The Amazing Spider-Man Revelations

Ce tome fait suite à Coming home (épisodes 30 à 35). Il contient les épisodes 36 à 39, initialement parus en 2001/2002, écrits par Joseph Michael Straczynski (en abrégé JMS), dessinés par John Romita junior (en abrégé JRjr), encrés par Scott Hanna, mis en couleurs par Dan Kemp. Ces épisodes ont été réédités dans Amazing Spider-Man by Straczynski Ultimate collection 1 (épisodes 30 à 45).

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*** Épisode 36 - Cet épisode a été écrit en 2001, en commémoration de l'acte de terrorisme du 11 septembre 2001, et de la destruction des tours du World Trade Center à New York. Spider-Man arrive sur le site de Ground Zero alors que les tours viennent de s'effondrer. Il apporte son aide aux secours. D'autres superhéros participent également aux opérations de sauvetage. La narration est faite au travers de cellules de texte, évoquant l'incapacité des superhéros (ou des autorités) à prévoir la catastrophe, mettant en lumière l'héroïsme des pompiers, médecins et quidams, pleurant la mort des innocents, refusant de stigmatiser une communauté comme étant responsable de ces actes odieux, écartant la guerre comme réponse, appelant à refuser de plier sous la terreur.

Pour bien comprendre cet épisode, il faut garder à l'esprit qu'il a été écrit dans les jours qui ont suivi les attentats du 11 septembre 2001. JMS hérite donc d'une tâche périlleuse : retranscrire le sentiment des newyorkais et d'une nation par le biais de la réaction d'un newyorkais de fiction (Peter Parker). Il met en avant le courage et la fraternité des individus touchés par la catastrophe. En cela, JMS reprend un thème qui apparaît sporadiquement dans les comics : le rappel des vrais héros de la réalité (par exemple, déjà en 1978, Chris Claremont et John Byrne avaient consacré un épisode de Marvel Team-up à louer le courage des pompiers newyorkais, épisode 75 dans Spider-man: Marvel Team-up).

Il développe un discours alliant refus de ployer sous la terreur et une forme de tolérance, assez courageuse de sa part, refusant des représailles basiques. En cela, sa prise de position correspond aux valeurs humanistes de Spider-Man. Dans les images, JRjr prend soin de montrer une foule d'anonymes multiraciales, pour éviter lui aussi de stigmatiser un peuple ou une communauté.

Néanmoins, JMS et JRjr se heurtent à la nature même des comics de superhéros. En choisissant d'intégrer des gugusses aux costumes bariolés et aux capacités surhumaines, ils aboutissent à des absurdités. JRjr dessinant Doctor Doom la larme à l'oeil face aux décombres, c'est ridicule et débile. Il s'agit d'un individu qui sème la destruction en guise de tactique de base, qui tue sans remord à longueur d'épisode. Dans son soliloque, JMS met ces actes barbares sur le compte de quelques individus sous l'emprise du mal (evil). Là aussi, le lecteur esquisse une petite grimace devant une analyse aussi réductrice. Il est tout à son honneur qu'il réussisse à exposer une position loin de tout appel à la haine, mais la dimension géopolitique est totalement ignorée. Appliquer la dichotomie Bien/Mal à la politique internationale ne semble guère approprié. 4 étoiles.

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*** Épisode 37 - Peter Parker observe Jennifer (une de ses élèves) en train de dormir pendant son cours. le proviseur lui indique que le frère de Jennifer est un drogué, et qu'elle l'aide à faire ses devoirs pour qu'il ne soit pas renvoyé de l'école. Parker décide de faire un détour en rentrant chez lui, pour passer devant l'appartement de Jennifer.

N'ayant peur de rien, JMS creuse la veine du réalisme social, avec cette fois-ci le sort de 2 mineurs livrés à eux-mêmes. Il a l'intelligence de laisser Spider-Man de côté, au profit de Peter Parker qui semble plus à même de se confronter à ces personnes en détresse. du coup l'habilité de JMS ressort mieux, avec un récit sans angélisme, ni pathos exacerbé, pour un drame qui n'a pas de solution miracle. Si le lecteur est à nouveau en droit de se poser la question de la pertinence d'une telle thématique dans une aventure de Spider-Man, il n'y a pas de hiatus comme dans l'épisode précédent. L'histoire est racontée avec tact, et JRjr applique la même retenue sur son approche graphique. Il soigne ses décors qui permettent au lecteur de constater le dénuement des personnages, sans tomber dans le misérabilisme à sensation. Les personnages présentent des visages expressifs, là aussi sans exagération. L'histoire se lit avec émotion, et débouche sur une fin évitant le manichéisme. 4 étoiles.

