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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
De 1880 à 1930, la ville de Chicago est passée de 500 000 habitants à près de 3,4 millions d'habitants, soit une augmentation de plus de 550 % ! Durant ces 50 ans, la population des Etats-Unis a 'seulement' augmenté de 150 %, passant de 50 millions à 125 millions d'habitants.
De la fin de la guerre de Sécession (1865) à la première guerre mondiale, beaucoup d'immigrés sont venus à Chicago d'Europe de l'Est, dans l'espoir d'une vie plus facile.

« La jungle » fut publié en 1906, après l'avoir été partiellement dès 1905 en feuilleton dans l'hebdomadaire socialiste "Appeal to reason". Dans ce roman, Upton Sinclair raconte l'itinéraire d'immigrés lituaniens au tout début du XXe siècle, attirés à Chicago par des promesses. Il y dénonce l'exploitation de la classe ouvrière par des capitalistes sans scrupules, pour qui la main d'oeuvre n'est qu'une marchandise et les consommateurs de simples sources de profits. L'industrie de la viande illustre les travers d'un capitalisme naissant sans contre-pouvoirs. Les capitalistes instrumentalisent les pouvoirs politiques et les institutions judiciaires, par collusions d'intérêts et corruptions, pour imposer leur Loi : celle du plus fort. Cette loi de la jungle comporte notamment : maltraitances sur les animaux avant leur abattage, maltraitances sur les travailleurs avant leur mise au rebut, tromperies sur la qualité de aliments fabriqués puis vendus, et atteintes à l'environnement. En fin d'ouvrage, des personnages engagés dans la cause socialiste présentent leurs thèses, comme si la révolution qu'ils prônent constituait la solution à tous ces maux.

Ce roman naturaliste témoigne de la naissance et du développement du capitalisme aux Etats-Unis. J'y ai (re)découvert la diversité des sources de peuplement du pays. La description de diverses usines (abattoir, mise en conserve, aciérie, production de moissonneuses-batteuses) montre que Frederik Winslow Taylor (1856-1915) n'a pas inventé le taylorisme mais a théorisé des schémas d'organisation du travail déjà existants (son essai 'The Principles ou Scientific Management', traduit en français par 'La direction des ateliers', date de 1911).

