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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
"La jeune fille suppliciée sur une étagère" s'appelle Mieko. Elle a 16 ans et une pneumonie fulgurante vient de l'emporter. Elle aurait pu facilement être sauvée mais sa mère a trop tardé pour appeler le médecin. Un médecin c'est beaucoup d'argent et chez Mieko, l'argent est compté. La jeune fille le sait bien, qui doit faire des spectacles de strip-tease pour aider ses parents. Mais si son corps est maintenant débarrassé de la douleur et de toutes les sensations physiques, sa conscience, étonnamment, est toujours vivante. Mieko voit et entend tout ce qui se passe autour de sa dépouille. Elle voit ainsi deux hommes qui offrent de l'argent à sa mère pour pouvoir emporter son corps jusqu'à la morgue de l'hôpital. Elle assiste ensuite à sa propre dissection. Commence alors un récit fantastique et glaçant. Car Mieko nous parle. Elle raconte tout ce que son coeur de jeune fille ressent. Elle nous dit le chagrin des adieux à son foyer et la honte d'être ainsi dénudée et touchée par ces hommes qui font des plaisanteries sur son corps, puis l'écartèlent et la démembrent comme une vulgaire pièce de boucherie.

Le lecteur ne peut qu'éprouver de la compassion pour cette jeune fille dont le corps sera vendu deux fois et jusque dans la mort. Et d'ailleurs, Yoshimura ne met-il pas en lumière ici la condition de la femme au Japon à la fin des années 50? Mariages arrangés pour les plus riches et travail avilissant pour les plus pauvres, voilà ce qui semble être leur sort. S'intéresse-t-on à ce que leur conscience pense? Pour la société elles semblent n'être que des corps grimés pour plaire ou destinés à procréer, comme dans la deuxième nouvelle du recueil, "Le sourire des pierres" où la jeune femme a été répudiée sous prétexte que son ventre était stérile.

L'écriture sobre et limpide d'Akira Yoshimura rend ici un bel hommage à ces femmes qui ne peuvent disposer de leur corps et dont la voix, comme celle de Mieko, reste toute intérieure. Et si la mort imprègne chaque page du récit, elle ne me semble pourtant pas être le centre du propos mais plutôt une allégorie de notre indépassable solitude. A trop manquer d'amour, à trop se résigner, on peut mourir à soi-même. Ne reste alors qu'un être docile et muet dont les élans de vie ont été réduits en cendres.
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Elle vient de mourir. A peine 16 ans, une vie mal entamée, une maladie aussi soudaine qu'expéditive lui ôte son dernier souffle.

Sa mère, qui ne veut pas travailler, occupe son temps à peindre des masques. La misérable vend le corps à peine refroidi de sa propre fille, sa seule fille, à l'hôpital du coin.

Akira Yoshimura, avec un certain détachement, et beaucoup de détails parfois à la limite du supportable, nous entraîne sur des chemins que je n'osais même pas imaginer. Toute vie a abandonné ce joli corps de jeune femme. Pourtant, son esprit demeure et assiste, sans souffrance, mais avec une conscience exacerbée, à la lente déchéance de son propre corps, à sa mutilation lente et réglée. On voudrait qu'il se produise quelque chose, que ce cadavre dont l'humanité échappe à tous, sauf au lecteur, se réveille, reprenne vie...

Une nouvelle fois, Yoshimura m'aura entraîné au plus près de la misère humaine, la plus banale, la plus commune. Ici, la mort s'empare d'un jeune être. Ce corps, cette enveloppe charnelle ne représentent plus rien, à peine un sujet d'expérience ou de formation pour les étudiants en médecine. C'est dans l'ordre des choses, dans l'ordre de la vie.

Ému par cette lecture, je réalise l'impermanence de notre vie dans ce monde : sujets à la mort, sujets au passage, à la brièveté. Mais sujets aussi à l'oubli... comme « La Jeune Fille Suppliciée sur une Étagère »...

Dans « le Sourire des Pierres », seconde nouvelle du bouquin, la mort revient, hante le récit, sous tous ses visages, brutal ou banal.

