Comme une prostituée qui s'abandonne entre les bras d'un mâle plus expert qu'elle, la plaine se laisse utiliser par l'homme avec une résignation inexpressive.
Peut-être était-ce ce hiatus si évident entre le parterre et le firmament, cette atroce palissade de roseaux directement opposée aux noirs métaux de la lune ; peut-être était-ce cet adolescent si beau, aux très beaux cheveux noirs, qui racontait à ses amis ses prouesses sexuelles devant la fascination d'une scène remplie de danseuses ; peut-être, enfin et surtout, était-ce cette dorure phallique qu'un étranger comme moi flaire dans les les présence et les faits les plus insignifiants, dans les lieux inconnus ; cet éros collectif, indigène, presque folklorique, qui se brise et se réfracte comme en un prisme dans la foule des inconnus endimanchés.
Et je compris alors que j'étais mort ; je compris que ce pont, ces maisons, cette ville, je ne les voyais pas de mes yeux, mais que c'était une musique, une musique douloureuse et très haute qui suscitait en moi ces images.
Le petit train de Scandiano fut un théâtre d'amours et de relations sociales. Je me souviens qu'au premier voyage, le premier jour de classe, mon père, qui m'avait accompagné, voulut me présenter aux autres élèves, pour me familiariser avec ce nouveau milieu. Je mourais de timidité. Je haïssais cette façon si ouverte, et presque impudique, de faire ressembler le début d'un chapitre de ma vie à celui d'un roman, écrit d'avance et socialisé.
Extrait «Le train de Casarsa»
Mario a une conscience de soi conventionnelle ; sa naïveté de jeune comptable le retient en deçà d'une limite qui l'emprisonnera toute sa vie. Et dans la répétition monotone des O dialectaux, il me semble l'entendre frapper, tête baissée, contre cette paroi métaphysique.
Extrait "O, le piège"
(...) trop souvent, la foule s'ouvrait, obscure, sur des Anges dorés et ravis dans des distractions cruelles.
"Seul peut éduquer celui qui sait ce qu'aimer veut dire [...]."
"Les idées peuvent nous faire vivre, c'est vrai...Mais nous vivons de sentiments, que nous gardons bien secrets."
"Le temps perdu ne se rattrape pas ! En fait, il vit au plus profond de nous, et seuls quelques-uns de ses fragments, anesthésiés ou embaumés par une mémoire conceptuelle et intéressée, vivent dans la conscience et forment notre autobiographie."