Par sa thématique, cette lecture m'a rappelé celle de 'La saga des émigrants', remarquable série de Vilhelm Moberg, même si cette dernière se déroule sur un laps de temps plus large, en milieu rural, et est écrite dans un style très différent (plus agréable à lire mais moins pictural). C'est surtout aux récits d'Emile Zola que j'ai pensé, à cause du dessein et de l'écriture qui en découle, ainsi que de la noirceur du propos. L'auteur cite d'ailleurs le romancier français : « Dante et Zola auraient pu trouver là une source d'inspiration » (page 146). L'émotion suscitée aux Etats-Unis par la publication de ce roman est de nature à confirmer qu'il recelait de grandes parts de vérité…
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Jürgis et sa famille lituanienne émigrent à Chicago. Nous sommes au début du XXe siècle. Il parvient à trouver du travail dans les immenses abattoirs industriels de la ville et leurs activités annexes. Mais peu à peu le rêve américain tournera au cauchemar.
Le livre aborde (brièvement, mais il faut le noter) le problème de la souffrance animale, la déshumanisation des emplois causée par l'industrialisation sauvage, l'absence de code du travail et ses conséquences humaines, l'absence de réglementation des produits, le tout dans le cadre d'un capitalisme tout-puissant. Jürgis connaîtra la misère, la déchéance morale et physique, et pour survivre devra se compromettre avec la pègre et les politiciens véreux, avant de prendre conscience de sa condition de prolétaire exploité et de s'engager politiquement..
Écrit dans un style simple et quasi journalistique, ce livre apparaît, à nos yeux de lecteurs du XXIe siècle, comme une découverte naïve des excès d'un capitalisme dérégulé. On n'y trouvera pas d'analyse psychologique ou des rapports sociaux poussée, contrairement à Zola à qui on pourrait comparer Upton Sinclair, mais c'est une formidable enquête sur le Chicago industriel du début du XXe siècle.
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Plongez-vous dans l'univers sombre voire et miséreux des abattoirs de Chicago fin XIXème.
Accrochez-vous. Vous avez lu Germinal ? C'est pire. Une machine géante à broyer les bêtes et les Hommes. le gigantisme de l'industrialisation qui mène à des aberrations. La production de conserves et de viandes dans des conditions d'hygiène dignes d'un film d'horreur. Des conditions de travail tellement effroyables que vous n'avez pas besoin de prévoir de retraite pour les ouvriers : ils meurent tous avant. Des conditions de vie où chacun essaie de tirer la couverture à soi, mais elle est si petite pour tant de gens, que la misère est le lot du plus grand nombre. Sans parler de tous les gredins qui profitent d'un système tellement corrompu que l'honnêteté devient un handicap pour tenter de survivre.
Et puis pour les immigrants, s'ajoute la barrière de la langue. Leur espoir d'une vie meilleure en Amérique est tellement immense, intense, qu'ils sont prêt à tout et mettent un temps infini à se rendre compte qu'on les spolie, qu'on les exploite et qu'ils sont piégés dans la misère. C'est sombre et triste. Ça pue la viande avariée, les corps qui ne se lavent pas assez souvent, les vêtements usés et crasseux, la soupe trop claire, la neige grise, la canicule de plomb, les eaux stagnantes qui ont oublié qu'elles ont été limpides un jour, les greniers mal aérés aux matelas trop minces pleins de vermine, les gosses morveux et mal nourris, l'alcool bas de gamme, les blessures mal cicatrisées guettées par la gangrène.
Jurgis a du courage, de la force. On le suit avec sa famille de l'espoir lumineux des premiers pas en Amérique, à l'errance entre petites misère et grande misère. Il pense et nous aussi, avoir toucher le fond et non. Il y a toujours pire. C'est injuste, mais c'est comme ça.
La loi du plus fort est remplacée par la loi du plus malin, du plus rusé, de celui qui écrasera l'autre pour prendre sa place le plus vite.
Franchement notre vie actuelle à côté, c'est le paradis.

Au niveau du style, c'est moins romancé que du Zola. C'est plus comme un long reportage, très factuel. On finit par de longs discours sur le socialisme salvateur. J'ai trouvé cette partie un peu trop longue et politisée, mais dans le contexte elle avait sa place.

Alors, faut-il le lire ? Oui. A part peut-être si vous êtes végétarien…
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Roman naturaliste et social qui a le mérite de la pédagogie.
Au-delà des clivages politique, il peut se lire comme une description factuelle des conditions de travail des travailleurs, immigrés pour la plupart, il y a un peu plus d'un siècle.
Et comment le capitalisme sans garde-fou peu mener à une misère sans nom, au mépris des travailleurs, mais aussi des consommateurs.
J'ai lu quelques critiques qui affirmaient que cela n'avait pas beaucoup changé depuis ; je pense au contraire que personne, personne aujourd'hui ne pourrait cautionner cette exploitation institutionnelle, encadrée et régulée par la police.
Les raisons de se révolter ne manquent certes pas dans notre monde actuel, mais on ne peut nier le progrès réalisé depuis cette époque.
En revanche, on aurait pu se passer du discours militant final (que j'ai lu en diagonale, j'avoue !) car la démonstration par l'exemple était à mon avis suffisante.
J'ai apprécié le style évocateur, qui parfois me rappelait du Maupassant dans la façon de raconter un destin en quelques phrases.
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Contrairement à son roman ''pétrole!'', le roman ''La jungle'' de l'auteur Upton Sinclair est un roman coup de poing.