La mort prend même une telle emprise sur le jeune Sone qu'elle devient sa raison d'être. Pire encore. Sone prend le contrôle de la vie des autres, ceux qui en souffrance laissent leur vie glisser, glisser.

Il les entraîne au bout du chemin, toujours le même.

Ce même chemin que Sone a parcouru une fois de trop, dans ce cimetière où il jouait pendant son enfance avec son ami Eichi.
Lien : http://leranchsansnom.free.fr/
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La jeune fille suppliciée sur l'étagère, c'est Mieko, une toute jeune fille de 16 ans qui vient de mourir. Son corps a été vendu à la science et c'est par sa voix qu'elle détaille toutes les étapes auxquelles se livre le personnel de l'hôpital. Avec distance, indifférence et presque curiosité, Mieko décrit la levée de son corps, décrivant les brancardiers, puis arrivée à l'hôpital, les agents hospitaliers commencent à prélever, qui les seins qui les poumons et encore les morceaux de peau. Avec un regard distanciée, Mieko évoque sa courte vie avec une mère de bonne famille qui a fui pour suivre le père qui, au fil des ans, s'est mis à dépenser sa paye, sitôt en poche, dans la boisson n'accumulant que des dettes, elle évoque son travail comme stripteaseuse sur patins à roulettes.
Au fur et à mesure de la dégradation de son corps, l'intérêt des hommes s'estompe sauf celui d'un vieux monsieur, furieux de ne pouvoir s'approprier les os pour en faire des spécimens translucides.
Dans le sourire des pierres, Eichi retrouve par hasard Sone, un camarade d'étude et celui-ci assez manipulateur, lui propose un curieux trafic de pierres tombales et réussit à se faire héberger dans la maison familiale d'Eichi et de sa soeur.

Deux textes dont le premier touche au plus sacré dans la mort, le corps et surtout son appropriation par l'hôpital et les différents intervenants chargés de prélever, qui, ce travail en valant un autre, s'expriment avec humour, avec empathie ou en fumant leur cigarette, alors que la jeune Mieko assiste au quasi-démontage de son corps petit bout par petit bout, on y retrouve la référence à un autre texte de Akira Yoshimura - Spécimens transparents. Un texte qui peut provoquer un certain malaise, le sacré percutant le trivial, le tout sous le regard calme et presque indifférent de la jeune fille.
Le deuxième texte joue plus sur la fascination que va exercer Sone sur une fratrie, instillant un certain malaise et une manipulation larvée que va ressentir le jeun Eichi.
Dire que la mort est le sujet de prédilection d'Akira Yoshimura est presque un pléonasme mais son écriture est tellement dépouillée que même un sujet qui pourrait être scabreux devient accessible même s'il peut provoquer un certain malaise.
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Deux nouvelles très surprenantes.

La première a un sujet inhabituel. Un corps donné à la science mais la personne qui habitait ce corps est toujours présente. En suivant ce qui arrive à ce corps et les pensées de cette jeune femme, on découvre son passé. C'est surprenant, parfois poétique, parfois morbide.

La seconde, plus courte, relate une relation entre deux hommes et l'influence de l'un des deux sur les femmes.

Dans ces deux nouvelles, on découvre des pans de la culture japonaise concernant les rites funéraires et la culture en général (reniement des femmes stériles).

C'est un auteur vraiment intéressant. très différent de ceux que j'ai pu rencontrer dans le passé.

Quelques mots relevés

A comme Aedes : moustique.

J comme Jizô : statuette bouddhique protectrice des voyageurs et des petits enfants.

K comme Kannon: statue de la divinité bouddhique de la compassion et de la fertilité.

L comme Lucane: insecte coléoptère.

P comme Pulvérulent: qui a la consistance de la poudre ou se réduit en poudre.

S comme Stupa : monument bouddhiste.

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Novices en littérature japonaise, réticents à l'idée de tomber sur des descriptions interminables de cerisiers en fleurs et de reflexions philosophiques en bambou zen, sachez qu'il n'en est rien dans ce tout petit livre de nouvelles d'Yoshimura Akira.





Une première pour moi dans le monde de la littérature japonaise ; une rencontre avec un style d'écriture très riche, aux termes parfaitement choisis et à la traduction très réussie.

