C'est une histoire d'amour dont les épisodes ont été mélangés par un fou.
Les seules filles qui m'inspirent un amour incurable sont celles qui ont gardé l'incroyable complexité du réel. Elles existent à proportion d'une sur un million.
Rien n'est vierge comme de tuer. Cette sensation ne s'apparente à aucune autre. On tressaille de plaisir en des régions difficiles à situer. Un tel exotisme libère.
On a pas de plaisir sans un minimum d'organes
- Tu n'as pas de coeur, l'entendis-je dire dans mon dos.
Je n'en avais plus, en effet. Cet espace de souffrance et de plénitude n'habitait plus ma poitrine, qui n'était plus jamais ni trouée, ni irriguée.
A la place, il y avait une pompe mécanique facile à ignorer.
On se réveille dans l'obscurité sans plus rien savoir. Où est-on, que se passe-t-il ? L'espace d'un instant, on a tout oublié. On ignore si l'on est enfant ou adulte, homme ou femme, coupable ou innocent Ces ténèbres sont-elles celles de la nuit ou d'un cachot ?
On sait seulement ceci, avec d'autant plus d'acuité que c'est le seul bagage : on est vivant. On ne l'a jamais tant été : on n'est que vivant.
En quoi consiste la vie en cette fraction de seconde où l'on a le rare privilège de ne pas avoir d'identité ?
Et ceci : on a peur.
Or, il n'est pas de liberté plus grande que cette courte amnésie de l'éveil. On est un bébé qui connaît le langage. On peut mettre un mot sur la découverte innommée de notre naissance : on est propulsé dans la terreur du vivant.
En vérité, on passe son temps à lutter contre la terreur du vivant. On s'invente des définitions pour y échapper : je m'appelle machin, je bosse chez chose, mon métier consiste à faire ci et ça.
Sous-jacente, l'angoisse poursuit son travail de sape.
On ne peut complètement bâillonner son discours. Tu crois que tu t'appelles machin, que ton métier consiste à faire ci et ça mais, au réveil, rien de cela n'existait. C'est peut-être que cela n'existe aps.
On ne devrait jamais trop manger quand on a le vague à l'âme. Cela suscite des vertiges romantique, des élans macabres, de lyriques désespoirs. (...) Avant d'écrire Les Souffrances du jeune Werther, combien de choucroutes garnies Goethe avait-il dû avaler ?
On ne devrait jamais manger quand on a le vague à l'âme. Cela suscite des vertiges romantiques, des élans macabres, de lyriques désespoirs. Celui qui se sent sur le point de sombrer dans l'élégie devrait jeûner pour conserver son esprit sec et austère. Avant d'écrire Les Souffrances du jeune Werther, combien de choucroutes garnies Goethe avait-il dû avaler ?
On n'est jamais si heureux que quand on a trouvé le moyen de se perdre.