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Critiques de Montesquieu (149)
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De l'esprit des lois

Il est toujours enrichissant de se replonger dans les classiques en période de crise. Le N° 146 de l’hebdomadaire Le 1 cite cette semaine L’esprit des Lois à l’occasion de son numéro consacré à la corruption… C’est l’occasion pour moi de re-parcourir Montesquieu.

L’esprit des lois est le fruit de presque vingt ans de réflexion sur ses expériences passées, ses voyages en Allemagne, Hongrie, Autriche, Italie, Hollande, Angleterre… Montesquieu s’est épuisé dans cette tâche monumentale, par amour pour la raison et la vérité dans un profond respect de la nature humaine.

Publié en 1748, cet ouvrage est toujours aussi juste et résonne à nos oreilles de lecteurs du XXIème avides de comprendre les grands problèmes contemporains.



Montesquieu part des lois naturelles, une forme de raison primitive qui régit le monde : les lois des hommes sont les lois positives, issues de la raison humaine et dans cette logique, les lois politiques de chaque pays ne devraient être que des prolongements de cette distinction fondamentale, quels que soient les époques, les pays et les gouvernements. Les élans lyriques de la préface donnent toute la mesure de l’œuvre accomplie et de l’espoir que Montesquieu fonde dans une science politique lucide et sereine

Mais les différents types de gouvernement, républicain (démocratie et aristocratie), monarchique et despotique, n’appliquent plus vraiment ces principes fondateurs et complexes. Montesquieu insiste sur les notions indispensables de vertu démocratique et de modération aristocratique ; il met cependant en garde sur les risques de l’ambition, « pernicieuse dans une république », mais parfois bénéfique dans la monarchie placée sous le signe de l’honneur ; enfin la crainte suscitée dans les régimes despotiques est inconcevable dans une société civilisée. Chacun de ces mots, aux sens très forts mériteraient un long développement.

Rapidement, le concept de corruption fait son apparition : « la corruption de chaque gouvernement commence presque toujours par celle des principes ». Pour ne parler ici que de la démocratie, régime qui nous rapproche de notre époque actuelle, Montesquieu isole deux menaces : l’ambition individuelle dans un souci d’égalité et une forme d’insubordination ou « esprit d’égalité extrême » quand « chacun veut être égal à ceux qu’il choisit pour lui commander ». Cette situation provoque l’anarchie et favorise le despotisme.

Les pouvoirs judiciaire, exécutif et législatif des différentes nations ne fonctionnent pas de manière égale face aux réalités communes dégagées par Montesquieu. C’est pourquoi il prône la séparation et l’équilibre des trois pouvoirs, la liberté politique se limitant au « droit de faire tout ce que les lois permettent », dans « cette tranquillité d’esprit qui provient de l’opinion que chacun a de sa sureté ».



Montesquieu ne se limite pas au domaine politique : son analyse est d’une telle ampleur qu’elle englobe aussi l’espace et la géographie avec notamment sa fameuse théorie des climats qui en influençant le tempérament des peuples agissent aussi sur les lois ; c’est l’occasion d’aborder la question de la servitude et de l’esclavage et de déconsidérer par l’ironie cette pratique aujourd’hui taxée de crime contre l’humanité ; en effet, il nous propose un faux plaidoyer en faveur de l’esclavage qui rappelle l’extermination des indiens d’Amérique et leur remplacement par la main d’œuvre africaine, la réalité des plantations sucrières, qui stigmatise aussi les différences raciales, reprend la théorie de l’absence d’âme chez les noirs, rabaisse leur naïveté... L’auteur revisite les idées reçues pour mieux les mettre à mal.

Montesquieu donnait une forme de suprématie aux climats froids et aux peuples nordiques ; dans les pays froids, les gens sont plus vigoureux, plus courageux, moins enclins aux plaisirs, moins sensibles à la douleur. Plus les zones sont tempérées et chaudes et plus leurs habitants sont timides, soumis à la recherche des plaisirs et à la sensibilité… Naturellement les lois doivent tenir compte de ces différences.

Le climat interfère aussi dans les relations entre hommes et femmes et est cause d’une « inégalité naturelle ». Nous pouvons lire des pages sur la nubilité, la polygamie, la situation des femmes en Orient, la pudeur, la répudiation et le divorce…

De même les conditions de fertilité du sol influencent les conditions de vie et de subsistance : on ne légifère pas de la même façon pour des nations cultivatrices ou commerçantes, pour des peuplades d’éleveurs de troupeaux ou de chasseurs.

