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Dans cette bande dessinée nous sommes quelque part sur l'Île de Guernesey, et l'artiste William vit un terrible chagrin d'amour car il ne s'est toujours pas remis de sa rupture avec sa bien-aimée Héléna... Son modèle Rosalie voudrait qu'il s'intéresse à son corps, son ami Victor aimerait lui qu'il tourne la page en s'intéressant l'âme de cette dernière, et même Héléna qui s'inquiète pour lui fait un détour pour lui dire que c'est définitivement fini entre eux deux... Mais lui finalement occupé par la découverte d'une sirène, sensuelle et charnelle, mais aussi jalouse et passionnée. Ils vivent leur idylle sur une plage isolée ou tout n'est que calme et volupté, jusqu'au moment au sa famille de prédateurs marins en fait le siège pour récupérer celle qui a oublié d'où elle vient !

Guillaume Sorel est un bel auteur, autant comme scénariste que comme dessinateur (et dans ce domaine autant comme concepteur d'illustrations que concepteur de planches) : son style est reconnaissable entre mille et traverse les années sans se faner... Mais c'est aussi un fin connaisseur du genre fantastique d'Edgar Allan Poe à Stephen King, et ici il effectue une relecture de "La Petite Sirène" d'Andersen dans un style gothique très riche en « memento mori » pour aboutir à un résultat assez proche d'H.P Lovecraft avant que celui-ci n'élabore son Mythe de Cthulhu (vous savez, celui qui était du "Horla" de Guy de Maupassant ^^)... Mais c'est du fantastique à la française donc qui fait la part belle à la contemplation et à l'onirisme ce qui n'est pas forcément ma tasse de thé (avec une fin dont je ne dirais rien pour vous en laissez la surprise), toutefois les éditions Glénat offre un superbe écrin à ce récit de 70 pages avec une préface de Pierre Dubois, une postface de l'auteur et 20 pages d'illustration bonus comportant des doubles pages de toute beauté, ce qui m'oblige à les étoiles booster !
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Magnifique qualité des dessins qui restituent par leurs couleurs savamment mêlées un réelle atmosphère où le surnaturel se mêle admirablement au réel. Certaines planches semblent être des aquarelles, particulièrement la dernière, de la sirène splendide sur deux grandes pages.

L'histoire mélange réalité troublante et onirisme avec une touche de fantastique, voire d'horreur, lorsque les sirènes attaquent le malheureux peintre égaré dans ses amours perdues et son attirance pour cette sirène emplie d'humanité et de tendresse pour lui.

Le scénario très librement inspiré d'Andersen tient la route et le lecteur se laisse emporter dans ce monde déroutant que connaît le peintre et qui le détruit peu à peu.

Très belle bande dessinée, au graphisme qui ne donne jamais dans l'à peu près, dommage que le texte manque un peu de profondeur.
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William est un artiste qui vit en solitaire. Son univers est une petite crique entourée de falaises et un bois où fleurissent les jacinthes sauvages. Il n'arrive pas à oublier l'amour de sa vie, jusqu'au jour où il rencontre une sirène passionnée.

J'aime assez l'ambiance distillée dans la bande dessinée. Ce charme printanier des fleurs bleues, ce rivage paisible où règne sérénité et isolement. D'ailleurs Sorel a magnifiquement peint ces paysages qui donnent envie d'évasion. Les aquarelles sont splendides.
Puis le fantastique s'invite avec l'apparition de la sirène et une histoire d'amour passionnée va naitre entre deux mondes. Un côté beaucoup plus sombre, plus gothique s'installe.
Puis vint le dernier tiers de l'histoire et là ça vire onirisme et on mélange mort et vivant dans quelque chose de pas très clair. C'est assez dommage de mon point de vue. J'ai eu l'impression d'être passé à coté de quelque chose, ou de ne pas avoir tout compris... Je ne sais pas ce qu'a voulu faire passer l'auteur et c'est très frustrant.
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Dans une petite maison isolée entre plage et forêt, William traîne son blues depuis sa rupture avec Helena. Pour occuper son temps, il peint mais peu importe le modèle, c'est toujours les traits d'Helena qui se dessinent sous ses pinceaux. Seuls, Rosalie qui pose pour lui et Victor son ami viennent troubler sa solitude. Mais un jour, lors d'une sortie en mer, il rencontre une sirène aussi belle que sauvage. L'histoire qui ne va pas sans évoquer celle d'Andersen ne fait que commencer ....

