Et voilà, une fois de plus, une lecture qui attendait depuis très ( trop ) longtemps.
Attention ce billet est susceptible de contenir des références à certains films, séries, jeux ..
Et quelle surprise: le titre est assez trompeur, car le texte - inachevé du fait de la mort de Chrétien de Troyes - ne raconte pas seulement l'histoire de Perceval, mais une bonne moitié est constituée de digressions racontant les aventures de Gauvain. Ce qui est une bonne chose, car je l'avoue j'ai largement préféré ces passages là.
Perceval tout d'abord: c'est le héros par excellence, l'archétype du chevalier, héroïque courageux, prompt à la bataille... bref,un peu pénible.
Pourtant le début est assez drôle, car Perceval (qui ne connait pas son propre nom, je n'invente pas c'est écrit noir sur blanc dans le bouquin) a tout du paysan mal dégrossi. Elevé par sa mère, veuve, et bien que fils de chevalier, il ne sait pas ce qu'est un chevalier.. ce qui donne des scènes assez cocasses lorsqu'il rencontre une troupe de chevaliers pour la première fois, puis se met en tête d'aller " voir le roi qui fait des chevaliers". de plus il n'écoute toujours qu'à moitié ce qu'on lui dit, part toujours bille en tête au devant du danger (pas du tout le genre à faire des combats psychologiques donc ) rate systématiquement ce qu'il devrait réussir facilement, mais réussit ce qu'il aurait du rater, car il est l'élu, celui qui a un destin, celui dont on parlera encore 20 siècles après...
Après , on peut mettre à son crédit une absence à peu près totale d'orgueil et une volonté sincère de s'améliorer.. mais il reste toujours un peu crétin.
Ce qui le fait tomber régulièrement dans des pièges, dont il se sort miraculeusement parce qu'il est l'Elu.
Ce qui est dommage parce que pour un lecteur du XXI° siècle, c'est plutôt redondant, mais j'imagine que qu'au XII° siècle, raconté par un troubadour pour animer un banquet interminable, ça devait passer très bien. Les passages qui se ressemblent beaucoup, comme l'exagération systématique: les femmes rencontrées sont TOUJOURS les plus belles du monde, les mieux vêtues, les plus dignes ( même Ygerne qui doit approcher des 80 ans!), la reine qui va mourir de colère et de chagrin parce qu'on lui a renversé du vin sur la robe - bien sûr, elle revient dix lignes plus loin quand elle a cessé de faire la tête - les combats durent des heures alors qu'on s'est presque fait couper un bras ou deux...
Du coup, dans ma tête, à chaque prouesse, j'entends " diiing!" Réussite critique en jet de Chance, Perceval gagne un niveau!"
Tellement c'est ce que ça m'évoque.. Je me demande s'il existe un jeu de rôle que ce soit papier ou vidéo qui reprendrait la trame du roman. Parce que c'est tout à fait ça.. le personnage qui a une mission a remplir.. et perd un temps fou à cause de quêtes annexes qui s'ajoutent les unes aux autres.
D'ailleurs c'est là qu'on peut parler de Gauvain, en parallèle de l'histoire de Perceval: Accusé de trahison devant toute la cour, le voila qui doit aller se battre en duel pour laver son honneur. Or Gauvain, c'est l'inverse de Perceval: il ne fonce pas sans réfléchir, ne se bat que s'il n'y a pas d'autre solution et préfère chercher des solutions pacifiques qui satisfassent tout le monde. Mais c'est aussi le chevalier " pas de chance", qui tombe systématiquement sur des casse-pied, des malhonnêtes, ou simplement victime d'un concours de circonstances facétieux.. et c'est très très drôle.
Par exemple, on apprend qu'un chevalier ne peut pas se défiler si l'honneur d'une dame est en jeu et qu'elle a fait appel à lui. Même si c'est pour une raison idiote. Et voilà comment il se retrouve obligé de prendre part à un tournois, parce qu'une petite fille est venue lui tenir la jambe. Au sens propre.. elle s'accroche à sa jambe ( les requêtes devaient se faire comme ça?) pour lui demander d'intervenir pour arbitrer une querelle entre elle et sa grande soeur qui lui a tiré les tresses.. et que la meilleure solution est d'affronter le champion désigné par sa soeur.
Et qu'il se retrouve, un peu plus tard, enfermé dans une tour avec une dame qui lapide de assaillants à coup de pièces d'échecs..
Car lui n'est pas l'élu.. Il retrouve par hasard une bonne partie de sa famille qu'il croyait disparue, déjoue les maléfices d'un château enchanté.. mais tout le monde ou presque s'en fiche... hé ouais! Echec critique en jet de popularité.
Là l'histoire s'arrête abruptement: l'auteur est mort. C'est très frustrant. C'était d'ailleurs très frustrant même pour les auditeurs de l'époque que plusieurs personnes ont proposé leurs conclusions, apparemment de manières assez différentes, et l'édition folio concocte un mélange entre les divers manuscrits
J'avoue que je suis plus circonspecte sur cette partie, les manuscrits divergent beaucoup, et je ne peux pas m'empêcher de penser que
Chrétien de Troyes aurait peut être eu une intention tout autre et conduit son récit très différemment
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