Certes, les déductions de Montesquieu peuvent sembler un peu hâtives ; j’ai en mémoire l’expérience avec la langue du mouton qui l’amène à écrire des généralités sur la psychologie des peuples… Mais il a au moins eu le mérite de démontrer que la science politique doit tenir compte de phénomènes physiques, psychologiques et économiques.



La fin de cet essai est plus compliquée, très juridique et donc d’une lecture plus difficile… J’avoue l’avoir un peu survolé à partir du Livre XXVI. Montesquieu donnent des conseils avertis aux législateurs après avoir fait en quelque sorte un grand historique de droit depuis les origines.



Chez Montesquieu, la science politique doit être utile au bonheur des hommes, dans le progrès social et la garantie d’une certaine liberté, modérée par une forme de vertu et d’obligation morale.

Ainsi, pour cet érudit en matière de littérature grecque et latine, la démocratie antique était une sorte de gouvernement idéal mais incompatible avec les civilisations modernes. Il avouait aussi une nette préférence pour la constitution anglaise et réfléchissait à une constitution semblable pour la France, à une adaptation de la monarchie absolue en limitant les pouvoirs royaux à une époque où l’on commençait à se révolter contre les privilèges. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen s’inspirera de ses idées notamment en ce qui concerne la séparation des pouvoirs ; par contre, Montesquieu préférait la liberté à l’égalité et ne revendiquait pas l’abolition de tous les privilèges.

L’auteur a développé une méthode et des expérimentations scientifiques pour mettre en lumière un ordre universel, général et admis au-dessus des personnalités qui dirigent les hommes et les pays. Dans ce grand travail de clarification et de compréhensions des lois humaines, il garde cependant une posture critique envers les abus, les tyrannies et les intolérances.

À relire et à méditer.

À conseiller peut-être comme livre de chevet aux candidats à l’élection présidentielle qui s’approche…

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Lettres Persanes

Comme pour vous, sans doute, les « Lettres Persanes » représentent un souvenir scolaire (bon, mauvais ou neutre, ça dépend), éternellement liés aux classiques Garnier à couverture jaune. Rares sont les élèves qui peuvent être emballés par un roman du XVIIIème (à part les « Contes » de Voltaire, et encore pas tous). Alors vous pensez, un roman épistolaire… Moi, j’ai mis des années avant de me replonger dans ce bouquin, pour finalement y trouver un autre intérêt, sinon un certain charme.

Il est vrai que la lecture d’un tel ouvrage peut rebuter. Les auteurs des lettres, comme leurs destinataires, ainsi que leurs contenus, sont à chaque fois différents. Il nous faut du temps pour comprendre qui est qui, et quels sont les liens qui relient les personnages entre eux. Une fois qu’on a compris ça, c’est beaucoup plus facile.

Deux Persans (mais pas le shah, hélas, un shah persan, dans cette histoire aurait été le bienvenu), Usbek et Rica, entreprennent un voyage à Paris. C’est essentiellement un voyage de découverte, aussi nos deux touristes improvisés ne se gênent pas pour commenter, dans leur correspondance, tout ce qu’ils voient, entendent et ressentent de ce grand pays qu’est la France et qui pour eux est encore une énigme : l’étonnement est leur première réaction, suivi par une critique faussement naïve et parfois mordante.

En fait il y a deux histoires, dans ce roman : la première, c’est ce voyage, et cette découverte d’une nouvelle civilisation aux antipodes de celle qu’ils ont quittée : sur le plan politique, économique, social, sociétal, religieux… tout est nouveau, et la surprise est totale. La deuxième histoire concerne Usbek sur un plan plus… privé (je ne suis pas certain que ce qualificatif soit le plus approprié, mais je n’en ai pas d’autres sous la main) : Usbek est parti en laissant derrière lui cinq épouses (quand on aime, on ne compte pas) : Zachi, la première épouse, la préférée (en tous cas au début), Fatmé, une passionnée, Zéphis, une orgueilleuse et une inconstante, Zélis, une provocatrice, et Roxane la plus jeune, mais pas la plus innocente. Au fil du temps les choses se gâtent dans le harem. Le grand eunuque est assassiné, les femmes sont livrées à elles-mêmes : Zélis enlève son voile à la Mosquée, Zachi couche avec une de ses esclaves, Roxane est surprise dans les bras d'un jeune homme .. Usbek, à distance, tente de rétablir l’ordre, mais il est trop tard. Roxane s’empoisonne en accusant Usbek de sa mort, et en revendiquant sa liberté.

La première histoire, de par son aspect satirique, reste souriante ; nos voyageurs, étant sans préjugé, d’un esprit vif et impertinent, et faussement ingénu, ont beau jeu de souligner les incohérences et les ridicules de la société française dans tous ses domaines, et même de remettre en question, sans y toucher, aux fondements de la civilisation occidentale.

