" Et brusquement j'entrai dans le brouillard. J'allais à sa rencontre, et lui, il venait à la mienne ; alors, derrière moi, le soleil s'éteignit ; et il me sembla que toute la terre avait été tout d'un coup recouverte (...) "
(C. F. RAMUZ, "L'homme perdu dans le brouillard" -- initialement parue dans "Nouvelles et morceaux", 1910, Lausanne, Payot & Cie)
Il aimait à raconter cette histoire, étant devenu vieux, étant même si vieux qu'il ne savait pas l'âge qu'il avait.
Il ne pouvait plus bouger de la galerie de son chalet, où on l'asseyait le matin dans un fauteuil de paille, et on lui étendait les jambes, bien enveloppées dans des couvertures, sur une chaise devant lui. C'est qu'il était tout noué par les rhumatismes, comme beaucoup de vieux à la montagne, de ceux qui ont trop chassé le chamois, par tous les temps, dans la neige et le froid -- passé trop de nuits à l'affût.
(C. F. RAMUZ, "L'homme perdu dans le brouillard", incipit -- initialement parue dans "Nouvelles et morceaux", 1910, Lausanne, Payot & Cie)
Pas de montagne sans brouillard, pas d'homme de mérite sans calomniateurs.