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Critiques de Claude Farrère (88)
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Histoire de la marine française

Cette imposante et lourde "Histoire de la Marine Française" est généralement admise comme la référence du genre. Son auteur, Claude Farrère, est un officier de Marine issu de la promotion 1899 de l’École Navale. Promu Capitaine de Corvette en 1918, il pose la casquette au lendemain de la grande guerre pour se consacrer pleinement à sa carrière d'écrivain.

Près de 80 ouvrages, dont "Les civilisés" superbe roman anti-colonialiste, vont amener cet auteur prestigieux d'abord au prix Goncourt, en 1905, puis, supplantant son malheureux rival Paul Claudel, à l'Académie Française où il entra en 1935.

Il s'inspire largement de ses voyage pour rédiger une œuvre dense et brillante.

En 1906, il écrit un recueil de nouvelles fantastiques dont certaines furent publiées dans "Fiction" et dans "l'homme qui assassina", vingt ans avant Agatha Christie, il fit d'un assassin le narrateur de son histoire....

"Histoire de la Marine Française" s'ouvre sur sur notre première marine qui, en l'an 47 avant Jésus-Christ en Armorique, opposa une très belle résistance aux troupes romaines et à leurs galères menées par Jules César.

Et l'ouvrage se ferme, près de 450 pages plus loin, sur la Marine Nationale Française du vingtième siècle et son porte-hélicoptère "la Résolue" (qui attend d'être rebaptisée "Jeanne d'Arc"), sur son arme sous-marine pas encore nucléarisé et sur ses deux porte-avions dont le tout récent "Foch".

L'ouvrage est imposant, passionnant et illustré de belle manière grâce à un nombre impressionnant de photos, de dessins, d'enluminures et de reproductions de tableaux.

Le texte est rédigé par un véritable marin doublé d'un talentueux écrivain. La documentation sur laquelle il s’appuie fait de cet ouvrage une véritable mine d'érudition et de savoir.

Sans cesse réédité et remis à jour par son auteur, depuis 1932, la dernière mouture date de la fin des années 50 et a été publiée en 1962.

J'ai, pour la petite histoire, la chance de connaître un vieux monsieur, résident de la maison de retraite où je travaille, qui faisait partie de l'équipage du contre-torpilleur "Bison" atteint*, en 1940, par une bombe d'avion sur la côte de Norvège. Cette nuit-là, ce vieux monsieur s'est retrouvé, brûlé au visage, à la baille deux fois, à quelques heures d'intervalle. Il a encore, lorsqu'il le raconte des trémolos dans la voix. Je lui ai demandé de signer mon livre. Il a accepté. Je l'en remercie, mon exemplaire n'en a que plus de valeur. Et je le salue...



*p391 reproduction d'une photo du musée de la Marine "le contre-torpilleur Bison atteint par une bombe d'avion sur la côte de Norvège pendant la campagne de 1940"
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La Vieille histoire

"La vieille histoire" est une comédie en trois actes, écrite par Claude Farrère en 1920.

Elle n'a jamais été représentée.

Son fascicule est illustré, à l'ancienne mode, par des bois dessinés et gravés par Constant Le Breton.

Le Renaud n'est pas un mari ennuyant, ni soupçonneux, ni fureteur.

Mais il est marin.

Et il est parti, lui et son bateau, l'un portant l'autre.

La Renaude n'est pas femme à risquer un mauvais coup.

Mais elle n'est pas lente, sitôt le gêneur parti, à attacher le ruban vert au volet.

Elle ouvre l'oeil.

Lubin peut toquer sans crainte à la porte ...

"La vieille histoire" est une farce.

Elle aurait pu s'intituler : "le marin cocu et la culotte".

Le genre semble peu convenir à la plume élégante de Claude Farrère.

Ce morceau de scène a finalement peu d'intérêt.

Et sa lecture rapide est oubliée presque aussitôt que finie ...
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La bataille

"La Bataille" est une pièce en 3 actes inspirée par le roman éponyme de l'immense écrivain Claude Farrère. Elle a été représentée pour la première fois, en 1921, sur la scène du théâtre "Antoine" à Paris.

