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L'Estonie, le plus septentrional des Pays Baltes, aura vécu de 1939 à son indépendance en 1991 des années noires d'occupation communiste, avec une parenthèse allemande durant la seconde guerre mondiale. Une période dramatique qui ravage économiquement le pays, qui lamine la population subissant purges et collectivisations, stigmatisant des choix de résistance clandestine ou de compromissions avec le pouvoir en place.

Comme à son habitude, avec son écriture lyrique, Sofi Oksanen fait un récit rugueux du chaotique destin de son pays natal entre 1941 et 1965, à travers le parcours de personnages représentatifs, du salaud ordinaire, qui sauve sa peau en anguille en passant d'un camp à l'autre, du résistant de la première heure, volontaire et charismatique et de la jeune femme prise en tenailles entre sa loyauté d'estonienne et son amour pour un officier nazi.

L'auteur est orfèvre en dramaturgie littéraire: son livre Purge m'avait déjà mis un uppercut au foie. Elle nous offre à nouveau le même brouet de tragédie, les mêmes destins sordides qui ballotent l'humain, pris en otage dans un système politique terroriste.
C'est un livre qui prend aux tripes, que j'ai lu pour une approche plus documentaire que romanesque, construit par chapitres temporels entrelacés, éclairant la chronologie des événements et la psychologie des êtres. La fonctionnement de la surveillance communiste y est particulièrement glaçant, où tous se surveillent, où rien n'est acquis pour sa propre sécurité.

Sofi Oksanen, ambassadrice romancière d'un pays au passé douloureux? Difficile lecture mais indispensable.
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Elle a obtenu le prix Femina étranger en 2010 avec son roman « Purge », elle revient avec son « Quand les colombes disparurent », une oeuvre dense et poignante.
C'est le troisième volume consacré à l'histoire de son pays (après « Les vaches de Staline » et « Purge »).
Au travers du portrait d'un écrivain, Edgar Meos, (nommé dans le livre « Edgar Parts »), écrivain « officiel » pro-soviétique dans les années 60 et qui a été auparavant collaborateur pro-nazi pendant la guerre, c'est l'histoire d'un peuple meurtri par deux tyrannies successives qui défile sous nos yeux ; tyrannie nazie d'abord et oppression soviétique ensuite.
Les héros de ce livre sont confrontés à des choix difficiles, et doivent rejoindre la clandestinité afin de se battre dans l'espoir de voir une Estonie indépendante.
Edgar, lui, sera l'homme de l'ombre, des secrets. Il va dissimuler ses activités pro nazies.
Sa femme Juudit, va vite rejeter ce mari trop froid à son égard et va vivre une passion au grand jour avec un officier allemand, le bel Hellmut Hertz.
Roland est le cousin d'Edgar, il va faire le choix inverse et choisir de combattre l'occupant allemand.
Bien des années plus tard, Edgar va rechercher ce qu'a pu devenir son cousin , qu'il a cru pendant longtemps exécuté dans ce terrible camp nazi Klooga qui avait remplacé les déportations vers la Sibérie organisées auparavant par l'occupant soviétique. Ce camp de concentration de Klooga où furent emprisonnés 3 000 Estoniens juifs ou prisonniers politiques.
L'histoire de deux périodes est évoquée ici, avec des allers et retours entre ces deux périodes : les années 40 d'un côté et les années 60, de l'autre côté.
Chaque chapitre démarre avec une très belle illustration, c'est un timbre de l'époque reproduit et portant au fil des chapitres, les mentions Potchta CCCP (poste soviétique) quand le pays était sous occupation soviétique et successivement « Deutsches Reich » et « Grossdeutsches Reich » (le Grand Reich…) quand le pays était sous domination allemande), petit détail bien observé.
Le style n'est pas toujours facile tant il est foisonnant, dense. Plusieurs narrateurs interviennent et les changements fréquents d'époque ( années 40 d'un côté, années 60 de l'autre) rendent la lecture parfois un peu difficile mais cela ajoute du rythme.
Les personnages sont bien campés et l'atmosphère de délation, de questionnement et d'incertitude est extrêmement bien rendue.
Chaque personnage semble naviguer comme il peut entre trois possibilités : se battre pour une Estonie indépendante (choix le plus risqué), collaborer avec l'occupant allemand ou rejoindre le camp soviétique. C'est ce que fera Edgar, après avoir « retourné sa veste » fort habilement.
Une période trouble admirablement décrite.
Des détails palpitants qui émaillent le récit comme cette scène de spiritisme où Roland a des « nouvelles » de sa fiancée disparue, officiellement pour suicide mais qui déclare au cours de cette séance avoir été tuée.
Et des détails historiques qui foisonnent comme la volonté des Allemands d'exploiter les schistes bitumineux d'Estonie (déjà à cette époque !) et d'y « affecter » les prisonniers des camps et comme les détails de la vie quotidienne du temps de l'occupation soviétique, où il fallait un bon d'achat (difficile à obtenir !! ) avant de pouvoir acheter un réfrigérateur..)
Un souffle puissant, Sofi Oksanen est un écrivain jeune et qui a de l'avenir. Elle écrit en finnois, langue proche de l'estonien. Son oeuvre a valeur de témoignage historique.
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Un roman d'histoire et de trahison, de fierté et de fourberie.

