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Citations sur La Vie obstinée (23)

Ici, même le temps qu’il fait est un agent de cette monotonie. Les matins s’enchaînent une, deux, trois semaines durant sans que varient la température, la lumière, les couleurs , l’humidité, ou, si variations il y a, elles s’opèrent par d’infimes gradations prévisibles et parfaitement négligeables. Jamais une tempête, un orage, un coup de vent ; jamais, à cette époque de l’année, le moindre cumulus. Guère de signes indiquant que l’été fait place à l’automne, si ce n’est le vert intense des madias, qui, aussi avant en saison et comme en se riant de la sécheresse, apposent leurs taches crues sur les versants recuits par le soleil. Le parfum de cette herbe s’impose en même temps que sa couleur ; il recouvre bientôt tout le coin, se laisse porter par les petits courants d’air, vous entête, imprègne chaussures et pantalons, le chat qui a musardé, les placards où l’on a rangé chaussures et pantalons, les mains qui ont caressé le chat.
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L'histoire humaine est, dans sa totalité, sociale et non pas individuelle. Nous avons peu à peu appris à convertir l'énergie vitale en organisation sociale. En dehors de cette société que tous ces jeunes mettent plus bas que terre, l'individu n'existe pas; il ne possède pas de langage, de rôle, d'arts, d'idées, et j'en passe, qu'il ne tienne du groupe social. L'individu est un animal inculte. C'est à la société qu'il doit jusqu'au cheminement de sa révolte.
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Il paraît qu'il y a plus de gens vivant actuellement sur la terre il n'en vécut dans tout le cours de l'histoire humaine. J'ai peine à le croire. [...] Vivant pour quoi ? avais-je envie de demander [...]. Et occupés à quoi ? Là-dessus, j'avais mon idée. Nous nous agitons parce que nous nous agitons, nous bâtissons parce que nous bâtissons, nous nous reproduisons parce que nos reins nous l'intiment, et ensuite nous reportons sur nos enfants, qui ont les leurs et ne veulent pas des nôtres, les espérances que nous ne pouvons plus evoquer à notre sujet sans faire la grimace.
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Je serai, toute ma vie durant, plus riche de ce chagrin

(cette phrase, immense et absolument parfaite, justifie à elle seule la lecture de ce roman)
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Une longue descente nous mena à un couvert plus touffu, maintenant que nous longions le lit asséché du torrent. Le dessous des taillis était tapissé d'asters poussiéreux avec, de temps à autre, un pied de gilia. Certaines herbes, déjà foulées, exhalaient de fugaces odeurs de menthe. J'avisai au milieu du sentier la fumée d'un animal, renard probablement, toute pétrie de poils et de plumes, et, la retournant du bout de mon bâton :
-- Dis donc, ça doit faire mal. Comment se fait-il qu'un brave goupil, tout ce qu'il y a de sauvage et de naturel, souffre hémorroïdes étranglées ?
Composant avec ses lèvres une mimique qui pouvait donner à penser qu'elle allait me siffler un air, Ruth susurra de son ton le plus conciliateur :
-- J'ai un kleenex, si tu veux pour ta collection.
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L'autre soir, debout dans le patio à contempler les astres et les lumières perdues dans les collines, j'ai été parcouru d'une brûlure comme si l'on m'avait injecté du menthol dans les veines, secoué d'une convulsion glacée, envahi par la conscience aiguë et terrifiante que j'étais moi, que j'habitais depuis soixante-quatre ans sous ce crâne qui, de l'intérieur, paraît commodément habituel, mais que je pourrais ne pas même reconnaître s'il m'était donné de m'en éloigner de deux pas pour regarder sa surface dégarnie luire sous les étoiles. C'est moi, cette vieille tête chauve ? Seigneur ! Est-ce là ce qui s'offre au regard de Ruth ? [...] Et si je suis si étrange vu du dehors, suis-je tellement certain de connaître mieux ce qui se trouve à l'intérieur ?
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Assurément, aucun d'entre nous n'est inoffensif, quoi que cherche à nous faire accroire notre petite cuisine personnelle. Quelles qu'aient été nos raisons respectives de venir vivre par ici, aucun d'entre nous n'a pu faire abstraction des autres. L'éleveur obstiné soucieux de monnayer la terre qu'il lui reste ; l'arrière-petit-fils d'immigré italien, sa femme à la santé délicate, sa fille renfrognée, ses adobes aux vertus narcotiques ; la jeune femme en péril, habitée d'un désir éperdu de continuité ; le zigoto qui vivait dans l'arbre et ce zigoto-ci qui vit au sommet de la colline - tous, quelles que fussent nos aspirations, nous avons atterri au sein d'une communauté, avec les conséquences que cela a entraînées. Et au coeur de cette communauté il y avait la petite maison de Catlin.
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Lorsque nous arrivâmes à la voiture, elle nous adressa un sourire littéralement flamboyant, démesuré, intense et troublant.
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Nous allons continuer de synthétiser des hydrates de carbone et de nouvelles protéines pour nourrir nos milliards de bouches. Nous déploierons des trésors d'ingéniosité pour traiter la masse toujours croissante de nos déchets, mais sans toutefois y parvenir pleinement. Nous mettrons au point de nouvelles armes et les parades qui iront avec. Nous inventerons de nouvelles formes de chantage et de nouveaux moyens de pression politique - ou plutôt non : tout ça est déjà pas mal au point; dans ce domaine, il n'y a rien de nouveau sous le soleil. Et puis un beau jour, nous arriverons à faire ce vers quoi nous nous dirigeons depuis qu'au fin fond de la Tanzanie le premier zinjanthrope a ramassé une pierre ou un bâton. Quelqu'un appuiera sur le bouton ou bien un de nos bricolages technologiques nous pétera à la figure et, au bout du compte, détruira toute vie et nous avec.
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Ainsi donc, malgré quelques grincements de dents, je reconnais la réalité de ma conversion. Il se passe pour moi ce qu'un jour je lui ai dit qu'il se passerait pour sa fille. Je serai, toute ma vie durant, plus riche de ce chagrin.
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