Cette transposition apparaissait comme difficile voire irréalisable.

Pourtant, la pièce finement construite, se révèle au final comme solide et complète.

Pierre Frondaie, afin de mieux respecter l'esprit du roman, n'en a pas suivi trop scrupuleusement la lettre.

C'est une pièce puissante et captivante, une description de l'âme japonaise et la relation d'une lutte sourde de deux hommes pour une femme.

Suivant deux actes où flotte une fine lumière teintée d'exotisme, l'épilogue produit un effet saisissant.

Le dernier acte est le tableau d'une bataille navale à laquelle les spectateurs peuvent croire qu'ils participent avec les canonniers enfermés dans la tourelle d'un cuirassé.

Une tourelle à bord du "Nikko".

C'est une chambre hermétique, toute cuirassée d'acier épais. Deux canons l'emplissent aux trois quarts. Le tout est éclairé de façon formidable, pourtant la lumière du jour pénètre par les embrasures entre la cuirasse et les canons.

Douze marins sont à leur poste, des anonymes et des héros.

Au début de l'acte, le navire n'est pas encore en action. Il se hâte vers son poste de combat.

Yorisaka, le mari trompé qui commande la tourelle, fait soudain son apparition, provoquant un rigide garde à vous de ses marins galvanisés par la perspective du combat.

Puis, Fergan, l'amant, l'officier anglais invité, neutre dans cette bataille, l'ami, clôt derrière lui cet espace réduit où la tragédie va se nouer....

Pierre Frondaie a su rendre dans cette heureuse adaptation les deux attraits principaux du roman :

- la fine analyse du double caractère japonais moderne gardant farouchement dans son coeur les moindres traditions ancestrales de sa race

- et la vision d'une bataille navale moderne, avec les obus de gros calibre détruisant une escadre en quelques minutes.

A son époque, l'effort réalisé par le théâtre "Antoine" pour présenter cet épilogue saisissant fut un grand étonnement à la répétition générale, impressionnant que devait être le pivotement de cette énorme tourelle sur son axe, avec ses canons, ses obus, son escalier, sa machinerie et ses hommes.

A la lecture, aujourd'hui, de cette pièce sobre et émouvante, on ne peut s'empêcher de s'imaginer cette représentation et de regretter de pas y avoir assisté.
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L'Europe en Asie

Analyse politique et historique de la situation chinoise du dernier siècle (depuis la guerre de l'opium) par la plume française Claude Farrère.



L'opuscule présente certains intérêts. L'auteur connaît l'Asie, la vit, et l'aime. Il entretient, au Japon comme en Chine, des amitiés qui le mettent très au courant des enjeux. Par ailleurs, le petit texte est écrit peu avant l'invasion allemande de la Pologne, en juillet 1939...



Il faut reconnaître quelques fulgurances, mais aussi ses obsessions. Autant il souligne l'importance à l'époque très sous-estimée des marchands de canons, autant il insiste sur la bizarrerie du cerveau chinois, parce qu'il serait le seul peuple à avoir migré d'ouest en est (?!), et sur le caractère purement (?!) occidental du Japonais.



Ce racisme latent, un biais ouvertement pro-japonais, et la conviction que l'occident a en Chine une mission humanitaire discréditent cependant ses conclusions.
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Les civilisés

3ème prix goncourt décerné en 1905 à Claude Farrère, né Charles Bargonne, officier de marine.

Nous suivons un trio de jeunes hommes dits "civilisés" qui ne pensent qu'à jouir de la vie, de l'amour facile, de l'opium offerts par le colonialisme à Saïgon. Leur équilibre se trouve ébranlé quand l'un tombe amoureux et désire se conformer à l'idéal du mariage et quand l'autre cherche désepéremment à se marier et est éconduit. Le seul à continuer à se comporter en civilisé désertera au moment où la guerre éclatera. Tout dans ce livre montre l'hypocrisie, le cynisme, la vanité de la vie. Passionnant.
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Thomas l'Agnelet : Gentilhomme de fortune

Encore une fois un livre tiré de l'oubli par Libretto . Vous avez aimé suivre les aventures d' Hornblower Bolitho Jack Aubrey , vous aimerez ce livre.



