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Conter la peinture - Alain Yvars - Nouvelles - lu en juin 2020.

Je remercie Alain Yvars pour l'envoi de ce beau livre illustré par des photos de tableaux de grands peintres. Il faut dire que la passion de l'auteur est la peinture étant lui-même un peintre pastelliste.

Après avoir lu "Que les blés sont beaux", je me suis plongée à nouveau dans l'univers d'Alain Yvars qui, d'une manière fort originale, nous conte douze petites tranches de vie de peintres se rapportant chacune à un ou plusieurs tableaux de ceux-ci.

Nous avons même, ô surprise, une histoire qui se déroule à l'époque de l'Art rupestre préhistorique, illustrée par deux superbes photos, l'une du "Bison" de la grotte d' Altamira et l'autre "Main négative" de la grotte du Pont- d'Arc .
Au travers de la jolie écriture de l'auteur, j'ai voyagé chez Modigliani, Johannes Vermeer, Toulouse-Lautrec, Winslow Homer que je ne connaissais pas, Claude Monet, Georges Seurat, James Mac Neill Whistler que je ne connaissais pas non plus, Georges de la Tour, et Rembrandt van Rijn .

J'ai rendu visite au fil des siècles à ces peintres dont la vie fût souvent difficile et que nous avons la chance encore aujourd'hui de pouvoir les admirer non seulement avec les yeux, mais avec le coeur aussi

C'est ce qu'Alain Yvars a fait passer en moi par ses mots , sa poésie, son entrain et sa passion.

Cher Alain, je te remercie pour cette évasion picturale de quelques heures au milieu de ces génies.

Un petit rappel, important, les bénéfices des ventes sont reversés à l'association "Rêve d'enfants malades".




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La lecture de ce livre délicat, qui nous montre tant à voir (les reproductions sont en couleurs et en haute définition), m'a rappelé cette citation (Carnets d'un vaincu, Nicolás Gómez Dávila) : « L'existence de l'oeuvre d'art prouve que le monde a un sens. Même si elle ne dit pas lequel ». Nous découvrons de multiples significations au monde qui nous entoure grâce à cette flânerie délicieuse parmi plus d'une douzaine de tableaux signés Auguste Renoir, Henri de Toulouse-Lautrec, Berthe Morisot, Georges de la Tour, Amedeo Modigliani, Johannes Vermeer, Georges Seurat, Rembrandt van Rijn, Claude Monet, J.M.N. Whistler, Winslow Homer, ainsi que « cet humble artiste de la préhistoire vient se mêler à ces grands noms ».

Plusieurs des tableaux dont il est question ici m'étaient inconnus. J'ai été éblouie par la découverte du tableau « Nuit d'été (1890) » de ce « poète des flots » qu'est Winslow Homer.

Comme le dit le narrateur de la cinquième nouvelle (« Un après-midi au théâtre »), « nous allons nous introduire par la pensée dans la toile afin de mieux la décrire… »
Suivez, sans crainte, l'auteur, il est un guide original et fort instruit !
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Lui-même peintre et passionné d'art, Alain Yvars a choisi quelques oeuvres picturales célèbres pour, le temps de courtes nouvelles, redonner vie à chacun de leurs auteurs et de leurs époques : un peu comme si, en observant chaque tableau, un écho de leur contexte et des personnes qui les ont vus naître vous parvenait au travers des siècles. Soudain, l'atelier, le modèle, la société d'alors resurgissent à vos oreilles, comme un fond sonore accompagnant votre contemplation.


Je me suis plu à imaginer un musée capable de vous faire vivre les oeuvres de la même façon : devant chaque tableau, un casque sur les oreilles, j'entendais l'évocation sonore reconstituée à partir du texte d'Alain Yvars, ou bien, à l'instar de l'expérience immersive proposée sur les peintres impressionnistes au Château d'Auvers-sur-Oise, j'assistais à un bref son et lumière, au moyen de quelques images projetées sur les murs et toujours d'une bande-son restituant l'atmosphère et les voix.


Il a fallu à l'auteur toute l'imprégnation acquise au cours de décennies de passion, pour ressusciter avec autant de naturel et de crédibilité ces petits morceaux de vie, pour réussir ces brèves plongées dans l'intimité des peintres et de leur entourage. Tous ces textes accompagnés d'illustrations réussissent à faire vivre les oeuvres qu'ils évoquent : en lisant Alain Yvars, les tableaux cessent d'être de beaux objets inertes que l'on vient contempler, ils s'animent et parlent, ils vous projettent directement dans l'existence des hommes et des femmes peintres.