La seconde histoire, au contraire, passe d’un orientalisme convenu (style « Mille et une nuits") à la tragédie complète, ce qui fait basculer l’ensemble du roman dans un drame auquel l’auteur, par petites touches, nous a préparés.

On a souvent intérêt à relire nos classiques. Et qui sait, si la France du XXIème siècle était visitée par des Martiens en goguette, comment nous jugeraient-ils ?





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Dialogue de Sylla et d´Eucrate

Dans le "Dialogue de Sylla et d'Eucrate" se profile discrètement des idées philosophiques, dans la marche naturelle du dialogue.

Cette discussion d'une grande âme et de son interlocuteur fait ressurgir des idées et des questionnements philosophiques.

Le style simple, élégant, élevé, naturel, affiché ici par Montesquieu est remarquable.

Je ne suis pas d'accord avec toutes les idées exprimées, mais elles ont le mérite de faire surgir la réflexion.

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De l'esprit des lois

De l'esprit des lois a mal vieilli. Nombre de chapitres de cet ouvrage semble aujourd'hui ridicules. Il reste des premiers chapitres visionnaires, magnifiques, et quelques vérités, éparpillées dans les derniers chapitres.

Résumons donc : l'on comprend pourquoi Montesquieu est considéré comme un philosophe majeur, mais l'on peut douter de l'actualité de certains passages.
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Lettres Persanes

Usbek, un riche noble persan, quitte Ispahan à la recherche de connaissances, en plus de la culture orientale, avec l'idée qu'il faut aussi connaître l'Occident. Il est accompagné de son ami Rica, dans un long voyage à Paris, après avoir laissé ses cinq femmes aux soins de plusieurs eunuques. En entretenant, lors du voyage et du séjour prolongé à Paris (1712-1720), une correspondance avec des amis rencontrés dans les pays traversés, il dresse un regard faussement naïf sur les mœurs, les conditions et la vie de la société française au XVIIIe siècle, politique en particulier, se terminant par une satire cinglante du système de droit.



Montesquieu utilise une perspective étrangère pour mettre en lumière la culture et les systèmes politiques occidentaux, profitant de cette perspective pour tisser une critique bidirectionnelle, des Français et des Perses, des positions libérales et conservatrices.



A Paris, les Perses dressent un portrait de la société française de l'époque, commentant les sujets les plus divers. La différence de tempérament entre les deux amis est notable, Usbek étant plus instruit et posé beaucoup de questions, tandis que Rica est moins impliqué, plus libre et plus attiré par la vie parisienne.



Les Perses notent le rôle des parlements, des tribunaux et des organisations religieuses. Ils décrivent une culture florissante, la prolifération des imprimés. Le café - où se déroulent des débats, du théâtre et de l'opéra. La presse périodique commence à jouer un rôle dans la vie quotidienne. Des institutions (universités, Académie française, sciences) et des groupes sociaux sont également décrits.



Il existe également une étude intéressante sur les religions comparées, dans laquelle Usbek tente de comprendre le christianisme à la lumière de l’islam, ainsi qu’une critique cinglante du dogme religieux.



L'action se déroule dans les dernières années du règne de Louis XIV, décrit satiriquement comme un « grand magicien » qui maintient ses sujets sous l'illusion. Critiquant sévèrement le pouvoir absolu des monarques, qu'il prétend maintenir comme représentants de Dieu sur terre.



Le décor exotique est dû à l'énorme succès de la première traduction dans une langue européenne, le français, des Mille et Une Nuits, réalisée par Antoine Galland.
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Défense de l'esprit des lois

Si l'on connaît et l'on lit De l'esprit des Lois, l'on connaît moins et l'on lit moins La Défense de l'Esprit des Lois. Et c'est justifié.

En effet, cette Défense de l'Esprit des Lois me semble bien moins intéressante que le texte qu'elle défend ! Et pour cause : Montesquieu, qui aurait pu nous apporter quelques éclaircissements ou compléments de pensée, nous offre à la place… Une Défense de l'Esprit des Lois, en fait. Et c'est là le problème.

Car, faire la Défense de l'Esprit des Lois était sans doute très utile pour Montesquieu, de son temps, mais aujourd'hui… Aujourd'hui, la plupart des passages de la Défense de l'Esprit des Lois sont dépourvus d'intérêt, consacrés à proclamer que l'ouvrage est conforme aux bonnes mœurs, à la morale…

Un petit texte d'un grand philosophe.
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Lettres Persanes

Plongée dans ce recueil aux morceaux choisis pour une étude scolaire, je me délecte des bons mots de Montesquieu!



