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C.F. RAMUZ (1878-1947) : un immortel ORRY littéraire aux soixante-seize pièces maîtresse...
Liste créée par dourvach le 04/10/2014
76 livres.

De 1905 à 1947, Charles-Ferdinand Ramuz (dit "C.F. RAMUZ") — natif de Lausanne en 1878, disparu en 1947 — a forgé, dans une langue qu'il a créée de toutes pièces, une œuvre qui défie le temps.

Voici donc un modeste "orry littéraire" (vaudois et valaisan), fait de "romans-poèmes" et d'essais, "nouvelles et morceaux", chroniques, correspondances, recueils de poèmes, pièces chantées, travaux biographiques) — en guise de pierres sèches. La voûte provisoire de notre "liste magique" a été élevée un jour d'octobre 2014 ; elle s'est poursuivie et se poursuivra patiemment, au fil des rééditions et "découvertes" posthumes.

Chacune des pièces est placée dans l'ordre chronologique de sa première publication : de l'ouvrage solide, qui défie le Temps — autant dire ce vieux Satan...

(signé : "Dourvac'h"/"Farinet ou La Fausse monnaie")



1. Le Petit Village
Charles-Ferdinand Ramuz
3.83★ (11)

1903 [poésie] : "Le Petit Village. Poèmes", éditions Charles Eggimann & Cie (Genève) /// « Je suis né en 1878, mais ne le dites pas. Je suis né Suisse, mais ne le dites pas. Dites que je suis né dans le Pays-de-Vaud, qui est un vieux pays Savoyard, c'est-à-dire de langue d'oc, c'est-à-dire français et des Bords du Rhône, non loin de sa source. Je suis licencié-ès-lettres classiques, ne le dites pas. Dites que je me suis appliqué à ne pas être licencié-ès-lettres classiques, ce que je ne suis pas au fond, mais bien un petit-fils de vignerons et de paysans que j'aurais voulu exprimer. Mais exprimer, c'est agrandir. Mon vrai besoin, c'est d'agrandir... » [C.F. Ramuz, "Journal", tome II, éditions Slatkine (Genève), 2005, p. 40.] /// ARGUMENT : "Premier recueil de poèmes de Charles Ferdinand Ramuz, "Le Petit Village" n’était jusqu’à ce jour disponible qu’au sein des œuvres complètes. Nous tenions à redonner à ces vers – qui sont à l’image de l’aphorisme de l’écrivain portugais Miguel Torga, «L’universel, c’est le local moins les murs» – un espace qui leur soit propre. « Une œuvre rare, d’une fraîcheur qui soulève, à la fois terrestre et céleste. Quelque chose comme un chant d’amour portant à la connaissance du monde un coin de campagne campé dans toute sa singularité, en même temps qu’investi d’une dimension universelle. » /// rééd. aux éditions Héros-Limite (Genève) avec une préface de Jil Silberstein et les illustrations de Marfa Indoukaeva, 104 pages, 2010.
2. Aline
Charles-Ferdinand Ramuz
4.05★ (303)

1905 [roman] : "Aline", éditions Payot (Lausanne) / Librairie académique Didier, Perrin & Cie (Paris) /// « Julien Damon rentrait de faucher. Il faisait une grande chaleur. Le ciel était comme de la tôle peinte, l'air ne bougeait pas. On voyait, l'un à côté de l'autre, les carrés blanchissants de l'avoine et les carrés blonds du froment ; plus loin, les vergers entouraient le village avec ses toits rouges et ses toits bruns. Il était midi. C'est l'heure où les grenouilles souffrent au creux des mottes, à cause du soleil qui a bu la rosée, et leur gorge lisse saute à petits coups. Il y a sur les talus une odeur de corne brûlée. Lorsque Julien passait près des buissons, les moineaux s'envolaient de dedans tous ensemble, comme quand une pierre éclate. Il allait tranquillement, ayant chaud, et aussi parce que son humeur était de ne pas se presser. » /// ARGUMENT: "L'amour qui se plaît à unir les contraires, jette l'un vers l'attire Aline, la sage jeune fille, et Julien Damon, le coq du village. Mais chez Julien l'amour passe vite tandis que chez Aline, il grandit jusqu'à la passion, jusqu'au drame... Grâce à la vigoureuse magie d'une langue simple, d'un style abrupt mais d'une étrange puissance d'évocation, Ramuz s'affirme, dès ce roman de jeunesse, le peintre magistral des plus humbles registres du coeur."
3. Aline - Cinq nouvelles
Charles-Ferdinand Ramuz
5.00★ (4)

1905 [roman] : "Aline" suivi de "Cinq nouvelles", ouvrage orné de sept dessins d'Alexandre Blanchet, éditions La Guilde du Livre (Lausanne), 1941 /// ARGUMENT : " Publié pour la première fois en 1905, "Aline" est le premier roman de Charles-Ferdinand Ramuz. Aline, élevée par sa mère dans des conditions modestes est séduite par le fils d'un riche paysan du village. Elle vit une véritable histoire d'amour emplie de passion, alors que Julien, lui, ne cherche qu’à satisfaire son instinct. Abandonnée alors qu'elle est enceinte, Aline devient la meurtrière de son propre enfant et cherche une ultime échappatoire à son destin par la mort après l'annonce des fiançailles de Julien."
4. Les Circonstances de la vie
Charles-Ferdinand Ramuz
3.80★ (42)

1907 [roman] : "Les Circonstances de la vie", éditions Payot & Cie (Lausanne) / Librairie académique Perrin & Cie (Paris) /// « D'un côté de l'entrée, se trouvait la boulangerie et de l'autre un horloger. Il fallait suivre un long corridor, et monter un petit escalier de pierre. Le bureau était au premier étage ; on lisait en lettres noires sur une plaque de tôle émaillée : "EMILE MAGNENAT" "Notaire" Plus bas : "Entrez sans heurter." C'était donc là. » /// [ARGUMENT] : "Les Circonstances de la vie", c'est "Madame Bovary" à Aubonne, a-t-on pu dire. Aubonne, petite ville vaudoise, au pied du Jura, où pendant quelques mois de 1902-1903, Ramuz enseigna. 1905-1910, ce sont les années naturalistes de Ramuz. "Aline", "Jean-Luc persécuté", "Aimé Pache". Ramuz s'est installé à Paris. Aubonne est reconstitué dans le 14e arrondissement. On voit mieux la Suisse depuis Paris, ne cessait de dire Ramuz. Et, de fait, la description de la petite ville-un village au début du siècle-est d'une précision clinique. Ramuz, dans toute son œuvre, n'ira jamais plus loin dans le réalisme. On évoque Flaubert : mais un Flaubert plus sarcastique et parfois même très cru. Il y aura même quelques protestations et une censure de certaines scènes ou certains mots. C'est la vie quotidienne d'une petite ville, avec son ennui provincial et ce qui se passe quand on s'y ennuie. Quelques années plus tard, Ramuz imprégnera ses romans de lyrisme et de métaphysique. Déjà, "Jean-Luc persécuté" est envahi de mysticisme et d'un désespoir qui dépasse le réalisme dans l'outrance. A Paris, le naturalisme est de mise et Ramuz s'interdit toute émotion. Cette retenue lui vaudra l'estime du jury du Goncourt de 1907. Mais on lui préférera un certain Emile Moselly. Un Ramuz insolite, un peu entre parenthèses, qui, après avoir trouvé son style et sa manière avec "Le Petit village" et "Aline", hésite, revient en arrière, se laisse influencer, expérimente et doute. "Les Circonstances de la vie" témoigne de ces fluctuations, mais n'en reste pas moins un grand roman. Parce qu'en toute époque, Ramuz est Ramuz : l'artiste, l'observateur, le penseur et le sculpteur de mots."
5. Le Village dans la montagne
Charles-Ferdinand Ramuz
4.75★ (8)

1908 [chronique/récit] : "Le Village dans la montagne", texte de C.F. RAMUZ, illustrations d'Edmond BILLE, éditions Payot & Cie (Lausanne) - réédition (non illustré) par "Les Amis de Ramuz" (Loches), collection "Bibliothèque des Amis de Ramuz", 179 pages, 2009 /// ARGUMENT : "Ainsi la chronique du "Village dans la montagne" aura-t-elle permis à Ramuz d'élaborer et de charpenter ce territoire imaginaire qui servira bientôt de personnage (et non seulement de paysage) à ses grands romans de l'Alpe. Car cette chrono-topographie est aussi et surtout une forge et une matrice de l'univers ramuzien, d'où vont sortir, encore mal dégrossis de leur gangue réaliste mais déjà parfaitement identifiables par le lecteur, la plupart des grands rythmes, thèmes, motifs et personnages de l'œuvre romanesque en gestation avec les questions fondamentales qu'elle pose : l'identité, le rapport au monde — avec le territoire : enracinement et déracinement, et avec les autres hommes : solidarité et séparation." [Source : Christian Morzewski, auteur de la Préface]
6. Jean-Luc persécuté
Charles-Ferdinand Ramuz
4.20★ (89)

1908 [roman] : "Jean-Luc persécuté", éditions Payot & Cie (Lausanne) / Librairie académique Perrin & Cie (Paris) /// « Comme il avait été convenu qu'il irait, ce dimanche-là, voir une chèvre à Sasseneire, Jean-Luc Robille, après avoir mangé, prit son chapeau et son bâton. Il alla ensuite embrasser sa femme (car il l'aimait bien et il n'y avait que deux ans qu'ils étaient mariés). Elle lui demanda : « Quand seras-tu rentré ? » Il répondit : « Vers les 6 heures. » /// ARGUMENT : "Trompé et méprisé par sa femme, un jeune paysan se met à boire. Un nouveau malheur lui vole son fils. Persécuté par le destin, la folie lui ouvre ses bras, lui souffle un crime atroce. N'importe où, hors du monde, écrivait Baudelaire. Pour Jean-Luc, ce sera le précipice. Ce roman oppressant compte parmi les premières réussites d'un Ramuz hanté par les complots diaboliques de la montagne."
7. Aimé Pache, peintre Vaudois
Charles-Ferdinand Ramuz
4.32★ (34)

1910-1911 [roman] : "Aimé Pache, peintre vaudois", éditions Payot & Cie (Lausanne) / éditions Fayard (Paris) /// « Il naquit le 20 septembre 1874, d'Emile Pache, juge de paix, et de Suzanne Charton, sa femme. On le mit d'abord à l'école du village. Puis, à onze ans, comme son frère, il entra au collège de Lully. Seulement Henri, ayant achevé ses classes, en était resté là, tandis qu'il avait été décidé qu'Aimé "étudierait". Il devait faire son collège, ensuite viendrait le gymnase, ensuite l'Université ; et après, on ne le savait plus, mais Mme Suzanne, sans le dire à personne, avait toujours rêvé qu'il deviendrait pasteur. » /// ARGUMENT : "Conçu en 1905 et publié une première fois en 1910, "Aimé Pache" est peut-être le livre de Ramuz le plus significatif, le plus proche de sa pensée en gestation et le plus intérieurement autobiographique. Le roman de formation des Suisses romands."
8. L'homme perdu dans le brouillard et autres nouvelles
Charles-Ferdinand Ramuz
4.00★ (9)

1905-1911 [recueil de nouvelles] : "L'homme perdu dans le brouillard et autres nouvelles", éditions Zoé (Genève), 2021. /// « Cependant, il gardait sa langue ; et plus le reste de son corps allait s’engourdissant, plus il semblait qu’elle devînt alerte pour ces longues histoires qu’on venait écouter : des étrangers, l’été, et même des gens du village, car elles n’ennuyaient jamais, et il en savait de toutes les sortes ; et il fumait sa grosse pipe, n’ayant plus que ces deux plaisirs. » /// ARGUMENT : "Pour Ramuz, la nouvelle est un laboratoire. Dans sa quête de formules narratives originales et ses expérimentations stylistiques, le récit court lui offre un espace concentré dont il tire le meilleur parti dès son entrée en écriture, puis tout au long de sa carrière. Qu’il s’inspire du légendaire alpestre ou mette en scène des animaux martyrisés, qu’il campe des personnages typés ou explore la scène de genre, voire le morceau bref, l’écrivain dévoile aussi bien la cruauté des hommes que l’intensité de leur rapport aux éléments, tantôt hostiles, tantôt sublimes. D’une efficacité exceptionnelle, ces textes sont autant d’hommages au pouvoir de la fiction. "L’homme perdu dans le brouillard et autres nouvelles" réunit des textes écrits entre 1905 et 1911."
9. Vie de Samuel Belet
Charles-Ferdinand Ramuz
4.45★ (105)