Chacune de ces petites nouvelles est différente, toutes sont agréables à lire et, sans aucun doute, elles ont de quoi intéresser autant les passionnés d'art que les néophytes. Coup de coeur (5/5).


Je remercie Alain Yvars pour son service presse et salue son soutien à l'association Rêves pour enfants malades, à qui il reverse les bénéfices de ses publications.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Ouvrir tout doucement la porte, pénétrer à pas feutrés dans l'intimité d'Alain Yvars, c'est accéder au monde de la beauté, de la poésie, de l'Art ; ce monde qui nous permet de nous évader de celui, si matérialiste, si lourd, qu'est celui dans lequel nous évoluons. Ce paradis nous permet d'envisager que les muses existent quelque part tapies dans un petit coin de notre être intérieur et de temps en temps, de les laisser se manifester sous l'effet de notre sensibilité artistique.

J'avais beaucoup aimé son roman « Que les blés sont beaux : l'ultime voyage de Vincent van Gogh ». Sa plume abolit les frontières du temps et de l'espace. Et j'ai retrouvé dans « Conter la peinture » la même sérénité, la même poésie, et cette capacité à transporter le lecteur dans l'univers qui est le sien : la peinture. Cette fille divine qui nous ouvre une des portes de la création à nous, simples mortels, bienheureux de pouvoir admirer.

C'est un livre d'artiste mêlant peinture et écriture. Tout au long de ma lecture, j'ai eu le sentiment qu'Alain Yvars nous offrait, un peu comme un cadeau, cette part intime de lui-même qu'il cultive dans un tête-à-tête avec les oeuvres qu'il apprécie.

Ce sont douze nouvelles dont chaque thème nous relate le dialogue qui émerge du regard, de la sensibilité, du savoir de l'auteur avec un tableau. Chaque récit est accompagné de la reproduction en question ce qui sollicite et anime l'imaginaire du lecteur et embelli l'ouvrage.

Sous la plume de l'auteur, l'alchimie opère, fusion de la matière et de l'esprit, chacune des oeuvres s'anime sous le regard du lecteur qui s'éveille à la magie de la peinture, suscité par l'intensité émotionnelle que transmet l'auteur. Chacune des oeuvres évoquées s'habille alors d'une âme. Sans l'âme, la peinture ne serait qu'une image inerte. Et le lecteur entre dans cette intimité, assiste à cet échange entre l'auteur et l'oeuvre voire participe à cette interaction.

J'ai vraiment ressenti, même entendu, la voix de Berthe Morisot, relisant sa lettre qu'elle adressait à sa soeur.

Quant à « La diseuse de bonne aventure » de Georges de la Tour, je ne la regarderai plus jamais comme auparavant : l'auteur ayant attiré mon attention sur le travail de perfection du peintre.

Petit supplément de plaisir quant à moi, l'association de Proust à ce petit recueil dont un passage met en évidence « La Vue de Delft » de Vermeer. J'ai écouté la voix envoutante d'André Dussollier récitant « le petit pan de mur jaune ».

« La science de la peinture est tellement divine qu'elle transforme l'esprit du peintre en une espèce d'esprit de Dieu. »