Quel superbe album ! Les dessins et les couleurs sont magnifiques et les pages alternent entre horreur et poésie. Guillaume Sorel a su distiller une touche de fantastique au milieu de détails réalistes dès le début avec cette belle forêt dense et pleine de mystères, fantastique qui ne fait que croitre au fil des pages. Rêve ou réalité, on oscille constamment entre les deux et le peintre s'enfonce dans une histoire pleine de sensualité et de fureur ou les scènes épiques succèdent au moments intimes.

Suspense, violence, instants de grâce, le scénario réserve quelques jolies surprises dont la fin très réussie.
Et j'ajoute une mention spéciale pour la préface de Pierre Dubois et pour les planches supplémentaires en fin d'album, vraiment superbes !
Lien : https://chezbookinette.blogs..
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J'ai découvert Guillaume Sorel au travers de Hôtel Particulier, et j'avais beaucoup aimé cette ambiance fantastique.
Et je retrouve à nouveau cela dans cette lecture. le décor est différents : une maison sur une plage, à l'orée d'une forêt. Un homme quasiment seul obsédé par le souvenir de celle qu'il aime.
Et une fin qui m'a beaucoup surprise.
Tout cela soutenu par des dessins magnifiques, chacun est une véritable oeuvre a lui seul.... Alors, sur plus de 70 pages c'est un régal pour les yeux.
En plus le volume est compléter par une explication de d'auteur sur la genèse du projet, ainsi que quelques études et peintures sur le même thème.
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Une bande dessinée aux dessins plutôt réussis avec des couleurs à l'aquarelle des plus vivantes. L'histoire d'un homme, peintre en panne d'inspiration et en plein deuil amoureux, passant ses journées isolé dans une maison au bord de mer avec une modèle qui vient régulièrement poser nue pour lui (une BD avec des nus très réussis, d'ailleurs). Mais la mer est jalouse.

L'histoire d'une passion entre un homme et une sirène. Mais…
… Mais les sirènes n'existent pas, non ? Alors ? Comment ?

