Somerset Maugham est un écrivain anglais un peu oublié de nos jours, bien qu'à une époque , dans la première moitié du dernier siècle il était très apprécié et lu dans le monde anglo-saxon. Personnellement je l'ai connu assez jeune , ma mère ayant à l'époque la majorité de ses livres dans sa bibliothèque. Un excellent écrivain voyageur, qui a transmis dans un style riche en descriptions les histoires des autres. L'auteur de ce livre , Tan Twan Teng , malais d'origine chinoise de Penang, où ce récit a lieu, nous relate ici dans le même style, la vraie histoire de Maugham durant son séjour chez un couple de britannique à Penang. Lesley , la femme du couple et Maugham en étant les deux principaux protagonistes. Il l'entrecroise avec la vraie histoire du procès d' Ethel Proudlock , une autre britannique de Kuala Lumpur, duquel Maugham lui-même en a fait une nouvelle, « La Lettre ». On y croise aussi
Sun-Yat-Sen le révolutionnaire, père de la Chine moderne en pleine activité à Penang. Mais la fleur du récit est celle du titre, cette maison aux mille portes, métaphore des fausses apparences, dont je ne vous dévoilerais rien et l'histoire d'amour qui s'y déroule.
Dans cet aperçu terrible de la société coloniale britannique de Penang, pastiche de la bourgeoisie anglaise de la mère patrie, l'hypocrisie est à son paroxysme. Les mariages malheureux,l'homosexualité ( l'époque de Byron),les adultères sont ensevelis sous des couches de bonne conduite, tea-parties, et autres événements sociaux où les rumeurs vont bon train.
La condescendance des britanniques, ces colonisateurs qui méprisent les autochtones est répugnante . Ils envahissent un pays , profitent un max de ses moyens et de ses richesses et ne les considèrent même pas comme leurs égaux, ni même des hommes.
C'est aussi un livre sur la mémoire, la perte et les dissonances culturelles qu'on ne peut éradiquer.
Une prose excellente dont la version originale en anglais est très proche de celle de Maugham.
C'est le troisième livre de l'auteur , non encore traduit en français, en lice pour le Booker Prize 2023. Ses deux premiers sont déjà traduits. Retenez ce titre , car un livre qui vaut la peine d'être lu pour son histoire et sa prose.