1913 [roman] : "Vie de Samuel Belet", éditions Payot & Cie (Lausanne) / Librairie Ollendorff (Paris) — rééd. aux éditions Gallimard (Paris), coll. "Blanche", 1945 ; puis aux éd. Gallimard (Paris), coll. "L'imaginaire", 296 pages, 2005. /// « Je m'appelle Jean-Louis-Samuel Belet, né à Praz-Dessus, le 24 juillet 1840, d'Urbain Belet, agriculteur, et de Jenny Gottret, sa femme, comme on peut voir sur mes papiers. Je n'avais que dix ans quand mon père mourut. Cinq ans après, ce fut le tour de ma mère. J'allais entrer dans ma quinzième année. Un matin que j'étais à l'école, on heurte à la porte. Le régent va ouvrir ; il me dit : « Samuel, il te faut rentrer chez toi. » Il avait un air tout drôle. » /// ARGUMENT : "Il n'y a peut-être pas de livre de Ramuz qui soit plus représentatif de son genre que sa "Vie de Samuel Belet". Dans le déroulement de cette existence qui, par le chemin des passions et de la violence, aboutit au renoncement joyeux et à la paix de l'âme, Ramuz semble avoir fait tenir toute sa riche expérience humaine. Ce petit paysan suisse que l'amour et l'ambition arrachent à son milieu et à sa patrie — pour qui le désespoir n'est pas la leçon de l'échec, non plus que l'envie ne peut être celle de la pauvreté —, qui croit envers et contre tout à l'amour, à l'amitié et à la pureté, nous enrichit d'une leçon qui est la leçon même de l'oeuvre de Ramuz. Ce livre a le rythme même de la vie qu'il conte — une vie simple et pleine, dont l'effort est la grande loi, mais qui accueille également la passion dont la fatalité est aussi une grande loi de la vie de l'homme. Les fautes de Samuel Belet sont, comme ses vertus, nées du plus profond de lui-même ; elles sont, les unes et les autres, son expression complète. De là, le merveilleux équilibre de l'un des récits les plus humains qui soit tombé de la plume de Ramuz."
10. Nouvelles et morceaux, Tome 3 : 1912-1914
Charles-Ferdinand Ramuz
1912-1914 [nouvelles et écrits fragmentaires] "Nouvelles et morceaux", Tome 3 : "1912-1914", éditions Slatkine (Genève), 2007. /// ARGUMENT : "« C'est une chose splendide […], vous êtes libéré de la tyrannie du sujet, du genre, de la forme, de tout ce qui ne devrait jamais être que le prétexte d'une œuvre, ou son appui et qui en est trop souvent le joug et la cage. » Ces quelques lignes à propos d'Adieu à beaucoup de personnages, extraites d'une lettre élogieuse d'Ernest Ansermet, évoquent avec clairvoyance le projet esthétique qui sous-tend l'écriture du recueil ; elles pourraient s'appliquer avec autant d'à propos à de nombreux autres textes parus entre 1912 et 1914 dans la Gazette de Lausanne et le Journal de Genève. La création des Cahiers vaudois, qui réunit des artistes considérant Ramuz comme leur chef de file, ouvre à l'écrivain une période de grande liberté éditoriale, et lui offre l'occasion d'affirmer ses partis pris esthétiques. Il emprunte alors avec finesse des caractéristiques propres aux genres de l'essai et de l'autobiographie pour faire de ces fictions brèves autant de facettes d'un ambitieux art poétique centré sur la représentation du pays. L'écrivain n'abandonne cependant pas les collaborations de longue date qui le lient à La Semaine littéraire et à la Bibliothèque universelle, auxquelles il destine des textes où le récit tient plus de place. Ces publications, ajoutées aux tentatives — infructueuses — de percer à Paris comme nouvelliste, marquent d'autres traits formels une production aux allures hétérogènes. L'édition conjointe des nouvelles et des morceaux parus — ou rédigés — entre 1912 à 1914 révèle en creux un écrivain à la fois soucieux d'accroître son public et désireux de se donner les moyens de donner naissance à une œuvre originale, où les contraintes éditoriales ne retranchent rien à la rigueur du projet poétique."
11. Lettres, tome 1 (1900-1904) : C.F. Ramuz / C.A. Cingria
Charles-Ferdinand Ramuz
4.00★ (3)

1900-1914 [correspondance] : "C.F. Ramuz - C.A. Cingria : Lettres", 2 volumes : "1900-1904" et 1904-1914", choix de G. Guisan et D. Jakubec, éditions La Bibliothèque des Arts (Lausanne), 1978.
12. Construction de la maison
Charles-Ferdinand Ramuz
4.25★ (4)

1914 [roman inachevé] "Construction de la maison", publication posthume, avec une introduction de Stéphane Petermann, aux éditions Zoé (Chêne-Bourg), 272 pages, 2018. /// ARGUMENT : "Construction de la maison" nous convie auprès d’une famille de petits propriétaires terriens vivant au rythme de la vigne et des saisons du Lavaux, le temps du chantier de leur nouvelle demeure. Madame Catherine et ses enfants, Samuel, Héli, Vincent ou la «petite Marianne» : à travers les événements que traversent la famille, Ramuz illustre les tensions entre le désir des transmission des hommes et le cycle implacable de la nature. Dans ce roman inédit ébauché en à peine trois mois en 1914, Ramuz met en place les prémisses de ses romans qui lui assureront, dès 1924 et sous l’égide des éditions Grasset, la reconnaissance du public et des milieux littéraires."
13. Raison d'être
Charles-Ferdinand Ramuz
1914 [essai/manifeste] : "Raison d’être", éditions C. Tarin, "Cahiers vaudois" (Lausanne) — rééd. aux éditions de La Différence (Paris), 1991. /// ARGUMENT : "Charles-Ferdinand Ramuz (1878-1947) est sans doute le plus connu des écrivains suisses du XXe siècle. "Raison d’être" est un texte bref et essentiel qu’il écrivit à la veille de la Première Guerre mondiale. L’Europe vacillait, et avec elle la culture européenne. Les valeurs et les formes étaient en plein bouleversement (Einstein, Picasso, Freud, Lénine...). Apatride (il a vécu à Paris de 1904 à 1914, et témoigné de cette expérience parisienne au début de son livre), Ramuz croit retrouver quelque « raison d’être » en retournant dans son pays, en s’enracinant dans le sol, dans l’ici et maintenant, dans la présence charnelle, dans l’élémentaire. Ce « réaffrontement à une réalité première », dans une langue forte et rigoureuse que l’emploi du « nous » universalise, est plus que jamais une quête à recommencer, notre quête."
14. Raison d'être - Le grand printemps
Charles-Ferdinand Ramuz
5.00★ (2)

1915 [essai/manifeste] ; "Raison d'être" ; 1917 [essai] : "Le Grand Printemps", éd. C. Tarin, "Cahiers vaudois" (Lausanne) ; éd. Les Cahiers vaudois (Lausanne) - rééd. aux éditions Mermod (Lausanne), 1952.
15. L'Exemple de Cézanne - Pages sur Cézanne - Cézanne chez Vollard
Charles-Ferdinand Ramuz
4.00★ (3)

1914 [essais] : "L'Exemple de Cézanne" suivi de "Pages sur Cézanne" et "Cézanne chez Vollard", éditions Les Cahiers vaudois (Lausanne) — rééd. aux éditions Séquences (Rezé), 1988, puis aux éditions Pagine d'Arte (Tesserete/Lugano), coll. "Mots & Images", 2016. /// ARGUMENT : "Les éditeurs de Pagine d'Arte invitent le lecteur à la découverte de nouvelles correspondances entre l'image et le texte : un dialogue continu entre la lecture poétique et le plaisir du regard. Mon éducation a été chez les peintres écrit Ramuz qui définit ainsi « une poétique personnelle en commentant l'esthétique d'autrui ». Comme Baudelaire, avec qui s'établit une similitude : « ce que Delacroix a été pour l'auteur des "Fleurs du mal", Cézanne l'a été pour Ramuz ». Après l'apparition de Cézanne et la découverte de cet artiste solitaire à l'écart, Ramuz évoque son caractère et décrit l'exemplarité de son style. Ensuite « il élève Cézanne au rang de vrai précurseur qui a su conquérir la simplicité ». D'après Ramuz, l'art de Cézanne est en même temps ancien et moderne, primitif et essentiel, dépouillé, au seuil du cubisme mais pas abstrait. Sa vision reflète la géométrie du sentiment du paysage ; l'image de la nature qui s'en dégage correspond à l'architecture de l'esprit que Ramuz et Cézanne partagent, entre mots & images."
16. Paul Cézanne
Charles-Ferdinand Ramuz
4.50★ (4)

1914 [souvenirs/essais biographiques] "Paul Cézanne" par C.F. RAMUZ (réunion de textes), éditions La Bibliothèque des Arts (Lausanne), collection "Polychrome", 100 pages, 1995.
17. Chansons
Charles-Ferdinand Ramuz
3.00★ (2)

1914 [poésie chantée] : "Chansons", éditions C. Tarin (Lausanne) , coll. "Cahiers vaudois" ; rééd. , avec des illustrations d'Henry Bischoff aux éditions Fata Morgana, 1994. /// ARGUMENT :"Publiées en 1914 par les Cahiers vaudois ces treize chansons naïves et savantes comme les bois gravés d’Henry Bischoff qui les illustrent ne sont pas sans évoquer l’Apollinaire de la guerre joyeuse. Rééditées pour la première fois depuis quatre-vingts ans, elles donnent de Ramuz une image toute différente."
18. La guerre dans le haut-pays
Charles-Ferdinand Ramuz
4.12★ (24)

1915 [roman] : "La Guerre dans le Haut-Pays", éditions C. Tarin, coll. "Cahiers vaudois" (Lausanne). /// « Il avait devant lui une feuille de papier, une vieille écritoire ébréchée en faïence blanche ; et il mordillait les barbes de sa plume, parce que la rime ne venait pas. Il n'y avait encore que le titre d'écrit : "Bouquet de Sylvie" et deux vers, et c'est tout, car le difficile était de passer au troisième qui devait, comme on a vu, apporter la rime ; alors il se mit à regarder autour de lui comme s'il espérait la voir se poser sur le mur. C'était une grande chambre de chalet, c'est-à-dire toute en bois, très basse, avec trois petites fenêtres si rapprochées l'une de l'autre qu'elles se touchaient. » /// ARGUMENT : "C'est pendant l'hiver 1797-1798 que les Vaudois se libérèrent des Bernois. Les troupes françaises traversèrent le lac Léman et marchèrent vers la capitale. Au milieu de la tourmente de la grande Histoire, la vie quotidienne des habitants d'un village montagnard se trouve soudain bouleversée. Si les idées révolutionnaires se sont déjà infiltrées dans la vallée, la fidélité au régime bernois reste ancrée dans les esprits. Par son récit de ces événements, C. F. Ramuz nous rapproche de 1798. L'enthousiasme de l'instituteur Devenoge pour les idées de Rousseau, l'amour de Félicie et de David, l'opposition du fils à son père conservateur, les prophéties du mystique Isaïe, sont autant d'éléments modernes qui nous donnent à penser que nous sommes, nous aussi, des acteurs de l'actualité."
19. Le règne de l'esprit malin
Charles-Ferdinand Ramuz
3.91★ (39)

1917 [roman] : "Le règne de l'esprit malin", éditions Les Cahiers vaudois (Lausanne) /// « L'homme arriva au village vers les 7 heures ; il faisait grand jour parce qu'on était encore en été. L'homme était maigre, il était petit ; il boitait un peu ; il portait sur le dos un sac de grosse toile grise. Il n'y eut point d'étonnement pourtant parmi les femmes qui causaient entre elles devant les maisons, quand elles le virent venir, et les hommes, occupés dans les granges et les jardins, à peine s'ils levèrent la tête ; sûrement que ça devait être un ouvrier de campagne en quête d'ouvrage, comme on en voit souvent passer dans le pays. » /// ARGUMENT : "Un soir d'été, dans les montagnes du Valais, un inconnu qui dit se nommer Branchu, arrive au village et s'installe comme cordonnier. Au début, il est bien accueilli mais, après trois ou quatre mois, les signes commencent à se montrer...un fusil qui éclate, Mudry qui tombe d'une paroi, deux bêtes qui crèvent dans la même étable, le croup de la fille du sonneur... Pour Luc, un crève-la-faim qui lit des gros livres, le règne du Malin est commencé, pour Lhôte dont Branchu a guéri la mère, c'est Jésus ! ... [Source : WIKIPEDIA] /// "Une histoire toute faustiennne : Branchu, le "vagabond-cordonnier" (qui arrive puis stationne dans l'auberge, quelle coïncidence ! ... ce juste trois jours après la mort du cordonnier du village... et s'enquiert aussitôt d'un commerce à racheter), c'est Mephistophélès... Le naïf "Faust", par contre, c'est le village entier, séduit d'abord par le bagoût et les espèces sonnantes et trébuchantes de l'étrange vagabond... Nous irons jusqu'au bout de la route avec le Maudit : la séduction puis le malheur... "Le règne de l'esprit malin" s'empare du village... Force du diable (ou du diablotin) : car il est justement si "malin"... Seule "l'innocence" d'un enfant, peut-être, en contrepouvoir si fragile... Cette innocence-là, inatteignable par le monde matérialiste des adultes, n'offrira plus "prise"... imperméable à toute emprise, à toute puissance sournoise... Le conte reste réaliste. Branchu pourrait tout aussi bien ne pas être "le diable"... Diable d'homme, tout simplement !" [Source : Dourvac'h]
20. La guérison des maladies
Charles-Ferdinand Ramuz
3.92★ (15)

1917 [roman] : "La guérison des maladies", éditions Les Cahiers vaudois (Lausanne), 1917, puis éditions Grasset (Paris), 1924 /// « Tout près de la maison, il y avait le lac ; pourtant on ne voyait pas le lac de la maison : à peine si on apercevait le ciel, en se penchant par la fenêtre. C'est ces vieilles petites villes du vignoble, qui sont assises entre la pente du mont et l'eau, et la place leur est avarement mesurée, parce que la terre a trop de valeur. Une tête de Vierge sculptée se voyait encore au-dessus de la porte d'entrée. » /// ARGUMENT : "Dans le bourg, au bas des collines et au bord du lac, Marie Grin ne connaît pas le bonheur, un père ivrogne, une mère acariâtre et son amoureux, le Parisien, vient de se suicider... Marie se transforme en martyre en prenant la souffrance de ceux qui viennent la visiter et en acceptant de porter leurs maux. Ces guérisons miraculeuses déstabilisent la communauté et le père Grin, devenu prophète et organisateur de manifestations, est jeté en prison par les notables. Mme Grin, sur les conseils du syndic, fait emmener Marie à l'hôpital de la ville. Le calme revient... " [Source : WIKIPEDIA]
21. Les signes parmi nous
Charles-Ferdinand Ramuz
3.67★ (22)

1919 [roman] : "Les Signes parmi nous", éditions Les Cahiers vaudois (Lausanne), 1919, puis éditions Bernard Grasset (Paris), 1931, puis rééd. dans "Œuvres complètes" (tome 13), éditions Mermod (Lausanne), 1941 /// « Caille, le colporteur biblique, a suivi encore un moment la route qui longe le lac ; puis s'est engagé dans un chemin de traverse. Au bout de ce chemin, il y avait une maison. C'était une grande maison fraîchement repeinte en blanc, avec des contrevents verts ; à côté de la porte, sur un banc de même couleur, une femme déjà assez vieille était assise. » /// ARGUMENT : "Ce 31 juillet 1918, Caille, un colporteur biblique, longe le lac et arrive au village... « et partout les Signes se levaient autour de lui » : La guerre...la grippe espagnole commence à toucher les jeunes, les vieux et même le docteur... deux, quatre, cinq morts... la grève des ouvriers de la verrerie...l'orage qui gronde... l'Apocalypse... la fin. C'était seulement un gros orage. En Champagne, les Alliés ont avancé de 7 kilomètres, fait 25.000 prisonniers. Caille va reprendre la route, car le Seigneur a encore été miséricordieux..." [Source : WIKIPEDIA]
22. Symétrie - L'enfant
Charles-Ferdinand Ramuz
4.00★ (2)

1914, 1920 [évocations] "Symétrie" (1914) suivi de "L'enfant" (1920), rééd. aux éditions Les Amis de Ramuz (Loches), coll. "Bibliothèque des Amis de Ramuz", préface de Jean-Louis Pierre, 46 pages, 2013. /// ARGUMENT : "Hommage à la vie, présence de la mort, découverte du monde : des thèmes récurrents auxquels la venue au monde d’un enfant donne une acuité particulière. Loin du lyrisme de circonstance, l’écrivain s’essaie à déchiffrer l’énigme de notre condition."
23. Histoire du Soldat : Parlée, jouée, dansée
Charles-Ferdinand Ramuz
3.40★ (11)