Un album sympa au scénario peut-être un peu bancal qui ne met pas vraiment en valeur le talent graphique
Lien : https://www.noid.ch/bluebell..
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William, un peintre, vit en ermite dans un atelier au bord des falaises et de la mer, entouré d'une forêt au sol noyé d'un océan de jacinthes sauvages.
Il a bien un jeune modèle, Rosalie, mais ne vit que dans le souvenir de la belle Héléna, son amour perdu. Un jour, sa barque est attaquée par des créatures aquatiques infernales, des sirènes aux dents aiguës. Pourtant, l'une d'elles lui sauve la vie.
Par hasard, je découvre cet album de Guillaume Sorel. « Hôtel particulier » étant pour moi un coup de coeur, l'une des meilleurs bandes dessinées que j'ai lues, je vais me laisser entraîner dans ce bois magique, rempli des fleurs qui enchantent mes printemps.
L'atmosphère est étrange, fantastique. Dans les premières pages, un chien poursuit un chevreuil qui fuit le long d'un sentier envahi par les brumes. C'est là qu'une vignette en bas de page porte le titre de l'album. C'est là que le lecteur quitte le monde quotidien et pénètre dans un univers parallèle. La moitié de la planche suivante est occupée par la forêt couverte du bleu des jacinthes. Une incrustation figure un craquement terrifiant. Une autre précipite un chevreuil sur le sol. le même ? Impossible. Celui-ci arbore une imposante ramure. L'autre n'était qu'un daguet. Pourtant, comme au début, sa chute est accompagnée de quelques feuilles roussies d'automne, alors qu'ici, on est au printemps. Et puis, comme le souligne William, « les chevreuils ne tombent pas du ciel. »
A partir de ce moment, attendez-vous à un monde de l'étrange où se mêlent rêve et réalité. Pourquoi William vit-il en ermite dans des lieux où les seuls êtres vivants sont renards, écureuils et mouettes ? de temps en temps, son ami Victor vient passer un moment avec lui. Il veut découvrir les nouvelles oeuvres de l'artiste. Rosalie est son jeune modèle, mais William ne dessine que de mémoire. le portrait d'Héléna. La femme aimée et sans doute morte.
Et puis apparaissent les créatures marines. La trame de l'histoire est certainement inspirée par le conte d'Andersen, mais un Andersen cruel et un conte pour adultes, où, loin d'être telles la jolie petite statue de Copenhague, celles-ci sont plus proches de leurs ancêtres mythologiques.
La fin apportera la réponse à laquelle on ne s'attendait pas. Il n'y a plus qu'à reprendre au début, à la lumière de cette révélation !
Pour terminer le volume, sous le titre de « La sirène amoureuse », Guillaume Sorel explique la genèse de son récit. le départ de son inspiration provient d'une balade à Guernesey, où, par hasard, il suit un chemin qui s'enfonce à travers la forêt, pour le mener à « cette crique où est bâtie cette unique maison ». Comme moi, il est fasciné par ces fleurs printanières, qu'on nomme, en anglais, « bluebells ».
En 2015, il avait décidé de se consacrer à la peinture et met son « travail de bande dessinée entre parenthèses ». Cet album est fort imprégné de cette atmosphère picturale.
L'addendum est constitué des planches étudiant diverses possibilités de couvertures, des crayonnés pour les visages et expressions des personnages, ou des scènes gigantesques, impressionnantes, qui n'apparaissent pas dans le récit, qui pourraient être des tableaux.
Je qualifierais ce travail de pur chef d'oeuvre Il m'a fascinée.
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A tout galets, une histoire de Petite Sirène.

Il y a quelque chose de précieux dans certains papiers, et je remercie Glénat pour cela, une odeur riche, suave, enivrante quand on en ouvre les livres. J'ai un grand affect des odeurs. En ouvrant ce livre j'ai eu, comme le ressac, des visions de Loisel, Vicomte, Lapierre et j'en passe.

S'ils sont venus me voir c'est qu'ils ont hanté aussi cette sensation que je n'ai que trop peu souvent hélas. Vous savez cette envie qui vous titille avec une pointe de jalousie. A regarder en détail les planches, les scruter, tenter de suivre les traits, admirer la vue d'ensemble. Qui donne cette envie géniale. Dessiner.

L'histoire en elle même tangue entre mythe, conte revisité, hommage, horreur et bizarre. Et c'est ce dernier, le bizarre, qui pêche un peu et rend le récit plus bancal qu'intrigant.

Néanmoins je ne peux que saluer l'ensemble, ils sont rare, du moins sous mes yeux, les livres qui allient superbe et scénar développé.
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William, artiste tourmenté vivant dans le souvenir de sa compagne, s'est retranché dans une maison nichée entre mer et forêt, tout juste dérangé par un renard et quelques écureuils ou encore son ami Victor qui vient parfois lui rendre visite.

Un lieu propice à la rêverie, parsemé de jacinthes des bois, ces fameuses bluebells qui poussent où les fées virevoltent, comme le rappelle Pierre Dubois dans la préface.

Ne cessant de fantasmer son amour envolé à travers dessins et croquis, il ne parvient pas à tourner la page jusqu'au jour où lors d'une sortie en mer il réchappe de peu à une attaque de sirènes et se réveille sur la plage à côté de l'une d'elles...

