"Il repensa à ce qu'elle avait dit l'automne d'avant,qu'elle commençait à croire que les gens pouvaient changer".
Ce principe, mis en avant dans le roman
le monde à l'endroit, par l'Américain
Ron Rash (nouvelliste, romancier, lauréat de grands prix littéraires) se retrouve dans les trois personnages principaux, à l'envers (anticonformistes), dans ce récit.
Travis Shelton, le jeune délinquant (qui parle ci dessus) "un sacré buveur", un "craneur", qui, se croyant malin, vole par deux fois les plans de marijuana d'une culture illégale, les revend à Leonard Shiler, ex prof devenu dealer, puis se fait sectionner le tendon d'Achille par les brutaux et dangereux propriétaires du champ, en guise d'avertissement.
Leonard, le prof désabusé,mis au ban de la société,qui se fout de pousser les jeunes et moins jeunes à la drogue en leur revendant cachets et marijuana.
Dena, la paumée autodestructrice, qui loge dans le mobil-home de Leonard.
Le monde à l'endroit évoque les raisons qui font que certains êtres se perdent, un jour, sur leur propre chemin de vie (non reconnaissance de leur valeur,humiliation,injustice,dénonciation,abandon..) puis leur laisse une deuxième chance pour se racheter (leur empathie,leur intelligence,leur besoin de béquilles, leur rencontre avec l'amour ou l'amitié..).
J'ai trouvé ce roman noir, très noir car les Toomey (père et fils), à la serpette chirurgicale et aux sales coups faciles sont ignobles, car l'inconscience de Travis, le cynisme de Leonard et l'avilissement de Dena m'ont énervée, car le passé sanguinaire (du comté "Bloody Madison" lors de la guerre de Secession) sur lequel le présent revient sans cesse,m'a révoltée...puis soudain j'ai vu, à travers mots, s'éclairer une lumière...j'ai entendu le Messie de Haendel qu'écoute Leonard, avec ferveur, une musique qui dit "Les passages tortueux deviendront droits" car il y a de la beauté en ce monde...et j'ai pensé voilà un sacré bon livre que celui dont l'infime parcelle d'espoir fait halluciner et frissonner son lecteur.
Ajoutez à cela une belle écriture,une plongée dans la nature souveraine où l'on se croit dans une tranquille partie de pêche à la truite et où l'on se retrouve sur un terrain de chasse, une ambiance angoissante à souhait (avec moult péripéties),un panel d'émotions contradictoires (en rapport ou non avec la question: porte-t-on le poids des actes répréhensibles de ses ancêtres?),des portraits psychologiques forts (contradictoires aussi, avec la mise en évidence du conflit père-fils) et vous obtenez un excellent roman!