LEMM, c'est une drôlâtre de malaventure livresque. Et je vais m'arrêter là avec le vieux français ! Parlons-en, du vieux français, car c'est ce qui caractérise cet ouvrage dans un premier lieu, puisque c'est le 1e élément littéraire à sauter aux yeux. F. Vesco nous offre une escapade au Moyen-Age européen, avec la puanteur, l'oppression et le langage qui vont avec. Ne vous étonnez donc pas de voir beaucoup de mots remodelés (ou plutôt modelés à l'ancienne) ou tout simplement oubliés par les langues de nos jours. Mais loin de ralentir la lecture ou de dérouter, ce vieux français est une véritable immersion dans la langue des communs et des bourgeois moyenâgeux. Un petit lexique de fin (que j'ai remarqué seulement à la fin de ma lecture) permet de vérifier quelques termes si l'on a des doutes, mais, personnellement, je n'ai eu aucun souci de compréhension. En revanche, ce livre étant destiné à un lectorat jeunnesse, des jeunes aux moins jeunes ados, je me demande comment se passerait la lecture pour eux… Si quelques mots sortent complètement du vieux français, leur sonorité et leur place dans le contexte permettent d'en comprendre aisément le sens toutefois.
Passons aux personnages ! Mirella, la protagoniste, est une étrange rouquine, porteuse d'eau et orpheline. Elle est au bas de l'échelle sociale d'Hamelin, le petit bourg qu'elle approvisionne en eau, et se fait donc traiter tour à tour de sorcière et de chair à tripoter par les habitants. Mais elle a un instinct de survie féroce et peu d'orgueil, ce qui lui permet de résister à toutes sortes d'attaques, qu'elles soient verbales ou physiques. Ce n'est pas pour autant qu'elle n'a pas conscience de l'injustice de son sort et la colère et le besoin de reconnaissance lui rongent lentement les entrailles sous les guenilles qu'elle porte. Mirella, c'est aussi une musicienne dans l'âme, car elle chante pour ceux qui ont en besoin, qu'ils soient lépreux ou fossoyeur, elle danse dès qu'elle en a l'opportunité, s'attirant les foudres du prêtre local… Mirella, c'est une âme charitable, un grand coeur, beaucoup d'empathie, car elle prend soin des plus faibles qu'elle, des rejetés, des malmenés… malgré sa propre situation pitoyable. Les autres personnages notables sont globalement divisés en deux parties : ceux qui soutiennent Mirella (Pan, le plus jeune porteur d'eau et les lépreux) et ceux qui la rejettent (le prête, Lottchen l'aubergiste, le bourgmestre, les soldats et les habitants de manière générale…). Tous représentent parfaitement les différents niveaux sociaux et professions de l'époque, avec le dose de préjugés que chacun porte à son voisin. J'ai tout à fait eu le sentiment d'être tombée dans le Moyen-Age obscurantiste et misérable.
Question intrigue, j'ai largement préféré la 2e partie. La 1e moitié du bouquin m'a semblé un peu longuette, terne et tristounette avec l'arrivée de la peste dans Hamelin et les morts à chaque page… C'est néanmoins une ambiance morose qui était de mise, même si ça a rendu la deuxième partie bien plus palpitante et intéressante à mes yeux… Car c'est aussi à ce moment-là que la part fantastique du livre arrive. On pressentait que Mirella avait quelque chose de spécial, mais les choses sont révélées à ce moment-là… Si la naissance de ses pouvoirs m'a semblé trop légèrement expliquée, le reste des éléments fantastiques était intéressant. Puis cette seconde moitié de livre est une véritable ode au féminisme, à la joie de vivre et à l'insouciance, aux enfants et à la liberté. C'était extraordinaire de voir Mirella prendre son envol de tout point de vue et de s'opposer à tout ce qui la rendrait triste et colérique.
J'ai l'impression qu'un T2 est prévu, même si le T1 se suffit à lui-même de mon PDV.
Lien :
https://littcentcinquante.wo..