Citations sur Journal de nage (44)
La mer n'a pas d'âge. Elle ne procède pas, à l'image des montagnes, par strates successives datables. L'effacement est son principe. Chaque vague annule la précédente. Etre propulsé dans l'intemporel est un élément de la joie de nager. La mer n'a pas d'âge, le nageur non plus.
Nager apprend à s'adapter.
Il y a un savoir de la houle.
L'écriture est le coup de talon qui opère la bascule de la mort à la vie.
Elle est la force unique, et mystérieuse, de sauvetage,
De salut.
Alors que je nage vers la bouée, un gardien, du haut de la chaussée, me crie : « On ferme ! » À 20 h30 paraît-il.
Il crie cela face à la Méditerranée et, au-dela, de l'autre côté, à l'Algérie et, encore plus loin s'il lui reste un filet de voix, à l'entièreté du continent africain.
ON FERME !
Il ne faut pas s'écarter, pour dire notre propre corps ou en relation avec des corps qui nous importent, d'un principe de délicatesse. Toute faute, toute intrusion d'une grossièreté héritée de siècles de misogynie s'insinue, malgré nous, en haine ou honte de soi.
Certains mots charrient des traces de rires gras et de brutalités, des restes de camaraderie de bordel.
La mer n'a pas d'âge. Elle ne procède pas, à l'image des montagnes, par strates successives datables. L'effacement est son principe. Chaque vague annule la précédente. Etre propulsé dans l'intemporel constitue un élément de la joie de nager. La mer n'a pas d'âge, le nageur non plus.
J’ai découvert les piscines à l’âge de 15 ans , en Angleterre en même temps que le flirt . Ça a à voir : piscines et flirt relèvent d’un jeu avec les limites . Le flirt m’a davantage impressionnée, encore que ça ne m’ait jamais complètement plu- par définition . De même que le masochisme est par définition une passion dévalorisée . Et c’est dommage car ne pas mesurer son importance nous empêche de comprendre beaucoup de comportements de la sphère intime , professionnelle et politique .
Je suis fatiguée des gens qui nagent pour prouver, que ce n’est pas Tchernobyl, que c’est Tchernobyl , qu’ils existent , qu’ils ne sont rien . J’ai envie de nageurs qui nagent pour nager .
L'été, à Nice, je me réveille en trois fois, une première fois quand j'ouvre les yeux (les chants des oiseaux, à l'aube, ont déjà fissuré l'enclos de mon sommeil), une deuxième avec le café, une troisième, la plus vivifiante, le véritable éveil : quand je plonge la tête dans l'eau.
Fraîche et claire. Je nage parallèle à la côte. Des petites vagues rencontrent ma joue gauche. Ce n'est pas une gifle, seulement un contact plus appuyé. L'autre joue n'éprouve rien de tel. La dissymétrie fonctionne comme un aiguillon. Jour de Soleil est aussi jour d'un infatigable désir de nager. Je nage un moment dans l'instant sans me préoccuper du suivant. Je suis contente telle quelle, quasi inactive, attentive à sentir la profondeur bleue sous moi, qui me porte et rend tout effort inutile. Je suis cette humeur d'abord, humeur dérive, humeur planche mais face opposée.