Les trajectoires de Thomas et Louis ,son ami intime , entre Saint-Malo et les Caraïbes , leur parcours plein de fureur et de sang m'ont emporté dans leur monde.



Les descriptions psychologiques des personnages et le récit de ces Malouins versant dans la flibuste sur l'île de la tortue se mélangent harmonieusement pour nous distraire . Ce n'est pas une mince ambition par les temps qui courent .



Bref un excellent roman d'aventures maritimes.
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Les civilisés

Le lien suivant renvoie vers la page d'un site perso (ce n'est pas le mien) consacré à l'Indochine coloniale ( bellindochine.free.fr ) et donne à lire de brefs extraits de ce roman colonial qui décrit sans aménité la société des colons français en Indochine. Critique morale plutôt qu'anticolonialiste; le marin Claude Farrère ne semble avoir rien appris sur les peuples d'Indochine qu'il semble mépriser tout comme les méprisèrent les colons du Tout-Saïgon que Farrère étrille dans ce roman.

Le mythe tenace (encore aujourd'hui) d'une mentalité orientale inaccessible et impénétrable à l'entendement occidental constitue le socle du savoir ethnologique de l'auteur sur les orientaux. Si ce que j’ai pu lire de Claude Farrère (c’est à dire pas grand chose) semble démontrer une connaissance familière de la littérature orientaliste de son temps, dans Les Civilisés il n'évoque guère les asiatiques que pour la couleur locale; sa palette lexicale se contente de vocables exotiques tels "congaï", "saï", "phou", "boy" et curieusement le mot hispanique cañha pour désigner un habitat forcément crasseux... Quel dommage qu’un si beau style n’ait pas su donner à voir un peu de la vérité humaine sans plus de nuances qu’un violent contraste entre la beauté morale (Sélysette Sylva et sa mère) et la dépravation la plus aboutie (Mévil, Torral).

Mais les peuples de l'Indochine ne sont pas le sujet du roman. Il s'agit plutôt de condamner au nom d’une morale pétrie de christianisme (mais non sans ambigüités), le donjuanisme du petit club des "Civilisés ». Le docteur Mévil, l'ingénieur Torral, le journaliste corbeau Claude Rochet et le marin Fierce forment cette coterie d'individualistes chevronnés qui figure dans le portrait moral de la bonne société Saïgonaise comme une sorte de chancre abominable.

Cette petite bande de débauchés affecte un profond mépris de tout sentimentalisme et s’acharne à n'aimer les femmes (et parfois, les petits garçons) qu'au physique.

Les réminiscences du Don Juan se retrouvent dans les théories professées par l’idéologue de la bande, l'ingénieur Torral, pour qui la morale (comme le monde) se met en équation, selon une variante sorte de principe de moindre action; le rationalisme est ici poussé à quelques raffinements qui vont au bien au-delà du "je crois que deux et deux font quatre" de Don Juan à Sagnarelle.

Au final, le docteur Mévil rencontre sa statue du commandeur (le fantôme de l'évêque d'Adran) et le personnage principal (Fierce) de même, d'une autre façon. Les deux sont précipités dans l'abîme et la tombe.

Ne s'en tirent bien que les plus ignobles; Rochet et surtout Torral l’ingénieur jusqu'au-boutiste qui, désertant quand la guerre éclate avec les anglais, échappe à la mort en fuyant dans un navire allemand. Toute l’ambiguïté du roman tient dans le parcours de ce personnage; il est le plus antipathique (au physique comme au moral) mais par sa cohérence et sa parfaite logique, sa philosophie séduit. Parfois on a l'impression que Farrère veut lui donner raison. C’est lorsqu’il le condamne il n'est guère convaincant ; il nous ramène les curés et l'héroïsme barbare d'antan qu'il oppose à la dépravation des "civilisés". Il est vrai que Farrère écrivait en temps où l'élite intellectuelle pouvait croire sans rire que l'on mettrait bientôt tout l'univers en équations.


