La fonction propre de l’intelligence c’est la perception des rapports. C’est pourquoi les données des sens et de la conscience n’intéressent l’intelligence que comme termes de rapports connus ou à découvrir. Sauf le cas de vague rêverie, où nous laissons aller nos idées au hasard, sans les arrêter au passage pour les décomposer ou les rapporter à d’autres ; sauf les cas plus rares, où la force d’une impression immobilise au contraire la conscience et la fixe sur un unique objet, — nous ne faisons jamais qu’analyser nos idées, pour découvrir les relations des éléments qu’elles renferment, ou comparer nos idées à d’autres idées, pour découvrir leurs relations avec celles-ci. La vie humaine tout entière est fondée sur la connaissance des rapports de coexistence, de succession, de causalité, etc., entre les choses. Et la science n’a pas d’autre objet que d’étendre ou de rendre plus certaine la connaissance de ces rapports.
C’est le grand mérite de l’école criticiste (école de Kant) d’avoir mis en relief l'originalité et l’importance de cette fonction intellectuelle ; c’est le grand défaut de Hume et de toute l’école empiriste de l’avoir confondue avec les fonctions sensitives de la simple appréhension ou de l’association des idées.
La science est la recherche des raisons des choses. Or il y a deux sortes de raisons qui nous servent à comprendre les choses et à les expliquer : les causes et les lois. Soit la présence d'un grain de sable en un certain lieu : pourquoi se grain de sable est-il là ? On donnera la première réponse en indiquant la cause, soit le vent, soit la mer, ou tout autre, qui l'a apporté là. En ce sens la raison du fait c'est l'antécédent, la circonstance, l'agent, en un mot la cause dont le phénomène en question est l'effet.