AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,89

sur 103 notes
5
5 avis
4
9 avis
3
2 avis
2
1 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Une Saison Amère, c'est le titre imbécile de la traduction extraordinairement médiocre d'un livre pourtant sublime. Aussi comprendrez vous que mes seulement quatre étoiles se réfèrent à la piètre qualité de cette traduction car, en soi, l'oeuvre de Steinbeck en vaut, cinq, six, sept voire huit.

" Une Saison Amère ", quel titre débile ! L'original est un vers du Richard III de Shakespeare totalement effacé dans cette traduction. Mais il n'y a pas que le titre ; Anouk Neuhoff a tout gâché dans cette traduction du style de Steinbeck.

Il existe pourtant une vraie traduction de ce dernier roman de John Steinbeck mais qui ne circule plus que sur le marché de l'occasion et qui était l'oeuvre du traducteur Jean Rosenthal (le traducteur, notamment, de Ken Follett). En somme, si vous en avez l'occasion, évitez à tout prix cette traduction minable et jetez-vous sur l'autre qui s'intitule " L'Hiver de Notre Déplaisir ", qui colle parfaitement à l'original " The Winter Of Our Discontent ".

Outre ce problème de traduction, c'est un chef d'oeuvre de plus à mettre au compte de l'épicier Steinbeck, qui, encore une fois, nous sert un roman plein d'intelligence et d'humour, riche, profond, fin, subtil, complexe et qui suscite la réflexion bien au-delà du domaine qu'il explore.

« Now is the winter of our discontent
Made glorious summer by this sun of York ;
And all the clouds that lour'd upon our house
In the deep bosom of the ocean buried. »
Cette première tirade de Richard III colle à merveille au propos que souhaite véhiculer l'auteur. Voilà un homme, John Steinbeck, qui est né, qui a grandi et vécu une bonne partie de sa vie en Californie du début du XXe jusqu'après la seconde guerre mondiale. La tragédie, pour lui, c'est qu'entre temps, son pays est devenu la première puissance mondiale, sa population a explosé et son mode de vie s'est métamorphosé du tout au tout. La Californie agricole de son enfance n'est plus qu'un très lointain souvenir ; désormais, c'est le temple du high tech, du business et de la superficialité.

Il ne s'y reconnaît probablement plus beaucoup au début des années 1960 (voir à ce propos des mutations survenues en Californie durant l'entre-deux-guerres le roman graphique d'Emmanuel Guibert, L'Enfance D'Alan) de sorte qu'il finit même par s'installer sur la côte Est, celle des origines de son pays.

Il ne faut donc probablement pas s'étonner si l'auteur choisit pour établissement de son dernier grand roman une ville imaginaire, New Baytown, mais qu'il est aisé de situer sur Long Island, en tant qu'ancienne ville baleinière, une ville de pionniers totalement dépassée par le mouvement des années 1960. Au passage, l'auteur fait très certainement un clin d'oeil à Moby Dick, un type d'ouvrage qui lui aussi appartient au passé, du temps des glorieux pionniers de l'Amérique.

Le narrateur et personnage principal, Ethan Hawley, est issu d'une des anciennes grandes familles de la ville. Son père a perdu toute la fortune de la famille ; ne subsiste que le nom (mais ce qui est déjà mieux que rien). Ce faisant, Ethan est désormais garçon d'épicerie au service d'un émigré italien de première génération, ce qui est une sorte de relégation sociale indéniable.

Ethan s'en accommoderait assez bien s'il ne tenait qu'à lui. C'est un employé modèle, honnête et travailleur, qui fait l'ébahissement de son patron italien qui se demande toujours, avec son regard suspicieux qu'est-ce qui peut bien se cacher derrière une telle incompréhensible honnêteté.

Ethan, homme de la quarantaine, est marié avec une femme qu'il aime et qui le lui rend bien. Ils ont deux grands enfants de l'âge de l'adolescence. Malgré tous les sentiments qui unissent Ethan à sa famille, il sent bien dans leur regard qu'un peu d'argent supplémentaire et une situation professionnelle et sociale supérieure leur conviendrait mieux et le grandiraient à leurs yeux.

Le problème d'Ethan, c'est qu'il est à la fois intelligent, lucide et moral. le sang Hawley qui coule dans ses veines vient souvent lui rappeler qu'il est issu de fiers marins besogneux : des gens francs avec des valeurs. Derrière son comptoir, Ethan observe tout, comprend tout, et comprend surtout qu'il n'a pas l'âme d'un homme d'affaire.

