Inaugurée en 2018 avec le premier tome des « Montagnes hallucinées », la collection « Les chefs d'oeuvre de
Lovecraft » publiée par les éditions Ki-Oon et signée de l'artiste japonais
Gou Tanabe connaît depuis un large succès et s'enrichit d'année en année. En 2021 ce sont ainsi deux nouveaux textes majeurs du maître de l'horreur qui sont venus s'ajouter à la liste, «
Celui qui hantait les ténèbres » et le premier tome de «
Le cauchemar d'Innsmouth ». Écrit dans les années 1930, le récit est le seul a avoir été édité sous forme de livre du vivant de l'auteur, et son succès équivaut bien ce
lui des « Montagnes hallucinées » ou de «
L'appel de Cthulhu ». On comprend sans mal pourquoi... L'ouvrage met en scène un jeune homme amateur d'antiquités et de généalogie parti faire un peu de tourisme dans la Nouvelle-Angleterre des années 1920. Alors qu'il est en route pour Arkham afin de suivre la trace de la famille de sa mère, le voyageur se voit contraint, pour des raisons budgétaires, de faire un arrêt à Inssmouth, ville côtière autrefois florissante mais sur laquelle circule désormais les plus folles rumeurs. Tous ceux amenés à croiser son chemin
lui déconseillent d'ailleurs de s'y rendre : on prétend que la ville a été ravagée par une terrible maladie venue des mers du sud et que les habitants restants présentent depuis des difformités répugnantes qui suscitent l'aversion de tous. Loin de décourager le jeune homme, l'hostilité des habitants des environs ne fait que renforcer sa curiosité : le voilà donc en route pour passer une journée à Inssmouth ! Seulement, une fois sur place, force est de reconnaître que les rumeurs n'ont pas vraiment menti. L'ambiance est lourde, les résidents effectivement repoussants par leur aspect et fort peu accueillants, et puis il y a cette impression d'être observé qui ne quitte pas notre héros et le plonge dans un malaise de plus en plus grand à mesure qu'il arbore les rues décrépites d'Innsmouth.
Considéré par l'éditeur comme « l'un des piliers du mythe de Cthulhu », «
Le cauchemar d'Innsmouth » met en effet en avant un certain nombre d'éléments emblématiques de la légende des Grands Anciens : des créatures étranges issues de la mer, un ordre secret qui sert d'intermédiaire, un pacte obscure conclu entre une poignée d'habitants et des êtres terrifiants, la folie qui rode et menace d'engloutir le protagoniste et les rares témoins qu'il parvient à interroger… Quand bien même nous n'avons affaire ici qu'à la première moitié du récit, on peut néanmoins déjà constater la qualité de l'intrigue de même que celle de la construction narrative reposant à nouveau sur un enchaînement de flashbacks qui révèlent chaque fois un morceau supplémentaire de l'histoire de la malédiction d'Innsmouth. Comme souvent, la curiosité du protagoniste est le moteur de l'histoire et c'est sa quête à la recherche de la vérité qui va le faire basculer progressivement et envisager l'existence de créatures si effroyables que la raison de tous ceux confrontés à leur materialité vacille. La manière dont
Lovecraft parvient à instaurer peu à peu un climat d'angoisse est une fois encore bluffante, la tension montant crescendo jusqu'à cette semi-conclusion qui nous laisse pantelants à l'idée du terrible engrenage dans lequel le protagoniste a, malgré
lui, mis le doigt. Les dessins de
Gou Tanabe sont pour leur part toujours aussi réussis, les vues d'Innsmouth, de ses maisons abandonnées, de ses ruelles désertes et surtout de ses habitants au physique si repoussant participant grandement à l'instauration du climat de peur qui imprègne la majeure partie de l'ouvrage. le livre en
lui-même bénéficie pour sa part d'un soin toujours aussi particulier, la couverture arborant à nouveau ce très bel effet cuir qui fait de chaque ouvrage un magnifique objet de collection.
Septième récit de
Lovecraft à faire l'objet d'une adaptation par
Gou Tanabe «
Le cauchemar d'Innsmouth » est un texte qui donne des frissons et séduit tant par le mystère qu'il met en scène que par la manière redoutablement efficace avec laquelle l'auteur introduit insidieusement la peur dans l'esprit du lecteur. La qualité est également à nouveau au rendez-vous du côté des illustrations qui collent à merveille à l'ambiance de ce récit déterminant concernant
le mythe de Cthulhu et qui plaira certainement autant aux fans inconditionnels de
Lovecraft qu'aux néophytes qui souhaiteraient se familiariser avec son oeuvre.
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