Je prends plaisir à me faire lecture à voix haute!!! Je redécouvre ainsi ces textes aux propos si actuels, aux remarques pleines de bon sens sur la société, la nature humaine… Je suis bien contente que Montesquieu ait pensé au subterfuge de lettres trouvées pour faire publier son œuvre… Quelle langue savoureuse ! Mais il est bien dommage que certains aspects soient toujours le reflet de notre société… Bien souvent, je me suis surprise à répondre tout haut : "Cest vrai!" Mais sa subtilité et son ironie m'ont bien amusée, j'ai passé un très bon moment en la compagnie de Montesquieu…



A (re)lire de toute urgence! Mais à dose homéopathique, par petites touches, pour faire durer le plaisir...
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Lettres Persanes

3 raisons de lire ce roman :

- Une jolie petite bombe. Publié anonymement à Amsterdam, Montesquieu ne s’est présenté que comme traducteur des lettres. Jouant sur l’image de la fausse naïveté des voyageurs découvrant de nouveaux horizons. Et il dézingue à tout-va la France du XVIIIème : les coutumes, le gouvernement du pays, le roi, les moeurs et la religion.

- Cédant à la mode de l’orientalisme et des romans par lettres, Montesquieu produit un chef-d’oeuvre du genre, reflet parfait de l’esprit des Lumières. Une satire tout en finesse qui veut mener le lecteur à mener sa propre réflexion - sur des thèmes qui restent totalement d’actualité. Même Diderot était fan : "Quel livre plus contraire […] à tous les préjugés vulgaires et par conséquent plus dangereux que les Lettres persanes ? Que nous reste-t-il à faire de pis ?" Alors il ne faut pas hésiter une seconde…

- La langue, qui pour un texte du XVIIIème siècle, que je ne trouve pas si aisée que ça en général, reste assez facilement compréhensible. Le format de la lettre facilite également la lecture du fait de "chapitres" assez brefs. Et je ne m’en cache pas : Montesquieu, je l’aime ;)
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De l'esprit des lois, tome 1

Montesquieu est considéré à juste titre comme le père fondateur, si ce n'est des démocraties, au moins de la notre. Il a su établir les bases de ce type de régime, beaucoup plus lucide que Rousseau, s'il admet que les hommes à l'état naturel naissent égaux, il admet aussi que la société fait perdre cette égalité! Il voit dans la concentration des pouvoirs la mort de l'égalité et de la justice. il prône donc la séparation des pouvoirs, car " tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser", et pour être certain de préserver les équilibres fondamentaux, il est nécessaire de contrôler les pouvoirs. "Le pouvoir arrête le pouvoir". Il est pour le bicamérisme parlementaire, et voit dans ce modèle le meilleur moyen d'éviter les dérives. Sujet d'actualité brulante, car dans notre V république, ce bicamérisme ne remplit plus le rôle de départ! D'autre part Montesquieu part de l'idée que le peuple doit être représenté dans son ensemble par l'une des chambres. Posons nous la question de notre constitution, basée après la guerre sur le bipartisme, pour assurer la sécurité des gouvernements, ce bipartisme là est il aujourd'hui représentatif de l'ensemble des électeurs... D'autre part les pouvoirs, notamment judicaires et exécutifs sont ils encore séparés?.. Montesquieu un vrai démocrate à relire d'urgence si on veut encore sauver la démocratie...
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Considérations sur les causes de la grandeur ..

Cette fulgurante exposition des grandeurs de l’esprit romain s’amorce avec ses premières origines pour s’arrêter au moment où s’amorce la dégénérescence.

À propos de ce que promet le titre, il faut savoir que l’auteur s’intéresse donc bien d’avantage à la grandeur qu’à la décadence des Romains, qu’il évoque, pour terminer son ouvrage, de la manière suivante : « je dirai seulement que, sous les derniers empereurs, l’Empire, réduit aux faubourgs de Constantinople, finit comme le Rhin, qui n’est plus qu’un ruisseau lorsqu’il se perd dans l’Océan… ».
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Lettres Persanes

En utilisant des protagonistes étrangers, Usbek et Rica, Montesquieu justifie ainsi ses critiques de la societé française.



C'est aussi le moyen pour lui de présenter, au travers des réflexions de ses personnages confrontés à deux mondes culturellement opposés, ses idées politiques. Dans l'édition que j'ai lue, il y a une préface de Laurent Versini qui est très intéressante. Elle explique notamment pourquoi Montesquieu a choisi de présenter certaines sociétés et leurs formes de gouvernement (l'Angleterre, Rome, etc.) et pas d'autres, et démontre également que la thèse germaniste, à laquelle Montesquieu adhère, commence alors à prendre de l'importance.