Les compromissions, les entourloupes, les coups bas pour arriver à tirer son épingle du jeu le révulsent. Pourtant, il voit tout, il sent tout, il est capable comme Gloucester de devenir Richard III, mais que va-t-il devoir abandonner ou trahir pour se hisser sur le trône qui lui ouvre les bras ?

John Steinbeck nous offre en guise de testament littéraire une sensationnelle réflexion sur la réussite, économique et sociale, sur la notoriété, sur la possession et l'argent. Pour lui, comme pour Georges Brassens, les trompettes de la renommée sont vraiment très mal embouchées. Pourtant, c'est le visage de son Amérique : la réussite à tout prix, quel qu'en soit le prix ; quitte à tricher, quitte à tuer discrètement, quitte à écraser autrui, quitte à voler mais en conservant toujours la face en se réfugiant derrière un joli tampon officiel de légalité.

Voici l'argent, voici le trésor, voici la récompense, elle ne vous appartient pas mais vous pourriez aisément mettre la main dessus discrètement en toute dignité. Pour cela, il suffit juste d'aider un mourant à rejoindre rapidement sa tombe, ou de passer un petit coup de fil aux services de répression pour attirer l'attention sur les affaires d'untel ou d'untel. Que dit votre âme ?

L'auteur, avec son sens de l'humour et de la facétie, utilise la parabole, et même la parabole dans la parabole, au travers d'un jeu-concours comme seule l'Amérique des années 1960 peut en organiser : faire un texte sur « Combien j'aime l'Amérique », une compétition à laquelle les deux enfants d'Ethan vont participer et dont les résultats sont très certainement à l'image de ce que l'auteur pense de son pays, du moins de ce qu'il est devenu.

En somme, un livre à ne pas rater (mais à ne pas lire dans cette traduction bidon Une Saison Amère), assurément l'un de mes coups de coeur de l'année. Bien entendu, tout ceci n'est que mon avis, en espérant qu'il ne fera pas votre déplaisir en cette saison qui vient de voir finir l'hiver, car, tout bien pesé, il ne représente pas grand-chose.
Commenter  J’apprécie          1313
quel talent !! à lire d'urgence
intrigue très bien ficelée, humour, tendresse, lutte entre honnêteté et corruption, tout y est !
Commenter  J’apprécie          321
Un steinbeck,pioché dans une caisse de livres voyageurs dans une asso's de ma ville ,et qui m'a reposé après la lecture très dure du : manufacturier de M. Köping.
Un style ,une atmosphère et une ambiance qui m'a replongée quelques années en arrière lorsque je lisais du Steinbeck,É.Caldwell ,R Wright, Pearl Buck etc.....Mes années collège et lycée...
Au travers notre personnage Ethan tout en humour décalé et caustique qui se glorifie de son honnêteté : je ne suis qu'un petit vendeur honnête qui me contente de ce que j'ai,à la " botte" d'un patron italien ,eh bien rira bien qui rira le dernier ,car sous son apparence bon enfant Ethan cache bien son jeu, et entre les lignes nous voyons une critique habilement dissimulée de l'Amérique des années 60.
Beaucoup de tendresse ,d'humour et aussi un certain sarcasme car la société américaine en prend " plein son grade" .
Un retour en arrière,pour moi ,quelque peu nostalgique,mais de temps en temps cela fait du bien de retrouver ces écrivains qui nous ont marqués dans notre jeunesse .
Commenter  J’apprécie          260
Tous se liguent contre Ethan Hawley commis épicier pour qu'il redore le blason de sa famille déchue. Descendant d'une des familles fondatrices de cette petite ville de province, enrichie grâce à la pêche à la baleine, et qui a lentement périclité avec l'émergence de l'industrie pétrolière il est l'employé modèle du commerce que sa famille possédait jadis.....Sa philosophie est tout autre, heureux et débonnaire; il observe lucide cette agitation et va tenter de répondre aux pressions de tous.
Commenter  J’apprécie          149
Un Steinbeck hors norme. Une comédie ou un drame ? Ce héros presque parfait, sans histoire, qui plie mais ne rompt pas, va-t-il surprendre tout le monde, rouler dans la farine ses concitoyens qui eux flirtent avec l'illégalité ou va-t-il rester droit et sans tâche au risque de perdre l'admiration de sa famille ?
On sourit, on s'attendrit, puis on rit jaune et parfois on sent un noeud dans l'estomac quand le drame semble inéluctable.
A lire absolument par tout adepte de Steinbeck.
Commenter  J’apprécie          110
La famille d'Ethan Allen Hawley possédait autrefois une grande partie de la ville de New Baytown. Désormais, Ethan est commis dans l'épicerie qui appartenait à son père. Son épouse Mary et ses enfants Allen et Ellen savent plus ou moins subtilement lui reprocher leur pauvreté et la perte de leur niveau social. « L'argent effacerait les sourires méprisants sur les visages de tous ces affreux bêcheurs. / Personne ne méprise les Hawleys. / C'est ce que tu crois ! Tu ne le vois pas, c'est tout. / Peut-être parce que je ne cherche pas à le voir. » (p. 50) Alors, et bien qu'il s'enorgueillisse d'être un homme de valeur, Ethan met en place un plan retors pour rendre aux siens le confort matériel dont ils rêvent. du week-end de Pâques au week-end du 4 juillet de l'année 1960 se noue un drame patient aux conséquences nombreuses.