La 1ère nouvelle nous transporte dans le corps d'une jeune fille et nous fait vivre et ressentir tout ce qu'il va subir. Sa position est à la fois en dehors de et dans son corps. C'est donc, en quelque sorte son âme qui nous parle.

Ce jeune et joli corps - de son cerveau, aux organes, de ses veines à sa peau - sera ouvert, découpé, dépossédé de son contenu, coloré par des produits, objet de travail pour de jeunes médecins en apprentissage. Voilà précisément ce à quoi sont destinés les corps légués à la science. L'écriture d'Akira Yoshimura nous ouvre cette porte de mystère, avec une extrême finesse et un réalisme parfait. On frémit en s'imaginant certains actes, mais l'auteur a l'immense mérite de ne jamais franchir la frontière du dégoutant ou du choquant ; ce qui m'aurait amené à fermer ce livre, ce qui ne fut pas le cas, bien au contraire, moi, petite âme sensible, je fus captivée.

En parallèle de cette partie de la nouvelle dédiée au devenir du corps, l'auteur nous livre également tout un pan de culture japonaise, teintée de pauvreté, d'inexpressivité des émotions, où la rigueur et la dignité prônent au détriment de l'amour et de la compassion. Les parents de la jeune fille, leurs réactions face à la mort de leur fille, puis le rapport monétaire qui s'y substitue, sont tout autant déstabilisants. Mais le contexte culturel étant incroyablement bien posé par l'auteur, on ne porte pas de jugement, on ne les comprend pas non plus, on les observe. La jeune fille elle-même, en s'attribuant une part de responsabilité dans sa propre mort (dûe à'une maladie foudroyante), en culpabilisant des conséquences morales et financières de sa mort sur la situation de ses parents, nous offre une manière autre de se remettre en question, à mille lieux de nos comportements et de nos valeurs d'européens.

La deuxième nouvelle « le sourire des pierres » n'a aucun lien, ni thématique en commun avec la première. Il s'agit, comme le résumé l'indique, de retrouvailles de deux jeunes garçons, dont un à la personnalité étrange. Celui-ci a pour première occupation de voler des statuettes mortuaires dans les cimetières, pour les revendre. Sa deuxième raison de vivre est celle d'être aimer jusqu'à l'extrème, également par le biais, parfois, de ces statuettes. Dans ce texte – probablement trop subjuguée par la première nouvelle – je n'ai pas retrouvé la finesse des mots de l'auteur, ni le réalisme des descriptions. Mais les personnalités des deux garçons et de leur entourage et les images de la culture japonaise décrites par l'auteur restent captivantes. Nous rencontrons dans cette nouvelle, Sone, un jeune homme extrêmement malin, macabre et manipulateur.

Prenez le temps de le lire et de découvrir cet auteur….et continuez donc votre chemin avec un autre tout petit livre d'un autre auteur japonais…. "Sommeil " de d'Haruki Murakami.
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Premier livre de Akira Yoshimura que je lit et là ... une grande découverte. Deux nouvelles, la première est la plus troublante, fascinante. J'ai eu du mal à lâcher le premier des ces deux récits, je me suis senti comme en apnée, ne prenant ma respiration qu'aux derniers mouvements de Mieko. L'histoire de Mieko Mizuse d'une jeune fille de 16 ans qui vient de rendre son dernier souffle atteinte d'une pneumonie aigüe. Une fois passé de l'autre côté : ses sens sont accrus "Son ouïe est pure et pénétrante". le ton de l'auteur est léger tel une âme au dessus de son corps et des actes de dissections que celui subira. Mais la plume est aussi acéré que les scalpels utilisés par les étudiants et les médecins.

La mère de Mieko a vendu le corps de la jeune fille à un hôpital universitaire dès son dernier souffle. La vie est rythmée des dissections, éviscérations, entourés d'un professeur en admiration devant un squelette. des employés qui ne peuvent se défaire de l'odeur des cadavres et que leur femme quittent. le manque d'humanité de la mère est étonnant : n'appellera le médecin qu'à la dernière extrémité, fait travailler sa fille comme strip-teaseuse (Un métier qui rapporte plus)

On se prend au jeu, et une dose d'empathie envahit, la douleur qui devrait s'en suivre n'existe pas, elle est non ressentie, sauf par le lecteur. Sa plus grande douleur : le rejet et le déni de ses proches.