1920 [théâtre musical] de C.F. RAMUZ (texte et didascalies) et Igor STRAVINSKY (musique) : "Histoire du Soldat : parlée, jouée, dansée" — rééd. aux éditions Séquences (Rezé), 78 pages, 2005. /// ARGUMENT : "Un soldat revient de guerre, et se distrait en jouant du violon. Lorsqu'il rencontre le Diable dans la personne d'un vieillard, sa destinée bascule. Que choisir : la richesse, l'âme, le pouvoir, l'art ? Son violon devient un symbole de l'âme et une monnaie d'échange pour accéder à la richesse ou encore à l'amour, quand la princesse tombe malade et que le roi la promet en mariage à celui qui saura la guérir. Après de multiples rencontres avec le Diable, le soldat saura-t-il résister au désir de liberté et d'inconnu et se garder de tomber du côté des ténèbres ? Cette histoire emprunte au mythe de Faust où, comme dans la légende d'Orphée, la musique a droit de vie ou de mort. "L'Histoire du soldat", issue d'un conte populaire russe, est publiée à l'occasion du centenaire de l'oeuvre écrite par Ramuz et mise en musique par Stravinsky."
24. Les femmes dans les vignes et autres nouvelles
Charles-Ferdinand Ramuz
3.60★ (10)

1914-1921 [recueil de nouvelles] : "Les Femmes dans les vignes et autres nouvelles", éditions Zoé (Chêne-Bourg), coll. "Zoé Poche", 179 pages, 2021. /// « Le petit enfant, assis sur un carré de toile à matelas dans le pré, tend la main vers un cerisier qui est bien à quarante pas de lui. Ayant refermé sa main, il s’étonne qu’elle soit vide. Il nous faut apprendre le monde depuis son commencement. » /// ARGUMENT : "En 1914, marié et devenu père de famille, Ramuz quitte définitivement Paris. Sa nouvelle situation le pousse à interroger les fondements mêmes de son choix de l’écriture. Le récit court lui offre un terrain de réflexion privilégié, entre fiction et introspection. Quelques années plus tard, au sortir de la Grande Guerre, c’est toute son esthétique qu’il entend réinventer, à la mesure des bouleversements suscités par les événements mondiaux. Une fois de plus, il recourt à la nouvelle pour mettre en œuvre sa vision des hommes « posés les uns à côté des autres ». Au fil de ses méditations, c’est toujours la même aspiration formelle qui l’anime : la quête d’une langue, d’une narration, d’un style à lui. "Les Femmes dans les vignes et autres nouvelles" réunit des textes écrits entre 1914 et 1921.
25. Joie dans le ciel (Terre du ciel)
Charles-Ferdinand Ramuz
4.26★ (59)

1921 [roman] : "Terre du Ciel" (*) pour sa première publication, éditions Georg & Cie (Genève) / éditions G. Crès & Cie (Paris) /// « Alors ceux qui furent appelés se mirent debout hors du tombeau. Avec la nuque, ils ont fait aller la tête en arrière ; ils ont percé du front la terre comme quand la graine germe, poussant dehors sa pointe verte ; ils ont eu de nouveau un corps. Il y avait un grand soleil. Une grande belle lumière est venue sur leurs mains, sur leurs habits, sur leurs chapeaux, sur leurs barbes, sur leurs moustaches. Et c'était tout près du village, là où autrefois on les avait mis [...] » /// ARGUMENT : "Les habitants d'un village vaudois ressuscitent et regagnent leurs maisons, remises à neuf. Adèle retrouve son bâtard, qu'elle avait, dans une autre vie, noyé dans la rivière ; l'aveugle voit ; l'amputé marche. L'oppression, l'argent n'existent plus. Ramuz chante un monde mystique, idéal et transparent, d'où le temps s'est absenté... Mais comme il n'y a plus de passé, plus d'avenir, il n'y a plus de souvenirs, plus de projets. Bientôt, l'ennui mord les âmes. Il faudra que l'infernale cohorte des punis, restés dans leurs tombeaux et qui veulent s'en évader, revienne menacer le village pour que ses habitants mesurent enfin leur félicité. Le message de l'auteur est clair comme ses mots, violent comme ses images : pas de bonheur, pas d'éternité sans souvenir du mal." /// (*) ce roman sera entièrement remodelé et paraîtra sous un nouveau titre : "Joie dans le ciel" en 1925.
26. Salutation paysanne
Charles-Ferdinand Ramuz
3.50★ (2)

1921 [essai] : "Salutation paysanne et autres morceaux", éditions Georg & Cie (Genève) — réédition précédée d'une lettre à Monsieur Bernard Grasset, éditions Grasset (Paris), 1929.
27. Présence de la mort
Charles-Ferdinand Ramuz
3.92★ (55)

1922 [roman] : "Présence de la mort", éditions Georg & Cie (Genève) — rééd. aux éditions de l'Aire (Vevey), coll. "L'Aire bleue", 170 pages, 2009. /// « Alors les grandes paroles vinrent ; le grand message fut envoyé d'un continent à l'autre par-dessus l'océan. La grande nouvelle chemina cette nuit-là au-dessus des eaux par des questions et réponses. Pourtant, rien ne fut entendu. » /// ARGUMENT : "Présence de la Mort" (1922) où la canicule s'abat sur le monde, dessèche les herbes, brûle les vignes de Lavaux, terrorise les populations lausannoises, engendre la révolte nihiliste du « tout est permis », débouche enfin sur la mort vers laquelle on va à la fois ensemble et seul." [Source : "L'HEBDO", 13 octobre 2005]
28. La séparation des races
Charles-Ferdinand Ramuz
4.53★ (41)

1922 [roman] : "La Séparation des races", éditions du Monde nouveau (Paris) /// « On va, on va longtemps avec les yeux contre cette côte ; elle est si élevée que, pour arriver jusqu'en haut, il faut renverser fortement la tête en arrière. » /// « Il y a ces pâturages qui sont sous le col à deux mille cinq cents mètres, et c'est seulement vers la fin de l'été qu'ils y montent, à cause que leur vie va de bas en haut [...]. Tout là-haut, au milieu de la dernière pente d'herbe, on voyait le chalet ; ils étaient devant le chalet, assis par terre, parce qu'il n'y avait même pas de banc, se tenant adossés au mur de pierres sèches, en face et au-dessus du vide. Vu de cette hauteur, le fleuve, au fond de la vallée, n'était plus qu'un bout de fil gris apparaissant à travers une brume bleue, comme si ce n'eût pas été de l'air, mais de l'eau, dans laquelle on aurait mis fondre du savon, qui remplissait cet immense bassin de fontaine ; ils se tenaient là sans parler, parce qu'on se sent tellement petits, c'est tellement trop grand pour nous. »
29. Passage du Poète (Fête des vignerons)
Charles-Ferdinand Ramuz
3.89★ (65)

1923 [roman] : "Passage du Poète" (*) pour sa première publication, éditions Georg & Cie (Genève) /éditions du Siècle (Paris) /// « Sa hotte a fait clair dans les vignes, le jour où il est venu. Il avait dit qu'il s'appelait Besson ; il était vannier. L'affaire a été alors seulement qu'on était pas très sûr qu'il y aurait suffisamment d'ouvrage pour lui dans le pays, comme on lui a dit ; et les gens à qui il s'était adressé secouaient la tête : « On ne croit pas. » /// ARGUMENT : "Passage du Poète" est peut-être le livre le plus ramuzien de Ramuz, le livre que Ramuz lui-même préférait à tout autre. Une manière d'ouverture à toute son œuvre, en même temps que le point d'aboutissement de son style le plus caractéristique. Le passage du poète se fait parmi les vignerons de Lavaux, ces vignes en cascade qui entourent Lausanne. La voix la plus forte est celle de Bovard, dont le monologue est passé à la postérité. Le travail de l'homme rejoint, poursuit, complète l'œuvre de la nature. Toute la métaphysique de Ramuz transparaît dans ce court livre de prose, véritable manifeste d'une œuvre, en même temps que chant, célébration de la terre et de la vie." /// (*) "Passage du Poète" sera entièrement remanié par son auteur pour reparaître en 1929 sous un autre titre : "Fête des Vignerons".
30. L'Amour du monde
Charles-Ferdinand Ramuz
3.36★ (33)

1925 [roman] : "L'Amour du monde", éditions Librairie Plon (Paris) ; rééd. dans "Œuvres complètes" (tome 13), éditions Mermod (Lausanne), 1941 /// « C'est vers ce temps-là qu'il a commencé à se hasarder jusque dans les rues de la petite ville, ce qu'il n'aurait pas osé faire auparavant, mais il y avait des choses qui n'étaient pas permises et, à présent, elles l'étaient. Il y avait des choses qui avaient semblé impossibles et qui ne semblaient plus impossibles. Vers ce temps, c'est-à-dire vers le milieu de mai, il a commencé à s'aventurer jusqu'en plein centre de la ville ; comme il faisait chaud déjà, il portait des vêtements en toile blanche. Il tenait à la main une branche qu'il avait cassée en passant dans une haie et ayant encore ses feuilles ou même toute fleurie, quand c'était une branche d'aubépine ou de fusain. On n'a guère fait attention à lui, les premiers jours, sauf que ceux qui n'avaient pas encore eu l'occasion de le rencontrer se retournaient sur son passage, demandant : « Qu'est-ce que c'est que ce particulier-là ? » mais on leur disait : — Comment, vous ne savez pas ? C'est le pensionnaire du docteur Morin... — Ah ! — Il croit qu'il est Jésus-Christ. On riait. Et lui, continuait sa route, sa branche de feuilles à la main, comme quand on portait autour de Lui des palmes [...] » /// ARGUMENT : "L'intrusion du cinéma et de son langage même, dans un roman daté de 1924, a de quoi surprendre. on peut penser que Ramuz, l'un des tout premiers, a fait entrer le 7ème art dans la littérature. La communauté villageoise si chère à l'auteur est retournée à la fois par un doux toqué qui se prend pour Jésus, par un marginal voyageur et par l'arrivée des premiers films muets, tout chargés alors de poésie. Mais le rêve va se changer en drame..."
31. Joie dans le ciel (Terre du ciel)
Charles-Ferdinand Ramuz
4.26★ (59)

1925 [roman] : "Joie dans le ciel" (*), éditions Bernard Grasset (Paris) /// « Alors ceux qui furent appelés se mirent debout hors du tombeau. Avec la nuque, ils ont fait aller la tête en arrière ; ils ont percé du front la terre comme quand la graine germe, poussant dehors sa pointe verte ; ils ont eu de nouveau un corps. Il y avait un grand soleil. Une grande belle lumière est venue sur leurs mains, sur leurs habits, sur leurs chapeaux, sur leurs barbes, sur leurs moustaches. Et c'était tout près du village, là où autrefois on les avait mis [...] » /// ARGUMENT : "Les habitants d'un village vaudois ressuscitent et regagnent leurs maisons, remises à neuf. Adèle retrouve son bâtard, qu'elle avait, dans une autre vie, noyé dans la rivière ; l'aveugle voit ; l'amputé marche. L'oppression, l'argent n'existent plus. Ramuz chante un monde mystique, idéal et transparent, d'où le temps s'est absenté... Mais comme il n'y a plus de passé, plus d'avenir, il n'y a plus de souvenirs, plus de projets. Bientôt, l'ennui mord les âmes. Il faudra que l'infernale cohorte des punis, restés dans leurs tombeaux et qui veulent s'en évader, revienne menacer le village pour que ses habitants mesurent enfin leur félicité. Le message de l'auteur est clair comme ses mots, violent comme ses images : pas de bonheur, pas d'éternité sans souvenir du mal." /// (*) remodelage du roman "Terre du Ciel" publié en 1921, pour être réédité sous un nouveau titre : "Joie dans le ciel" en 1925.
32. Le Cirque
Charles-Ferdinand Ramuz
4.00★ (4)

1925 [nouvelle] : "Le Cirque", éditions Georg & Cie (Lausanne), puis en version remodelée, Nouvelle Revue Française (Paris), 1931 ; rééd., avec un avant-propos d'Annie Fratellini, aux éditions Du Lérot (Tusson), 2011. /// ARGUMENT : "En automne 1900, Ramuz s’installe à Paris. Il a 22 ans. Il en aura 59 lorsqu’il fera paraître ce livre fondamental dans son parcours d’écriture et de vie. Les années n’ont atténué ni la fraîcheur ni la précision des première impressions. Le tableau du Montparnasse au début du siècle est riche de couleurs et de personnages. Mais ce qui importe davantage, c’est la réflexion conduite par Ramuz sur la nature de la grande ville, son rôle de capitale historique et culturelle. Paris l’amène à traiter des sujets les plus divers : les arts, les modes et le snobisme, la langue, bien sûr, et l’écriture, mais aussi le monde du travail, la société, l’identité des provinces. Par-delà le souvenir se reflète ici l’image de tous ceux qui sont un jour montés à Paris. Pour le « petit Vaudois » qu’est Ramuz, la Suisse romande est une « province qui n’en est pas une », française par la culture, suisse par la politique. À la frontière entre essai et autobiographie, Ramuz réfléchit avec brio aux relations entre centre et périphérie."
33. La Grande Peur dans la montagne
Charles-Ferdinand Ramuz
3.84★ (697)