Lien : http://belleindochine.free.f..
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Thomas l'Agnelet : Gentilhomme de fortune

Ouh, qu'elle a fini par me devenir pénible, cette lecture ! Il y avait pourtant plein d'ingrédients pour me plaire : le siècle de Louis XIV, Saint-Malo, l'univers des corsaires et de la flibuste, des batailles navales, une grande amitié virile et même cette histoire d'amour destructrice qui possédait un certain potentiel. Hélas, impossible d'accrocher au potentiel tragique de toute l'affaire.

Impossible d'éprouver grand intérêt pour le destin de personnages qu'un travail psychologique plus poussé aurait pu rendre passionnants, mais qui ne dépassent guère le stéréotype sans profondeur : Thomas, qu'on tente de nous faire passer pour un brave garçon dévoyé mais qui ressemble surtout à une brute doublée d'un abruti ; Louis, d'un angélisme fade, incolore, inodore et sans saveur ; Juana, aussi fatale et vicieuse que se doit de l'être toute femme fatale digne du nom.

Bon. Tout ceci aurait encore pu passer si l'écriture avait su faire du stéréotype un symbole, pointer le nez vers la légende. L'intention de l'auteur est sans doute là, mais son style - irréprochable d'un point de vue académique - est trop classique, manque de nerf, de folie, de puissance, pour donner l'élan, la fougue, la démesure que cette histoire aurait mérité, sans compter que beaucoup de choix narratifs m'ont frustrée de ce que j'avais envie de voir raconté.

Mais le pire, c'est encore l'esprit du roman, l'esprit de l'auteur, terriblement daté - dans le genre morale catholique petitbourgeoise étriquée du début du XXe siècle. On a droit à tous les clichés : la bonne Bretagne pieuse, les bons fils d'autrefois comme n'en fait plus ce siècle tant il est corrompu, les femmes curieuses comme le sont toutes les femmes et dangereuses catins dès qu'elles suivent leurs sens, sans compter le sempiternel nègre ou indien qui finit par trahir son camp parce qu'il a les foies face à l'ennemi (l'espagnol, lui, bien sûr, meurt toujours fièrement). Ce n'est pas grand chose, d'abord, une petite remarque agaçante, un soupir, après tout, ça ne colle pas si mal avec l'esprit de l'époque évoquée, puis à la longue l'agacement l'emporte et n'aide guère à rester concentré.



Reste un tableau assez intéressant du monde de la flibuste, de ce moment charnière où la paix vient mettre un terme malencontreux à la grande heure des corsaires, et finit par lancer les plus aventureux d'entre eux sur les chemins de la piraterie pure et simple. Bien documenté, le roman est au moins assez instructif (quoique parfois un peu trop ouvertement pédagogue), et il faut lui reconnaitre des scènes réussies. Mais il gâche beaucoup de ses potentiels, et ne dépasse pas assez les modes de pensée de son temps pour atteindre à l'intemporel des vrais grands romans : à en juger par ce seul texte, l'injuste oubli dont est victime aujourd'hui l'auteur, académicien en 1935, ne me semble pas si injustifié !
Lien : http://ys-melmoth.livejourna..
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La bataille

Jean-François Felze, peintre connu, fait le tour du monde sur le bateau d'une riche américaine qu'il peut à la fois haïr et adorer, mais dont il dépend de toute façon. Ils font une escale au Japon. On est en 1905. La guerre russo-japonaise est en marche. Felze est reçu dans une famille japonaise distinguée, chez le marquis et la marquise Yourisaka. Ceux-ci sont complètement européanisés, contrairement à son ami chinois, qui se trouve lui aussi au Japon et à qui il rend visite. Ce sont deux mondes différents qu'il côtoie : l'un où l'on rejette les traditions et l'autre où on les vénère. Il commence le portrait de la marquise mais le marquis est appelé à livrer bataille. On a d'ailleurs un récit assez précis de cette bataille.

Il y a une légère intrigue amoureuse entre la marquise et plusieurs hommes mais cela reste finalement sans surprise.

Ce qui est intéressant, c'est la façon dont un peuple peut rejeter les traditions en vue de "paraître" face aux étrangers. On verra à la fin que la marquise n'a finalement pas tout oublié...