Ce roman met en avant l'individu : comment être heureux, justifier son existence, sans toutefois nuire à son prochain ? Il base sa réponse sur deux principes essentiels : la justice et la tolérance. Grâce au regard d'Usbek ou Rica, il montre à quel point les sociétés peuvent être ridicules dans de petits détails quand ces valeurs sont universellement partagées et reconnues. Individualité également parce que Montesquieu montre qu'il peut apprécier une entité ou une personne tout en méprisant un ensemble. Par exemple, il croit en Dieu mais dénigre le clergé.



Lecture fluide et agréable : on passe sans peine d'une lettre à l'autre !
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Lettres Persanes

Cette oeuvre majeure, publiée anonymement à l'origine car le risque de se dévoiler était évident, (les Louis n'appréciaient pas trop la critique) est la façon la plus simple d'aborder Montesquieu. L'emploi de commentateurs étrangers sous couvert d'échanges épistolaires étaient encore assez neufs et permettait une liberté de ton pas si fréquente (étonnement du candide). C'est parfois drôle ce qui ne gâche rien et renforce la vision philosophique et politique de l'auteur.

C'est très agréable à lire et, en étant attentif, on y découvre des petites flèches empoisonnées et des commentaires assez corrosifs.
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Lettres Persanes

Un riche Persan, Usbek, décide de voyager en Occident, aussi bien par intérêt d’observer d’autres sociétés, que par prudence, pour se mettre à l’abri du pouvoir politique de son pays. Il amène avec lui, un jeune homme, Rica. Après un passage par l’Italie, nos Persans arrivent à Paris. Ils écrivent moult lettres, à des amis restés en Perse, à des gens rencontrés sur la route, entre eux également, et pour Usbek à ses femmes et aux eunuques chargés de les garder.



Les lettres sont très diverses, il y a celles qui décrivent les mœurs locales, souvent sous un angle humoristique ou caustiques, il y a les lettres plus philosophiques, où surtout Usbek, s’interroge sur l’organisation politique, sur la religion, sur les mœurs, sur l’économie, l’histoire… et il y a les lettres qui composent une sorte de roman sur les histoires du sérail, sur les rapports d’Usbek avec ses épouses.



Le livre joue sur la vogue de l’Orient, apparue dans la deuxième moitié du XVIIe siècle, suite aux voyages en Chine, au Siam, aux Indes… et aux récits publiés. Entre 1704 et 1717, Antoine Galland, orientaliste et voyageur, publie ainsi sa traduction des Mille et une nuits.



Ces voyages, ces échos des civilisations très différentes, posent les questions de la relativité des cultures, des usages, remettent en cause ce que l’on croyait allant de soi. En même temps, l’opulence supposée et le faste de ces contrées lointaines font rêver.



Une partie du succès des Lettre persanes vient sans doute du goût de l’exotisme du public, des descriptions des mœurs orientales, des savoureuses petites histoires de sérail. Mais l’essentiel du livre se passe en France, et c’est bien plus de mœurs françaises qu’il s’agit que de mœurs persanes. Le fait que le regard soit porté par des étrangers, par des gens venus d’une culture complètement différentes, pas du tout au courant de la façon dont les choses se passent ici, permettent à Montesquieu beaucoup d’acuité dans le regard, beaucoup de férocité dans la critique et la satire, puisque ce sont des étrangers qui ne comprennent pas. Au fameux « Comment peut-on être Persan » il peut opposer « Comment peut-on être Parisien ».



De même, les réflexions sur le pouvoir politique, sur la religion, sur les mœurs (avantages du divorce etc) sont permises davantage à ces Persans, d’autant plus qu’ils les illustrent par des exemples de chez eux, même si évidemment, la portée que veut leur donner Montesquieu est universelle. Comme commence à être universelle la nature humaine, vue par les philosophes du XVIIIe siècle.



Il est évidemment impossible de faire ici une analyse de cette œuvre très dense et complexe. Juste quelques remarques sur les choses qui m’ont frappées lors de cette relecture.



Déjà le prima accordé à la raison. L’être humain est complètement rationnel, il agit dans son intérêt, en choisissant la meilleurs option pour lui. Montesquieu semble éliminer complètement les affects, les conduites émotionnelles et passionnelles. Par exemple, il exclut complètement la possibilité de prendre plaisir à faire souffrir l’autre, sans que cela rapporte un bien matériel, juste pour le plaisir d’infliger de la souffrance. Ce qui est bien optimiste, et bien naïf j’en ai peur. Enfin tout au moins dans ses analyses. Parce que notre Usbek, tout prêt à avoir une immense ouverture sur les mœurs, à s’interroger sur le bien fondé des harems, à vanter les mérites de la douceur et de la mansuétudes, se transforme en tyran sanguinaire dès qu’il sent ses femmes lui échapper à distance.