C'est un itinéraire de résilience que l'histoire de l'Estonie, un tout petit pays d'à peine un peu plus d'un million d'habitants. Devenu indépendant à la fin de la Première Guerre mondiale, mais envahi par l'Union soviétique en 1939, le territoire est ravagé. Les Allemands qui repoussent les Russes en 1941 sont perçus comme des libérateurs, mais leur règne est de courte durée car l'Armée rouge occupe à nouveau le pays en 1944. (L'Estonie redeviendra indépendante en 1991, mais le roman s'arrête aux années 60). À travers ces bouleversements, les Estoniens continuent à vivre et à penser au champ qu'on pourra peut-être planter pour assurer une récolte la saison prochaine. Des Estoniens continuent à croire à leur pays, même lorsque la capitale change de nom, lorsque Tallin est Reval pour les Allemands, lorsque les envahisseurs déciment tour à tour les familles et que les bombardements détruisent les villes.

C'est aussi l'histoire de l'Histoire qui s'écrit en fonction du pouvoir. Dans le roman, un historien de l'ère soviétique a pour tâche de décrire les exactions des « méchants Allemands » et des traîtres anticommunistes. Cette belle « histoire » deviendra une version officielle pour l'état, une histoire qui ne pourra être réécrite qu'avec l'effondrement du bloc de l'Est. L'Histoire n'est donc pas neutre, mais toujours écrite en fonction d'une époque, d'une idéologie dominante. Si les écrits n'atteignent pas toujours les sommets de propagande du nazisme ou du communisme, les textes des épopées coloniales ou religieuses trahissent que leurs histoires ne sont que des versions de l'Histoire.