Léonardo Da Vinci
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Qui ne s'est pas exclamé un jour, les yeux effarés, devant une oeuvre d'art ou une musique qui donne un vertige des oreilles : « Comment il a pu imaginer ça ? Comment il a pu composer une telle merveille ? »
C'est cette admiration démesurée de la peinture qui a poussé Alain Yvars à écrire ce livre pour semer son amour du beau.
Son écriture, à haute tension, sensuelle, est comme les créateurs, ces êtres exceptionnels, qu'elle met en scène, comme leurs confidences qui nous serrent le coeur. Ces fortes personnalités qui, en passant, nous bouleversent à jamais. La genèse d'un style, d'une nouvelle vision du monde, d'un tableau en particulier, sont au centre de ces douze nouvelles sur Modigliani, Henri de Toulouse-Lautrec, Winslow Homer, Vermeer, Monet, Renoir, Seurat et quelques autres.
Rien de docte dans les pensées d'Alain Yvars qui pourtant possède une science supérieure de la peinture, une grande érudition, littéraire et historique, et peint lui-même. Elles sont curieuses et surtout émouvantes.
Cette lecture a coïncidé avec ma visite ensoleillée de la rue des Beaux-Arts, pour approvisionner mon jeune artiste en papier spécial et en crayons de couleur Caran d'Ache ! le long étui, la boîte magique, quoi ! Vider sa bourse pour la création, quoi de plus libérateur !
Je lui ai cité cette phrase du bouquin qui reprend les mots de Claude Monet : « Regarde la nature et peins ce que tu vois, comme tu peux. » C'est l'unique conseil que l'immense impressionniste a donné à la jeune Blanche, sa belle-fille.
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Après "Que les blés sont beaux" me voici de retour dans le monde de la peinture vu par Alain Yvars pour son nouvel ouvrage un recueil de nouvelles "Conter la peinture". Je tiens à remercier l'auteur pour l'envoi de ce livre magnifique.
L'auteur y confirme une belle plume qui vous emporte dans son univers. Alain est un magicien qui entre dans les tableaux et vous en dévoile les secrets : ombre, lumière, atmosphère, technique. Puis il se métamorphose en peintre qui vous confie ses pensées, partage un verre de fée verte avec vous, vous emmène dans une guinguette au bord de l'eau et vous explique ses toiles. Nous découvrons les artistes à l'oeuvre ou au chef d'oeuvre. Avec une profusion de détails Alain Yvars vous immerge dans une époque et dans ses nouvelles. C'est un magicien qui donne vie au tableau, au peintre et à son temps.
Parmi toutes ces nouvelles qui sont toutes excellentes, j'ai apprécié Un poète des flots qui m'a permis de découvrir l'oeuvre d'Homer Winslow. Avec Un aquarium géant, j'ai éprouvé l'angoisse que devait ressentir un Monet vieillissant à l'idée de perdre la vue. J'ai retrouvé avec plaisir La ronde de nuit de Rembrandt, tableau qui part ses effets de lumière me faisait croire que les hommes avançaient en parlant, que le chien tapait des pattes en jappant, j'avais l'impression qu'ils allaient sortir du tableau mais ce n'était que mon imagination de petite fille...
Vient ensuite la nouvelle qui m'a le plus émue Qu'ont-ils fait de la vue de Delft, magnifique paysage de Johannes Vermeer.Ressentir la déception d'Alain face à l'usure du temps, il ne reste presque plus rien des bâtiments, tout c'est modernisé.Quelle tristesse toute cette beauté engloutie par les âges mais c'est ce qui rend cette oeuvre si précieuse. Et pourtant comme je comprends votre indignation. Il faut se dire que la peinture que ce soit un sourire, une lumière, un paysage est un instant de grâce , une communion entre le peintre et sa vision du monde qu'il offre à l'éternité et aux amateurs d'art.
Des nouvelles que je conseille à tous les passionnés d'art et un livre qui m'est très précieux. Merci Alain de partager votre passion et de cette belle générosité dont vous faites preuve en versant vos bénéfices à l'association Rêve pour enfants malades.
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Quand l'amour de la peinture, l'érudition et l'inventivité se combinent, cela donne les splendides nouvelles de ce recueil.

Ce sont surtout des moments de la création racontés par le peintre ou un de ses proches, autant d'histoires qui donnent à vivre la peinture, ce qui est encore mieux que de la voir. Mêlées mine de rien d'une foule d'informations précises sur le contexte, les techniques ou les sujets. On comprend ce qui fait de ces toiles des chefs-d'oeuvre tout en apprenant à aimer les artistes qui en sont les auteurs.

C'est parfois beau à pleurer (Monet), parfois ahurissant (le procès intenté par Whistler pour faire reconnaître qu'il n'était pas un escroc), toujours fascinant.

Et pour prolonger le plaisir (ou découvrir un avant goût), on peut aller fouiller les critiques de jvermeer (c'est le pseudo de l'auteur sur Babelio), notamment celles sur des ouvrages consacrés à la peinture. On y retrouve sa palette si particulière, mélange d'érudition et de tendresse.
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Dans son traité de la peinture, Léonard de Vinci comparait la peinture à une poésie muette, et la poésie à une peinture aveugle. Une troublante relation existe entre la peinture et l'écriture, deux arts s'influençant mutuellement.

Arrivé pour le nouvel an, ce recueil est l'aboutissement d'un besoin ancien de l'auteur de parler de peinture sous une forme différente de celles qui lui étaient présentées le plus souvent dans les nombreux livres ou monographies rédigés par des spécialistes de l'art.