Un roman sur la condition ouvrière. Ce n'est pas réellement un roman d'éducation, excepté vers la fin. C'est plutôt un roman : «Je te colle le nez dans ta merde» (pardonnez-moi les termes utilisés). Ainsi, on aime ''la jungle'' et ''Pétrole'' pour des raisons assez différentes. le premier consiste à montrer à la face du monde plusieurs chemins de vie possible d'un ouvrier (peu reluisant) tandis que le deuxième cherche à éduquer son lecteur par rapport au monde qui l'entoure. En d'autres termes, un roman coup de poing versus un roman qui fait appel à la raison et à l'intellect.

Upton Sinclair, quelquefois appelé le Zola américain, à fait son roman à partir d'un travail journaliste sur les conditions de travail dans les abattoirs. Il a parcouru quelques abattoirs, un sceau à la main pour se fondre dans le décor et à lui-même assisté au travail acharné des ouvriers.Il a également assisté à des scènes de la vie quotidienne. À ce titre, son roman est une image des conditions de vie et de travail des ouvriers de cette époque pas très lointaine.

Toutefois, il est difficile de donner une note parfaite. Il a trop voulu faire vivre d'expériences à son personnage principal. Ainsi, il est ouvrier dans plusieurs départements, chômeur (jusqu'ici, ça va), , vagabond, gangster, responsable politique mineure, contremaître corrompu et finalement, à nouveau, ouvrier éclairé par une éducation socialiste. Tout cela, il aurait pu le séparer entre quelques personnages ou au moins, deux. Mais, il a voulu montrer plusieurs facettes, peut-être trop.

Cela dit, le livre est excellent. L'écriture n'est pas rebutante pour celui qui voudrait avoir une vue partielle sur ce que pouvait être la vie d'un ouvrier au début des années 1900.
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Un livre qui m'a bousculé, révolté par son sujet.
Je n'ai pas arrêté de relire sa date de parution et me suis dit mais est ce que les choses ont réellement changé depuis la parution de ce roman.
Samedi soir j'ai regardé sur LCP un documentaire sur les "opérateurs" des abattoirs et quel effroi d'entendre certains échos sur ces témoignages et des pages de ce roman de Upton Sinclair, écrit en 1906.
L'auteur va nous raconter la vie de Jurgis, lituanien, qui est venu chercher le rêve américain, une vie meilleure En 1900, il est à Chicago avec sa jeune épouse, Ona, sa belle mère et des cousins. Ils vont survivre dans cette jungle, trouver du travail dans les abattoirs, premier employeur de cette ville. Romanesque, avec un style journalistique, Upson Sinclair nous parle de cette Amérique du début du 20e siècle : le début du capitalisme, de l'industrialisation, de l'American dream, mais quel constat éprouvant. L'auteur décrit très bien cette vie d'ouvriers, de misères, d'espoirs, de désillusions, de combats....
J'avais lu Pétrole ! de cet auteur et avait déjà apprécié son texte, un peu plus romanesque que celui ci.
Un texte même si quelquefois sa lecture est éprouvante et révoltante, il faut le lire car c'est un grand texte romanesque mais aussi un témoignage sur Chicago, l'américan dream, la condition ouvrière.
Ironie de mes lectures, je suis en train de lire et apprécier la lecture de "la femme révélée" de Gaëlle Nohant et celui ci se passe un peu plus tard à Chicago en 1950-1960 et les conditions sociales ont un peu évolué.
Quand le romanesque nous parle de la vie, des espoirs, des combats menés et qu'il faut malheureusement continués à mener.

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Bien que l'histoire de ses héros soit fictive, le roman d'Upton Sinclair a la précision d'un témoignage, presque d'un documentaire. En nous plaçant aux côtés d'une famille d'immigrés lituaniens dans le Chicago du début du XXème siècle, il dresse un tableau exhaustif et terriblement réaliste de la condition ouvrière de l'époque, mais s'attache aussi à mettre en évidence le fléau que représente le nouveau modèle économique symbolisé par les trusts américains, en prenant l'exemple de la filière viande.