J'adore les illustrations de Guillaume Sorel même si je ne possède pas grand chose de lui dans ma collection. Je l'ai découvert au fil de quelques planches des contes de l'Ankou et j'ai longuement contemplé ses dessins au cours de ma lecture du cycle des mythagos.

Une fois de plus je suis ébahi devant tant de talent, cet album est une véritable oeuvre d'art empreinte de mystère et de poésie où chaque case est un tableau.

Tantôt bucolique, mélancolique, inquiétant et même frisant l'horreur, les ingrédients du récit sont parfaitement dosés.

La chute est brutale, inattendue mais j'étais prévenu.

N'hésitez pas une seconde à vous y plonger!
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Ce tome contient une histoire complète et indépendante de toute autre. La première édition date de 2018. le récit a été entièrement réalisé par Guillaume Sorel, scénario, couleur directe. Il comprend une introduction de 2 pages rédigée par Pierre Dubois, citant Paul Claudel, et le poème Annabel Lee d'Edgar Allan Poe. Il se termine par une postface d'une page rédigée par Sorel, évoquant sa pause d'un an en bande dessinée pour se consacrer à l'illustration et à la peinture, ainsi qu'à une longue promenade effectuée sur l'île de Guernesey, à la recherche d'un endroit dénommé Bluebells Wood, et la découverte, à la place, d'un lieu plus sauvage et d'une crique où est bâtie une unique maison. S'en suivent 19 pages de recherches graphiques pour la BD, et de peintures sur le thème des sirènes.

À l'automne, sur la lande proche de la mer, un chevreuil est en train de brouter, et il relève soudain la tête. Un chien, la bave aux lèvres, se lance vers lui, menaçant et agressif. Il s'enfuit jusqu'au bois proche et disparaît dans la brume de la forêt aux hyacinthes (Bluebells Wood). Il chute de plusieurs mètres de haut, tombant dans une clairière verdoyante, parsemée de hyacinthes. William John, peintre, a entendu le bruit de la chute, depuis son atelier. Il sort de sa maison sur la plage et pénètre dans le bois. Il y trouve le cadavre du chevreuil. Il ne comprend pas comment il a pu tomber du ciel, à travers les arbres qui sont plus haut que les tours du château d'Édimbourg. Il traîne le chevreuil jusqu'à la petite plage de sable blanc, et il va chercher un couteau pour le dépecer sur une grande roche plate baignant dans l'océan. Il récupère les morceaux, et balance les abats dans l'eau pour que les crabes et les mouettes se régalent. Les mouettes arrivent mais s'éloignent aussitôt sans toucher aux restes.

William rentre chez lui avec sa brouette chargée de viande, ne comprenant pas pourquoi les mouettes n'ont pas voulu de la viande. le soir, il sert le chevreuil en daube à son ami Victor qui est venu lui rendre visite. Il évoque le souvenir d'Héléna, la vie de reclus de William, et son avancée dans ses peintures. Sur la plage, du bruit se fait entendre à côtés des os du chevreuil. le lendemain, les écureuils et le renard de la forêt sont effrayés par quelque chose. William est en train de préparer sa peinture noire. On frappe à la porte ; c'est Rosalie, la femme qui lui sert de modèle. Elle se déshabille et s'installe sur le canapé pour prendre la pose, William ne lui adressant quasiment pas la parole. Distrait par le bruit d'un écureuil glissant affolé sur le toit, il congédie son modèle. Il se rend sur la plage, et met sa barque à l'eau, avec son matériel de peinture. Il a pêché quelques poissons. Une longue ombre passe sous sa barque dans l'eau claire. Il est attaqué par 2 longues sirènes qui s'en prennent à lui et tentent de faire chavirer son esquif.