Difficile de trop en dire sans détailler le plan complexe d'Ethan. « Je voudrais bien connaître le secret des affaires. / Je peux vous dire tout ce que je sais en une phrase. L'argent attire l'argent. / Voilà qui ne m'aide pas beaucoup. » (p. 77) Tout commence avec un tirage de tarots, s'agrémente d'une proposition de pot de vin et d'un héritage de 5 000 dollars, et repose sur un projet plus ou moins secret porté par la municipalité. Si Ethan met de côté ses principes, allant jusqu'à envisager le pire, il ne peut se départir d'un remords profond. « Et si j'oubliais les règles un moment, je savais que j'en conserverais des cicatrices, mais celles-ci seraient-elles pires que les stigmates de l'échec que je portais ? Être vivant, de toute façon, c'est avoir des cicatrices. » (p. 122) Dans les monologues qu'il adresse aux objets ou aux disparus, il pèse le bien-fondé de sa démarche tout en repoussant les avances de Margie Young-Hunt. « Dans les affaires comme en politique, un homme doit tailler son chemin à grands coups de machette à travers la foule pour devenir Roi de la Montagne. Une fois arrivé là-haut, il se montrer grand et magnanime, mais il doit d'abord arriver là-haut. » (p. 198)

J'avoue ne pas comprendre pourquoi la narration passe en un chapitre de la troisième à la première personne, mais j'ai apprécié ce roman qui ne ressemble pas aux Raisins de la colère ou À l'est d'Eden. John Steinbeck démontre une nouvelle fois à quel point il aime dépeindre les petites gens et leurs tourments moraux. S'il le fait ici avec un cynisme nouveau, ce dernier reste imprégné de tendresse et de commisération. À l'instar d'Hamlet qui ne sait pas s'il doit vraiment embrasser le destin qu'on lui a tracé, Ethan s'engage avec réticence sur le chemin escarpé de la richesse et rien n'assure qu'il atteindra sa destination. Un grand roman très humain, comme toujours avec Steinbeck.
Commenter  J’apprécie          81
Prix Pulitzer en 1940 pour Les raisins de la colère, John Steinbeck reçut en 1962 le Prix Nobel de littérature. Parmi ses seize romans, on peut citer notamment quelques titres illustres comme Des souris et des hommes, Rue de la sardine ou À l'est d'Éden. Une saison amère est un ouvrage moins connu de l'auteur, son dernier pourtant, paru un an avant son élection au Nobel et sept avant sa mort.

Le titre de l'ouvrage bénéficie d'une traduction libre, son titre original étant The Winter of our Discontent : « L'hiver de notre mécontentement » (le titre anglais reprend les premières lignes de Richard III de William Shakespeare).

Le récit suit la vie d'Ethan Hawley, un père de famille issu d'une grande famille désargentée d'une ville portuaire des États-Unis. Ethan travaille comme commis dans une épicerie pour un émigré italien, qui lui a fait fortune, au contraire de la famille Hawley, WASP bien sous tous rapports. Ethan est un homme intègre au coeur pur, un bon père de famille, un bon mari, un travailleur honnête et droit, qui se contente de sa situation sociale détériorée et l'accepte sans amertume.

Pourtant, la position passée de sa famille fait de lui, au regard de tous, un déclassé social. Sa femme et ses enfants eux-mêmes semblent lui reprocher, ou tout du moins regretter les ors passés. Ethan, influencé par son entourage, décide donc de se mettre en quête des richesses perdues, quitte à bafouer son intégrité morale.