Ona et Jurgis sont au centre du clan dont nous faisons la connaissance, le roman s'ouvrant sur leur cérémonie de mariage, alors que le jeune couple est aux Etats-Unis depuis quelques mois. Ils se sont connus en Lituanie, et rapprochés à la mort du père d'Ona, propriétaire terrien qui voyait d'un mauvais oeil que Jurgis, travailleur et sincère mais pauvre et illettré, tourne autour de sa chère fille, cultivée et habituée à un certain confort. Ona orpheline, et la fortune paternelle n'ayant pas fait long feu, Jurgis n'a guère eu de peine à la convaincre de le suivre pour tenter leur chance en Amérique. Ils partent accompagnés de Marija, l'exubérante et vigoureuse cousine d'Ona, de sa belle-mère et de ses cinq enfants, du frère de cette dernière et du père de Jurgis.

Passées les vicissitudes du voyage, qui voit fondre leurs maigres économies -ils sont bien sûr la proie de profiteurs en tous genres-, ils s'installent à Packingtown, quartier des abattoirs de Chicago, où les hommes de la famille et la solide cousine trouvent rapidement du travail. Les nouveaux arrivants sont alors subjugués par l'ampleur et la perfection technique de ce qui représente une ville à part entière : les abattoirs sont sans doute la plus grosse concentration de main-d'oeuvre et de capitaux qui ait jamais existé. Comptant trente mille employés, ils nourrissent trente millions de personnes de par le monde, et des milliers de boeufs et de cochons y sont tués chaque jour.



Bientôt, nos héros quittent la chambre crasseuse et minuscule dans laquelle ils s'entassaient depuis leur arrivée pour une petite maison soi-disant neuve qu'ils achètent, comptant sur le cumul des revenus des hommes de la famille pour en régler les traites...

La réussite semble leur sourire, mais ce n'est qu'une illusion...

Le travail à la chaîne pour un salaire de misère, à des cadences toujours plus soutenues, sans aucune mesure de sécurité, l'absence de protection sociale, rendent quotidien le risque d'accident ou de mort, par ailleurs exhaussé par des conditions de vie insalubres. Jurgis perd son père, emporté par la tuberculose, puis un accident de travail le maintient alité pendant plusieurs mois. A partir de là, tout semble se liguer contre eux. Les dépenses imprévues se multiplient, ils découvrent avoir été arnaqués lors de l'achat de leur maison, Marisa se retrouve elle aussi au chômage suite à la fermeture de la conserverie où elle peignait des boîtes... Lorsque Jurgis peut de nouveau travailler, il a perdu sa constitution robuste et son endurance, et doit se contenter de tâches de plus en plus viles, difficiles et mal payées.

Même le climat est contre eux, chaque saison faisant subir ses contraintes. Au printemps, c'est la pluie qui transforme tout le quartier, dépourvu de rues, en marécage, ses habitants devant parfois progresser plongés jusqu'aux aisselles dans une eau souillée pour rejoindre leurs logements. En été, ce sont les températures accablantes qui rendent les ateliers irrespirables, et provoquent de nombreuses morts par insolation. le froid et la neige de l'hiver font des trajets pour joindre les lieux de travail une aventure parfois fatale pour les doigts et les oreilles...

Une véritable descente aux enfers, en somme, que partage le lecteur horrifié.

Les conditions de vie et de travail de tous ces hommes et femmes, de ces enfants aussi -puisque malgré la récente interdiction du travail aux moins de seize ans, les parents, pour survivre, n'ont souvent d'autre moyen que de mentir sur l'âge de leur progéniture- sont si dures, si dangereuses, si méprisantes du respect de l'individu que c'en est à peine supportable.
Ces ouvriers sont considérés non pas comme des individus d'ailleurs, mais comme de la main d'oeuvre, dont on tire le maximum au meilleur prix, et que l'on jette sans scrupule lorsqu'ils ne sont plus utilisables. Et c'est d'autant plus facile quand on a affaire à des travailleurs immigrés, ignorants de la langue et des usages de leur nation d'accueil.