Des impressions fugitives, une atmosphère, des ambiances, quelques tableaux en haute définition et, d'un coup, des artistes, hommes et femmes qui ont fait l'histoire de l'art, nous apparaissent, peignent et revivent un court instant. Ils ont pour nom Auguste Renoir, Henri de Toulouse-Lautrec, Berthe Morisot, Georges de la Tour, Amedeo Modigliani, Johannes Vermeer, Georges Seurat, Rembrandt van Rijn, Claude Monet, J.M.N. Whistler, Winslow Homer… Un humble artiste de la préhistoire vient se mêler à ces grands noms…

Un amour parmi d'autres de Modigliani : sa « Belle anglaise » :
« Un soir, nous devions nous rendre à une des nombreuses soirées qui animaient Montparnasse. Je n'avais que cette petite robe noire à me mettre. « J'ai une solution, m'avait-il dit ! ». Il attrapa des pastels et me dessina des fleurs sur le tissu, à même le corps. C'était superbe. »

La silhouette De Toulouse-Lautrec déambule après le spectacle du Moulin Rouge :
« D'une démarche chaloupée, il traverse l'espace libéré par les danseuses. Les spectateurs dansent à leur tour et terminent leur soirée. Révérencieux, ils lui font un passage. Il fait un geste amical vers deux femmes tendrement enlacées qui valsent dans un coin de la piste. »

« La lettre d'amour » de Johannes Vermeer nous conte son histoire :
« Les deux couleurs fétiches du peintre se rejoignent et s'harmonisent : la robe en satin jaune de la musicienne accolée au bleu du tablier de la servante. »

Par une belle nuit d'été, Winslow Homer découvre un spectacle irréel :
« Vue de près, les taches se transformaient en jeunes filles. Etroitement enlacées, elles dansaient le long du rivage. Leurs longues robes flottaient autour d'elles, les unissant dans un même drapé. »

Claude Monet touche la modernité dans son projet des « Nymphéas »:
« J'ai voulu aller encore plus loin : supprimer la ligne d'horizon, fondre les plans, oublier la perspective. le ciel est absent, seule sa réflexion sur l'onde est visible. L'apparence éphémère des choses… »

Un jeune bourgeois ne se méfie pas assez d'une diseuse de bonne aventure :
« le plus impressionnant est le visage desséché de la vieille bohémienne. Il fait peur : traits sillonnés de rides profondes, mains noueuses, mâchoire édentée. Une sorcière… »

À 40 ans, Auguste Renoir est amoureux :
« de plus, elle était gourmande et cela me ravissait. Quel plaisir je prenais à la voir manger ! Elle prenait des formes rondelettes, tout en gardant une taille de guêpe. »

20.000 ans plus tôt, un art nouveau naissait :
« Les yeux de Yourk se dilataient dans un effort de concentration extrême : il fallait faire mieux, donner de la consistance, de l'épaisseur à l'animal. »