Le lecteur se réjouit par avance de pouvoir découvrir de nouvelles planches de Guillaume Sorel, qui l'emmèneront dans un endroit chargé de légendes. Il est aux anges dès la séquence d'ouverture composées de 4 planches et une demie, dépourvues de texte, lui offrant de suivre le parcours d'un chevreuil. Il découvre un paysage magnifique, une lande ondulée, avec une herbe déjà brunie par l'approche de l'automne, des feuilles virevoltant au vent, un arbre à la forme torturée suite à l'action de l'anémomorphose, des roches affleurantes, partiellement recouvertes de mousse, et tout ça rien que dans la première case. La quatrième page de bande dessinée lui permet de fouler le sol de la forêt de Bluebells, avec une herbe vive et verte parsemée des tâches bleues des hyacinthes, des troncs vigoureux, un feuillage aux couleurs irisées très haut dans le ciel. Par la suite, le lecteur éprouve l'impression d'entendre le sable de la petite plage, crisser sous ses pas. Il hume l'humidité de l'air marin, en regardant les rochers battus par les flots. Lorsque William est en mer, il se retourne pour admire la côte, à la fois la plage, mais aussi les petites falaises dont la forêt arrive jusqu'en bordure. Il apprécie d'avoir une vue globale de l'anse, depuis la mer quelques pages plus loin (page 54). de la même manière, Guillaume Sorel montre la plage sous plusieurs angles au fil des séquences, à des moments différents de la journée, avec un éclairage variable. L'ambiance n'y est pas du tout la même en plein soleil, qu'à la nuit tombante.

À chaque fois que William retourne dans la clairière aux hyacinthes, le lecteur ressent une forme de sérénité qui se dégage de ce paysage paisible et accueillant, de cette herbe souple et épaisse, de la protection offerte par les hautes frondaisons. La représentation de la maison sur la plage offre tout autant d'intérêt, à la fois sa forme extérieure, sa terrasse s'appuyant sur un mur de pierre, à la fois l'aménagement intérieur, qu'il s'agisse de la salle de bains avec sa baignoire métallique, de la pièce de travail de William avec sa bibliothèque, son chevalet, ses toiles, ses pots à pinceau, ses chiffons, tout le matériel d'un peintre. S'il en éprouve le goût, le lecteur peut laisser son regard s'attarder sur les accessoires de chacune des pièces, l'artiste y ayant inséré de nombreux détails, des cadres souvenirs de William, à un verre d'eau posé négligemment au pied du canapé pour que Rosalie puisse se désaltérer à sa guise, sans avoir à se déplacer. Il y a bien sûr un autre environnement qui occupe une place majeure dans le récit : l'océan. Au fil des séquences, le lecteur peut voir l'eau calme, agitée par de petites vaguelettes avec la nuée de mouettes et de goélands, la magnifique eau bleue plus profonde quand William s'éloigne un peu en barque, une belle eau transparente quand l'ombre d'une sirène passe sous la barque, l'eau ruisselante le long de la barque ou des rochers, les étranges clapotis ponctuels quand la renarde nage, la masse sombre, insondable et agitée quand les vents se lèvent.

La lecture de cette bande dessinée ne procure pas qu'un plaisir esthétique devant la beauté plastique des images. Guillaume Sorel est aussi un vrai conteur, capable de créer des images mémorables, et des séquences impressionnantes. Après avoir refermé cette BD, le lecteur conserve des visions saisissantes à l'esprit, outre la beauté des sites. Il s'agit parfois d'un détail : les poils du pinceau de William trempés dans la peinture, un écureuil dérapant sur une ardoise du toit, les poissons fraîchement péchés s'agitant dans un seau d'eau, le homard encore vivant désorienté sur la table de la cuisine. Il peut aussi s'agit d'un spectacle plus impressionnant comme une nuée de mouettes et de goélands, l'assaut des sirènes sur la barque, le brouillard se levant sur la mer. Il peut encore s'agir d'une séquence muette racontant un moment où l'émotion s'intensifie, car il y a 17 pages muettes sur 70, et encore à peu près autant ne comprenant qu'un seul phylactère ou une seule cellule de texte.