1926 [roman] : "La grande Peur dans la montagne", éditions Bernard Grasset (Paris) /// « Le Président parlait toujours. La séance du Conseil général, qui avait commencé à sept heures, durait encore à dix heures du soir. Le Président disait : — C'est des histoires. On n'a jamais très bien su ce qui s'était passé là-haut, et il y a vingt ans de ça, et c'est vieux. » /// « — C'est que tu as voulu, Président, t'attaquer à plus fort que toi... Et elle est méchante, quand elle s'en mêle. Parlant sans doute de la montagne : — Il y a des places qu'elle se réserve, il y a des places où elle ne permet pas que l'on vienne... » /// ARGUMENT : "Le pâturage abandonné de Sasseneire est-il vraiment maudit comme le croient les anciens ? Quelques bergers incrédules, pour s'en assurer, décident d'y conduire le troupeau. La montagne leur réserve sa terrible réponse. Dans ce roman qui tient de l'étude de moeurs et de l'épopée tragique, Ramuz, avec une remarquable virtuosité, passe insensiblement du sourire à l'inquiétude, de l'inquiétude à l'horreur... [Source : éditions Grasset (Paris), collection "Les Cahiers Rouges"] /// "Sasseneire est un pâturage de haute montagne que les gens du village délaissent depuis vingt ans à cause d'une histoire pas très claire dont tremblent encore les vieux. Mais faut-il perdre tant de bonne herbe par crainte d'un prétendu mauvais sort, alors que la commune est pauvre ? Le clan des jeunes finit par l'emporter : en été, le troupeau monte à l'alpage, à 2.300 mètres d'altitude, sous la garde du maître fromager, son neveu, quatre hommes et un jeune garçon. Très vite le site, les propos du vieux Barthélemy créent un climat de crainte et de superstition. Puis la « maladie » ravage le bétail. Mis en quarantaine, les hommes de l'alpage sont prisonniers au pied du glacier menaçant. Tout alors bascule. C'est la grande peur dont Ramuz fait le récit dans cette forte et célèbre chronique montagnarde. [Source : éd. "Le Livre de Poche" (Paris)] /// "[...] une fiction poignante. Elle raconte des événements survenus, à la fin du fin du 19è siècle, dans une communauté du Valais suisse qui vit en quasi-autarcie, chose inimaginable aujourd'hui, n'ayant pour seule ressource qu'un peu de seigle et du bétail, se déplaçant à pied ou à dos de mulet : " ... on vit de lait, on vit de viande; on vit de lait, de petit-lait, de fromage maigre, on vit de beurre; même le peu d'argent bon à mettre dans sa poche qu'on peut avoir vient du bétail." Le maire décide qu'il faut reprendre la transhumance pour faire paître le bétail sur le plateau dans la montagne. Tous ont peur depuis la terreur survenue des décennies auparavant, avec la maladie et le reste. Six d'entre eux se portent volontaires, des jeunes enthousiastes, rationnels, qui n'ont pas connu cet autrefois, et des vieux circonspects, superstitieux avec un mélange de croyances magiques et de syncrétisme catholique. Très vite, là-haut, on entend des bruits la nuit (le diable ?), des bêtes sont malades, la tension monte et la tragédie survient. Ce roman atteste des dons de Ramuz pour l'invention de sujets dramatiques et l'art de leur mise en scène. Force de l'atmosphère et sentiment d'angoisse sont remarquablement produits, quoi qu'on dise du style." [Source : Christw, Babelio, 2012]
34. La beauté sur la terre
Charles-Ferdinand Ramuz
3.78★ (179)

1927 [roman] : "La Beauté sur la terre", éditions Mermod (Lausanne), 1927, puis éditions Bernard Grasset (Paris), 1928 /// « Voyons, a dit le patron, tu ne vois pas que c'est un timbre d'Amérique ?... Santiago, dans l'île de Cuba. Et la lettre est une lettre officielle, pas moyen de s'y tromper. Et qu'est-ce qu'il faut que je réponde ? — Ma foi, a dit Rouge, à ta place, moi, je la laisserais venir. — Tu crois ? » /// ARGUMENT : "Juliette, jeune orpheline de dix-huit ans, débarque un jour dans un village vaudois, venant de son Cuba natal. Elle cherche refuge chez son oncle, aubergiste de son état, qui reste sa seule famille. Ce roman de Ramuz, paru en 1927, ne laisse pas d'étonner par son thème lui-même. Comment Ramuz a-t-il pu introduire cette fleur exotique dans une oeuvre aussi fermée sur les paysages vaudois et valaisans qu'est la sienne ? Qu'Aimé Pache pousse jusqu'à Paris, certes ! Mais qu'une jeune fille des Caraïbes vienne irradier une auberge campagnarde de sa beauté absolue, voilà qui peut faire penser à un tournant dans l'oeuvre de Ramuz. N'importe quel écrivain aurait traité pareil thème sur le mode sociologique. L'irruption d'un élément étranger dans le vase clos d'habitudes locales : quelles en seront les perturbations au niveau des comportements, jusqu'où iront ces bouleversements ? Mais Ramuz n'est ni sociologue ni psychologue. Ce qui l'intéresse, c'est cette trame souterraine aux choses, invisible et pourtant présente, qui les élève jusqu'à des hauteurs inconnues. "La Beauté sur la Terre" pourrait s'appeler "La Beauté sous la Terre", tant elle soulève et transcende tout ce qu'elle touche et fait vibrer. Mais si on rêve de la Beauté, si on peut l'entrevoir ou la frôler, on ne l'aborde pas de face. La Beauté, comme le soleil ou la mort, rend fou ceux qui la regardent en face. Ainsi de Joseph qui, faute de pouvoir s'approprier l'image de son rêve, se met à tout détruire autour de lui. Ainsi de ces hommes qui, après de timides avances, en viennent à exprimer leurs convoitises les plus brutales ou les plus sordides. Juliette finira par fuir le village, l'auberge et son oncle. La vision de Ramuz est pessimiste. Mais en même temps se dessine une morale nouvelle, à mi-chemin du christianisme et du panthéisme, qui fait de certaines forces obscures le levain de ce qui peut constituer, en dépit de tout, la Beauté sur la Terre."
35. Vendanges
Charles-Ferdinand Ramuz
5.00★ (5)

1927 [chronique] : "Vendanges", éditions du Verseau (Lausanne) — rééd. aux éditions Séquences (Rezé), 94 pages, 2002. /// ARGUMENT : "Les souvenirs d’enfance de Ramuz pour décrire sa participation à la saison des vendanges à Yvorne, dans le Chablais vaudois, vers 1890. Durant trois semaines en octobre, à date fixe, les écoliers du Collège classique cantonal de Lausanne avaient des vacances de vendanges. Ces vacances de saisons où l’on sortait de ses devoirs d’écolier pour rentrer, chaque fois, dans les travaux des hommes. Un texte poétique magnifique, empreint de la nostalgie d’instants précieux. Ces petits riens qui transforment des jours de dur labeur en un émerveillement. Ramuz chante le vin couleur de bouton d’or, ce vin vivant et naturel d’avant le « progrès d’une civilisation à rebours » qui multiplie les traitements chimiques. Il évoque le travail des hommes et des femmes, ceux de Monthey, pressureurs de père en fils, et les femmes venues de Savoie, en bateau, pour les effeuilles. Il raconte les petits matins où le brouillard s’attarde, le froid humide qui transperce les habits, les doigts gourds, le jus des grains qui colle aux manches, les odeurs, le dos qui souffre – pourtant il suffit qu’un rayon de soleil brille pour que tout change. Parce que c’est beau, la vigne ; c’est dur, mais c’est beau."
36. Remarques
Charles-Ferdinand Ramuz
3.00★ (2)

1928 [essai] "Remarques", éditions L'Âge d'Homme (Lausanne), 152 pages, 1990. /// ARGUMENT : "Voici un Ramuz qui étonnera : ce n'est plus le romancier des montagnards du Valais ou des vignerons de Lavaux, ni celui des colporteurs sentencieux ou des faux-monnayeurs sympathiques, mais c'est un Ramuz philosophe, un Ramuz moraliste, frère de celui du Journal, qu'il convient de lire par petites doses, car il s'agit de textes serrés, au riche contenu, qui réclament attention et reprise. Comme tous les écrivains, Ramuz s'est posé à lui-même une foule de questions autour desquelles ont foisonné des réponses, ou idées, ou remarques. Il lui arriva de les noter, en les mettant en forme, et de publier celles qui lui parurent dignes d'être retenues. Une première fois dans les Six Cahiers (1928-1929), une autre fois dans les Œuvres complètes (t. 19, 1941), ailleurs encore. On en trouvera dans ce petit « poche » le rassemblement complet. Ces remarques ont pour thème les plus hauts objets que puisse aborder la réflexion humaine et nous révèlent un humaniste inquiet de la destinée de l'homme, du monde et de Dieu. Ramuz le solitaire analyse avec une singulière profondeur les grandes stratifications sociales, l'originalité du paysan parmi les autres groupes humains, la portée véritable des grands mots (ordre, unité, vérité, beauté, bonté...) et des grandes options esthétiques (nature, réalisme, ressemblance...), la puissance des images à travers les civilisations, la fonction privilégiée réservée au poète dans l'ordre de l'univers. (« Il n'y a plus de solitude là où est la poésie »). Son besoin d'absolu le conduit jusque-là : à affirmer que la poésie triomphe des forces de division et permet de rejoindre l'innocence première. Mais, pessimistes au fond, les Remarques ramuziennes indiquent du même coup que cette quête de la cohérence et de la plénitude auxquelles l'homme aspire n'est jamais achevée. Elles nous proposent des chemins d'approche, des lambeaux de certitudes, avec une acuité d'intelligence et une vigueur de sève irremplaçables. Elles sont bien faites pour provoquer le lecteur, et lui faire trouver en lui des révélations et des illuminations propres à le sortir de son quotidien et à nourrir sa soif de réflexion ouverte et d'images justes."
37. Deux lettres (précédé de) Georges Haldas : Fidélité profonde
Charles-Ferdinand Ramuz
1928-1929 [correspondance] : "Deux Lettres", précédé de "Georges Haldas : Fidélité profonde", éditions L'Âge d'Homme, collection "Poche Suisse", 110 pages, 2001. /// ARGUMENT : "Les deux lettres de Ramuz à ses éditeurs premiers et privilégiés : Bernard Grasset et Henri-Louis Mermod ont été écrites à la fin des années 20 et publiées dans les Six Cahiers édités par l'un des éditeurs, H-L. Mermod (1928-1929), en même temps que "Remarques" et "Souvenirs sur Igor Stravinski". L'importance de ces deux lettres n'échappera à personne. Par beaucoup d'aspects, elles reprennent la réflexion que Ramuz avait inaugurée dans "Raison d'être" et qu'il poursuivra dans "Paris, notes d'un Vaudois", suite à la conférence qu'il avait prononcée devant l'Association internationale des écrivains de langue française et intitulée "Une province qui n'en est pas une". L'enjeu en est la situation de la Suisse romande dans sa définition culturelle : qui sommes-nous ? demande Ramuz. Qui sommes-nous face à la France, à la culture française, dans le contexte de notre histoire, dans celui de l'Europe ou de nos compatriotes non francophones ? Notre différence doit-elle rejaillir sur la langue, sur nos formes d'expression, sur notre littérature ? En quoi sommes-nous différents ? Quels sont les points de convergences et quels sont ceux de divergences ? Ces réflexions de Ramuz sont évidemment fondatrices de tout ce qui s'est voulu, partant de Suisse romande, original dans le sens le plus historique ou géographique. Sur ce plan, Ramuz a été le théoricien de la spécificité suisse romande dans le contexte francophone et singulièrement face à la France et à Paris. Ces deux lettres ont la force d'un témoignage capital et l'importance d'un manifeste fondamental."
38. Souvenirs sur Igor Strawinsky
Charles-Ferdinand Ramuz
4.50★ (8)

1928-1929 [souvenirs] "Souvenirs sur Igor Strawinsky" — rééd. aux éditions de L'Aire, "Fondation C.F. Ramuz", 1996. /// ARGUMENT : « Nous avons lié connaissance devant les choses et par les choses. De nouveau, je ne me souviens plus du tout de ce que fut l'objet de la conversation : ce dont je me souviens très bien par contre, c'est de cette parfaite entente préliminaire dont le pain et le vin d'ici furent l'occasion. J'ai pu voir tout de suite, par exemple, Strawinsky, que vous aimiez comme moi le pain quand il est bon, le vin quand il est bon, le vin et le pain ensemble, l'un pour l'autre, l'un par l'autre. Ici commence votre personne et du même coup commence votre art : c'est à dire vous tout entier; je me suis acheminé à cette connaissance dite intérieure, par le plus extérieur, le plus terrestre des chemins. »
39. Passage du Poète (Fête des vignerons)
Charles-Ferdinand Ramuz
3.89★ (65)

1929 [roman] paru sous le titre : "Fête des Vignerons" (*) — réédition aux Editions Séquences, avec une Après-lecture de Jean-Louis Pierre, 255 pages, 1984 /// « Sa hotte a fait clair dans les vignes le jour où il est arrivé. Il nous avait annoncé son arrivée. Il nous avait dit qu'il s'appelait Besson ; il nous avait dit qu'il était vannier. Et alors l'affaire avait été seulement qu'on n'avait pas été très sûr qu'il y aurait suffisamment d'ouvrage pour lui dans le pays : — Vous comprenez, lui disait-on, ce qu'il nous faut, à nous autres, dans le vignoble, ça n'est pas tellement l'osier... L'osier est plein de trous, l'osier laisse passer. » /// ARGUMENT : "Si l'on s'offrait le plaisir de faire connaissance avec un écrivain, espèce rare, si rare ? Voici "Fête des vignerons", frère jumeau de "Passage du Poète", mais faux jumeau, à découvrir. Voici Ramuz le Vaudois, oublié, méconnu. Pourtant peu, savent, comme lui, parler des humbles, du travail de la terre, peindre une communauté dans son essence. Regardons passer Besson le vannier, Besson le poète... Ouvrez vite "Fête des vignerons", jamais réédité depuis 1929 ; vous entendrez une langue à la fois sensuelle et rocailleuse, neuve parce qu'authentique, un chant venu du Rhône, apparemment simple, ce qui veut dire infiniment travaillé, repris. Ce chant sous accompagnera et vous cheminerez longtemps avec Ramuz, "Ramuz le salubre [...] Ramuz, ou la plénitude" comme l'écrivait Jean Paulhan." [texte : Jean-Louis Talloires] /// (*) Ce roman est un complet remaniement de "Passage du Poète", que l'auteur publia en 1923.
40. Montée au Grand-Saint-Bernard
Charles-Ferdinand Ramuz
4.00★ (3)

1930 [carnet de voyage] : "Montée au Grand Saint-Bernard", édition posthume, éditions De Lérot (Tusson), 1990. /// ARGUMENT : "En juillet 1930, avec H.L. Mermod l’éditeur mécène au volant de sa 35 chevaux, le sculpteur Jean Clerc, le poète Gustave Roud passionné de photographies, Ramuz monte au Grand-Saint-Bernard. Ce qui aurait pu n’être que le récit d’une excursion, émaillé de réflexions critiques sur le touriste « moyen » ou ironiques sur le partage purement artificiel des frontières s’élève, ici, à la méditation. « Pèlerinage » … les mots prennent alors toute leur valeur spirituelle et poétique. "
41. Conformisme
Charles-Ferdinand Ramuz
4.50★ (2)

