Dans ce second volume, j'ai retrouvé Hakim là où je l'avais laissé, à savoir en Turquie, sur le point d'emménager à Istanbul avec sa femme enceinte et sa belle-famille. Mais son beau-père, n'arrivant toujours pas à trouver du travail et voyant ses économies fondre comme neige au soleil, prend la décision de rejoindre la France. Une fois là-bas, il réussit à rapatrier les siens (légalement). Mais n'ayant pas d'actes de mariage et de naissance, Hakim et son bébé (sa femme a accouché entre temps) ne peuvent partir avec eux et se retrouvent seuls. En plus de devoir subvenir aux besoins de son fils, financièrement parlant, Hakim apprend à être père. Il ne devait s'écouler que trois mois avant qu'Hakim puisse retrouver sa femme, le temps pour elle de faire le nécessaire et de composer avec l'administration française. Or, les démarches sont longues et n'aboutissent finalement pas. Voilà presque un an que le petit Hadi n'a pas vu sa mère... Se retrouvant dans une impasse, dans l'impossibilité de rejoindre légalement sa femme, Hakim plaque tout et prend contact avec un passeur, censé le conduire avec son fils en Grèce. Embarqués avec un grand nombre de réfugiés, serrés comme des sardines, d'abord dans la remorque d'un camion puis dans un rafiot gonflable, le voyage est un véritable désastre...
J'ai trouvé ce tome encore plus bouleversant que le précédent. J'ai perçu toutes les émotions par lesquelles est passé Hakim : la peur au ventre, omniprésente, pour lui mais surtout pour son fils ; son désespoir, sa colère, son amour pour son fils, sans qui il aurait sans doute tout laisser tomber ; sa tristesse et son apathie lorsqu'il apprend le décès d'un très proche, tué par les bombardements en Syrie ; ses doutes concernant les décisions qu'il doit prendre, malgré tous les risques encourus.
Lorsque Hakim, les larmes aux yeux, évoque certains événements à
Fabien Toulmé, ce dernier nous explique comment lui-même a failli verser quelques larmes, tellement il était touché par ce père au désespoir. Autant vous dire qu'en ce qui me concerne, ça n'a pas seulement failli... J'ai été touchée en plein coeur. Cet épisode dans l'Odyssée d'Hakim est bouleversant et éprouvant. L'auteur, comme à son habitude, sait nous transmettre et partager ses émotions, tout comme celles de ses protagonistes. Et c'est d'autant plus terrible parce que nous ne sommes pas dans une fiction mais bel et bien dans la réalité.
Par moments, je me suis demandé dans quoi je m'étais embarquée, si j'arriverai entière au bout de ce périple. Mais ce périple, Hakim l'a vécu pour de vrai, je me devais de continuer également. J'ai atteint la côte grecque en larmes mais j'y suis parvenue, et je vous assure que lire les yeux brouillés n'est pas chose facile...
Enfin bref, je pense que vous l'aurez compris : je ne suis pas sortie indemne de cette lecture tout en émotions, qui joue avec notre sensibilité. C'est à la fois beau et tragique, triste à en mourir et pourtant empli d'amour, de solidarité et de belles rencontres.
Une lecture percutante et éperdument chamboule-tout.