Liée à cette notion de rationalité de l’être humain, l’idée qu’on a qu’à laisser jouer les intérêts individuels, pour obtenir le meilleur état possible de la société. Les forces vont d’une certaine façon s’équilibrer, nous avons tous besoin les uns des autres, si on se comporte d’une façon malhonnête ou injuste, cela va se retourner contre nous. Montesquieu ne semble pas du tout percevoir que les appétits de certains sont bien plus grands que la moyenne, qu’il existe un goût du pouvoir et de la domination pour elles-mêmes, la cruauté gratuite. J’exagère sans doute un peu, mais cette vision du monde est quand même là, et comme elle est toujours d’actualité, elle m’a frappée.
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Lettres Persanes

Les lettres persanes sont un trésor de la littérature française, que tout le monde étudie succinctement au lycée mais… que personne (ou presque) ne lit jamais intégralement. On le sait, elles sont censées avoir été écrites par deux natifs d'Ispahan qui font un séjour prolongé en Europe Occidentale. Une partie de cette correspondance, destinée au harem d'Usbek (où, en son absence, les choses vont tourner au vinaigre), est centré sur le mode de vie persan et est facile à lire. le reste, c'est-à-dire la majorité de ces lettres, permettent aux voyageurs de donner leur point de vue sur la société française du début XVIIIème siècle. Leur curiosité - qui ne vaut certes pas approbation ! - s'étend à tous les domaines, politique, moeurs, religion, philosophie, etc... L'un des grands motifs de stupéfaction est le laxisme moral qui conduit les épouses à tromper souvent leur mari (et réciproquement) sans soulever de réprobation. Mais, aussi, la religion locale est questionnée finement, Usbek n'hésitant pas à entrer dans les subtils arcanes de la métaphysique - c'est peu vraisemblable car un étranger n'a jamais pas assez d'intérêt pour cela.

Même si le ton reste badin, il faut au lecteur beaucoup de concentration pour lire ces lettres dont le sujet est sérieux et qui se réfèrent à une situation vieille de trois siècles. En outre, la langue de Montesquieu est très pure, mais un peu désuète. Ce n'est donc pas un livre facile. Heureusement le découpage en lettres (souvent courtes) facilite un peu la lecture.
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Lettres Persanes

Après avoir longtemps renié la paternité des lettres qui composent cette œuvre et avoir prétendu en être le simple compilateur, on sait aujourd'hui qui en est l'auteur.

Pour contourner la censure, Montesquieu utilise le regard que des étrangers portent sur Versailles, le Prince et sa cour. Ce n'est donc pas lui qui se moque ou qui critique mais c'est le regard neuf et étonné des étrangers sur les mœurs occidentales et principalement françaises qui immunise l'auteur contre toute censure.
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Lettres Persanes

Quand on referme cette correspondance, on a cette impression d'avoir voyagé à chaque phrase, à chaque lettre. On a traversé et caressé l'universalité par l'esprit. Par là, cette oeuvre est bien révélatrice du début du siècle des Lumières, le cosmopolitisme est au rendez-vous.



Usbek et Rica avec leurs correspondants font part d'histoires relatives aux différents continents. Ce n'est pas seulement un voyage à Paris qui est réalisé, mais un voyage autour du monde par mention d'espaces géographiques et le savoir rapporté. Les lettres sont imprégnées d'une volonté de savoir, par Usbek, reposant sur la raison. Par Ricca, la curiosité est poussée à sa logique et les questionnements sont au coeur mêmes des écrits. le savoir, est universel et ne se borne pas à une seule culture : "Nous sommes dans un royaume florissant; mais nous n'avons pas cru que ses bornes fussent celles de nos connaissances, et que la lumière orientale dût seule nous éclairer". Voilà une des idées fondatrices des lumières.



A travers le regard persan, le regard de l'altérité, Montesquieu élabore une critique de la société française. Ces correspondances sont des satires politiques et sociales. Presque rien n'est épargné. Les moeurs des Français ( mode vestimentaire, atmosphère de Paris) , les catégories " professionnelles" de la société Montesquieu met en évidence aussi l'idée d'équité et pointe certaines injustices comme le droit d'aînesse.



La religion est au coeur même de la critique : la religion (ses dogmes, pratiques) prise par les chrétiens par intérêt. Ils ne gardent que ce qu'ils leur arrangent, comme un marchandage avec Dieu. le Clergé ( et sa richesse inégale) est aussi ciblé, ainsi que ses " agents". Plus globalement, les dogmes religieux sont mis en question et critiqués, il n'y a pas de cohérence apparente. La tolérance sur les religions est esquissée dans quelques unes des lettres, rejoignant par là le mouvement des Lumières qui est encore à son Midi.



