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EAN : 978B00KU1PTBE
121 pages
Aux Editions de l'Ibis (30/11/-1)
4.75/5   2 notes
Résumé :
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
C'est vrai, je l'avoue, le confesse : j'aime les mal aimés. Et s'il est un roi, de nous autres Français, parmi la longue liste d'iceux qu'on ne sait qu'abhorrer, qu'on juge soit vil, soit pendard, soit couard, soit tyran, soit stupide, soit incapable, soit fainéant, c'est bien lui, ce touchant, ce douloureux Charles, neuvième du nom.

Partout on lit de lui qu'il fut calamiteux, faible, fou ou féroce, selon l'angle d'attaque. Bref, il n'a pas laissé une empreinte positive ni dans la littérature ni dans les esprits. Mérimée, le premier, lui dédie un modeste ouvrage qui n'est pas franchement à son avantage (Chronique du règne de Charles IX). Vint ensuite Dumas et son inénarrable Reine Margot : sans commentaire. Et, tout dernièrement, Jean Teulé a pris idée de se le faire, le ridiculisant au besoin dans Charly 9.

Mais voilà, voilà, voilà, moi, voyez-vous, je déteste les étiquettes. Quand on me dit que quelqu'un est un illustre vaurien, ça m'attire, je n'y peux rien. Plus il est abject, plus il est vilain et plus j'aime à marcher à son train. Qu'en est-il du rebutant Charles IX ?

Nous autres Français ou, à tout le moins, francophones, ce qui revient au même pour la question qui m'occupe, je vous, je nous trouve cruellement ingrats avec ce roi-là. Avez-vous lu Joinville ? Avez-vous lu Rabelais ? le premier fit son Saint Louis au XIVème siècle naissant, le second engendra Pantagruel au premier tiers du XVIème.

Si je sais encore compter, cela fait plus de deux siècles d'écart. le français y est toutefois extrêmement comparable. Poussons plus loin encore. Montaigne. Vous connaissez Montaigne, je suppose ? Encore un demi siècle au compteur. le français y est toujours largement comparable à celui de Rabelais. Puis, soudain, surgi de nulle part, arrive Pierre Corneille qui nous jette au visage le Cid en 1637.

1637, rendez-vous compte, moins de cinquante ans après les Essais de Montaigne ! Quelle métamorphose dans le verbe, la syntaxe, l'orthographe, la prosodie, tout, absolument tout est changé. Qu'est-ce qui explique ce prodige ? Corneille tout seul ?

Certainement non. de Joinville à Montaigne le français n'avait évolué qu'à un rythme normal et en tout point comparable à celui des autres langues de par le monde. La révolution du français est imputable à un seul et unique personnage historique : j'ai nommé Charles IX.

Ce roi, petit-fils de François Ier, ami des arts, promoteur de la Renaissance française et signataire de l'ordonnance de Villers-Cotterêts, petit-neveu de Marguerite de Navarre, protectrice des écrivains et écrivaine elle-même, fils d'Henri II, qui fut assurément le roi le plus raffiné de son temps et qui couva sous son aile un obscur Pierre de Ronsard.

La Pléiade, cela vous dit quelque chose ? Mais au fait, qui fut l'un des mécènes et protecteur de ce groupement d'artistes ? Qui a décoré Montaigne ? Ne serait-ce ce calamiteux Charles IX ? Qu'a-t-il fait encore contre les arts et la langue française ce frileux incapable ? Il a créé l'ancêtre de l'Académie française (Académie de musique et de poésie) sous la houlette de Jean-Antoine de Baïf.

Et c'est précisément cette académie qui, dans le sillage de la Défense et illustration de la langue française de Joachim du Bellay (décédé trop tôt malheureusement pour piloter lui-même l'académie) a concouru à modifier considérablement le français. Mais que serait-il advenu s'il n'y avait eu au sommet de l'État un monarque soucieux de faire respecter à la cour les prescriptions de ladite académie ? Une réforme ne compte que si elle est appliquée. Et ce roi était appliqué, très appliqué même et s'appliquait à la faire appliquer.