C'est ainsi une nouvelle forme d'esclavage que dépeint Upton Sinclair, confortée par la toute puissance d'industriels engagés dans la course du profit à outrance, justifiant les pratiques les plus malhonnêtes, voire les plus délétères pour ceux qui en sont les victimes. Ainsi, dans les abattoirs, rien ne se perd : la graisse évacuée dans des eaux polluées est récupérée pour fabriquer du saindoux (auquel s'ajoute parfois les restes d'un ouvrier tombé dans la cuve), les carcasses de boeufs tuberculeux sont vendues après avoir été "maquillées", des alchimistes colorent les déchets pour en faire des conserves... Et ces mystifications à but lucratif s'étendent aussi au quotidien des habitants de Packingtown, dont les logements sont construits, en l'absence de tout-à-l'égout, sur des déjections, dont les aliments sont frelatés (des sels de cuivre sont ajoutés dans les conserves pour rehausser la teinte des légumes, le lait est étendu d'eau et additionné de formol...) dont les vêtements sont faits de coton additionnés de déchets de laine retissés,...

Tous les niveaux de la société sont d'ailleurs gangrenés par la corruption : la police, la justice, les services d'inspection sanitaire... sont à la solde des trusts dont ils servent les intérêts.

Face à cette puissance a priori invincible, à cette iniquité a priori inéluctable, que faire sinon capituler ? La prérogative quotidienne de la survie, créent une angoisse permanente. La misère est âpre, cruelle, mais surtout sordide, triviale, laide, et humiliante : beaucoup perdent tout respect d'eux-mêmes, sombrent dans l'alcoolisme, se perdent dans la prostitution... L'enthousiaste et responsable Jurgis devient dur, cynique. Il reprend toutefois espoir le jour où, ayant pénétré dans une salle de réunion pour s'abriter du froid, il entend un discours nouveau, qui invite à la lutte...

"La jungle" est un récit dur mais édifiant, dans lequel Upton Sinclair a su allier le souci d'une rigueur quasi journalistique (il a passé six mois à enquêter dans les abattoirs, où il s'est même fait embaucher) à un sens du romanesque justement dosé. Bien que riche en descriptions parfois très détaillées, son récit n'est ainsi jamais fastidieux, la dimension sociale de son texte n'occultant pas l'importance de ses personnages. Son écriture est par ailleurs très vivante, faisant naître images et odeurs à l'esprit du lecteur, et enrichie d'un humour -certes noir- et d'une implication ironique qui met d'autant plus en lumière l'absurdité monstrueuse du monde qu'il évoque.

A lire, bien sûr !

N.B : à sa sortie, en 1906, cet ouvrage fit scandale. Mais au grand regret de son auteur, c'est davantage le scandale sanitaire qui interpella ses concitoyens que les conditions de travail inacceptables des ouvriers. Un rapport d'enquête sera exigé par le président Roosevelt à la suite de la parution de "La jungle", qui aboutira à l'adoption de deux lois sur l'inspection des viandes.
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Upton Sinclair (1878-1968) était un journaliste et écrivain américain socialiste. La jungle est parue en 1906. Ce roman raconte l'histoire d'une famille de migrants lituaniens venue chercher fortune à Chicago. le personnage principal est Jurgis Rudkus, un jeune homme grand et fort, courageux, enthousiaste et naïf. Il est prêt à travailler toujours plus pour améliorer le sort de ses proches. Il va s'apercevoir assez vite que l'honnêteté ne fait pas le poids face au capitalisme sauvage et aux corruptions de tous genres.



