Réservé depuis un mois à la bibliothèque, je commence enfin ce livre avec impatience et avec confiance. J'entrevois une lecture douce, qui s'attache à une américaine dont le fil de vie va évoluer au gré du temps qui passe et surtout suite à une décision, un choix qu'elle ose enfin opérer à 61 ans.
Willa a 11 ans. À ses yeux, son père est merveilleux, d'humeur égale, drôle et surtout gentil. Ses talents culinaires se résument aux sandwichs grillés au fromage et lorsqu'ils sont au menu du jour cela signifie que la mère a de nouveau eu un de ses accès de colère en claquant la porte.
Lecture d'une petite tranche de vie de Willa et sa petite soeur Elaine qui tentent de faire une crème au chocolat pour surprendre leur père lorsqu'il rentrera. Deux soirées et deux nuits sans leur maman qui revient tout enjouée et pleine d'entrain à leur réveil.
Willa a 21 ans. de son université, elle prend l'avion avec son petit ami Derek pour le présenter à ses parents. Elle s'emploie à ne pas paraître négligée, ne discute pas (ou très faiblement) les décisions de son ami même lorsqu'il s'agit d'un mariage qu'elle n'envisageait pas avant la fin de ses études. Elle se laisse guider, se laisse mener.
Autre tranche de vie avec le vol dans un premier temps puis la rencontre avec les parents.
Willa a 41 ans. Elle perd son mari Dereck dans un accident de la route alors qu'il s'énerve contre un chauffard.
Je deviens légèrement perplexe face à ces tranches de vie qui ne s'attachent qu'à un seul fait, certes fort bien détaillé pour remplir les pages, mais qui ne laissent jamais entrevoir les pensées, les émotions ni les sentiments de Willa. Condamnant dès ses onze ans le comportement imprévisible et coléreux de sa mère, il semblerait qu'elle ait choisi la complaisance pour ne pas faire de vagues qui risquent de perturber ses proches. Ses relations avec ses parents, sa soeur, son mari et ses fils restent floues et distantes. Arrivée à ce stade de ma lecture, je n'ai pas trouvé d'indices véritables pour déterminer si la vie de Willa lui pèse ou non.
Alors, comme annoncé par l'auteure en préambule de son roman, j'attends que Willa donne de la couleur à sa vie jusque là plongée dans le noir et blanc.
Willa a 61 ans. Elle se rend à Baltimore pour s'occuper de la fille d'une ancienne amie de son fils Sean. La mère a été blessée à la jambe par une balle perdue et la voisine qui ne désire pas s'occuper de la jeune Cheryl pense appeler, à tort, sa grand-mère. Willa se retrouve dans un quartier modeste, fait connaissance des voisins. Entre la climatisation à fond, le pipi du chien Falcon, la découpe du poulet, son mauvais sens de l'orientation, une série avec des extraterrestres et leur vaisseau spatial, j'attends désespérément le frémissement car je pressens bien qu'il n'y aura pas de tsunami !
Willa n'ose toujours rien demander et rien attendre des autres. Les relations que les voisins entretiennent entre eux sont pétries d'indifférence.
Je suis dépitée. le tracé de cette lecture reste désespérément plat, aucune oscillation, même infime, ne vient le perturber. Pas d'émotions, pas d'empathie, pas d'intérêt. Je n'ai sûrement pas su saisir entre les lignes le bouleversement de la vie de Willa au milieu de ce quotidien si bien exposé. Je n'ai pas décelé les étincelles qui lui ouvrent, paraît-il, une nouvelle vie.
Je reconnais cependant que l'écriture d'
Anne Tyler est fort agréable à parcourir. Elle est parfaite pour rentrer dans les détails de ces petits riens qui comblent le quotidien.
J'ai sûrement manqué le rendez-vous avec la vie de Willa et j'en ressors bien frustrée !