Citations sur Je suis ton soleil (106)
Le monde est flou. Soudain, je suis certaine que c'est la raison pour laquelle on pleure : s'extraire du monde qui nous fait souffrir. Les larmes brouillent les visages, les gens, elles protègent des méchants et de la réalité.
“Tu crois que j’ai la tête à ça ?
– Y a pas de bon moment pour tomber amoureuse.
– Non, mais il y en a des mauvais et on est en plein dedans.
Elle va faire une école de commerce, terminer sa métamorphose de pétasse larve en pétasse adulte, dégainer l’imparable panoplie tailleur-escarpins-brushing-gros-diams, écrabouiller les autres pour enquiller du flouze, épouser un pédant méprisant qui se prendra pour la huitième merveille du monde parce qu’il est riche, avoir des enfants peignés au gel, et mourir en étant passé à côté de sa vie. Bon vent. Je la pleins.
-Moi aussi, je pense à toi.
-C'est vrai?
-Oui, parce que je t'aime.
-Moi aussi, Déborah, je t'aime.
(en italique:)
Bonjour,
Nous informons notre aimable lectorat que les quatre dernières lignes de dialogue sont un pur fantasme de Déborah Dantès. Cette conversation n'a pas eu lieu dans la vraie vie.
Nous reprenons donc la vérité là où nous l'avions laissée, et prions notre aimable lectorat de nous excuser pour la gêne occasionnée.
J'essayais à tout prix de me concentrer sur l'histoire, mais dans un coin de ma tête, je courais sur la plage en riant aux éclats, l'iode et le vent me fouettant les cheveux.
Demain, nous partons chez mamie Zazou, ma grand-mère paternelle, en Bourgogne. Si Baudelaire avait vécu ma vie, il aurait quand même une notion vachement plus aiguë de ce qu'est un spleen. Un putain de vrai spleen. [...]
Il y aura Mathilde et Kris, les enfants de ma tante Sarah, la soeur aînée de mon père, qui ont dix et douze ans. Et bébé Charlotte, la fille de Janyce-avec-un-y (qui appelle son enfant Janyce-avec-un-y ? Mamie Zazou a été criminelle sur ce coup-là), le petit-enfant-prodige. Quand bébé-Charlotte bave ses épinards, la tablée entière s'extasie en poussant des cris de pucelle en feu.
A chaque repas.
Vivement.
Elle blablate comme ces vieilles dans les asiles, cheveux gras, collants troués, qui racontent leurs frasques de jeunesse aux rideaux délavés. Je l'aime, Eloïse, mais mon cerveau n'est pas taillé pour ce genre de conversations habituellement, alors là... La description détaillée de la langue d'Erwann, "douce mais entreprenante" (en même temps, elle s'attendait à quoi ? Poilue avec des ventouses ?) me plonge dans un abîme de perplexité.
C'est la raison pour laquelle on pleure: s'extraire du monde qui nous fait souffrir.
Les larmes brouillent les visages, les gens, elles protègent des méchants et de la réalité.
- Déborah
Une tension dont je n'avais pas conscience s'est évaporée entre nous trois, parce que Jamal s'est délesté, que je ne porte plus son secret comme un petit baluchon rempli de plomb.
A cette seconde précise, notre rituel des cadavres exquis est né.
Le reste de la journée y est passé.
Parfois le cadavre est raté. La phrase sonne faux.La tournure est balourde, pâteuse. Personne n'est convaincu. Mais lorsque le hasard arrête de papillonner et embrasse notre cause, le résultat est magique et nous fait hurler de rire.