1931 [long article/essai] : "Conformisme", réédité aux éditions La guêpine (Loches), 240 pages, 2013. /// ARGUMENT : "Un Ramuz qui dérange ! Publié en 1931, cet article n’a pas vieilli. Comme l’écrit Jacques Chessex dans la préface, il « sonne comme une cloche qui ne cesserait de sonner l’alarme sur la place publique. Résumons-nous, il dérange ». Un texte de Ramuz sans concessions sur son pays, et qui annonce l’essai de 1937, "Besoin de grandeur".
42. Farinet ou la fausse monnaie
Charles-Ferdinand Ramuz
4.20★ (62)

1932 [roman] : "Farinet ou La fausse monnaie" /// « Le père Fontana a continué à dire des choses à voix basse aux deux hommes qui étaient avec lui dans le café Crittin à Mièges : « Oui... » Il hochait lentement la tête. C'étaient les nommés Ardèvaz et Charrat. « Oui, a continué Fontana, parce que je dis, moi, que son or est meilleur que celui du gouvernement. Et je dis qu'il a le droit de faire de la fausse monnaie , si elle est plus vraie que la vraie. Est-ce que, ce qui fait la valeur des pièces, c'est les images qui sont dessus, ou quoi ? ces demoiselles, ces femmes nues ou pas nues, les couronnes, les écussons ? Ou bien les inscriptions, peut-être ? Ou bien leurs chiffres, disait-il, les chiffres qu'y met le gouvernement ? Les inscriptions, on s'en fout, pas vrai ? Et les chiffres aussi, on s'en fout. » /// ARGUMENT : "Dans le café Crittin à Mièges, les nommés Ardèvaz et Charrat, avec le père Fontana, se disent des choses à voix basse : « Farinet a le droit de faire de la fausse monnaie parce que son or est meilleur que celui du gouvernement... ». Mais, en ce moment, Farinet (*) est couché sur sa paillasse dans une cellule de la prison de Sion... ](source du texte-présentation : WIKIPEDIA) [(*) Farinet a été un faux-monnayeur véritable. Il a même eu son heure de célébrité (très locale) aux environs de 1880, dans tout le pays qui s'étend de Martigny à Sion." /// "Au-dessus du village de Mièges en Valais, Farinet, fils de contrebandier, fabrique de la fausse monnaie avec de l'or qu'il recueille au sein de la haute montagne surplombant son village. Il écoule ses pièces d'or auprès des gens du pays, tous acquis à sa cause. N'est-ce pas de l'or pur officiellement attesté? Arrêté à Aoste et condamné à six ans de réclusion, Farinet s'échappe de prison par deux fois et se réfugie toujours plus haut dans ses montagnes où il se croit invincible. Joseph-Samuel Farinet a bel et bien existé. Né en 1845 et mort en 1880, ce faux-monnayeur est devenu un héros fabuleux. Ce n'est ni le héros de légende, ni le mythe folklorique valaisan, ni même le fait divers en soi, aux allures de roman policier, qui intéressent C.F. Ramuz. Farinet incarne cette liberté que veut célébrer le poète ! L'histoire de Farinet, est racontée par C. F. Ramuz dans une langue rude, simple, à la respiration haletante, reflétant bien le caractère et la vie des montagnards. " [Source : Préface de Philippe Renaud]
43. Adam et Eve
Charles-Ferdinand Ramuz
3.50★ (24)

1932 [roman] : "Adam et Eve" /// « Mme Chappaz jeta dans la poêle pleine d'huile bouillante les pommes de terre coupées en tranches minces, et elle recula vivement, tout en renversant la tête en arrière. Puis elle s'est mise à secouer la poêle à petits coups, pendant que l'huile à la surface du récipient faisait des bosses, comme quand le lac brasse par le mauvais temps. C'est alors qu'elle a vu Bolomey qui arrivait. Quelle heure peut-il bien être ? L'horloge a sonné un coup dans le corridor. I heure de l'après-midi. » /// ARGUMENT : "Lorsque le malheur fait irruption dans la vie de Louis, celui-ci ne comprend pas. Après la mort de sa mère, voici que sa jeune femme le quitte. L'explication ? La nature, où il erre comme une âme en peine se tait. Or d'autant plus lancinant, le pourquoi : pourquoi le désaccord, la maladie ; pourquoi le mal, pourquoi la mort ? Le vieux Gourdou, rétameur et raccommodeur de faïence qui vaque entre les villages en philosophant volontiers, détient, lui, une explication. « C'est dans le Livre, dit-il. Parce qu'on n'était pas comme ça avant. On a été chassé une fois, il y a longtemps, et on oublie ». Alors Louis se met à lire le Livre, pour comprendre « à quoi ça sert d'exister ». Au commencement, il se laisse convaincre : il voit bien qu' « à présent tout est gâché ». Puis une femme — Lydie, la fille de l'aubergiste, qui prend les choses comme elles viennent depuis qu'elle aussi on l'a abandonnée — et sa bonne nature de paysan l'incitent au grand retournement. D'un jour à l'autre, le revoici sur pied, décidé à faire son bonheur. « Il a faim, écrit Ramuz. Il est dans la vie ». Et sa femme lui revient. Mais à l'aube de leurs retrouvailles, Louis découvre finalement qu'il n'a pu exorciser la malédiction originelle. Adrienne repartira. Parce que, comme le disait Gourdou : « Rien ne nous est donné qu'on ne le reprenne. Séparés et collés ensemble. unis par le dehors, par les lois, par les habitudes, désunis du dedans : frères et étrangers. » Baignant dans un climat de grande tendresse et de lyrisme, "Adam et Eve" est à la fois un roman de l'amour et de la séparation, et une méditation poignante sur la perte de l'innocence et sur le sens de notre présence au monde. Des gens tout simples s'interrogent sur les grandes questions de l'existence avec les mots les plus simples, auxquels le génie de Ramuz donne cependant un inoubliable chatoiement et une signification universelle."
44. Taille de l'homme - Charles-Ferdinand Ramuz par Charles-Albert Cingria
Charles-Ferdinand Ramuz
5.00★ (9)

1933 [essai] : "Taille de l'homme", éditions d'Aujourd'hui (Lausanne) — rééd. "Taille de l'Homme" de C.F. RAMUZ suivi de "Charles Ferdinand Ramuz" [évocation] par Charles-Albert CINGRIA " aux éditions L'Âge d'Homme (Lausanne), coll. "Poche Suisse", 1998. /// ARGUMENT : "Une protestation contre cet « homme nouveau », qui sacrifie, semble-t-il, à des abstractions, sa liberté essentielle et toutes ses exigences à la fois religieuses et concrètement terrestres."
45. Une main
Charles-Ferdinand Ramuz
4.10★ (11)

1933 [chronique] : "Une Main", éditions Bernard Grasset (Paris) - rééd. Du Lérot éditeur (Tusson), 116 pages, 2009. /// ARGUMENT : "Ramuz vient d'emménager dans sa maison de la Muette à Pully lorsqu'il se casse le bras et reste immobilisé plus de deux mois. Dès qu'il peut reprendre l'écriture, il note toutes les sensations et les impressions qu'il a ressenties lors de cette épreuve. Plus qu'un journal de ses maux, c'est une réflexion générale sur la vie, sur l'écriture. L'aventure, banale en soi, prend une ampleur universelle. Ramuz doit apprendre la patience, la dépendance, l'humiliation des scènes de rééducation (racontées avec humour), supporter sa maladresse et son inactivité."
46. Derborence
Charles-Ferdinand Ramuz
3.91★ (534)

1934 [roman] : "Derborence" /// « Il tenait une espèce de long bâton noirci du bout qu'il enfonçait par moment dans le feu ; l'autre main reposait sur sa cuisse gauche. C'était le 22 juin, vers les 9 heures du soir. Il faisait monter du feu avec son bâton des étincelles ; elles restaient accrochées au mur couvert de suie où elles brillaient comme des étoiles dans un ciel noir. » /// « Et quelque chose, là, éclairait doucement : une frange lumineuse, vaguement transparente, avec des reflets verts et bleus et une lueur comme le phosphore : c'était la cassure là-haut de la glace, mais elle était à cette heure, elle aussi, pleine d'un grand silence et d'une grande paix. Rien ne bougeait plus nulle part sous une cendre impalpable qui était la lumière de la lune ; on la voyait flotter mollement dans les airs ou être déposée en mince couche sur les choses, partout où elle avait trouvé à s'accrocher. — Là-haut... Séraphin tenait toujours le bras levé. Il a dit : — Oui, là où ça surplombe. Mais il semble bien que, pour ce soir, ça soit fini. Il avait une grande voix dans le silence. — Oh ! a-t-il repris, c'est que ça est toujours tombé, d'aussi loin qu'on se souvienne. Il avait rabaissé le bras : — Les vieux chez nous en parlaient de leur temps. Et ils étaient tout petits encore qu'ils entendaient déjà les vieux en parler... Seulement, voilà, c'est capricieux... Dommage... On entendait de temps en temps le tintement d'une clochette au cou d'une chèvre quelque part dans les environs. Les chalets étaient de-ci de là répandus. C'est des cabanes en pierre sèche. Une des pentes de leur toit était tout enneigée de lune [...] » /// « Derborence, le mot chante doux ; il vous chante doux et un peu triste dans la tête. Il commence assez dur et marqué, puis hésite et retombe, pendant qu'on se le chante encore, Derborence, et finit à vide, comme s'il voulait signifier par là la ruine, l'isolement, l'oubli. » /// « Une voix d'homme, une voix de femme. Et c'était elle et c'était lui ; maintenant on voyait que l'homme aidait la femme dans les passages difficiles ; là où la roche faisait mur, il sautait en bas le premier, il la prenait dans ses bras. Et, au fin sommet de la paroi, la tranche du glacier ruisselait de lumière comme un rayon de miel ; mais derrière ceux qui venaient et à mesure qu'ils venaient, tout le fond de la combe entrait définitivement dans la nuit et dans le silence, dans le froid et dans la mort. » /// ARGUMENT : "Antoine n'est pas revenu du pâturage de Derborence où il avait accompagné le troupeau, car la montagne s'est mise en colère... Pourtant un soir, Thérèse, sa jeune épouse, croit reconnaître sa voix et sa silhouette amaigrie et pâlie. Est-ce une vision ou un miracle ? Un survivant ou un spectre ? Si Antoine n'est pas son propre fantôme, il faudra qu'il le prouve... Avec cette chronique villageoise, où le ton vire du pathétique au cocasse aussi imprévisiblement que la bise des montagnes, Ramuz a réussi un de ses chefs-d'oeuvre. /// "Une histoire de revenant, mais rien à voir avec les zombies sanguinaires et les spectres shakespeariens... enfin, un peu quand même ! " [Source : Junie]
47. Le garçon savoyard
Charles-Ferdinand Ramuz
3.75★ (28)

1936 [roman] /// « Ils avaient, toute l'après-midi, déchargé la "Vaudaire", poussant l'une derrière l'autre leurs brouettes sur la planche qui ployait sous leur poids. Vers 8 heures, ils eurent terminé leur besogne. Ils étaient nus ; ils ont été mettre une veste. Ils ont descendu l'échelle qui menait sous le pont à une espèce de chambre où il y avait un fourneau à trois pieds posé sur un foyer de pierre, et où ils mangeaient et couchaient ; ayant ensuite remonté l'échelle, ils ont dit : « Et bien, on y va ? » On voyait la barque qui sortait de l'eau presque tout entière à présent, ayant retrouvé sa légèreté. Elle dansait sur place, comme une femme délivrée. Eux, ils avaient terminé aussi leur ouvrage ; c'était bien l'occasion, ou jamais d'aller boire un coup, parce qu'ils ne devaient repartir que le lendemain matin. On entendait le bruit des pianos mécaniques dans les cafés. » /// ARGUMENT : "Joseph le marinier est hanté par une dangereuse question : « Où se tient ce qui existe toujours et pas seulement pour un temps ? » L'apparition d'une acrobate, miss Anabella, va bouleverser sa vie. Existe-t-elle au moins ? Qu'importe. Cette vision surréelle, cette œuvre d'art humaine, devient pour lui le critérium de la vérité. Il s'éloigne de sa fiancée. Comme envoûté, il croit retrouver Anabelle sous les traits d'une serveuse, avec qui il finit par coucher. C'est évidemment une déception. Pire, un crime. Joseph, le mendiant de beauté, deviendra meurtrier pour venger un rêve offensé... Ce roman sur l'artifice et l'onirisme est l'un des plus achevés, des plus ambitieux du grand Ramuz."
48. Besoin de grandeur
Charles-Ferdinand Ramuz
5.00★ (3)

1936 [essai] : "Besoin de grandeur", éditions Mermod (Lausanne) - rééd. aux éditions Les Amis de Ramuz (Loches), coll. "Bibliothèque des Amis de Ramuz", préface de Jacques Chessex, 137 pages, 2006. /// ARGUMENT : "Ces mots de "Besoin de grandeur" sonnent comme un mot d'ordre, une injonction au jour le jour. Le reverdissement élémentaire. Les grands livres proposent toujours leur poids sombre avec l’allègement, l'assomption du texte. Ici, le grave, ce qui tire au noir, c'est le constat d'un pays étroit et complice de sa propre maladie. L’allègement, c'est la foi dans le renouveau par l'art, et ce besoin de grandeur vrillé au corps du créateur. Que fait ce livre parmi nous ? Comme le poète à son passage, il montre la voie, il élève, en abrupt révélateur." [Jacques CHESSEX]
49. La pensée remonte les fleuves
Charles-Ferdinand Ramuz
3.88★ (34)

1933, 1935, 1936 [essais] "Taille de l'homme" (1933), "Besoin de grandeur" (1936), "Questions" (1935), textes ici réunis sous le titre "La Pensée remonte les fleuves. Essais et réflexions", éditions Terre Humaine (Paris) ; réédition en coll. "Terre humaine" poche.
50. Si le soleil ne revenait pas
Charles-Ferdinand Ramuz
3.97★ (224)