La critique du pouvoir arbitraire despotique, qui ne connait pas de bornes ni d'équilibre de pouvoirs est bien sûre esquissée.. ( autocratie du Tsar de Russie). Montesquieu dresse le portrait des guerres justes et injustes, les conquêtes (colonies etc). L'intérêt général prévaut au delà des intérêts particuliers du souverain. A plusieurs reprises, sont évoqués les rois de France, Louis XIV et le jeune Louis XV, ainsi que la polysynodie de la Régence. Louis XIV est dépeint comme un roi victorieux, de guerres, et menacés par des cabales…



La justice, et les lois, les Parlements... sont aussi au coeur de la réflexion, et rejoignent le parlementaire qu'est Montesquieu. ( par ex : la peine proportionnelle à l'infraction/ crime commis).



Tantôt historien, Montesquieu fait placer dans ses correspondances, la question de la démographique, de la mortalité infantile et des causes qui les accompagnent ( famines, disettes, maladies).



Enfin, le savoir est l'épicentre des correspondances : livres, littératures ( poètes épiques, dramatiques...) histoire, géométrie, médecine, astrologie, justice, religion, philosophie, politique sont autant de thèmes abordés ( pour ne citer que ceux-là). L'univers du savoir est immense, et embrasse les catégories de l'universalité.



Parallèlement, la culture persane s'invite à nous. L'intrigue du sérail d'Usbek laissé aux mains de ses gardiens, place en son coeur, la question du commandement, de l'autorité, de la possession. Ce sérail qui était en ordre finit par devenir un chaos total. Montesquieu mêle une intrigue aux correspondances de voyage d'Usbek et Rica.



Un écrit agréable, la surprise, et le plaisir du lecteur ne sont pas oubliés. L'ennui n'est pas dans les Lettres Persanes. On voyage, dans les siècles, dans les espaces, dans les lumières du savoir.

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Lettres Persanes

Ce livre me semble assez complexe. Les lettres sont courtes mais traitent presque toutes d'un même sujet, soit l'amour et les femmes, soit la politique. J'ai eu la douloureuse impression qu'à l'époque, les hommes étaient polygames et avaient tous plusieurs femmes.

Un livre cependant très agréable à lire, et fort bien écrit. Quant à l'analyse, c'est plus compliqué.
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Lettres Persanes

Lecture scolaire oblige, je me suis plongée dans les lettres persanes avec une sélection de lettres à lire...Rapidement prise par le roman, je les ai finalement toute lues !



Le système épistolaire n'est pas fréquent dans la littérature française (du moins ce que j'en connais !), et l'idée de mettre en correspondance des Perses, de ceux restés au pays à ceux en voyage, est véritablement géniale.

La vision de notre monde de l'époque est ainsi dénuée de nationalisme ou d'arrogance vis à vis de notre nationalité; mais l'ironie et les critiques sous-jacente sont pourtant bien présentes. La grande force de Montesquieu est qu'il parvient, sans dénoncer ou montrer du doigt, à nous faire se rendre compte de l'absurdité de certaines des moeurs françaises de l'époque, déduction logique suite aux tableaux présentés par Rica et Usbek. Revers pourtant, ce dernier, critique envers l'Europe et plutôt idéaliste, fait subir le calvaire à son harem, qu'il ne remet absolument pas en question quand nous, Européens, nous affligeons à sa description. Ce dyptique France-Perse est donc profondément construit et subtil, la plume de Montesquieu plus qu'agréable...Le tout classe les Lettre Persanes dans la catégories des romans que l'on oublie pas, et que l'on ouvre avec plaisir à n'importe quelle page pour le relire.
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De l'esprit des lois

C'est une œuvre très importante, toujours citée avec force en cours de droit, c'est dire son importance. Et c'est ainsi que je l'ai découverte.

Une œuvre cependant ardue à lire (j'espère en avoir saisi l'esprit), mais passionnante.

Les théories de Montesquieu sont très argumentées, parfois pleines d'ironie (lorsqu'il traite de l'esclavage), certaines sont fondamentales et servent de base à nos institutions (la séparation des pouvoirs).

Une référence incontournable.
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Lettres Persanes

Objet littéraire à mi-chemin entre fiction et philosophie, les Lettres persanes constituent un ensemble assez hétéroclite, où la lecture peut dérouler sur vingt pages à la faveur des développements de l’intrigue, d’anecdotes ou de récits enchâssés à valeur philosophique, et s’embourber sur les vingt pages suivantes au milieu de considérations très théoriques sur la justice ou la liberté.