Quels qualificatifs : Remarquable, Addictif , Envoutant, pour cette nouvelle. Je ressors troublé de ce premier roman de Yoshimura, Cette lecture m'a donné envie de découvrir d'autres romans de cet auteur. J'attaque le prochain que l'on m'a recommandé : "Le convoi de l'eau", afin d'approfondir cette première rencontre avec Yoshimura.
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Je me souviens surtout de la première nouvelle, celle de la jeune fille. Ce qui m'a frappé au premier abord, c'est le point de vue de la jeune fille décédée. Son âme ? Elle decrit les moindres gestes que les employes des pompes funèbres font de son corps. J'ai trouvé cela très déstabilisant. Mais je pense que pour un lecteur japonais, ça l'est beaucoup moins car la mort n'est pas vraiment vecue comme une coupure radicale d'avec les vivants. Et donc cette jeune fille raconte comment elle se retrouve en cendres dans une petite boite à attendre que quelqu'un vienne la récupérer, si je me souviens bien.
La seconde nouvelle est également sur le theme de la mort, mais l'intrigue est beaucoup plus classique.
Donc, à lire pour mieux appréhender le theme de la mort au japon, mais également pour la construction et le point de vue du récit de la première partie.
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Les deux nouvelles publiées chez Actes Sud datent de 1959 et 1962 mais l'écriture d'Akira Yoshimura est intemporelle. Je ne m'attendais pas du tout à ce genre d'histoire... même si j'aurais pu en me renseignant un tant soit peu avant de l'ouvrir. le recueil est étiqueté " horreur " mais je parlerais plutôt d'épouvante.
Je retrouve dans ces deux récits la qualité d'écriture particulière que j'apprécie généralement chez les auteurs nippons, avec un style net et limpide, sans fioritures, allié à une qualité esthétique indéniable, qui parait jusque dans les détails et donne à l'ensemble une cohérence et une complétude parfaites.
La couverture est affreuse et ne rend pas grâce à la beauté blonde de la jeune fille soulignée à plusieurs reprises, mais le reste est parfait : un Coup de coeur
{lire le détail]
Lien : http://ocommecolomb.blogspot..
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Une nouvelle comme écrite au ciseau, à la structure resserrée. L'héroïne, une jeune fille de 16 ans que sa mère n'a jamais aimée, nous parle, et dit tout ce qu'on fait à son corps défunt de jouvencelle... Cela fait froid dans le dos.
Je n'ai aucun goût pour l'horreur, mais la fin a tout renversé. Cette écriture et cette histoire m'ont vraiment saisie.
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Après Naufrages et le Convoi de l'eau, un nouvel opus du japonais Akira Yoshimura, dont j'ai trouvé que le titre à lui seul était une promesse de beauté. Cette fois-ci ce sont deux courts récits, dont le premier est un chef-d'oeuvre saisissant (n'ayons pas peur des mots), mêlant fantastique, horreur et poésie : la narratrice est une jeune morte de seize ans dont les parents ayant besoin d'argent (c'est le Japon de l'immédiat après-guerre) vendent le corps à une faculté de médecine. Elle assiste alors à sa propre dissection, à la mise en morceaux et à la disparition de son corps, qu'elle relate avec détachement et sérénité.

Le second est moins horrifique, mais tourne également autour d'une fascination pour la mort et se tient à la lisière du fantastique. Eichi vit avec sa soeur, qui ne se remet pas de son divorce : rejetée parce qu'elle ne pouvait avoir d'enfants, elle confectionne du matin au soir de petits habits, sans jamais sortir de chez elle. Lorsque Sone resurgit du passé, entraînant Eichi dans le pillage de statuettes sacrées dans les cimetières, son aura mystérieuse et mélancolique va bouleverser cet équilibre morbide. Ces deux nouvelles sont fascinantes. Sobrement écrites, à la fois limpides et mystérieuses, elles constituent une espèce de lecture-éclair, violente, et à la persistance indéniable.
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