1937 [roman] /// " Vers les quatre heures et demie, ce jour-là, Denis Revaz sortait de chez lui. il boitait assez bas. C'était son genou qui n' "aillait pas", comme il disait ; et on lui disait : "Comment va votre genou ?" ; il répondait : "Il ne va pas fort." Ainsi il a longé non sans difficulté la petite rue qui traverse le village, et on l'a vu ensuite s'engager sur sa gauche dans un sentier qui menait à une vieille maison. A peine si on l'apercevait encore dans l'ombre, cette maison ; on distinguait pourtant que c'était une maison de pierre avec un toit couvert en grosses dalles d'ardoise, et il se confondait par sa couleur avec la nuit, mais est-ce bien la nuit ? ou est-ce le brouillard ? ou encore autre chose ? " /// " Ils étaient les sept, ils sont arrivés sur l'arête. La neige en avait été balayée par les vents. C'est qu'ici ils ne sont contenus par rien, qu'ils soufflent du nord ou du sud. Eux se sont trouvés faire face à ce dos où les blocs, posés à la suite l'un de l'autre, ont eu soudain une couleur et une forme ; ils sont devenus gris et on voit qu'ils sont gris ; ils ne sont pas seulement gris, mais veinés et on voit leurs veines, et tachés et on voit leurs taches. Dans les vides qu'ils laissaient entre eux, un peu de neige était restée, on voyait la neige ; ailleurs on voyait la terre et il y avait aussi un peu de gazon jauni. Du jaune, du blanc, du gris, du brun. C'est alors qu'Isabelle avait tendu le bras : " Regardez là-bas, qu'est-ce que j'ai dit ? " Ils s'étaient arrêtés. On la voyait maintenant, elle ; elle aussi, elle les voyait. On voyait la couleur de leurs visages, on voyait la couleur de leurs vêtements : les guêtres de Métrailler, les jambières de Tissières, la moustache de Julien Revaz ; et elle, ses joues joues brunes qui étaient dans leur milieu comme la pêche quand elle mûrit : " ça va être le beau temps. Souffle dans ton cornet, Jean, qu'ils nous entendent du village. Souffle comme à la caserne. Dis-leur : "Debout, les vieux, c'est le moment."... Jean a soufflé dans son cornet. Alors on a vu le village renaître peu à peu à lui-même. De là-haut, ils l'ont vu ressusciter à la lumière [...] " /// ARGUMENT : "Il faut dire que, pour eux, chaque année, vers le 25 octobre, le soleil était vu pour la dernière fois et il ne reparaissait pour eux que le 25 avril. Le 25 octobre, au-dessus de la montagne qui est au sud, il y avait encore une traînée de feu, une vague gerbe d'étincelles comme quand avec un bâton on attise un brasier ; et c'était fini pour six mois. " Mais le rebouteux Anzévui a prédit que, ce printemps-ci, le soleil ne reviendrait pas... Le village s'installe dans une psychose de fin du monde. A partir de cette situation, C.F. RAMUZ, le grand écrivain romand né il y a tout juste un siècle, a écrit un hymne vibrant à la vie, à la jeunesse et à la pérennité de la nature."
51. Paris : Notes d'un Vaudois
Charles-Ferdinand Ramuz
4.50★ (25)

1938 [récit/chronique], éditions Mermod (Lausanne) — rééd. éditions Plaisir de Lire (Lausanne) / éditions Gallimard (Paris). /// ARGUMENT : « Il faudrait d'abord savoir ce que c'est qu'un Vaudois, car très peu de gens le savent, en dehors des Vaudois eux-mêmes. » En automne 1900, Ramuz s'installe à Paris. Il a 22 ans. Il faudra attendre 1938 pour que l'auteur, sexagénaire, fasse paraître ce livre, aussi important que "Découverte du monde". Les années n'ont atténué ni la fraîcheur ni la précision des première impressions. Le tableau de Paris 1900 est riche de couleurs et de personnages. Mais ce qui importe davantage, c'est la réflexion conduite par Ramuz sur la nature de la grande ville, son rôle de capitale historique et culturelle. Paris l'amène à traiter des sujets les plus divers: les arts, les modes et le snobisme, la langue, bien sûr, et l'écriture, mais aussi le monde du travail, la société, l'identité des provinces. On sera frappé par la modernité du propos, par l'actualité des questions soulevées. "Paris, Notes d'un Vaudois" reste l'ouvrage essentiel pour aborder des thèmes sur lesquels le temps n'a pas de prise. C'est aussi une oeuvre dans laquelle l'écrivain situe le mieux sa personnalité de créateur. Charles-Ferdinand Ramuz est né à Lausanne le 24 septembre 1878. Il a fait des études de Lettres à l'université de Lausanne et y a obtenu sa licence en 1901. Il a exercé la profession de maître d'études au Collège d'Aubonne avant de comprendre rapidement qu'il n'était pas fait pour l'enseignement. Il s'est alors rendu à Paris et a étudié à la Sorbonne où il a préparé une thèse sur Maurice de Guérin. Dès 1914, il s'est installé parmi les vignes du Lavaux et n'en a plus bougé. Il a vécu dès lors une existence retirée mais s'est tout de même impliqué dans la vie littéraire. Dès 1924, après une « traversée du désert » l'éditeur Grasset publie ses livres et en négocie les traductions dans le monde entier, lui assurant ainsi le succès et la postérité. Charles-Ferdinand Ramuz est mort à Pully en 1947."
52. Découverte du monde
Charles-Ferdinand Ramuz
3.33★ (10)

1939 [essai autobiographique] /// ARGUMENT : "Dans "Découverte du monde", qu'il publie en 1939, Ramuz se retourne sur son passé le plus éloigné, pour y retrouver, en se fiant à sa seule mémoire, les traces de ce qu'il a été, et pour dévider, à partir de ces bribes obscures, le fil d'une vie dont il veut aussi montrer, a posteriori, la cohérence. Loin du registre de la confidence, à mille lieues de l'indiscrétion, cette autobiographie possède un centre de gravité qui la motive et qui la porte : elle est avant tout le récit de la découverte d'un destin d'écrivain. Cette vocation d'artiste, dont Ramuz a fait sa vérité, et autour de laquelle il a organisé sa vie, est pour lui une forme d'élection - la seule qui ait donné sens à sa vision du monde, et à son existence. Texte tardif, récapitulatif et souvent touchant, Découverte du monde propose ainsi une manière de bilan de l'itinéraire personnel que l'ancien «petit garçon» a choisi, et auquel il est resté fidèle. Charles-Ferdinand Ramuz est né à Lausanne le 24 septembre 1878. Il a fait des études de Lettres à l'université de Lausanne et y a obtenu sa licence en 1901. Il a exercé la profession de maître d'études au Collège d'Aubonne avant de comprendre rapidement qu'il n'était pas fait pour l'enseignement. Il s'est alors rendu à Paris et a étudié à la Sorbonne où il a préparé une thèse sur Maurice de Guérin. Il y a vécu entre 1904 et 1914 et y a écrit "Aline" (1905), "Jean-Luc persécuté" (1909) ou encore "Vie de Samuel Belet" (1913) Il a aussi écrit des nouvelles, des chroniques et des poèmes (dont le recueil "Le Petit Village" en 1903). Les thèmes spécifiques ramuziens, tels que la solitude de l'homme face à la nature ou la poésie des terres, des vignes et du lac y étaient déjà présents."
53. Lettre à Bernard Grasset
Charles-Ferdinand Ramuz
1941 [correspondance] : "Lettre à Bernard Grasset", Librairie numérique romande /// « Nous n’avons pas eu de 17ème siècle ; car alors nous étions Bernois, c’est-à-dire complètement muets, inexistants. Et c’est précisément pendant ce temps, que la langue « française » prenait sa forme définitive. J’aime votre 17ème siècle, j’aime le français, un certain « français » dont il a définitivement sanctionné l’usage, mais n’y puis voir pourtant (parce que je viens du dehors) qu’un phénomène tout occasionnel, tout contingent (qui aurait pu ne pas se produire), et qui précisément, pour ce qui est de nous et de moi, ne s’est pas produit. Précisément pour ces mêmes raisons, je me refuse de voir dans cette langue « classique » la langue unique, ayant servi, devant servir encore, en tant que langue codifiée une fois pour toutes, à tous ceux qui s’expriment en français. Car il y a eu, il y a encore des centaines de français ; qui, bien mieux, sont sans cesse en train de se défaire et de se refaire, c’est-à-dire vivent, c’est-à-dire deviennent tandis qu’elle (cette langue « littéraire ») tend de plus en plus à s’immobiliser et à mourir, imposant arbitrairement à ceux qui s’en servent, tout un ensemble de règles. J’aurais voulu montrer qu’elles étaient l’émanation d’une société qui n’était plus la nôtre, qu’elle a exprimé vraiment une hiérarchie humaine, une hiérarchie naturellement acceptée dans les idées et dans les mœurs. Et admettons encore que ce français dit « classique » soit valable même aujourd’hui pour un certain nombre de Français, il n’en reste pas moins que je ne vois pas très bien comment il serait valable pour moi : il nous faut l’apprendre. Le pays qui est le mien parle « son » français de plein droit parce que c’est sa langue maternelle, qu’il n’a pas besoin de l’apprendre, qu’il le tire d’une chair vivante. Et mon pays a eu deux langues : une qu’il lui fallait apprendre, l’autre dont il se servait par droit de naissance. Il a longtemps parlé son patois (son patois franco-provençal) ; puis, sous l’influence de l’école, comme beaucoup d’autres provinces, il l’a peu à peu abandonné, mais sans perdre son accent, de sorte qu’il parle avec l’accent vaudois un certain français redevenu très authentiquement vaudois quand même ; plein de tournures, plein de mots à lui, et bien entendu par rapport au français de l’école « plein de fautes ». Je me rappelle l’inquiétude qui s’était emparée de moi en voyant combien ce fameux « bon français » était incapable de nous exprimer et de m’exprimer, parce qu’il y avait traduction et traduction mal réussie. Je me suis mis à essayer d’écrire comme ils (les paysans, les gens du peuple) parlaient, parce qu’ils parlaient bien, parlant eux-mêmes sans modèles ; à tâcher de les exprimer comme eux-mêmes s’étaient exprimés, de les exprimer par des mots comme ils s’étaient exprimés par des gestes, par des mots qui fussent encore des gestes, leurs gestes. Cette langue-suite-de-gestes, où la logique cède le pas au rythme même des images, n’est pas très loin de ce que cherche à réaliser avec ses moyens à lui le cinéma. Ces critiques qu’on me fait sont peut-être bien, tout au fond, plus sociales que littéraires ou esthétiques : on fait valoir en somme que j’appartiens à une « classe », que je suis devenu un bourgeois, que je suis devenu un « lettré », que je n’ai pas le droit de me déclasser volontairement. Ce qui suppose qu’un intellectuel est nécessairement supérieur à un non-intellectuel en ce qu’il a appris plus de choses. »
54. Lettre à Henry-Louis Mermod
Charles-Ferdinand Ramuz
1941 [correspondance] : "Lettre à Henry-Louis Mermod", publication posthume, auto-édition, 43 pages, 2019. /// ARGUMENT : "Ramuz envoie une lettre à son éditeur suisse Henry-Louis Mermod. « Publier suppose public », lui écrit-il. L’écrivain, comme l’homme, se sent poussé à justifier ses choix face aux critiques. Comme il ne veut pas écrire pour un public instruit, ces gens du peuple dont il reprend le langage le lisent-ils ? Heureusement non, dit-il… Car ils échappent au savoir « scolaire » qui ne forme pas, mais déforme. Une certaine école ne reconnaît pas la différence, les dons plus subtils de ceux qui ne sont pas scolaires. Pourtant, ils ont d’autres valeurs : de l’expérience, un métier. Ils utilisent parfois des de sens très développés non reconnus : « l’école se méfie extrêmement des sens comme susceptibles justement de fournir à l’individu des renseignements qu’elle ne peut pas contrôler. … Elle déteste le sens du mystère parce qu’elle distingue qu’il est la négation vivante de son enseignement ou de sa science. Au nom de sa grammaire, l’école déteste l’informulé ; au nom de sa syntaxe, le balbutiement. Or, qu’est-ce que fait l’homme, dans le fond de sa nature d’homme et en présence du mystère, si ce n’est de balbutier. » Une certaine école, veut fabriquer des petits bourgeois avec les paysans, les ouvriers « et par mépris de leur nature et de la nature des choses, avec une conception tout abstraite du vrai, du bien, du beau, de ce qui doit se faire et de ce qui ne doit pas se faire au nom des signes, contre l’image » : l’école confond s’exprimer et s’expliquer. Alors ses personnages comme les gens du peuple, il les aime d’autant plus qu’ils échappent à cette nouvelle socialité « par la force de leur nature. » Alors pourquoi et pour qui écrit-il ? Par besoin de communiquer : « L’auteur pose des questions à la terre et au ciel, et répond d’une certaine manière par là même à ceux qui posent des questions de la même espèce à ce même inconnu de la terre et du ciel. Il répond en faisant de ces questions des images ; il répond en incarnant ces questions, car le phénomène de l’art est un phénomène d’incarnation (ce que l’école ne comprend pas). » Comment mieux définir le rôle de l’écrivain ? /// Charles Ferdinand Ramuz (1878-1947) est né à Lausanne, dans une famille de commerçants. Après une licence ès lettres classiques à l'Université de Lausanne, il enseigne au collège d'Aubonne (Vaud), puis est précepteur à Weimar (Allemagne). En 1903, il part pour Paris, sous prétexte de rédiger une thèse sur Maurice de Guérin. Il séjourne à Paris jusqu'en 1914. Ramuz publie ses premiers textes en 1903 : « Le Petit village », un recueil de poèmes. L'année suivante, il est l'un des fondateurs de La Voile latine avec les écrivains C.A. Cingria et Gonzague de Reynolds et le poète Henry Spiess, qui veulent défendre la latinité contre la germanisation larvée de la langue française. Dans ses premiers textes, écrits lors de sa période parisienne ("Aline" (1905), "Jean-Luc persécuté" (1909), "Vie de Samuel Belet" (1913), "Aimé Pache, peintre vaudois" (1911)), Ramuz développe ses grands thèmes : solitude de l'homme face à la nature, poésie de la terre. Les romans de cette période sont centrés sur un personnage. En 1914, Ramuz retourne en Suisse où il mènera une vie relativement retirée. Ce retour coïncide avec une évolution dans son écriture: abandon de la narration chronologique et linéaire; multiplication des points de vue ; substitution, au protagoniste traditionnel, d'une collectivité qui s'exprime à travers le "on" anonyme. L'écriture cherche alors à exprimer, dans sa nudité, le drame de collectivités villageoises combattant les forces du mal, les forces qui travaillent ces communautés, guerre, misère, peurs, menaces cosmiques, mais également le plaisir de l'activité créatrice. "Le règne de l'esprit malin" (1917), "La guérison des maladies" (1917), "Les signes parmi nous" (1919), "Présence de la mort" (1922), "La séparation des races" (1922) appartiennent au premier groupe ; "Salutation paysanne" (1919), "Terre du ciel" (1921), "Passage du poète" (1923), au deuxième. La fin des années 20 et le début des années 30 voient Ramuz atteindre la pleine maturité avec "La beauté sur la terre" (1927), "Adam et Ève" (1932), "Derborence" (1934), "Le garçon savoyard" (1936). Les personnages y incarnent les grands projets mythiques de l'homme. Le courant lyrique et poétique y est au service d'une vision tragique de l'homme pour qui seule la mort est au bout de la quête. Charles-Ferdinand Ramuz est mort le 23 mai 1947, à Pully, près de Lausanne."
55. La Guerre aux papiers
Charles-Ferdinand Ramuz
3.92★ (18)