Les membres de la familles trouvent à s'embaucher dans différentes entreprises liées de près ou de loin aux abattoirs de Chicago : abattage des animaux, découpe de la viande, fabrication de saucisses, conserverie, fabrication d'engrais... C'est l'occasion pour l'auteur de dénoncer de nombreux scandales :



Le scandale des conditions de travail et de vie des ouvriers : aux abattoirs, les conditions de travail sont extrêmement pénibles (efforts physiques, bruit, odeurs, longues journées) et dangereuses vu les machines utilisées et les cadences infernales. Les emplois sont précaires, les ateliers ferment de façon saisonnière, souvent l'hiver et de nombreux travailleurs se retrouvent alors à la rue dans le froid et la neige. Dans l'espoir de garder son logement, la famille Rudkus est obligée de mettre au travail vieillards et enfants. L'auteur dépeint tous les abus dont sont victimes les travailleurs pauvres : marchands de sommeil, prostitution, insalubrité, pollution, manque de soins... Les Etats-Unis étaient alors un pays émergent, on pourrait lire quasiment la même chose sur des ouvriers chinois aujourd'hui.




Le scandale de l'abattage des animaux : Les cochons, notamment, sont présentés comme des individus distincts : "Chacun d'entre eux était un être à part entière. Il y en avait des blancs, des noirs, des bruns, des tacheté, des vieux et des jeunes. Certains étaient efflanqués, d'autres monstrueusement gros. Mais ils jouissaient tous d'une individualité, d'une volonté propre ; tous portaient un espoir, un désir dans le coeur. Ils étaient sûrs d'eux-mêmes et de leur importance. Ils étaient pleins de dignité. Ils avaient foi en eux-mêmes, ils s'étaient acquittés de leur devoir durant toute leur vie, sans se douter qu'une ombre noire planait au-dessus de leur tête et que, sur leur route, les attendait un terrible Destin."

Le parallèle est fait entre le sort des bêtes et celui des hommes : "Jurgis se rappelait combien il avait été frappé, à son arrivée à Packingtown, par la cruauté sauvage qui présidait à l'abattage des cochons, et comme il s'était félicité de ne pas faire partie du troupeau. Son nouvel ami lui prouva qu'en fait il n'avait été qu'un des innombrables porcs passés entre les mains des patrons des conserveries. Ces gens-là ne s'intéressaient à ces animaux que pour les profits qu'ils pouvaient en tirer. Eh bien, leur attitude envers les travailleurs et la population était la même. Ce que la bête pensait ou ce qu'elle endurait n'entrait pas en ligne de compte, et ils faisaient preuve de la même indifférence vis à vis de la main d'oeuvre et des consommateurs de viande."



Le scandale de l'industrie agro-alimentaire : tous les déchets de viande les plus infâmes sont utilisés dans la fabrication du jambon et des saucisses. La description en a choqué les consommateurs américains, ce qui a entraîné la mise en place de contrôles sanitaires les abattoirs. Upton Sinclair déplorait d'avoir été plus entendu sur ce point que sur la condition ouvrière : "J'ai visé le coeur du public et par accident je l'ai touché à l'estomac".



L'ouvrage se termine par une présentation de la solution à tous ces maux : c'est le socialisme. J'apprécie particulièrement la description par un militant enthousiaste à un public émerveillé de ce que sera l'agriculture de demain, mélange de science et de collectivisation : "Ayant grandi dans une ferme, je sais l'épouvantable monotonie du travail des champs et j'aime à me représenter ce qu'il deviendra après la révolution. Je vois déjà l'énorme machine à planter les pommes de terre, tirée par quatre chevaux ou mue à l'électricité, qui creusera les sillons où elle enterrera à intervalles réguliers les tubercules qu'elle aura au préalable découpés, le tout à raison de vingt arpents par jour ! Je vois aussi le superbe engin à ramasser les pommes de terre, fonctionnant à l'électricité peut-être, qui parcourra un champ de mille arpents, soulèvera la terre pour en extraire les tubercules et les entasser dans des sacs ! (...) J'imagine déjà les moissons futures : des millions d'hommes et de femmes qui se réjouiront de venir passer l'été au grand air, transportés par trains spéciaux, libérés de la crainte du chômage puisque la quantité de bras nécessaires aura été calculée à l'avance". Mais c'est l'URSS de Staline, ma parole ! L'enfer est pavé de bonnes intentions.



