L'Homme de l'année, tome 16 : 1989 - L'Homme de la Place Tiananmen

1989, c'est l'année où les étudiants chinois ont manifesté en nombre Place Tian'anmen, avant que le pouvoir communiste ne décide la répression de ce mouvement pacifique. Cette BD est bâtie autour de ce qui a pu arriver à Tank man, ce manifestant qui est allé seul au contact des chars pour les arrêter dans leur carnage. Un inconnu célèbre, car la photo a fait le tour du monde.

Jean-Pierre Pécau invente une ancienne étudiante chinoise, ayant fuit son pays, qui y revient dix ans plus tard pour rencontrer un vieil hiérarque communiste, Sheng, l'ombre jaune. Un arriviste politique qui n'a eu aucun scrupule à profiter de ses entrées auprès de Mao et de ses successeurs pour devenir l'incontournable homme des tâches de l'ombre.
Alors que le PC chinois était divisé en deux tendances sur la façon de gérer l'agitation estudiantine demandant plus de liberté et de démocratie, lui a envoyé les troupes ouvrir le feu sur les « agitateurs ». Sans hésitations, sans regrets. Jusqu'à ce qu'il apprenne que son propre fils était parmi les leaders étudiants, avec son amie, celle qui se tient aujourd'hui devant son lit, à sa demande, alors qu'il est mourant. Il veut en savoir plus, comprendre, alors qu'il n'a jamais pensé qu'à lui.

La présentation est claire, les dessins vont bien à ce rappel quasi-documentaire de la montée des contestations, des hésitations du parti, avant le basculement vers une ligne dure qui perdure aujourd'hui. La pouvoir ne se partage pas, pas de place pour une autre pensée.
L'intrigue reste cependant assez superficielle, tenant plus dans les échanges entre l'ex-étudiante et le dirigeant communiste, et dans leur opposition psychologique. Par rapport à d'autres tomes de cette série, celui-ci paraît sérieux au possible.

La Chine est connue pour avoir envahi le Tibet pour ses richesses et chassé le paisible Dalaï-lama, fait des millions de victimes durant la révolution culturelle sans compter la mise actuelle dans des centres de rééducation de sa minorité ouïghours, avoir également malencontreusement disséminé par inadvertance sur toute la planète un virus mortel (qui a fait très peu de morts localement mais beaucoup dans les démocraties rivales) et bien entendu le massacre au char d'assaut de pacifiques manifestants étudiants le 4 juin 1989.

Excusez-moi si je n'admire pas vraiment les dirigeants de ce beau pays à la culture millénaire sans être une hyène folle. Ces mêmes dictatures (en incluant la Russie) qui viennent ensuite nous critiquer sur la gestion des gilets jaunes par exemple comme si c'était seulement comparable.

C'est totalement abject tout comme le fait de diplomates chinois de s'attaquer sournoisement à des blogueurs et chercheurs français qui commentent au nom de la liberté d'expression et qui sont jugés trop critiques à l'égard de Pékin. Ce n'est pas surprenant que ce pays se comporte de manière aussi brutale. Ce qui a changé, c'est qu'ils le font désormais ouvertement vis à vis des occidentaux.

J'ai lu récemment un ouvrage consacré au massacre de la place Tien-An-Men à savoir « TienAnMen 1989. Nos espoirs brisés ». Il est vrai que cette BD de fiction apporte plus d'images choquantes sur ce qui s'est réellement passé grâce aux travail des journalistes présents.

On se rappelle tous de cet étudiant anonyme qui s'était mis courageusement devant un char pour l'arrêter. Une image forte et symbolique mais qui cachait en réalité un véritable bain de sang inexcusable et impardonnable. A noter également le rôle des snipers chinois qui ont fait un carton. L'auteur va se concentrer sur l'histoire personnelle de cet étudiant.

Pecau va en effet nous livrer toute une histoire dont la fin ne tiendra absolument pas debout ce qui est franchement bien dommage. On a du mal à imaginer une telle vengeance auprès d'un mourant qui a perdu son fils durant cette tragédie. Je n'arrive pas à comprendre également le sens de cette photographie adressée à notre principale protagoniste. On arrive pas à faire le lien ce qui est décevant. Tout avait pourtant bien commencé pour démarrer ce récit qui va nous tenir en haleine.

On ne peut pas oublier de sitôt un tel massacre parce que des jeunes manifestent pour plus de libertés. Aucune excuse n'est valable mais malheureusement, l'impunité face au géant chinois est totale. C'est une froide leçon d'histoire.

Tiananmen, le 6 - 4, pour le sixième mois et le quatrième jour de l'année du coq : la plus grande place de Pékin est envahie par une foule d'étudiants qui réclament plus de démocratie.
Durant plus de deux mois la place restaura occupée et l'armée interviendra, finissant par tirer sur les manifestants et faisant ainsi des milliers de mort.
Symbole de ce soulèvement : un jeune homme devant les chars.
Cet album revient sur ces évènements via une rencontre imaginée entre la petite amie et le père de ce héros.
A travers leur dialogue, c'est toute la philosophie et le cynisme du régime communiste qui ressortent.
Le dessin est simple, sans véritable caractère mais l'amoindrit pas le scénario.
Album à conseiller aux jeunes générations pour le devoir de mémoire.

Ce tome 16 de l'homme de l'année revient sur l'illustre inconnu qui a défié les chars sur la place Tienanmen.
Un album vraiment intéressant par sa construction (dialogue entre une ancienne étudiante dissidente et un ancien dirigeant) et par les faits qu'ils racontent. Evidemment comme toujours, et surtout dans cet événement-ci, Jean-Pierre Pécau prends le parti de donner un nom à l'inconnu de la place Tiananmen et à ce qu'il s'est réellement passé.
Beaucoup de violence, beaucoup de morts, une répression féroce de la classe dirigeante, des militaires dissidents, des journalistes qui veulent faire éclater la vérité... Bref, un album qui essaye de raconter ces événements tels qu'ils ont pu possiblement se passé.
Un album qui donne au lecteur l'envie d'en savoir plus et c'est là l'un des grands intérêt de cette série, poursuivre la lecture en se faisant sa propre idée (l'auteur proposant quand même une histoire romancée que véritablement historique même si, jusque à maintenant, la qualité des albums dans ce domaine est très bon).