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*** Épisode 38 - May Parker rend visite à Peter et ils ont une discussion à coeur ouvert pendant 22 pages.

Toujours plus ambitieux, JMS décide de changer le statu quo de la série de manière significative en donnant une nouvelle vision de tante May. Fini la petite vieille fragile, et place à une personne âgée plus crédible. Dans une longue discussion, JMS met en scène deux individus minés par leur culpabilité réciproque, capables de prendre du recul sur eux-mêmes. D'un point du vue formel, le lecteur a l'impression d'assister à une scène de théâtre dans laquelle les 2 protagonistes exposent leurs points de vue dans des tirades vivantes. du point de vue du fond, JMS dresse un portrait saisissant de pertinence de May Parker, adulte, éloigné du cliché de femme fragile un peu bêtifiante.

Chapeau bas à JRjr : il réussit à faire passer cet épisode de dialogues sans ennuyer le lecteur. Il y a bien des pages dont les 2 tiers reposent sur des têtes en train de parler dans une case, mais elles restent minoritaires. Il utilise le dispositif bien pratique d'alternance d'angles de vue pour ne pas lasser le lecteur. Mais il ne se repose pas que sur cet artifice, utilisant également des mouvements de caméras, ainsi que des mouvements des 2 personnages qui sont crédibles, sans exagération pour compenser la nature statique de cet épisode. Globalement les expressions des visages sont également mesurées, à 2 ou 3 exceptions près. Plus impressionnant, au fil des pages, le lecteur s'aperçoit que les dessins participent activement à étoffer tante May pour en faire une femme âgée crédible.

Totalement inconscient, JMS fait table rase de l'aspect le plus puéril de la relation May-Peter, dans un épisode sans action, passant tout seul grâce à un travail discret et efficace de JRjr. 4 étoiles.

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*** Épisode 39 - Il s'agit d'un épisode sans paroles (ni dialogues, ni cellules de texte) pendant lequel Mary Jane Parker, Peter Parker et May Parker vaquent à leurs occupations.

Cet épisode participe de la même volonté d'innovation que les 3 précédents : JMS va exposer les liens affectifs qui unissent les 3 personnages principaux, sans utiliser de mots. À la limite de l'inconscience, grisé par le succès des 3 épisodes précédents, JMS persévère. D'un côté ce genre d'épisode muet constitue une provocation pour les lecteurs qui ont tendance à se plaindre d'une lecture de 5 minutes payée au même prix que celle qui leur en prend le double. En outre il s'agit d'un pari risqué reposant à 90% sur les qualités professionnelles du dessinateur. de l'autre côté, si les 2 créateurs sont à la hauteur (scènes lisibles et compréhensibles), ils réussissent à impliquer le lecteur d'une manière originale, en l'obligeant à formuler par lui-même le lien qui unit chaque case.

Force est de reconnaître que JRjr est à la hauteur du défi, et que chaque page se lit avec aisance, sans aucune difficulté de compréhension, retranscrivant aussi bien les actions, que l'état d'esprit des personnages. Chaque séquence est fluide et explicite. Oui, cet épisode se lit 2 fois plus vite qu'un épisode avec du texte, mais le lecteur a plus envie de s'attarder sur une case, un visage, une posture pour faire durer un peu plus ce moment avec tel personnage, cet instant fragile d'intimité.

JMS et JRjr prouvent à la fois leur talent et leur complémentarité, dans un exercice de style périlleux, totalement maîtrisé. 5 étoiles.

Si chaque épisode pris un par un semble présenter un défaut significatif, l'ensemble de ce tome constitue une aventure peu commune du fait de la volonté affichée d'innovation du scénariste. C'est la raison pour laquelle, dans son ensemble, il mérite 5 étoiles. La narration reprend sa forme habituelle dans le tome suivant : Until the stars turn cold (épisodes 40 à 45).