J'ai apprécié cet excellent ouvrage que j'ai trouvé passionnant, bien documenté manifestement. C'est un récit coup de poing, pas toujours agréable à lire car Jurgis descend aux Enfers mais j'en ai dévoré les 500 pages en trois jours. C'est instructif sans être ennuyeux ou fastidieux. La fin est un peu moins réussie à mon avis mais je reviendrai sans doute prochainement vers Upton Sinclair.
Lien : http://monbiblioblog.revolub..
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Dans La Jungle (parue en 2011 au Livre de Poche), Upton Sinclair nous raconte la vie d'une famille de migrants européens lors de leur arrivée dans la ville américaine de Chicago, au tournant des 19ème et 20ème siècles. Un témoignage très fort sur les conditions de vie, ou plutôt de survie, de la classe ouvrière dans ce pays naissant…




Que peut la littérature ? A cette question posée fréquemment par François Busnel dans son émission La Grande Librairie, le roman d'Upton Sinclair « La Jungle » offre une réponse claire : faire prendre conscience des souffrances de la classe ouvrière pour faire changer sa condition.

Le roman s'ouvre sur le mariage du personnage central, Jurgis, et de sa future épouse rencontrée en Lituanie, Ona, après leur émigration aux Etats-Unis. Jurgis est une force de la nature, un « dur à la tâche » qui trouve d'ailleurs rapidement un emploi dans les abattoirs de Chicago. Ceux-ci sont l'employeur principal de la région, 30.000 personnes y travaillent pour 8 à 10 millions d'animaux tués par an (à cet égard, le passage où Sinclair décrit les lieux est magistral). Les premiers pas du jeune couple et de leur famille s'avèrent porteurs d'espoir dans ce nouvel environnement.

Passées ces premières semaines, de nombreuses difficultés viennent jalonner leur parcours : l'achat d'une maison à un véritable escroc, l'arrivée du froid (et avec lui la baisse d'activité économique qui jette sur le pavé sans aucune protection un grande nombre de travailleurs), différents chantages conduisent la famille à la misère et à un parcours loin de celui escompté au départ.

La première partie du roman est un véritable coup porté au lecteur : un réel dégoût émerge rapidement à la lecture des pages. J'ai été profondément choqué par l'absence de moralité de cette société, où la corruption se retrouve à tous les niveaux. Certaines règles sont fixées pour empêcher le travail des enfants ? N'en déplaise, on falsifie leur âge pour qu'ils puissent travailler. Sans parler de la falsification les marchandises avariées pour les faire entrer à nouveau dans la chaîne alimentaire ou encore des conditions de travail dans les usines d'engrais… Ce livre regorge de tels exemples qui font que le parcours normal d'un immigré est celui d'une chute irrémédiable. Au moindre accident de la vie, les protagonistes se retrouvent dans un grand état de dénuement.

Sans vouloir révéler la seconde partie du roman, il semble évident qu'Upton Sinclair a voulu faire endosser à Jurgis plusieurs rôles jusqu'à l'ouverture vers une étape plus prometteuse de sa vie. Cette partie est un peu plus décousue (peut-être) que la première mais n'en demeure pas moins intéressante.

Ce livre a eu un fort retentissement dans le pays, puisqu'il a provoqué une enquête sur les pratiques des trusts de la viande, confirmant les propos de Sinclair, ce dernier ayant même été reçu par le président Roosevelt. Une législation sociale a ensuite été mise en place. Un bel exemple du pouvoir de la littérature !