Ce qui est lassant, ce sont les multiples formes de politesse répétées et les citations employées par l'ami chinois.
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Les civilisés



Féroce et édifiante cette description de la société coloniale Indochinoise.



Dans une première partie très moderne et provocante, l'auteur introduit une galerie de personnages cyniques, glauques, avides et égoïstes, observant la bienséance factice de ses rituels sociaux tout en s'adonnant sans vergogne à tous les vices.

Un trio masculin, se revendiquant jouisseur et indifférent à toute contrainte sociale ou morale, guide le lecteur à la découverte de ce microcosme tropical.



Contrairement au "kilomètre 83" dans lequel Henry Daguerches ignore pratiquement les populations autochtones, elles sont bien présentes chez Claude Farrère non en tant que protagonistes actives du drame mais comme éléments en trompe l'oeil du décor.

Au crédit de l'auteur l'omniprésence discrète de cohortes de boys corvéables, de prostituées soumises et de commerçants serviles témoigne cruellement des rapports coloniaux/colonisés.

Cette dénonciation, au demeurant courageuse et anticonformiste pour l'époque, s'accommode difficilement des considérations incontestablement racistes qui jalonnent le récit.

S'agit-il pour l'auteur de pousser la provocations pour appuyer son analyse ou recycle-t-il plus ou moins consciemment les poncifs racistes de son temps?



Ne condamnons pas hypocritement les générations passées, quand je me remémore certains comportements dont j'ai été témoin de la part d'expatriés, coopérants ou humanitaires de tout poil, je me dis que les choses n'ont guère évolué.



La seconde partie est moins passionnante, le satire sagace fait place à une dramaturgie lourdaude dans laquelle les trois chantres de l'hédonisme veule, lubrique et crapuleux subissent de peu crédibles retournements psychologiques acculant deux d'entre eux à de vaines tentatives de rédemption et poussant le troisième à l'exile.



Lecture très intéressante.

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Les civilisés

Peut-on faire sa carrière en exploitant sa vergogne l'oeuvre d'un glorieux aîné et en le plagiant ouvertement ? Cela semble impossible, et pourtant un homme y est parvenu : Claude Farrère, ou plus exactement l'enseigne de vaisseau Frédéric Bargone, qui se retrouva en service en 1903 sous les ordres du commandant Julien Viaud, plus célèbre pour son nom de plume Pierre Loti. Cette rencontre fut décisive dans la carrière littéraire du jeune Bargone, bien qu'il soit fort difficile d'évaluer de quelle nature elle pouvait relever. On connaît le goût de Pierre Loti pour les jeunes garçons, d'autant plus que l'homosexualité, jamais abordée par Loti lui-même qui "féminisait" ses romances dans ses récits, est beaucoup plus présente dans les romans de Claude Farrère, même si elle fait souvent simplement partie du décor des moeurs orientales.

Toujours est-il que Claude Farrère parla souvent de Pierre Loti comme d'un ami, prétendant même avoir recueilli ses dernières paroles sur son lit de mort, ce qui est parfois contesté par la famille de Loti, tandis que Pierre Loti n'a jamais écrit une ligne sur Claude Farrère. Il est donc probable qu'il y eut un parasitage manifeste de Farrère envers son aîné de 26 ans.

Toutefois si, dès 1904, Claude Farrère entre en littérature avec une série de romans totalement inspirés de l'univers de Pierre Loti, sur bien des plans, son travail s'écarte presque immédiatement de celui de son modèle. Pierre Loti, en effet, est avant tout un poète, dont le verbe est sensuel, onirique, hédoniste, servi par un style fluide et imagé, teinté de réminiscences symbolistes. Claude Farrère, en revanche, est un romancier très terre à terre, un narrateur méthodique, précis dans ses descriptions, méticuleux comme un fonctionnaire sourcilleux du règlement. Ses personnages ne sont pas des émanations de lui-même, leurs vices ne sont pas les siens. Là où Pierre Loti s'assume en décadent amoral et narcissique, Claude Farrère donne plus l'impression d'avoir pour la décadence la fascination de celui qui est incapable de réellement s'y abandonner. D'où une certaine préoccupation de moralité qui se saisit de lui en cours de rédaction, et l'amène à faire triompher la vertu sur le vice au terme de son roman, sombrant dans un puritanisme prudent auquel jamais Pierre Loti ne se serait abaissé.