L'ouvrage est une réflexion sur le prix éthique à payer pour gagner de l'argent et devenir riche. Jusqu'où cet homme sympathique et honnête est prêt à se compromettre pour se faire une situation ? L'histoire est divertissante et l'auteur propose autour d'Ethan de nombreux personnages truculents qui vont, malgré eux, pousser le héros sur le chemin de la roublardise et de la cupidité. Avec humour et derrière une légèreté trompeuse, Steinbeck raconte l'altération d'une belle âme pour obtenir une belle situation. Les stratagèmes du héros sont ingénieux et l'arnaque est amusante à suivre, mais il ne faut pas se fier à cette joyeuse candeur affichée, car derrière, le propos est sombre.

L'aventure d'Ethan et de ses proches permet à Steinbeck de porter un regard acide sur son pays et son rapport à l'argent et au succès. La question sociale est évidemment au coeur de l'oeuvre de l'auteur. le plus souvent il la traite en se rangeant du côté des indigents pour nous faire partager leurs souffrances et leur humanité comme dans Des Souris et des hommes ou Les Raisins de la colère… Ici le procédé est différent. Pas de compassion, pas de drame social, mais une virulente critique de l'argent roi et de la quête de reconnaissance des hommes, qui même bons, même sincères, sont prêts à se pervertir pour briller dans les yeux des autres.

La construction narrative est assez étrange, alternant le point de vue subjectif d'Ethan avec celui omniscient d'un narrateur extérieur pour des raisons qui m'échappent. Mais le style satirique est enlevé et l'on retrouve un peu de la veine comique de l'auteur, à l'image de Tortilla Flat.

Au final, cela donne un livre plutôt agréable à lire, qui derrière la farce et l'arnaque savamment ourlées, cache un réquisitoire sur l'ambition de la richesse. Il m'a pourtant laissé un sentiment mitigé. Peut-être m'a-t-il semblé trop évident dans sa démonstration ? Peut-être trop léger d'apparence pour son fond amer ? Trop amusé et amusant pour être véritablement prenant ? Je ne saurai le dire. Reste que l'auteur a du métier et que même si cet opus ne fait pas partie de ses meilleurs livres, il reste parfaitement recommandable !


Tom la patate

Lien : http://coincescheznous.unblo..
Commenter  J’apprécie          20
UNE SAISON AMÈRE de JOHN STEINBECK
Exit la Californie et la vallée de Salinas, nous sommes dans le Nord Est en Nouvelle Angleterre. Ethan est l'héritier ruiné d'une des familles fondatrices de New Bayton. Il est employé dans une épicerie dont Marullo est propriétaire. Ethan est honnête, marié, un petit garçon. Il accepte sereinement sa situation bien que, régulièrement, un banquier, un homme d'affaires, une amie s'étonne de sa passivité et de son apparente satisfaction. Ethan écoute, enregistre, s'informe. Est il prêt à changer et si tel est le cas, jusqu'où est il prêt à transgresser sa morale.
C'est un genre de conte moral auquel nous convie Steinbeck, tout en finesse , il fait évoluer Ethan dans un plan diabolique. Roman à suspense, c'est le dernier qu' écrira d'ailleurs Steinbeck ( paru en 1961)dans un langage bien moderne dans lequel j'ai eu du mal à retrouver le Steinbeck de ses grands romans, problème de traduction peut-être. Malgré ce petit souci, je vous conseille ce livre plein d'humour et d'intelligence.
Commenter  J’apprécie          10
Ethan est le type bien par excellence. Il travaille dans l'épicerie historiquement familiale sauf qu'aujourd'hui, ruiné, il n'en est plus que commis, employé par son italien de patron. Mais il fait preuve de philosophie. Rigoureux, droit et foncièrement honnête, il est spectateur d'un univers dans lequel ces valeurs n'ont pas cours, et il assiste, inadapté, à un laxisme moral généralisé.

Sous la forme d'une fable très critique, à travers le portrait de cet homme, John Steinbeck s'interroge sur la droiture et sur les limites de l'honnêteté. Dans cette société de la banalité du vice, l'opportunisme fait office d'échelon social et la reconnaissance se mesure aux finances alors que l'intégrité est réservée aux marginaux.

La suite sur mon blog.
Lien : http://touchezmonblog.blogsp..
Commenter  J’apprécie          10


Lecteurs (262) Voir plus



Quiz Voir plus

Des souris et des hommes

En quelle année est paru ce roman de John Steinbeck ?

1935
1936
1937

10 questions
908 lecteurs ont répondu
Thème : Des souris et des hommes de John SteinbeckCréer un quiz sur ce livre

{* *}