D’abord, sur l’intrigue, qui ne semble que donner prétexte et cadre au voyage des Persans en Europe et à leurs méditations au contact de ces singulières sociétés chrétiennes, il n’y a rien d’absolument transcendant. Usbek part voyager en laissant ses femmes sous la séquestre de ses eunuques, et s’absente pendant si longtemps qu’elles finissent par chercher à tromper leurs gardiens. Voilà, très simple, avec des évolutions suggérées graduellement par de rares mais réguliers échanges de lettres inquiètes entre Usbek et ses serviteurs. On sent une certaine fascination pour le harem oriental et ses sommets de sophistication que l’écriture si élégante du XVIIIème siècle mariée au ton des Mille et Une Nuits retranscrit très plaisamment. L’histoire vient toutefois apporter une concrétisation dramatique aux réflexions occasionnées entre les voyageurs persans en Europe, notamment sur la question de la liberté du genre humain en général, et des femmes en particulier. Tandis que les Persans semblent « occidentaliser » leur pensée, non pas sur tout mais sur quelques sujets sur lesquels ils semblent admettre le bon sens qui prévaut en Europe par rapport à leur propre société, la catastrophe finale qui bouleverse le harem d’Usbek constitue la chute fatale, presque logique, du caractère resté purement théorique de cette occidentalisation. Loin d’atténuer les conditions d’enfermement de ses femmes à la faveur de ses convictions ébranlées, Usbek, en proie à une jalousie qui est la conséquence des usages de la Perse, qu’il discute mais ne remet jamais en cause dans la pratique, les maintient, voire les durcit sur la foi des rapports alarmés des eunuques, au point d’exaspérer ses épouses désormais prêtes à tout pour s’affranchir de leur joug.



Voilà pour la promotion du mode de vie occidental, assez largement ignoré au profit des critiques qu’il génère dans l’esprit des Persans si l’on s’en tient à l’image répandue du livre. Ces critiques existent bien évidemment, nombreuses, soit sur le plan des mœurs, avec, dans ce cas, une naïveté factice assez comique de la part de l’auteur, soit sur le plan des valeurs, sur un ton plus philosophique et donc plus sérieux. La France est la principale cible des méditations des voyageurs, même s’il y a aussi quelques remarques sur l’Espagne, l’Angleterre, ou encore la Russie. Elle est appréciée selon le point de vue de Persans, bien évidemment, pour qui par exemple la libre société des femmes est une nouveauté à laquelle ils se convertissent semble-t-il assez facilement, mais aussi selon le point de vue de sages qui analysent la signification profonde, et parfois l’absurdité ou l’incohérence des usages, grâce à un recul, normal pour un étranger, mais que seul un esprit européen exceptionnellement libre et anticonformiste comme celui de Montesquieu peut adopter. Sur les questions philosophiques, tout n’est pas au même niveau d’exigence : cela va de la longue description de l’évolution des Troglodytes, métaphore limpide, jusqu’à de difficiles réflexions extrêmement théoriques sur le sens de la justice.



A remarquer pour notre époque préoccupée par la surpopulation de la Terre : l’auteur, à moins de trois siècles de nous, se fait longuement l’écho d’une anxiété rigoureusement opposée, celle de la dépopulation, résultat de faits culturels dans le monde chrétien (célibat des prêtres) et dans le monde musulman (polygamie, castration des eunuques) ; de même que pour la théorie rapidement évoquée des climats, lesquels seraient directement responsables du type de gouvernement d’un territoire, l’on doit bien prendre en compte que les quelques pensées pour le moins capillo-tractées qui peuvent se trouver ne doivent pas pousser à rejeter en bloc toutes les thèses du livre, extrêmement diverses et plus ou moins approfondies. Même si la société décrite, tantôt avec ironie, tantôt avec humeur, ne semble historiquement plus avoir grand-chose de commun avec la nôtre, ne serait-ce que sur le type de gouvernement, un petit effort de prise de hauteur permet de constater qu’à bien des égards, nous sommes en sommes les dignes descendants. J’en veux pour unique exemple parmi bien d’autres le traitement de la pratique du journalisme et de l’écriture : alors que les profanes s’effacent volontiers devant les spécialistes reconnus dans un domaine précis partout ailleurs, nous autres, Occidentaux anonymes et amateurs, revendiquons l’orgueil de claironner nos jugements et nos appréciations à la face de nos vrais intellectuels et professionnels, encouragés en cela par des tribunes comme Babelio (vous voyez, je plaide coupable), en nous attendant à ce que nos ressentis soient aussi légitimes que leurs décrets. Continuons, demeurons ce que nous sommes, mais ne soyons pas dupes de la valeur réelle de notre discours.
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