouvante. Puis, on rentre dans la vie de ce trio amoureux, avec un quatrième protagoniste qui déboule: un bébé, dont Agnès ne connait pas le père: Omar ou Arnor, et le dénouement de leur histoire....si on peut parler de dénouement. le roman est polyphonique: tout le monde "parle": Agnès,Omar, Arnor, leurs familles, la société, L Histoire, la politique et la sociologie, l'auteur ....et même le bébé de moins d'un an a droit au chapitre.Et ils parlent tous en même temps. C'est une lecture difficile, et je ne sais pas si je dois la qualifier d'agréable....je dirais plutôt que non, mais ça ne veut pas dire que le livre est "mauvais"...loin, très loin de là. Il vaut absolument la peine d'être lu, mais il est déconcertant et nécessite surement une autre lecture....dans quelques années.
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Un récit historique ? Un document de guerre ? Une romance ? Un essai ? Difficile de classer ce livre, avant tout un roman d'amour et de haine, mais qui présente aussi des parties relevant plus du domaine du récit de guerre, voire parfois du documentaire, et se permet même des intrusions de l'auteur, qui s'adresse directement au lecteur. La forme est donc des plus originales, alternant ces différentes formes d'un chapitre à l'autre voire parfois d'un paragraphe à l'autre. Ce qui ne facilite pas la lecture dans sa continuité, d'autant plus que l'on saute aussi d'un personnage à un autre, d'un lieu à un autre, d'une époque à une autre.
Je me suis souvent demandé au fil de ces 700 pages où l'auteur voulait en venir, et même une fois les dernières pages parcourues je suis dubitatif sur cette construction tarabiscotée : je n'aime pas les récits trop linéaires, mais enfin un peu d'ordre ne fait pas de mal. Ca n'est pas grave pour autant car, quelle que soit la forme, le(s) récit(s) est(sont) fascinant(s) par les sujets abordés (l'holocauste mais aussi les relents néonazis actuels) comme par l'écriture très fluide, très claire de l'auteur et, si j'avais parfois du mal à m'y retrouver parmi ces personnages aux noms exotiques, j'ai vécu leurs aventures avec beaucoup d'émotions.
Un très beau livre, assez dur par ces sujets, mais original et fort.
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Il y a beaucoup à dire sur Illska tant sur la forme que sur le fond et beaucoup de bien à en dire. Donc commençons par un point négatif : ce livre est sans doute un petit peu trop long. Pas parce qu'il y a des longueurs mais parce que le propos se dilue au milieu de choses moins essentielles. Pour la forme, c'est surprenant et réussi : prenez deux histoires pas complètement disjointes, une contemporaine et l'autre datant de la seconde guerre, la première en Islande, la seconde en Lituanie, découpez les en morceaux et livrez les morceaux pas n'importe comment, juste pour que le lecteur s'amuse à reconstituer les puzzles en vous lisant. Il y un risque de le perdre en route ou alors d'illuminer vos deux histoires. N'oubliez de saupoudrez de remarques sur le nazisme avec des petits morceaux d'humour et d'ironie. Ce qui nous amène au fond. Le mal incarné par les SS ? Trop facile ! On abandonne le manichéisme au point d'être parfois ambigu et on demande à chacun pourquoi c'est ça le mal. A Arnor, le néonazi à l'histoire personnelle complexe. A Omar, le gentil paumé qui fait n'importe quoi. A Agnes dont les racines entrecroisent ce mal et ses victimes. Et même à son bébé au père incertain. C'est brillant. Eiríkur Örn Norđdahl va devenir un grand écrivain qui prend des risques. Vivement qu'il nous étonne encore !
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"Illska" est né d'un projet à la fois clair et ambitieux : rendre compte de l'omniprésence et de la pérennité du mal.

Pour étayer une telle démonstration, il n'existe sans doute pas de référence plus parlante que celle de l'Holocauste, qui hante les pages du roman d'Eiríkur Örn Norðdahl, insère ses tentacules dans le moindre repli de son intrigue, y compris lorsqu'elle est censée parler d'autre chose. Seulement voilà, dans "Illska", il n'y a pas d'autre chose. le récit a beau prendre des allures d'histoire d'amour, et s'attarder sur certains de ses corollaires -jalousie, trahison...- on en revient toujours au même point : en filigrane, y plane, de manière permanente, l'idée de la possibilité du pire dont l'homme est capable.

"Illska" commence par la rencontre entre Omar et Agnes. Ils approchent de la trentaine, ne se sont pas encore véritablement fixés de projet de vie. Omar enchaîne les petits boulots. Agnes, juive d'origine lituanienne (le récit se déroule en Islande), n'en finit pas de rédiger un mémoire sur la montée des mouvements populistes en Europe. C'est dans le cadre de ce travail qu'elle fait la connaissance d'Arnor, un néonazi. Bien qu'installé avec Omar, la jeune femme, séduite par son intelligence, noue avec Arnor une étrange relation.

Les circonvolutions du roman, très bien construit, nous conduisent ensuite à Jurbarkas, petit village de Lituanie, pendant la seconde guerre mondiale. Certains de ses habitants ne se font pas vraiment prier pour collaborer avec l'Einsatzcommando arrivé sur les lieux avec pour mission d'éliminer juifs et autres indésirables. La terreur s'installe... votre voisin d'hier, le client de votre commerce, le patient de votre cabinet, est susceptible, d'un instant à l'autre, de vous humilier, de vous tabasser, de vous abattre comme un chien. Agnes compte, parmi les protagonistes de ces macabres événements, des ascendants dans les deux camps...

Au fil de ses allers retours perpétuels entre passé et présent, de l'Islande à la Lituanie, le récit semble hoqueter, mais jamais de manière anarchique. Il est évident au contraire que cette étrange sensation de pilonnage que procure la forme d'Illska est une volonté de l'auteur. Eiríkur Örn Norðdahl martèle son intrigue d'interruptions régulières, y insérant des informations brèves et diverses, chiffrées ou anecdotiques, sur l'Holocauste, le racisme, la barbarie humaine. C'est un peu comme si l'on regardait un film entrecoupé d'images subliminales, la teneur du message véhiculé par ces images étant la suivante : nous vivons dans un monde gangrené par la xénophobie et la violence qu'elle engendre. Et aucune leçon ne saurait être tirée de l'Histoire, le rejet de l'autre étant inhérent à l'homme.
Une fois posé ce postulat, l'auteur incite à une réflexion sur la difficulté à identifier et à admettre le danger que représente toute manifestation de ce rejet. Car le fascisme ne se présente pas forcément en bottes et en uniforme. Il sait aussi se faire insidieux, s'exprimer dans certaines subtilités du langage, se faufiler dans les croyances que les démagogues tentent d'imposer à propos d'Autrui...
A partir de quel moment doit-on s'alarmer de la progression du populisme ? Quand doit-on estimer que l'on bascule dans une situation inacceptable ? du simple préjugé à l'acte raciste, où se situe la frontière au-delà de laquelle l'intégrité de l'autre est menacée ?

"Illska" est un premier roman d'une étonnante maîtrise, dont le sujet est traité de manière originale et intelligente, bien qu'un peu moins subtilement dans sa dernière partie, où l'exercice de style a tendance à primer sur le fond.

A lire, bien sûr, malgré ce léger bémol...
Lien : http://bookin-inganmic.blogs..
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