Or Schengen ne survit qu'à condition que les frontières extérieures de l'Union soient contrôlées et étroitement surveillées. C'est la tâche que sont chargés d'assurer les navires et les agents de Frontex, les marines grecque et turque, la police et les services secrets grecs, ainsi que les autres agences européennes impliquées.
Voici comment le Parlement européen définit les hot-spots : "Ceux-ci ont pour but de mieux coordonner les agences de l'UE et des autorités nationales dans leur travail mené sur les frontières extérieures en matière de premier accueil, identification, d'enregistrement et de prise des empreintes digitales des demandeurs d'asile ("asylum serkers"). Actuellement, seules la Grèce et l'Italie ont des hot spots Mais d'autres pays peuvent aussi bénéficier de l'installation de hot spots s'ils le demandent ou si la Commission européenne est d'avis que ces pays ont besoin d'une assistance supplémentaire".
Quatre ans auparavant, en avril 2015, un accord conclu entre la Commission européenne et le gouvernement grec a donné naissance, sur les cinq îles de la mer Egée les plus proches de l'Asie mineure, Lesbos, Kos, Leros, Samos et Chios aux hot-spots ("points chauds"), points d'accueil de milliers de réfugiés venant de Syrie, d'Irak, d'Afghanistan, mais aussi du Pakistan, de l'Afrique subsaharienne et d'ailleurs, fuyant la guerre, la torture, la destruction de leur pays et tentant d'atteindre les côtes grecques.
Stelios Kamnarokos avait été l'un de mes étudiants de l'université de Genève les plus sympathiques et les plus inteligents. Son père, un homme corpulent, bon vivant, plein d'humour et pratiquant l'hospitalité inconditionnelle, était le pope de Mytilène : sur les quais et dans les cafés de la ville, tout le monde l'appelait affectueusement "Papa Dimitri". C'est lui qui m'avait fait découvrir ce miracle de la nature qu'est l'île de Lesbos.
En espagnol, moria veut dire il mourrait. Et c'est ça, qu'on fait, à Moria. On meurt à petit feu. Doucement. Intérieurement. D'abord en tombant malade, toujours, les premiers jours. La fatigue, la nourriture, le manque d'hygiène. Puis en perdant l'espoir. Alors, un jour, on finit par le saisir, ce couteau qu'on refusait de voir. Qu'on croyait réservé aux autres, aux plus faibles. Non, un jour, sans savoir comment, c'est nous qui nous mettons à faire comme eux sans pouvoir nous arrêter de regarder le sang couler.