Igor Kahn travaille comme contremaître dans une usine de baignoires à débordement permanent où il a su gravir les échelons grâce à ses compétences et son humanité. Mais, au bout de quinze années de bons et loyaux services, suite à une restructuration, il est licencié. Cet événement malheureux et un second heureux (il gagne au loto) lui permettent de s'installer dans une belle demeure sur l'estuaire de la Gironde. Mais progressivement, insidieusement, malgré une vie sociale active et quelques projets, l'ennui s'installe. Lors d'une réunion, il découvre la notion d'hapax existentiel à savoir une expérience qui change radicalement la vie d'une personne. Igor veut connaître cette expérience et décide de se lancer dans la culture d'un café d'exception : le kopi
luwak. Récolté dans les excréments des
luwaks, des petites civettes, ce café bénéficie d'une torréfaction qui lui confère un goût exquis. Et voilà notre Igor parti en Indonésie à la recherche de ces petits
luwaks mais il pourrait bien y trouver autre chose…
Luwak est un récit linéaire où on suit la vie paisible mais ronronnante d'Igor. L'accumulation des différentes scènes de vie du personnage fait qu'à un moment donné je me suis demandée où l'auteur voulait m'emmener. Puis, j'ai fini par me laisser porter par ce roman qui, sous couvert de raconter la vie banale d'un homme, permet de mettre en avant l'importance du rêve dans la vie surtout dans un monde où règnent la consommation à outrance, l'immédiateté, la compétition entre les hommes. C'est aussi une façon d'aborder la crise de la quarantaine : quand on est au midi de sa vie, quel bilan fait-on ? Comment satisfaire ses envies quand tout concourt à abandonner les projets idéalistes, un peu fous et pourtant tellement nécessaires ? Quel sens donner à sa vie dans un tel capharnaüm ?
Les similitudes entre Igor et l'auteur existent et sont d'ailleurs abordés dans l'autoportrait qu'on peut lire à la fin du roman. Igor choisit le café et les
luwaks,
Pierre Derbré l'écriture comme hapax existentiel.
J'ai aimé que
Pierre Derbré évoque les « petites gens », la banalité de l'existence mais où l'extraordinaire existe à condition de s'en donner les moyens. Les personnages secondaires sont assez bien brossés aussi. C'est un roman à la fois tendre, poétique qu'espiègle voire caustique. Un auteur et un récit à découvrir.
Et n'oubliez pas, comme le disait
Roger Nimier (cité dans le roman) : « Un homme dans projets est l'ennemi du genre humain ».
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