La France, décidément, n'était pour moi ni une déesse abstraite ni un concept d'historien, mais bien une chair dont je dépendais, un réseau de liens qui me régissait, un ensemble de pôles qui fondait les pentes de mon cœur. J'éprouvais le besoin de sentir plus solides et plus durables que moi-même ceux dont j'avais besoin pour m'orienter.
Pour connaître où revenir. Pour exister.
En eux mon pays logeait tout entier et vivait par eux en moi-même. Pour qui navigue en mer un continent se résume ainsi dans le simple éclat de quelques phares. Un phare ne mesure point l'éloignement. Sa lumière est présente dans les yeux, tout simplement. Et toutes les merveilles du continent logent dans l'étoile.
Ca, c'est impressionnant, l'âge d'un homme ! ca résume toute sa vie. Elle s'est faite lentement, la maturité qui est sienne.
De quels événements secrets sont donc pétries les tendresses particulières et, à travers elles, l'amour du pays ?
Enfin les pôles presque irréels aimantent de très loin ce désert : une maison d'enfance qui demeure vivante dans le souvenir. Un ami dont on ne sait rien, sinon qu'il est.
Quiconque a connu la vie saharienne, où tout, en apparence, n'est que solitude et dénuement, pleure cependant ces années là comme les plus belles qu'il ait vécues.
L'essentiel est que demeure quelque part ce dont on a vécu. Et les coutumes. Et la fête de famille. Et la maison des souvenirs. l'essentiel est de vivre pour le retour.
Ils étaient des enfants prodigues sans maison vers quoi revenir. Alors commence le vrai voyage qui est hors de soi-même.
Jamais je n'ai mieux aimé ma maison que dans le Sahara.
Que l'on soit absent dans la pièce voisine, ou sur l'autre versant de la planète, la différence n'est pas essentielle. La présence de l'ami qui en apparence s'est éloigné, peut se faire plus dense qu'une présence réelle.
Que l'on soit absent dans la pièce voisine, ou sur l'autre versant de la planète, la différence n'est pas essentielle. La présence de l'ami qui en apparence s'est éloigné, peut se faire plus dense qu'une présence réelle. C'est celle de la prière.