Panait Istrati un chevalier errant moderne

Accompagné par Anne Munsch (une couturière alsacienne connue dans le train de Nice, à l'occasion du voyage fait en Février 1923 en compagnie de la famille Ionescu, et qu'il va épouser) il erre dans les environs de Nice*. D'abord à Bagnoles de l'Orne puis au Mont-Saint-Michel et, enfin, à Saint-Malo. Là ils logeaient dans la resserre d'un ancien corsaire, et rien que la nuit, c'est ainsi que le prévoyait le contrat. La pièce était si petite que, comme le disait la compagne d'Istrati, si l'envie était venue au propriétaire de raconter toutes les aventures de ses ancêtres pirates, ils seraient tous morts, asphyxiés.
On remarquera certaines contradictions sur des points de détail, dans les divers articles où sera plus tard évoqué cet épisode. Mais tous coïncident quand il s'agit de décrire la misère sordide où ils vivaient. Dans « Comment j'ai débuté », nous lisons : « Avec la photo, ça marchait mal. Je n'avais plus d'argent pour acheter des fournitures, et je n'en avais pas non plus pour m'en aller. Ma femme pleurait. » (Ce dernier détail sera modifié dans l'article 1934 Istrati avouant que « la bourgeoise » s'était sauvée plusieurs fois de chez lui.)
(p. 94-95)
*Au sujet d'Anne Munsch, il fait savoir à R. R. (lettre du 4 Juin) : il a rencontré la « première femme-ami que j'ai enlevée à Nice à son mari, avec beaucoup de peine et au péril de mes jours ».

C'est là que la situation d'exception de Panaït Istrati a pris sa revanche. Car parmi les aspects destinés à augmenter l'impression d'inaccoutumé dont bénéficie la biographie il ne faudrait pas non plus oublier celui-ci : il crée dans une langue étrangère une œuvre exclusivement inspirée par les réalités et les traditions de son pays d'origine.