***
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Au bout du pinceau des histoires se racontent, au bout de la plume elle continuent à vivre.
Alain Yvars nous raconte ces histoires. Comment ? En nous invitant à faire un voyage à l'intérieur de la peinture en copains qu'elle aime accueillir, en amis de longue date qu'elle est contente de revoir. C'est chaleureux et très intime.
Découvrir et redécouvrir la peinture avec le même bonheur, car l'enthousiasme est le même pour le novice comme pour l'averti. Si je le dis, c'est que c'est vrai, car ceux à qui j'ai fait découvrir ce livre, tous très loin de la peinture, se sont rapprochés avec curiosité, intérêt et un énorme plaisir. Alain conte la peinture en tant que peintre, ami, hôte et complice.
Modigliani, peintre maudit, a quitté la vie à 35 ans, mais nous a laissé une vie intense qui se dégage des ses corps stylisés et dépouillés, des regards qui gardent les secrets mélancoliques de quelques rêves non avoués.
Alain, notre hôte et guide, tu nous racontes les couleurs : de loin, certaines sont "des taches floues baignées d'ombre et de lumière", dans la Nuit d'été de Winslow Homer, de près, elles se transforment en jeunes filles, et comme elles, nous lecteurs sommes aussitôt transfigurés. La beauté peut être si proche et, avec elle, la poésie. Timides et silencieuses elles nous murmurent : ouvrez les yeux et la porte de vos sens, laissez-les se balader entre lignes, lumières, et couleurs, à l'intérieur des histoires de fougue, de douleur, d'exaltation, d'attente patiente, d'acharnement, de don de sa vie à la peinture, de passion. Ecoutez avec le coeur.
Liée depuis la nuit des temps au destin de l'homme, et sûrement pour longtemps encore, la peinture n'a rien perdu de son mystère, elle nous appelle depuis la grotte d'Altamira, depuis des siècles qui se sont écoulés, des chefs d'oeuvres du passé restent nos contemporains.
Vermeer et le monde de l'intime, à peine dévoilé, souvent laissé avec son secret. A pas de velours, je suis Alain jusque dans la pièce où la femme n'ouvrira jamais la lettre d'amour. Malicieux, Alain nous prête la curiosité de l'enfant qui regarde par la serrure de la porte et nous fait découvrir la construction et la composition de la toile, les couleurs qui n'ont rien perdu de leur harmonieuse beauté, et la lumière, magique. Ça fait de longues années depuis ma dernière visite au Rÿksmuseun, à Amsterdam, et là j'y suis, j'entre dans l'histoire, je veux apprendre plus et j'y crois, je suis spectateur et acteur à la fois.
Toujours sans souffle devant l'immense peinture des Nymphéas de Monet. Tellement intime. La salle de l'Orangerie est arrondie, les murs ont reçu le don de Monet. L'hypnose est totale. A nouveau me revient en mémoire la silencieuse puissance de la peinture. Peindre l'instant, si fugitif, si changeant, et l'enlacement avec d'autres qui viennent et s'en vont, tout aussi éphémères. "La couleur se libère dans une vaste abstraction." La peinture, avant toute chose, est une émotion, elle touche, secoue, arrête le souffle, donne la chair de poule et bien des fois arrache une larme, celle que la beauté a touchée.
Saskia, la femme de Rembrandt est très malade. le temps, lui laissera-t-il le bonheur de voir le tableau terminé ? La ronde de nuit.
Samuel, un des élèves du maître, exprime avec conviction son excitation intérieure :
"- Cette oeuvre survivra à toutes les autres !... Vivacité... puissance... lumière... ce dynamisme, cette furie gestuelle qui emporte votre tableau !"
La peinture de Rembrandt me touche au plus profond par tout ce qu'elle dépasse, le sublime. Elle nous regarde depuis un lointain passé, elle est notre contemporaine et elle nous survivra.
Et Alain, toujours avec ses lecteurs, s'extasie devant cette harmonieuse discordance où chaque élément, - masse de peinture, lignes, couleurs - est mis en valeur par l'ensemble, la lumière est plus éclatante, plus subtile, plus surprenante et plus émouvante quand elle est entourée d'obscurité, quand elle prend naissance de l'ombre.
Regarder l'harmonie des formes et des couleurs, peser le poids, en valeur rajoutée, du vide rehausseur d'équilibre, entrer dans le rythme intérieur et la musique silencieuse, aucunement muette d'une toile, la regarder de près, pour le détails surprenants et la facture, et de loin pour se laisser combler par l'ensemble de sa force ou de sa douceur, écouter sa poésie ou son cri de désespoir.
Je sens le grincement des dents d'Alain devant l'injuste procès qu'a dû subir la toile de Whistler Nocturne en noir et or.
Les phrases prennent le rythme du cancan, courent, tourbillonnent s'essoufflent autour des jambes, rubans, soies et dentelles et... d'un seul coup se figent devant la Mélinite, l'impériale Jane Avril. Gros plan. le trait de Lautrec est précis, "il fixe sur le papier l'arabesque du geste, l'acuité des regards, l'expression des visages rougis par l'effort."
La Goulue arrive aussi, "saute en l'air et retombe sur le sol les jambes cassées en deux parties", après, elle se relève et "d'un geste soudain, elle soulève ses jupons jusque la taille. La Goulue guette sa proie... ses petits yeux durs se plantent sur un homme en habit et haut de forme... Il hurla de bonheur lorsqu'elle lança sa bottine en avant en lui montrant ses dentelles. de la pointe du pied, elle fit sauter son chapeau comme un bouchon de champagne."
"Le public était de feu ce soir !"
C'est la fin du spectacle, les lumières s'éteignent, Monsieur Lautrec sort du Moulin Rouge pas avant de jeter "un regard possessif vers la salle enfumée. Elle lui appartient... C'est lui le maître des lieux..."
Ta plume, Alain, est dans l'histoire de la peinture, dans la vie des peintres et de leurs modèles. Ton écriture chante, danse et dessine, s'émeut surtout au souvenir d'une vie de génie, de ses joies et de ses malheurs, de la création qui en est née et qui vit encore. La silencieuse puissance de la peinture nous happe et nous nous laissons aller avec bonheur. Un héritage à garder précieusement.
Cher Alain, maître-ami, un très grand merci !
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Le petit pan de mur jaune ! sur la couverture, le tableau de Vermeer! Proust !