Il était désireux de parler un français riche et de la plus grande pureté. Suffisamment humble pour s'estimer un élève auprès des plus grands poètes de son temps, au premier rang desquels on peut citer Ronsard. Mais ce n'était pas seulement un rimailleur du dimanche, c'était un esprit éclairé et j'en viens au livre qui nous occupe aujourd'hui.

C'est un véritable traité scientifique pour l'époque. Il y aborde l'écologie et l'éthologie du cerf avec une rigueur et une précision absolument stupéfiante pour son temps et surtout, pour sa jeunesse, car il meurt, je le rappelle, avant d'avoir fêté ses vingt-quatre ans. Sa description éthologique du regroupement des cerfs avant, pendant et après le rut témoigne d'une observation et d'un soin dans la restitution qui force le respect. Mais c'est aussi et surtout une culture : il a lu Aristote et tout ce qui était disponible à l'époque sur le sujet.

En vrai scientifique, il met en perspective les savoirs anciens et ses observations propres : « Aristote s'abuse d'un mois entier pour le moins car la pluspart des Cerfs muent comme i'ay dict es chapitres precedens sur la fin de Febvrier ou au commencement de Mars : et mesmes y en a de si advancez qu'ils se deffont de leurs testes des la my-Febvrier, mais peu. » La très longue section sur les chiens destinés à la chasse au cerf est tout aussi précise et nous en apprend sur les chiens de l'époque.

En somme, c'est un ouvrage technique, pratique, intelligent, plein de bon sens et qui fait remarquablement le tour de la question, sans négliger le fait qu'il est très bien écrit. Donc, nous sommes ingrats d'en vouloir à ce roi, plus manipulé que manipulateur, plus ami des arts et du raffinement que de la barbarie qu'on lui impute injustement. Et quand on parle de " la langue de Molière ", on devrait plutôt dire, " la langue de Charles IX " si l'on était à la fois plus précis, plus rigoureux et moins ingrats. Mais, nous sommes ce que nous sommes…

Bref, je ne connais pas d'homme ou de femme qui soient totalement bons ou totalement mauvais. Et plus je lis, et plus je connais celui-ci, et plus je considère le jeune âge auquel il s'éteignit et l'apport majeur qu'il fit en aussi peu d'années à ce que l'on nomme la culture française, plus je me dis que, loin d'être un Néron (d'ailleurs Néron était-il lui aussi le tyran monolithique qu'on décrit ?) s'il avait vécu plus d'années et s'il n'avait eu la mère qu'il a eu, peut-être le révérerions-nous aujourd'hui comme l'un des plus grands rois que notre sol ait porté.

L'histoire qu'on nous enseigne est toujours l'apanage de celui ou celle qui l'écrit. L'angle de vue ne reflète nulle vérité mais seulement celui de l'historien et/ou de celui qui le finance. Gardons-nous de juger, de dire Untel était bon, tel autre était mauvais. Qu'avons-nous fait de mémorable, nous autres, pour la culture ou pour la science, du haut de nos vingt-quatre ans et dont on parlera encore dans quatre ou cinq siècles ? Mais, bien entendu, ce n'est que mon avis, un modeste plaidoyer pour la réhabilitation dans les mémoires de l'infortuné Charles IX, c'est-à-dire pas grand-chose.
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Après avoir escrit du naturel du Cerf je veux parler de celuy des Chiens. Il faut sçavoir qu'il n'y a que trois sortes de Chiens courans. Les premiers Chiens qui ont esté en nostre Europe ont esté la race des Chiens noirs, et celle des Chiens blancs, mais celle des blancs a esté depuis confondue en celle des Chiens greffiers blancs comme je descris cy après, toutes les deux sont venues de Monsieur S. Hubert. Depuis le Roy S. Louys, estant allé à la conqueste de la terre saincte, fut fait prisonnier : et comme entr autres bonnes choses il aymoit le plaisir de la Chasse, estant sur le point de sa liberté, ayant sceu qu'il y avoit vue race de Chiens en Tartarie qui estoient fort excellents pour la chasse du Cerf, il feit tant qu'à son retour il en amena une meutte en France. Ceste race de Chiens sont ceux que l'on appelle gris, la vieille et ancienne race de cette couronne, et dict-on que la rage ne les accueille jamais. Voylà les trois et differens poils de Chiens dont je veux escrire.

Des Chiens courans.
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