Citations sur Une vie à soi (52)
La photo fascine par la perfection froide de ses lignes verticales et horizontales : parallélisme et symétrie des deux chaises longues et des deux corps allongés, ligne de démarcation très nettement dessinée entre la pelouse et la haie d’arbres, contraste entre les corps écrasés à terre et les arbres dressés vers le ciel. Tout est parfait et glacé, tout suinte l’argent et l’effrayante solitude.
C’est ton regard à nouveau qui me frappe, ton regard craintif, soumis, tandis que celui de ton frère me paraît fier et rempli d’assurance.
Ton regard, qui m’attrape et ne me lâche plus.
Ton regard, qui vient se nicher au plus profond de moi.
Qui vient s’y tapir, blottir, comme s’il était chez lui.
Je traverse mon enfance comme on travers une immense nappe de brouillard, dans une frayeur silencieuse.
Car il y a des rencontres qui sauvent. Elles vous saisissent au corps, elles vous soulèvent du sol auquel vous êtes englué, elles vous font passer de la nuit à la lumière.
Je ne savais pas, auparavant, la joie que c’était d’être vivant.
Une joie si violente qu’elle crée en moi une morsure douloureuse.
Je ne le savais pas. Je ne savais pas que j’aimais tant être en vie.
"J'ai compris qu'il y a ce que les gens paraissent, et ce qu'ils sont. Et que ces deux mondes-là, parfois, sont parfaitement disjoints. S'obstiner à toute force à en chercher le trait d'union vous fait tomber dans des trous noirs."
Les mots s'écrivaient, je les découvrais. C'était celle que j'étais qui commençait à s'écrire, et que je reconnaissais enfin. C'était celle que j'étais qui commençait à exister. J'avançais vers des territoires interdits : ceux situés de l'autre côté des convenances, des masques, des décors parfaits. J'avançais mot après mot vers le vivant.
A quoi ma rencontre avec Diane Arbus a-t-elle tenu? A rien, à la lumière et à la solitude de ce jour d'automne, au souvenir du musée du Jeu de Paume avec mes parents. A rien. J'en ai rétrospectivement le vertige. Car il y a des rencontres qui sauvent, elles vous saisissent au corps, elles vous soulèvent du sol auquel vous êtes englué, elles vous font passer de la nuit à la lumière.
A quoi ma rencontre avec Diane Arbus a-t-elle tenu? A rien, à la lumière et à la solitude de ce jour d'automne, au souvenir du musée du Jeu de Paume avec mes parents. A rien. J'en ai rétrospectivement le vertige. Car il y a des rencontres qui sauvent, elles vous saisissent au corps, elles vous soulèvent du sol auquel vous êtes englué, elles vous font passer de la nuit à la lumière.