Guillaume Sorel a l'art et la manière d'installer une ambiance ou une sensation au sein d'une scène, avec ou sans mots. Comme le lecteur peut s'y attendre, ce récit comporte une histoire d'amour un peu compliquée. Alors qu'il vit dans une demeure isolée, William John bénéficie de l'intérêt d'une femme et il y a plusieurs séquences de nu. L'artiste met en valeur le corps féminin, sans recourir à des poses lascives ou obscènes, avec des femmes dont la morphologie n'est pas celle d'un mannequin longiligne. Il sait souligner la sensualité de l'une ou de l'autre, en cohérence avec sa personnalité, celle de Rosalie étant très différente de celle des sirènes. Lors des étreintes amoureuses, il reste du côté d'un érotisme doux, faisant ressortir la complicité des amants par des caresses sensuelles. le récit comprend également une dimension angoissante liée aux 2 soeurs de la sirène qui ne partagent pas son intérêt romantique pour un être humain. Sorel s'appuie peu sur des agressions physiques pour faire monter la tension et installer un malaise. Dans son introduction, Pierre Dubois attire l'attention du lecteur sur la savante habileté avec laquelle l'auteur fait sourdre le malaise et l'installe durablement. Au grand étonnement du lecteur, le premier sens sollicité est celui de l'ouïe. de manière chronique, il se produit des bruits étranges et inattendus. le lecteur peut voir sur le visage de William John que ces bruits, ces craquements ne sont pas normaux. Les animaux y réagissent aussi en adoptant une posture inquiète.

Outre le comportement des humains, et les remarques que se fait William (soit en parlant à haute voix comme une personne seule, soit dans de brèves phrases de son flux de pensées), il y aussi le comportement des animaux qui devient parfois contre nature, comme s'il se produisait des événements qui relèvent du surnaturel. La citation en quatrième de couverture indique qu'il s'agit d'un récit avec une dose d'horreur. Il s'agit plus en fait pour l'auteur de faire naître l'effroi, par une accumulation progressive de petits phénomènes inhabituels. Il y a bien sûr l'existence de créatures comme des sirènes, mais le lecteur constate aussi que le comportement de William John ne s'explique pas entièrement de manière rationnelle. Ses soupçons se confirment de manière confuse avec la visite d'Héléna, sans qu'il ne sache exactement à quoi s'en tenir. En cela la référence à Edgar Allan Poe dans l'introduction de Pierre Dubois met la puce à l'oreille du lecteur, et s'avère très pertinente. S'il y est sensible, il retrouve effectivement cette façon de susciter l'inquiétude propre à Poe ou aux autres auteurs que cite Dubois, comme William Hope Hodgson. William John est dans une phase de transition où il doit faire le deuil de sa relation avec Héléna et accepter l'irruption de l'inattendu dans sa vie. Il est en proie à une inquiétude lancinante face à la vie, à l'inattendu que lui réserve l'avenir.

En découvrant une nouvelle bande dessinée de Guillaume Sorel, le lecteur est conquis d'avance par la promesse de planches magnifiques, d'images impressionnantes, transcrivant la beauté et la séduction de la nature, ainsi que les tourments de l'âme humaine, son intranquillité. Ce récit comble ses horizons d'attente, avec l'irruption du surnaturel, une progression déstabilisant aussi bien le personnage principal que le lecteur, la mise en scène d'un merveilleux aussi bien fascinant qu'inquiétant. À la fin le lecteur se rend compte que William John est autant le jouet des circonstances (l'apparition d'une sirène) que de ses traits de caractère qui sont comme une puissance qui modèle sa vie, sans échappatoire possible. En prime, il s'avère que l'intrigue se révèle plus riche que prévue, ne se limitant pas à cette passion entre un homme et une sirène.
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