1942 [roman] /// « Brochât venait justement de sortir, ce jour-là, de chez Fanchette Centlivres ; et il rentrait chez lui par le chemin du bas (l'autre traverse le village). Il n'était pas dans de très bonnes dispositions : il marchait lentement les mains dans les poches ; on doit dire qu'il faisait triste, ce jour-là, qui était un jour de la fin de l'hiver. Borchat avait fini par s'asseoir au bord du chemin sur un tronc de noyer récemment abattu : c'est que Borchat n'était pas pressé (et Borchat n'est jamais pressé) ; et puis il retournait sans fin ses mêmes vieilles idées dans sa tête, continuant à la hocher : Borchat, Daniel-Jean-Etienne, ancien soldat, 42 ans. " Elle n'a plus de dents, mais moi non plus. " /// ARGUMENT : "En 1802 dans le sillage de la Révolution française, le pays de Vaud connut l'insurrection des « Bourla-Papey », ou brûle-papiers. En détruisant physiquement les titres de propriété, cette jacquerie recourut au moyen le plus désespéré pour tenter d'abolir le régime féodal. Un roman dense et poignant, enfin réédité en poche."
56. Un coin de Savoie
Charles-Ferdinand Ramuz
5.00★ (1)

1909-1942 [chroniques] "Un coin de Savoie — et autres textes sur la Savoie", parution posthume, éditions Séquences (Rezé), 109 pages, 1989. /// ARGUMENT : « Dites que je suis né dans le pays de Vaud, qui est un vieux pays savoyard, c'est à dire de langue d'oc, c'est à dire français et des bords du Rhône. » Les cinq textes ici rassemblés, qui s' échelonnent de 1909 à 1942, disent l'attachement charnel de l'écrivain à la Savoie. Légères ou graves , nourries d'une poignante compassion au moment des deux guerres, ces pages débordant le cadre provincial, nous plongent au cœur même de l'espace ramuzien."
57. Vues sur le Valais
Charles-Ferdinand Ramuz
4.00★ (3)

1943 : [chronique], ouvrage illustré de photographies, éditions Urs Graf (Bâle et Olten), coll. "L'héritage populaire de la Suisse" — réédité, avec une préface de Maurice Zermatten, aux éditions Les Amis de Ramuz (Loches), coll. "Bibliothèque des Amis de Ramuz", 94 pages, 1994. /// ARGUMENT : "Vues sur le Valais" ne figure pas dans les Oeuvres complètes. Ramuz dépasse l'oeuvre de commande devant figurer dans une "série d'éludes illustrées ayant pour objet la vie populaire dans ses rapports avec le milieu naturel". Il nous offre, vers la fin de sa vie — nous sommes en 1943 et Ramuz mourra en 1947 — ses vues sur le Valais, découvert avec ferveur en 1906. Vues, à prendre dans tous les sens du terme : vues... des yeux, certes, mais surtout vues de l'esprit et vues du cœur. Le Valais fut la terre d'élection, celle des "lieux aimés" et source d'inspiration d'une grande partie de l'oeuvre, et souvent de la meilleure, de Jean-Luc persécuté à Si le soleil ne revenait pas, en passant par "La Grande peur dans la montagne", "Derborence...". [Jean-Louis PIERRE, Président des Amis de Ramuz]
58. Noces et autres histoires russes
Charles-Ferdinand Ramuz
3.00★ (3)

1943 [adaptation de poésies populaires russes] "Noces et autres histoires russes" d'Igor STRAWINSKY et C.F. RAMUZ, avec des illustrations de Théodore Strawinsky, éditions Ides et Calendes (Neuchâtel). /// ARGUMENT : "L'histoire de cet objet d'exception se déroule en trois actes. Acte I : entre 1916 et 1919, l'écrivain Charles Ferdinand Ramuz adapte en langue française huit œuvres d'Igor Strawinsky inspirées par des poésies populaires russes, en étroite collaboration avec le compositeur lors de son séjour en Suisse. Destinées au chant, ces adaptations sont éditées dans les partitions de musique, sous le texte original russe. Acte II : les adaptations de Ramuz sont rassemblées en 1943, à l'instigation de Richard Heyd, qui reprenait alors à Neuchâtel la direction des jeunes Editions Ides et Calendes. Un beau livre en résulte, dont le charme doit beaucoup à ses illustrations. En effet, si les textes se trouvent séparés de la musique qui en a dicté la forme, ils sont en revanche accompagnés en belle page par des dessins de Théodore Strawinsky, le fils du compositeur, aquarellés individuellement par l'artiste dans chaque exemplaire du livre. Acte III : tous les documents originaux ayant servi à l'établissement de l'ouvrage de 1943 (manuscrit de l'écrivain, études préparatoires et dessins aquarellés du peintre) sont reliés par la suite avec une partition autographe d'Igor Strawinsky de 1949 et la première version, inédite, de la préface de Ramuz. Dans cet exemplaire unique, les manuscrits de Ramuz apparaissent dans l'ordre où ils ont été publiés en 1943, les dessins de Théodore Strawinsky étant rassemblés à la fin du recueil. C'est cet objet exceptionnel que l'on découvre ici."
59. Pastorale : nouvelles et morceaux, 1905-1946
Charles-Ferdinand Ramuz
1905-1946 [recueil de nouvelles] : "Pastorale. Nouvelles et morceaux, 1905-1946", éditions Sang de la terre (Paris), préface de Jean-Louis Pierre, 1987.
60. La Folle en costume de folie - Pastorale - Amour
Charles-Ferdinand Ramuz
4.00★ (5)

1945-1947 [recueil de nouvelles] "La Folle en costume de folie" ; "Pastorale" ; "Amour", éditions Zoé (Chêne-Bourg), collection "Zoé Poche", 44 pages, 2001. /// ARGUMENT : "Les trois nouvelles rassemblées ici ont été écrites par Ramuz durant les dernières années de sa vie (1878-1947). Elles dépassent largement le cadre régionaliste pour s'ouvrir aux grandes forces qui régissent la vie humaine. Qu'il s'agisse de la folle, une douce dérangée, qui attend le retour de son fiancé depuis des années, des adolescents encore inconscients de leur désir mutuel ou du garçon de ferme amoureux de la fille de son patron, ces histoires simples nous donnent à sentir le non-dit et la violence des sentiments."
61. Le Lac aux demoiselles et autres nouvelles
Charles-Ferdinand Ramuz
3.83★ (5)

1945-1947 [recueil de nouvelles] : "le Lac aux demoiselles et autres nouvelles" — édition posthume Zoé, coll. "Zoé Poche" (Chêne-Bourg), 256 pages, 2021 /// ARGUMENT : "Ces nouvelles tardives, écrites entre 1943 et 1947, largement méconnues, dévoilent la modernité d’un écrivain qui a atteint une maîtrise virtuose de la narration. Elles déploient des récits visuels où la solitude de l’homme, le désir et la mort prédominent dans une esthétique du fragment. Ramuz s’y montre, plus encore que dans le reste de son œuvre, attentif aux personnages en marge, à la violence et à la folie sous toutes ses formes." /// « Le grand événement de cette fin de juillet fut qu’on avait cambriolé, pendant la nuit, la boutique des époux Menu, dans la Grand-Rue. De bonne heure, le juge d’instruction était arrivé avec la police et son secrétaire, pour procéder aux constatations. Il avait été facile de se rendre compte que le ou les cambrioleurs devaient connaître parfaitement l’état des lieux, parce qu’ils avaient passé par derrière. Il y a là plusieurs petites cours qui communiquent, et on arrive ainsi sans peine à une porte de bois plein qui n’était jamais que poussée, et ouvrait elle-même sur une porte vitrée, laquelle donnait accès dans l’arrière-boutique. Les voleurs étaient exactement renseignés. Ils n’avaient eu qu’à découper au diamant le carreau placé à côté de la poignée et, passant la main par le trou, tourner la clé qui était restée dans la serrure, à l’intérieur. Il y avait de la négligence, il faut bien le dire, dans le cas des époux Menu, mais la mère Menu disait : « Qui est-ce qui se serait attendu à une chose pareille ? » Quoi qu’il en soit, une fois qu’ils avaient été dans l’arrière-boutique, les voleurs avaient pu opérer tout à leur aise, ayant sans doute une lampe de poche, ce qui leur avait permis de se glisser sans faire de bruit et sans rien déranger entre les tonneaux, les bidons vides, les sacs superposés, les caisses empilées, jusqu’à la boutique elle-même où une porte volante donnait accès. C’était une boutique où on vendait de tout, une de ces boutiques de village, où il y a sur des rayons des boîtes de thon et de sardines à côté d’écheveaux de laine dont la couleur se montre par une déchirure du papier ; une de ces boutiques où on peut acheter aussi bien pour deux sous de caramels qu’une paire de pantoufles chaudes, aussi bien du pétrole ou du sucre que des aiguilles ou des boutons. Dans le bout du comptoir, une caisse enregistreuse toute neuve était posée au-dessus d’un tiroir-caisse de sapin. Rien n’était plus facile que de le forcer, ce qu’on avait fait. On n’avait eu qu’à introduire l’extrémité d’un tournevis entre sa partie supérieure et le bâti ; il avait suffi alors d’une simple pesée pour faire sauter la planchette mince qui le fermait sur le devant. – Et combien y avait-il dedans, savez-vous ? Le père Menu : – Au moins six cents francs. La mère Menu : – C’était l’argent de la semaine... Ah ! j’y disais bien, à mon mari, qu’il serait peut-être plus prudent de monter chaque soir la recette de la journée ; mais que voulez-vous ? depuis trente ans... Depuis trente-sept, trente-huit ans qu’on est là et il ne nous était jamais rien arrivé. Mon Dieu, dans quels temps vivons-nous ? »
62. Le village brûlé : Derniers récits
Charles-Ferdinand Ramuz
4.50★ (4)

1946-1947 [récits et fragments] : "Le Village brûlé. Derniers récits", parution posthume, éditions Plaisir de Lire (Lausanne) / La Guilde du livre (Lausanne), 1950/1951. /// ARGUMENT : ""Essai", tel est le nom inscrit par Ramuz lui-même à la fin de la plupart des récits qu'on va lire. Essai pour repartir, précise-t-il même en datant l'un d'entre eux. Trois mots lourds de sens et d'une résonance infinie, car ils cernent à la fois et nous livrent le secret de la réponse faite par le poète, dans les années extrêmes de sa vie, aux brusques assauts de la souffrance, aux appels toujours plus pressants, toujours plus porche, de sa mort. Cette réponse : un sursaut de tout l'être, un élan qui le jette devant le feuillet nu, seul lieu où puisse naître encore et prendre forme ce qui va nier une fois de plus le néant : sa poésie. Ces récits apparaissent dans le texte original manuscrit sous une forme si voisine de l'achèvement véritable que Madame C.F. Ramuz et Madame Oliveri-Ramuz n'ont pas hésité à nous les confier. Qui d'entre nous pourrait demeurer indifférent devant un tel don ? Et qui d'entre nous s'étonner ou s'attrister en voyant que la Mort demeure presque toujours au centre de ces pages — pour peu qu'il ramène sa pensée vers la chambre basse aux fenêtres grillagées où un grand poète, et l'un de plus humains de tous les hommes "essayait de repartir", faisant de chaque défaite successive une victoire." [G. Rd.]
63. Romans, tome 1
Charles-Ferdinand Ramuz
5.00★ (20)

2005 [Intégrale des 22 romans, t. 1], éditions Gallimard (Paris), collection "La Pléiade", édition en deux volumes, tome 1, 1.753 pages. /// CONTENU : Cette édition en deux volumes comprend, pour ce premier tome, les dix romans parus de 1905 à 1921 : "Aline" (1905), "Les circonstances de la vie" (1907), "Jean-Luc persécuté" (1908), "Aimé Pache, peintre vaudois" (1911), "Vie de Samuel Belet" (1913), "La guerre dans le Haut-Pays" (1915), "Le règne de l'esprit malin" (1917), "La guérison des maladies" (1917), "Les signes parmi nous" (1919), "Terre du ciel" (1921).
64. Romans, tome 2
Charles-Ferdinand Ramuz
4.75★ (17)

2005 [Intégrale des 22 romans, t. 2], éditions Gallimard (Paris), collection "La Pléiade", édition en deux volumes, tome 2, 1.795 pages. /// CONTENU : Cette édition en deux volumes comprend, pour le second tome, les douze romans parus de 1922 à 1942 : "Présence de la mort" (1922), "La séparation des races" (1922), "Passage du poète" (1923), "L'amour du monde" (1925), "La grande peur dans la montagne" (1925/1926), "La beauté sur la terre" (1927), "Farinet ou la fausse monnaie" (1932), "Adam et Eve" (1932), "Derborence" (1934), "Le garçon savoyard" (1936), "Si le soleil ne revenait pas"(1937), "La guerre aux papiers" (1942).
65. Romans - Intégrale
Charles-Ferdinand Ramuz
5.00★ (20)