Une dernière réflexion suscitée par le roman de Sofi Oknasen : encore plus que la destruction de l'envahisseur, c'est la fourberie et la trahison individuelle qui rendent la situation désespérante, et ce n'est pas toujours les bons qui gagnent…
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C'est l histoire de l Estonie, depuis 1940 jusqu'à 1966, a travers 3 personnages:Roland qui combat l envahisseur, son cousin Edgar qui "retourne sa veste" au gré du pouvoir en place (Union Soviétique ou Allemagne) et Juudit, sa femme qui vit un amour partagé et secret avec un Allemand.
Mais c'est l Histoire qui vaincra et survivra à l homme. Ce pourrait être l histoire de tout pays envahi.
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Il ne fait pas bon être un petit pays coincé entre deux grands. Sofi Oksanen démontre ici avec brio comment des estoniens qui ne demandaient qu'à vivre en paix et en liberté furent tour à tour sous le joug des communistes russes avant d'être sous celui des nazis allemands, avant de retourner sous le joug russe, sans aucun espoir d'être autonome ; la meilleure impunité pour pour un ex-collabo nazi estonien étant de retourner sa veste avec habileté pour réintégrer la grande famille communiste et faire partie des cadres...
Trahisons, délations, collaborations, amours delétères et retournements de situations sont au programme de ce livre dense, écrit au scalpel -voire au vitriol- par un jeune écrivain ambitieux et plein de talent.
Ceci dit je trouve qu'elle en fait un peu trop, et le livre pèche par des longueurs qui décousent un peu le sujet. Mais l'intrigue se tient bien et le lecteur finit par retomber sur ses pieds en dépit d'exercices de style de haute-voltige quelquefois assez périlleux. L'écriture est belle, le vocabulaire riche et travaillé, et on se laisse emporter par le récit, à la fois témoignage et dénonciation de ce qu'ont pu vivre les estoniens pendant la seconde guerre mondiale et après. Bien vu.
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Un roman estonien qui fait froid dans le dos.
Sofi Oksanen nous emmène au coeur des ténèbres de l'âme humaine, là où réside l'horreur véritable. Elle nous peint le portrait d'un véritable monstre, Edgar, qui va profiter de l'occupation de son pays par les pires régimes, les Nazis puis les Bolcheviques, pour cultiver et laisser s'épanouir ses pulsions les plus noires. Assassin, traitre à son pays, homosexuel refoulé incapable d'aimer sa femme, jaloux, malade d'ambition, il n'hésitera pas à tuer, dénoncer, trainer son épouse dans la folie. On ne sait pas si ce sont les dictatures nazies puis bolcheviques qui nourrissent ce type d'individu, ou si c'est grâce à eux que ces régimes perdurent, mais nous sommes plongés dans un dégout grandissant à mesure que Edgar, ne se contentant pas d'avoir trahi son pays, s'est lancé dans les années 60, alors que l'Estonie est occupée par les soviétiques, dans la rédaction d'un ouvrage où il massacre la mémoire de son cousin Roland en le présentant comme un nazi sanguinaire. Roland, après la mort de sa fiancée, Rosalie, assassinée dans de mystérieuses conditions, est en fait passé dans la Résistance, aux Allemands, puis aux Bolcheviques, et a vécu parmi les frères de la forêt. Pour finalement disparaitre après la guerre, jusqu'au jour où Edgar qui fouille dans les archives, va retrouver sa trace...Et c'est en prenant en filature un jeune opposant, qu'il va pouvoir boucler sa vengeance.
Dans les années 40, la femme d'Edgar, Juudit, malheureuse en amour, vit une grande passion amoureuse avec un officier allemand, tout en aidant Roland à organiser le départ de fugitifs. Jeune femme écartelée entre un mariage raté et un amour interdit, entre sa fréquentation d'un Allemand et l'appel du patriotisme, elle se laissera peu à peu sombrer après la mort de son amant et la victoire des Bolcheviques. Dans les années 60 c'est une femme brisée, alcoolique, qui vit avec un mari qui ne l'a jamais aimée et qui finira par la faire interner...
Un récit qui puise ses racines dans l'histoire douloureuse d'un petit pays qui a payé cher les conséquences de la seconde guerre mondiale, bien au-delà de 1945...Puissant et très noir.

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Sofi OKSANEN. Quand les colombes disparurent.

Une véritable claque prise en pleine gueule. Je resors remplie d'effroi, d'angoisse et il n'y a rien à faire, face à la folie des hommes. En refermant ce livre, la première pensée qui me vient à l'esprit : on prend les mêmes et on recommence. Oui ce récit glaçant témoigne de la frénésie qui s'empare des têtes dirigeantes, de leur démesure et de l'avidité du pouvoir. Et grande tristesse, depuis les canons ne s'éteignent pas. Et pourtant, tous, nous avons encore à l'esprit les tragédies offertes par la deuxième guerre mondiale. Je pensais, bien naïvement, ne pas revoir d'épisode aussi dramatique. Souhait bien naïf. Il y a déjà plus de cent jours de guerre. Oui plus de cent jours qu'un nouveau dictateur, avide de pouvoir embrase notre planète. Et les destructions sont de plus en plus violentes en raison des progrès techniques afférant aux tactiques de combat. Il ne reste presque plus rien de l'Ukraine, aujourd'hui. Et demain quel sera le pays visé ? Nous sommes peut-être la prochaine victime d'un tyran !