Conter la peinture, c'est, pour Alain Yvars, nous inviter au théâtre : regarder la mise en scène d'un tableau de Vermeer, une scène de vie ordinaire: « la lettre d'amour » : la porte est entr'ouverte depuis un réduit à balais, avec des seaux, un panier à linge, un coussin, des chaussures qui trainent par terre, un rideau ( rideau ! ). Les deux femmes l'une vêtue de bleu, la servante, donne une lettre à sa maitresse assise, robe jaune ( jaune et bleu, les deux couleurs fétiches du peintre, dit l'auteur)et se concertent :
Rupture ou rendez vous ? Se demandent elles et demande Alain Yvars ? « Vois la marine et le paysage idyllique suspendus au mur : à cette époque, ils symbolisaient le calme, bon présage en amour »….Et puis l'impression de profondeur donné par les dalles blanches et noires( comme dans le tableau de Pieter de Hooch, le couple au perroquet, et puis la lumière venant de la gauche sans que l'on voit de fenêtre. Alain Yvars réussit merveilleusement à nous expliquer ce que nous voyons, car nous ne voyons que ce que nous comprenons…. Et lui, avec sa culture, est là pour nous inviter à voir, pour nous faire voir. Et pour cela, plusieurs approches.

Au théâtre du Moulin Rouge, ce qui occupe Alain Yvars ( et nous, et nous), c'est le regard De Toulouse-Lautrec sur les danseuses, leur provocation ( la Goulue qui d'un geste preste , montre le coeur vert brodé sur sa culotte rose. )Les dessins préparatoires rapides qu'il fait en suivant ces levées de jambes et ces aperçus prometteur, lui le « petit bonhomme ».

Un peu coquin, donc, ce livre, évoquant le Montparnasse des débuts de l'impressionnisme, la fête perpétuelle peinte par Renoir, son amour de la vie et d ‘Aline la gourmande, l'amour de Rembrandt pour Saskia qui illumine la Ronde de nuit.

Parfois l'auteur donne la parole à un modèle par exemple Béatrice Hastings, poétesse et journaliste, qui a vécu une liaison orageuse avec Modigliani. Elle repense à sa rencontre avec lui, à sa peinture « vue de face, le cou et le visage s'allongent, le regard est vide. »… et elle caresse un nu de femme lascive.

Ou bien il fait écrire Berthe Morisot à sa soeur, pour lui parler en bien du pointillisme, rejeté par la critique :« versicolores gouttes » »tourbillonnantes cohues de menues macules », « fourmillement de paillettes prismatiques » « menues taches prismatiques » critiques qui la font rire ainsi qu ‘Eugène Manet son mari .

Ou bien encore se faisant journaliste, rapportant le procès fait par Whistler à Ruskin, qui l'a traité de bouffon. Lorsque l'on voit le « Nocturnes en noir et or », la beauté de ce feu d'artifice et sa modernité, entendre qu'il a « jeté un pot de peinture à la face du public »nous choque, bravo le peintre, refusant d'expliquer au juge l'importance des formes et des couleurs, pas de ce qui est représenté, de toute façon il ne comprendrait rien, mais nous, si, grâce à ce si charmant livre si rempli de références.

Ou bien en même temps les recherches de Monet peignant les cathédrales de Rouen à diverses heures de la journée, puis évoluant sans cesse jusqu'à peindre les Nymphéas, et l'on imagine le peintre et sa petite fille Blanche, les regardant avec distance, puisqu'ils doivent être vus de loin. « J'ai voulu aller encore plus loin : supprimer la ligne d'horizon, fondre les plans, oublier la perspective. le ciel est absent, seule sa réflexion sur l'onde est visible. L'apparence éphémère des choses… »

Je ne cite pas tout, à vous de découvrir le Jeu de mains de Georges de la Tour, la naissance de l'art rupestre, Winslow Homer ( j'avoue je ne connaissais pas) et, pour terminer sur Vermeer, qu'est devenu ce petit pan de mur jaune, disparu à Delft, et seul survivant sur la toile et dans la « Prisonnière » de Proust ?

En quelques pages, Alain Yvars conjugue l'art apparemment simple de nous convier à savoir regarder un tableau, et toutes les connaissances qui précèdent cette simplicité.
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