2005 [Intégrale des 22 romans], Gallimard (Paris), collection "La Pléiade", édition en deux volumes de 1.753 et 1.795 pages /// « Faire exprimer des choses par des gens qui ne savent pas les exprimer. » /// « Les suggérer alors par des images, le ton, la forme. Faire que le contenu déborde le contenant. » /// « Même dans les pires moments, je n'ai jamais cessé d'aimer passionnément la vie. » /// « Je cherche à me prouver que j'existe. » ["Journal", "L'heure du soir", fin février-début mars 1947, pages XXVII, Chronologie établie par Alain Rochat, volume 2]. /// CONTENU : Cette édition en deux volumes comprend les vingt-deux romans parus de 1905 à 1942 : "Aline" (1905), "Les circonstances de la vie" (1907), "Jean-Luc persécuté" (1908), "Aimé Pache, peintre vaudois" (1911), "Vie de Samuel Belet" (1913), "La guerre dans le Haut-Pays" (1915), "Le règne de l'esprit malin" (1917), "La guérison des maladies" (1917), "Les signes parmi nous" (1919), "Terre du ciel" (1921) [soit, au total,10 titres pour le tome I] ; "Présence de la mort" (1922), "La séparation des races" (1922), "Passage du poète"(1923, qui sera remanié en 1929 sous le titre "Fête des Vignerons"), "L'amour du monde" (1925), "La grande peur dans la montagne" (1925/1926), "La beauté sur la terre" (1927), "Farinet ou la fausse monnaie" (1932), "Adam et Eve" (1932), "Derborence" (1934), "Le garçon savoyard" (1936), "Si le soleil ne revenait pas" (1937), "La guerre aux papiers" (1942) [soit, au total, 12 titres pour le tome II] /// ARGUMENT : " Rééditions : Ses romans paraissent en Pléiade et son « Journal » chez Slatkine. Michel Audétat dit son admiration pour cet écrivain trop peu ou trop mal lu, qui revient en pleine lumière. Trop mal connu, trop largement ignoré des jeunes lecteurs et trop souvent réduit par les lettres françaises à la caricature d'un écrivain folklorique, C. F. Ramuz avait bien besoin d'être retrouvé dans sa vérité profonde. Un double événement le permet aujourd'hui. D'abord, la publication de ses 22 romans dans la Bibliothèque de la Pléiade. Ensuite, la première édition intégrale du Journal que Ramuz a tenu de 1895 à 1947. A cette occasion, voici cinq bonnes raisons de redécouvrir cet écrivain d'une modernité insoupçonnée. 1. Un grand romancier de la peur : Ramuz nous saisit, nous inquiète, nous terrifie parfois. Pour faire couler les sueurs froides, "La Grande Peur dans la Montagne" (1926) vaut bien "Le Retour des Morts-Vivants". Ce pâturage hanté. Cette maladie qui rôde. Ces corneilles qui tournent dans le ciel comme de mauvais présages. Et cette nuit, dans un silence de fin du monde, où l'on entend de mystérieux bruits de pas sur le toit du chalet... Lecteur, retiens ton souffle ! On ne lit pas impunément ce roman qui laisse une empreinte profonde. Il rejoint la grande peur qui n'est pas seulement «dans la montagne», mais aussi en nous. Peur de la mort ? Du monde menaçant ? De la Loi qu'on transgresse ? C'est tout cela, bien sûr, mais c'est tout aussi bien la peur nue, sans attribut, chimiquement pure, qui se confond avec le secret de notre être. On n'existe pas sans faire commerce avec elle: la peur qui loge en nous n'est pas moins fondamentale que nos pulsions sexuelles. Il y a dans l'œuvre de Ramuz une longue suite de romans tendus par l'effroi. "Les Signes parmi nous" (1919) qui est un récit d'Apocalypse. "Présence de la Mort" (1922) où la canicule s'abat sur le monde, dessèche les herbes, brûle les vignes de Lavaux, terrorise les populations lausannoises [...] [Source : " RAMUZ : CINQ RAISONS DE L'AIMER PASSIONNEMENT, "L'Hebdo", 13 octobre 2005]
66. Oeuvres Completes - Journal. Vol 1 : 1895-1903
Charles-Ferdinand Ramuz
5.00★ (1)

"Journal", Volume 1 : "1895-1903", "Oeuvres Complètes", éditions Mermod (Lausanne)
67. Oeuvres Complètes - Journal. Vol 2 : 1904-1920
Charles-Ferdinand Ramuz
5.00★ (1)

"Journal", Volume 2 : "1904-1920", "Oeuvres Complètes", éditions Mermod (Lausanne)
68. Oeuvres Complètes - Journal. Vol 3 : 1921-1947
Charles-Ferdinand Ramuz
5.00★ (2)

"Journal", Volume 3 : "1921-1947", "Oeuvres Complètes", éditions Mermod (Lausanne).
69. Poésies
Charles-Ferdinand Ramuz
4.67★ (5)

[poésie / anthologie] : "Poésies", éditions de l'Aire, coll. "L'Aire bleue" (Vevey), 124 pages, 2019. /// ARGUMENT : « Je suis né en 1878, mais ne le dites pas. Je suis né en Suisse, mais ne le dites pas. Dites que je suis né dans le Pays-de-Vaud, qui est un vieux pays Savoyard, c'est à dire de langue d'oc, c'est-à-dire français et des Bords du Rhône, non loin de sa source. Je suis licencié-ès-lettres classiques, ne le dites pas. Dites que je me suis appliqué à ne pas être licencié-ès-lettres classiques, ce que je ne suis pas au fond, mais bien un petit-fils de vignerons et de paysans que j'aurais voulu exprimer. Mais exprimer, c'est agrandir. Mon vrai besoin, c'est d'agrandir... Je suis venu à Paris tout jeune c'est à Paris que je me suis connu et à cause de Paris. J'ai passé pendant douze ans, chaque année, plusieurs mois au moins à Paris et les voyages de Paris chez moi et de chez moi à Paris ont été tous mes voyages ! (Outre celui que j'ai fait par religion jusqu'à la mer, ma mer, descendant le Rhône.) » [C.F. Ramuz : lettre à Henry Poulaille, mai 1924].
70. Histoires
Charles-Ferdinand Ramuz
3.50★ (4)

[nouvelles et écrits fragmentaires] "Histoires", éditions Ides et Calendes, coll. "Bibliothèque des Arts", 100 pages, 2000. /// « Elle avait trop aimé sa fille, c'est de quoi elle fut punie. Voilà trois fois déjà qu'elle l'appelait, et Julie ne répondait pas. Et elle avait alors essayé d'ouvrir la porte: la porte était fermée à clé. Elle était venue s'asseoir sur le banc du jardin, elle était bien triste. Pourtant il faisait un grand ciel tout bleu et un grand beau soleil d'été qui brillait en vives couleurs aux pétales des passeroses, plantées en bordure tout le long du mur; on entendait partout bourdonner les abeilles. Rien qu'une petite maison, au toit bas et dedans deux chambres, et autour un petit jardin. Puis là-bas une route blanche, là-bas aussi une colline, et le village était aux pieds. » /// ARGUMENT : "L'écriture de Ramuz refuse les catégories et si l'on devait absolument essayer de définir son œuvre le syntagme de prose poétique serait le plus approprié. Son écriture par une simplicité qui flirte avec la rusticité s'impose dans ces trois histoires comme un moyen d'appréhender l'essence de la vie montagnarde en Suisse."
71. Patience de Ramuz
Albert Béguin
4.00★ (1)

1950 [essai] : "Patience de Ramuz" d'Albert BEGUIN, éditions "À la Baconnière" (Neuchâtel) — rééd. aux éditions Isolato, 63 pages, 2008. /// ARGUMENT : "Essai sur l'oeuvre de Charles-Ferdinand Ramuz mêlant des considérations sur sa vie et sur son langage poétique montrant comment il a cherché par diverses voies à trouver l'issue qui permet de communiquer à l'intemporel."
72. C.F. Ramuz : Qui êtes-vous ?
Marianne Ghirelli
4.00★ (3)

1988 [essai] : "C.F. Ramuz. Qui êtes-vous ?" de Marianne GHIRELLI [essai], éditions La manufacture, 318 pages. /// ARGUMENT : "Charles Ferdinand Ramuz est né le 24 septembre 1878 à Lausanne, d'une famille d'ascendance paysanne. De 1904 à 1914, il vit à Paris, où il fonde la revue "La Voile latine", éditée à Genève, et écrit un nombre impressionnant d'articles et de nouvelles pour les journaux suisses. Son premier roman, "Aline", paru en 1905, annonce par son style concis, resserré, très plastique et tout en notations du visible, l'aboutissement de ses recherches stylistiques, la vision de l'objet traduisant les blessures et les mouvements intérieurs. Ramuz n'a jamais cessé d'affirmer que ses maîtres étaient les peintres, notamment Cézanne. En 1907, un voyage en Valais, avec un séjour prolongé à Lens, lui révèle la grandeur ancestrale du Vieux Pays, le caractère âpre, passionné, voire sauvage de ses habitants. De nombreuses nouvelles et plusieurs romans comme "Jean-Luc persécuté" [1908], "Farinet ou La Fausse Monnaie" [1932], "Derborence" [1934] ou "Si le soleil ne revenait pas" [1937], une de ses dernières œuvres, en témoigneront. Ramuz se renouvelle mais, angoissé, ne cesse de douter de soi d'une œuvre à l'autre. Il vit la guerre d'abord comme un grand mouvement de fraternité ; vite désillusionné, son œuvre se ressentira de cette expérience. L'intérêt ne sera plus centré sur un personnage comme dans "Aimé Pache, peintre vaudois" [1911] ou "Vie de Samuel Belet" [1913], mais sur le groupe ou la communauté. Pendant la guerre, il connaît aussi l'amitié de Stravinski dont l'influence sera libératrice pour sa création. De leur collaboration devait naître la célèbre "Histoire du soldat". C'est pendant ces années que Ramuz prend une part active au destin des "Cahiers vaudois", où paraîtront un certain nombre de ses essais. En Suisse, l'ami Henry-Louis Mermod commence à publier l'Intégrale de son œuvre. Ramuz peut s'exprimer dans les "Six Cahiers" et dans l'hebdomadaire "Aujourd'hui". Le Grand Prix romand, conçu à son intention, lui permet d'acquérir « La Muette », une vieille maison vigneronne. En 1936, le Grand Prix de la fondation Schiller suisse vient couronner l'œuvre du grand romancier et essayiste."
73. Ramuz vu par ses amis
P.O. Walzer
1990 [souvenirs] : "Ramuz vu par ses amis", parution posthume, éditions L'Âge d'Homme (Lausanne), coll. "Poche Suisse", 288 pages. /// ARGUMENT : "Ce petit livre d'évocations et de souvenirs rassemble la Suisse romande au zénith de son expression littéraire. On y trouve pour parler et célébrer le plus grand d'entre eux : C.F. Ramuz, les noms d'Adrien Bovy, C.-A. Cingria, Edmond Gilliard, Paul Budry, Ernest Ansermet, René Auberjonois, Albert Muret, Elie Gagnebin, Henri-Louis Mermod, Gustave Roud. Texte et documents réunis par P.O. Walzer et Gérard Buchet.
74. Ecrits sur Ramuz
Jacques Chessex
2005 [essai] : "Ecrits sur Ramuz" de Jacques CHESSEX, éditions de l'Aire (Vevey), coll. "L'Aire bleue", 104 Pages, 2005. /// ARGUMENT : "Je ne retouche aucun de ces textes: ils ont été écrits dans le saisissement, et la nécessité de l’émotion. Je lis Ramuz depuis l’enfance, il n’a pas cessé d’être l’exemple d’un très grand style, avec le même effet sur moi que Flaubert, Céline et Joyce. Lire Ramuz, c’est entrer dans une écriture plastique et mystique. C’est ce que j’entends, quand je dis cet auteur élémentaire. Pour le reste, je ne contourne ni n’épuise le sujet, — comme tous les sujets vrais, il résiste."
75. L'homme perdu dans le brouillard (BD)
Charles-Ferdinand Ramuz
3.44★ (18)

2011 [adaptation de nouvelles en bandes dessinées] : "L'homme perdu dans le brouillard", "La grande Alice", "Le tout-vieux", "La paix du ciel" : quatre nouvelles de C.F. RAMUZ adaptées en bandes dessinées par Mathieu BERTHOD, éditions Les Impressions Nouvelles, 78 pages, 2011. /// ARGUMENT : "Bloqué depuis quelques jours dans le chalet familial, lors d’un hiver particulièrement rigoureux, Matthieu Berthod est à la recherche de nouvelles lectures dans la bibliothèque du feu grand-père ; il y a là une partie de l’intégrale des œuvres de C.F. Ramuz dans une reliure en moleskine jaune pâle, qui attend depuis des lustres d’être retirée de son rayon. Il choisit le volume « Nouvelles et Morceaux » et le voilà plongé avec émerveillement dans une lecture ininterrompue. De ce recueil d’histoires courtes, proches du conte, traitant de thèmes universels, au style inimitable et extrêmement visuel, naît petit à petit un projet de mise en image. Matthieu Berthod choisit d’adapter quatre nouvelles. Quatre nouvelles inscrites dans un microcosme montagnard et campagnard suisse romand, dans un monde rural vivant en quasi-autarcie, disparu un siècle plus tôt, mais qu’il connaît bien pour avoir entendu les vieux de sa région le raconter en long et en large. Ici, un vieillard se souvient et raconte : jeune adulte, il se perd en montagne, et, sentant sa fin imminente, ne doit son salut qu’à l’amour qu’il porte à ses proches (« L’homme perdu dans le brouillard »). Là, la parole est donnée à « La grande Alice », la « putain de village » (ainsi Ramuz la nomme-t-il dans une de ses lettres) se gardant bien de juger selon les normes de la morale courante. « Le tout-vieux » emprunte au fantastique et relate les dernières heures d’un paysan qui se croit possédé. Enfin, on passe le seuil du merveilleux dans la rêverie du paradis possible que dessine « La paix du ciel ». Les émotions qui traversent ces récits, les points de vue qu’ils développent, les atmosphères qu’ils dégagent tendent au lecteur du début du XXIe siècle un miroir inattendu, dans lequel il se reconnaît. Cette sensation de ressemblance a guidé le travail de Matthieu Berthod. Il a cherché à la capter par le dessin, se réappropriant ces textes, faisant fi des codes classiques de la bande dessinée en se mettant entièrement au service de la littérature."
76. Identités de C. F. Ramuz
Jean-Louis Pierre
5.00★ (3)

2011 [essai / Thèse de Doctorat en lettres modernes] : "Identités de C.F. Ramuz" de Jean-Louis PIERRE, éd. Artois Presses Université (Arras), 344 pages. /// ARGUMENT : "Identités de C.F. Ramuz" trace le cheminement d'une vocation ressentie, au départ, comme étrange, et même coupable. Au prix de ruptures intimes, non sans contradictions, l'œuvre, profondément nourrie d'un enracinement vaudois revendiqué et sublimé, va s'imposer. L'étude des grands thèmes et schèmes permet de faire entendre une des voix les plus singulières de la première moitié du XXe siècle. On aimerait que, grâce à cet ouvrage, Ramuz apparût enfin "debout" dans la plénitude d'une oeuvre qui ne soit plus réduite à diverses facettes retenues tour à tour au fil des décennies ou selon l'espace de réception : Ramuz, le chantre de la terre vaudoise, ou l'écrivain de la montagne, ou encore le styliste novateur... Maître de la forme brève, comme du récit poétique et allégorique, moraliste et essayiste lucide, voire visionnaire, l'auteur de "La Beauté sur la terre" ne dissocie pas l'art de la vie. " Dire et faire, c'est la même chose ", note-t-il dans "Besoin de grandeur". Ecrire est un acte transgressif et politique qui engage tout l'être dans son rapport au temps, au siècle et au monde."
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