Sofi OKSANEN, nous relate la chute de l'Estonie, la résistance d'une partie de la population face à l'occupant, la volte face de certains membres, la collaboration avec l'ennemi et la pureté d'un être. Mais ces divers personnages, représentant les diverses strates de la population estonienne et leurs engagements dans la lutte armée. L'analyse est fine, engagée et reflète les engagements des uns, la désertion des autres, le désaveu, le renoncement d'autres. Roland, un homme juste sui son chemin, Edgar le caméléon se déplace en fonction de ses désirs, Juudit, épouse d'Edgar profite de l'ennemi et trahit les siens, se jetant dans les bras d'un allemand. Quelle sera l'issue de cette guerre ? Qui sera le vainqueur, que deviendra le vaincu ? Et toutes ces déportations massives qui frappent les civils, vers la Sibérie. Sofi retrace une page très importante de ce pays, confronté simultanément aux russes, aux allemands et qui ne désire que vivre en paix ; difficile d'obtenir gain de cause face à tous ces envahisseurs ! le pays doit donc s'organiser. Les résistants résistent, les collaborateurs opèrent avec ruse, les girouettes tournent selon la pression atmosphérique, et l'ennemi avance. Merci Sofi pour cette belle leçon d'histoire, de patriotisme. Je recommande la lecture de ce document, surtout, si comme moi, votre connaissance de l'Estonie est vague. Je vous souhaite une bonne lecture.
( 02/06/2022)

Lien : https://lucette.dutour@orang..
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Purge et Les vaches de Staline m'avaient laissé une forte impression. Je retrouve encore une fois intacte la verve de Sofi Oksanen.

Ses livres sont tous construits de la même façon : des femmes au centre des drames familiaux dans un pays envahi par l'ennemi pendant la guerre. le traumatisme des occupations russe et allemande aura laissé des marques profondes sur le peuple estonien.

L'auteure raconte comment les habitants ont vécu la vie avec l'envahisseur, l'expropriation de leurs terres et le rationnement alimentaire. Ils se sont vus dans l'obligation de choisir un camp (résistant ou collabo) et ont subi les conséquences de ces choix. L'évocation de certains flashbacks pendant la guerre rappelle que le peuple estonien gardera toujours l'odeur de la mort imprégnée au fond de l'âme.

On suit deux trajectoires de vie diamétralement opposées. Nous nous retrouvons au coeur des motivations qui ont mené des membres d'une même famille à faire des choix totalement contraires : se battre pour protéger les nationalistes ou se mettre aux bottes de l'envahisseur.

Ce roman est mené d'une plume couperet trempée dans un langage raffiné, sombre et précis, confirmant ainsi le talent de Sofi Oksanen ainsi que sa maîtrise extrême du sujet.

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1941. L'Estonie accueille les troupes du IIIè Reich en héros : les voilà débarassés des Soviétiques, qui ont mis à mal le pays. Mais cela ne dure qu'un temps...
Mais un temps qui a permis à Edgard de grimper, de qevenir quelqu'un, grâce aux informations collectées lorsqu'il travaillait pour les Soviétiques au Ministère de l'Intérieur.... Après un "séjour" en Sibérie, il revient dans les bonnes grâces du Parti en exploitant le filon nazi. Seule une chose le chiffonne : son cousin Roland, qui lui lutta pour l'indépendance du pays sous tous les régimes. Lui seul peut ùmettre en péril ses plans de carrière. Il le chercehra, tissera des toiles, le trouvera...
Une intrigue riche, complexe, comme l'éopque et les situations politiques successives du pays. Un très beau roman qui alterne les points de vu et laisse quelques mystères pour le lecteur. Une histoire d'amour, de sacrificen de trahison (un peu les mêms ingrédients que Purge) Et comme Purge, ce sont les femmes les catalyseurs, qui sopnt les plus nombreuse, et qui restent au premier plan, mêmes absentes...
Une chose m'a chiffonnée : quelques incohérences, dues sans doute à la traduction (pourtant le traducteur est le même que pour les autres romans.) Mais cela n'empêche pas la lecture.
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Je n'ai pas lu Purge le roman le plus connu de Sofi Oksanen célébré un peu partout, mais je me dis qu'il devait etre plus facile d'accès que celui ci, particulièrement ambitieux sur le papier et qui nous apprend plein de chose sur l'Estonie ce pays balte pas bien connu de nous autres occidentaux, mais qui souffre quand même d'un manque de fluidité et de clareté vraiment trop flagrant.
On change d'époques- on passe des années 40 aux années 60 et de points de vue d'un chapitre à l'autre et du coup il faut etre terriblement concentré pour réussir à garder le fil de ce roman. Très instructif mais trop alambiqué pour moi qui malheureusement fut passé un peu à coté...
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