Difficile de classer ce bouquin qui emprunte à la fois au roman policier et au récit d'anticipation, sur fond de portraits de personnages désespérés. le spitch de départ est assez simple. Un groupe de 4 enquêteurs mènent de front deux enquêtes. La première est sanitaire : des morts s'enchaînent à cause d'intoxications alimentaire qu'on peine à comprendre. L'autre est policière : un tueur en série enferme ses victimes dans une sorte de cocon mutant.
La spécificité du roman est qu'il se passe dans notre monde, mais avec un décalage : l'auteur imagine une France amputée d'un gros morceau de son territoire, suite à l'explosion d'un complexe de recherche qui a rendu inhabitable une zone bientôt dite « morte ». Inhabitable, on découvre qu'elle ne l'est pas tant que ça, car dans cette zone irradiée beaucoup y voient une possibilité de fuite de la société pour se bricoler des micro-mondes alternatifs
Le roman tourne beaucoup autour de cette zone morte. Les intoxications alimentaires semblent y trouver leur source, tout comme les meurtres énigmatiques. Et puis surtout, il y a le caractère des 4 enquêteurs (3 hommes, 1 femme). Tous ont des difficultés à vivre une vie normale, chacun à leur façon. Attirés par les marges et la noirceur, révulsés par la laideur du monde, en difficulté pour nouer des relations, ils semblent s'être trouvés lors de cette enquête et vivent leur propre utopie relationnelle à 4, aussi bancale que salvatrice.
En fait, c'est ce travail sur les personnages que j'ai trouvé le plus intéressant. L'auteur, dont c'est le premier roman publié, peine à donner du rythme à ses enquêtes, et il m'a fallu attendre la deuxième moitié du roman pour vraiment entrer dans la traque de ce tueur en série étrange. Par contre, le coté mélancolique et foutraque des personnages m'a bien plu.
Alors c'est vrai qu'il est parfois difficile de différencier les personnages masculins tant tous semblent habités par cette noirceur désespérée, mais au fond cela n'a pas été très gênant pour moi. J'ai ressenti une sorte de tendresse pour ces écorchés vifs. Peut-être que la vraie quête de cette équipe de détectives, c'est de trouver un sens à leur existence, un remède à leurs souffrances, une direction -
Stig Dagerman dirait une « consolation ». Je crois que l'auteur utilise la confrontation avec les meurtres, les cocons et les
spores, pour éclaire leur « zone morte » à eux, et s'interroger sur les possibilités d'une vie aux marges du monde.
En conclusion, un récit qui porte évidemment les défauts d'un premier roman, mais qui se lit agréablement grâce à son atmosphère travaillée et à ses personnages atypiques.