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Citations sur La Leçon de ténèbres (38)

Je me balade toujours avec ma petite foule invisible. Ce sont mes morts , ceux que j’ai connus et aimés, ceux que je n’ai pas croisés, mais qui ont trouvé place en moi.
A force de nous côtoyer , nous sommes devenus les meilleurs amis.
Ils me connaissent mieux que quiconque , mais sont intrusifs et jaloux. Ils détestent les nouveaux venus. Je dois parlementer longuement quand une personne entre dans ma vie.
Eh bien quoi, on ne te suffit pas ? s'indignent-ils chaque fois.
Mes fantômes sont très susceptibles. Et j'ai souvent peur de les blesser, alors j'use de ruses, j'en abuse parfois. Je mens.
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Le violon c' est mon territoire sans mots, mon espace de vibrations. C' est ma possibilité de dire autrement, seulement en gestes. Des gestes sonnants.
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Je monte directement à la salle du haut où sont exposées la plupart de ses œuvres. Celles que j’ai vues plus tôt dans la journée en pleine lumière sont maintenant dans le noir. Seulement deux toiles sont encore éclairées. Je n’en reviens pas, je me demande pourquoi les gardes ont presque tout éteint. Pour des raisons de sécurité ? De conservation ? J’en perds mon latin. Je laisse tomber mon sac par terre. Comment examiner les apôtres dans la pénombre ?
Ils sont accrochés les uns à côté des autres sur un mur. Portraits en buste de douze hommes, chacun drapé de ses couleurs, de ses attributs, de son rôle, tous barbus, plus ou moins âgés, peints à l’huile sur toile, et qui devaient m’en dire plus sur Doménikos.
Il y a aussi, au fond de la salle, le célèbre Vue et plan de Tolède où la ville est peinte de manière très détaillée. Aucun éclairage sur ce tableau non plus. Impossible d’observer la restitution exacte qu’a faite le peintre.
J’avais espéré pouvoir fouiller ces tableaux en prenant mon temps, en prenant même une bonne partie de la nuit. À ma guise, à mon rythme, j’aurais exploré chacun des plissés, scruté leurs mains, mais je ne vois plus rien.
Doménikos, je prie pour que tes mains soient aussi longues, aussi diaphanes, aussi éloquentes que celles que tu peins. Des mains qui, dans leurs mouvements, n’indiquent rien, qui prolongent le regard du personnage, en sont sa continuité expressive.
J’observe chacun des apôtres avec la torche de mon téléphone. La tâche de lumière éclaire une petite zone de la toile laissant tout le reste se diluer dans l’obscurité. J’examine ainsi le tableau par fragments successifs, perdant toute idée d’ensemble, d’unité. J’essaie ensuite de reconstituer le puzzle dans mon esprit. Je n’y arrive pas.
Je prends quelques photos de détails pour ne pas oublier, mais le flash écrase la toile, la criblant d’éclaboussures blanches. J’aimerais me souvenir, retenir tous les instants de cette nuit, pouvoir y revenir demain et les jours suivants. Pouvoir y revenir toujours.
Quand tu seras là, Doménikos, il me faudra tout abandonner. Mes armes, l’écriture, le livre, l’espace que j’ai créé pour toi dans mon esprit. Une place de choix, mais sera-t-elle suffisante ? Je sais que tu ne viendras pas de si loin, même pour faire l’amour, si nous n’anéantissons pas nos temporalités respectives.
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Doménikos, venir à Tolède pour te voir, c'est revenir sur les pas, en inventer d'autres, c'est croiser mon père, c'est me remémorer le moment où , des mois après sa mort, j'ai trouvé le carnet.Un carnet au fond d'un tiroir, un carnet oublié qui m'attendait. Un carnet qu'il avait tenu enfant dans la ferme délabrée des Landes, quand toute la famille s'était retrouvée là, isolée, à cultiver les champs. Dans leur exil, il y avait peu de livres, mais il y avait un dictionnaire dont mon père recopiait les illustrations.Sur ce carnet, il y avait des pages et des pages couvertes de dessins d'animaux, d'objets, de portraits pris à la volée de ses proches, mais surtout un tableau comme une obsession, la Trinité peinte par Doménikos qui est au Musée du Prado.

( p.132)
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Ça m'émeut de voir ton nom écrit à la plume.Ce n'est plus de la peinture, il y a quelque chose de très vivant dans cette signature- là , le geste, l'encre, ta main posée qui prend appui sur le papier, et ce contrat qui t'engage à rester dans cette ville le temps de finir la commande, des années donc.
J'aimerais caresser le trait de ta plume.

( p.106)
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Pendant combien d'heures avait-il parlé avec Le Titien de la " cosa mentale" de Léonard ? Que se passe-t-il dans l'esprit d'un artiste avant que l'oeuvre ne se concrétise ? Par quelle mystérieuse alchimie passe-t- elle du concept à la sensibilité de la main ?
Chaque invention, chaque esquisse est unique.

( p.118)
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Tu t'enthousiasmes pour les progrès scientifiques et techniques.Tu prônes la modernité en peinture, tu réfutes l'idée de faire, comme tant d'autres, de l'Antiquité l'étalon du temps présent.
Ton caractère se truffe d' arguments. Tu te fais l'ardent défenseur de la couleur, du geste impétueux qui s'émancipe des codes anciens trop longtemps exploités.
( p.56)
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Une nuit, une seule où je pourrai y déambuler loin de la foule. Il y a des pièces pour se cacher, des couloirs pour courir, une chapelle pour sortir le violon de son étui et écouter la résonance longue qui galopera sur la voûte et emplira mes oreilles.

Le violon pour faire vibrer l’espace vide, pour mettre en transe les particules de l’air, pour les mettre en danse afin que Doménikos me rejoigne. Et je ne doute pas de sa venue, comme il ne doute pas de mon désir. Mon seul désir.
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Venir à Tolède, c’est m’attabler avec mes morts, c’est boire un verre bien frais avec eux à la terrasse d’un bar et, dans notre ivresse, hurler aux étoiles que rien ne pourra nous séparer. (…)
Je pleurerai votre absence.
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Un des tableaux de Domenikos m'y attend, l’Expolio. Je suis pressée. Je veux entrer dans la toile, m’y asseoir, m’y allonger, m'y engouffrer, m'y dénuder à l'ombre de sa trame, et ne plus en sortir jusqu'au soir.
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