Vous l'aurez donc compris, j'ai beaucoup apprécié ce livre
Lien : https://etsionbouquinait.com..
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Ce livre est composé de deux tomes, « Les abattoirs de Chicago », et « Les affranchis ». (Selon les éditions, ils peuvent être rassemblés, ou, suivant la traduction, avoir un autre sous-titre)
tome 1 : Les abattoirs de Chicago
Dans le premier tome, Upton Sinclair décrit la spirale de la misère dans laquelle est entraînée une famille lituanienne, récemment immigrée aux USA. Ils arrivent à Chicago, dans une vaste zone industrielle, sale et polluée, un désert urbain. le lieu où ils vivent est un ancien marécage, devenu ensuite une décharge de détritus et de polluants. Renfloué, le site reste insalubre. Tous leurs rêves (avoir une maison à eux, élever un enfant, mettre de l'argent de côté, etc.) sont broyés par le système capitaliste, qui ne leur laisse même pas le minimum pour vivre, afin de les maintenir dans une dépendance continuelle à l'égard des patrons de la ville. Les conditions de travail aux abattoirs où travaille Jurgis sont particulièrement sordides, et l'exploitation féroce (les contremaîtres sont de vrais tyrans). Sinclair décrit pendant plusieurs pages les différents postes de travail : chargeurs de boeuf, hisseurs, arracheurs de laine, employés en salles de cuisson, aides de cuisines, ouvriers aux ateliers de boîtes de fer-blanc, aux ateliers d'engrais, etc...
Finalement, il peint de manière très poignante la lente descente aux enfers de cette famille, la pauvreté de leur condition de prolétaires faisant du moindre problème ou accident de la vie une catastrophe qui précipite leur chute dans une spirale infernale de malheur...

tome 2 : Les affranchis
Le travailleur immigré lituanien Jurgis, après que sa femme et son fils soient décédés, s'enfuit à bord d'un train de marchandise, qui va l'amener à retrouver la campagne, la nature qui l'enchante et lui rappelle sa verte Lituanie natale. Vivant comme un vagabond, au gré de menus travaux agricoles, puis de rapines, il va suivre les déplacements de centaines, de milliers de tâcherons qui trouvent à s'employer en suivant les récoltes, qui se succèdent au gré de la saison dans le pays.
L'hiver venu, il doit cependant revenir chercher du travail en ville. Il croise à nouveau la route d'un jeune cambrioleur, un peu anarchiste, et pour qui voler les riches rétablit un peu de justice sociale. Celui-ci initie Jurgis aux différents procédés de vols et d'escroqueries. Ayant intégré la “ pègre ” de Chicago, il trouvera ensuite à s'employer lors de campagnes électorales, car les politiciens véreux de Chicago utilisent les voyous pour effectuer leurs coups-fourrés. Jurgis va même devenir un “ jaune ”, lors de la grande grève des ouvriers de la viande de Chicago, avant de devenir inemployable pour les patrons et la pègre eux-mêmes.
Se retrouvant à nouveau pauvre et à la rue, c'est en s'abritant dans une salle où se tient un meeting socialiste que va se révéler à lui un nouvel avenir : la lutte ouvrière.
Upton Sinclair, à travers le personnage de Jurgis, voudrait bien montrer que le militantisme est plus grisant... que l'alcoolisme ! : “Pour le prix d'un verre de bière, on pouvait acheter cinquante exemplaires d'une brochure, les distribuer aux malheureux que l'Idée n'avait pas encore régénérés, et s'enivrer ensuite de la pensée du bien qu'on pouvait faire.”

Finalement, ce livre est très intéressant. Upton Sinclair fut accusé d'avoir déformé la réalité, afin de servir sa cause (il était militant du parti socialiste, et aux USA, cela veut dire beaucoup !). Il répondit toujours que la réalité qu'il avait décrite était malheureusement le lot de beaucoup de gens aux USA. D'ailleurs, le gouvernement US de Roosevelt réagit, en élaborant une législation sur l'abattage des animaux de boucherie... car ce qui choqua le plus, ce ne sont pas les conditions de travail des ouvriers, mais le risque sanitaire que faisait courir à la population le traitement industriel du secteur de la viande... Upton Sinclair déclara, après le triomphe de son livre à l'époque : “J'avais visé le coeur, et j'ai touché l'estomac de la nation ! ”.
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