Mais cette frilosité littéraire et moralisatrice, qui empêchera toujours l'élève de dépasser le maître, lui assurera cependant la reconnaissance de ses pairs, du milieu littéraire, et d'une large partie d'un public désireux de s'encanailler, mais d'en ressortir totalement absous. Par la suite, les romans et les recueils de nouvelles de Claude Farrère s'adaptèrent à ce public fadasse et perdirent autant de leur intensité que de leur crudité, ce qui n'empêcha pas Claude Farrère de mener une carrière inaltérable durant plus de 50 ans, laissant à la postérité pas loin de 70 ouvrages presque exclusivement consacrés aux territoires de l'Empire Colonial Français, dont il était par ailleurs un vigoureux défenseur, même s'il tenait à en dénoncer les dérives.

Mort en 1957, Claude Farrère n'a pas assisté à la fin de l'Empire Colonial Français, ni au bannissement progressif de son oeuvre, d'abord par désuétude, ensuite sous l'effet de la repentance démagogique. Pour être honnête, ce n'est pas forcément une grande perte sur le plan strictement littéraire, tant Claude Farrère est devenu rapidement un reflet si conformiste de la mentalité de son époque qu'il ne pouvait que très difficilement lui survivre.

Toutefois il convient d'isoler de cette littérature fade ce que l'on peut appeler la « Trilogie Lotienne », à savoir : « Fumée d'Opium » (1904) ; « Les Civilisés » (1905) et « L'Homme Qui Assassina » (1906).

« Les Civilisés » tient une place à part dans cette trilogie, d'abord parce que ce roman obtint le prix Goncourt à sa sortie et fit connaître Claude Farrère au grand public, mais aussi parce que ce roman fut véritablement "subtilisé" à Pierre Loti. En 1883, Pierre Loti alors en mission à Annam (l'actuel Vietnam) avait été frappé et révolté par la manière dont les colons français se comportaient en Indochine, se montrant volontairement violents et ostensiblement décadents sans que rien ne le justifie à l'époque, le mouvement rebelle Viêt-Cong n'existant pas encore.

de manière anonyme, Pierre Loti avait révélé ces exactions dans une série d'articles envoyés au Figaro, dont la publication fut stoppée nette sur ordre du gouvernement.

Inspiré par ce précieux exemple, mais aussi probablement par son expérience personnelle, car il fut lui aussi détaché en Indochine Française, Claude Farrère signa le grand roman indochinois que Pierre Loti, quelque peu prisonnier de sa littérature sensuelle et exotique, n'a jamais jugé pertinent d'écrire.

« Les Civilisés » ouvrit donc la voie vers une thématique littéraire qui allait perdurer pas loin de 70 ans, incarnée notamment par par de très grands auteurs comme Eugène Pujarniscle, Henry Daguerches ou Jean Hougron, avec plus ou moins de complaisance, de décadence ou de nostalgie.

Le roman se déroule presque exclusivement dans la ville de Saigon (rebaptisée après 1975 Hô Chi Minh-Ville, en l'honneur du leader Viêt-Cong héros de la décolonisation). C'était déjà en 1905 la capitale du Vietnam, et même si elle était moins peuplée qu'aujourd'hui, elle accueillait pas moins de 700 000 habitants, la plupart d'une extrême pauvreté. C'est dire si un colon occidental ayant su accumuler de tangibles économies pouvait absolument réaliser tous ses caprices à Saigon.

Trois amis français, un médecin colonial, Raymond Névil, et deux officiers de marine, le capitaine Torral et le comte Jacques de Fierce, forment un trio d'amis qui se sont eux-mêmes baptisés les "Civilisés". Depuis de nombreuses années, ils consacrent leurs soirées – et assez souvent leurs nuits - à écumer autant les endroits sélects que les bas-fonds de Saigon, usant et abusant de tous les plaisirs, alcool, drogues, jeux d'argent et bien entendu bacchanales sexuelles de toutes sortes. Plus âgé que ses camarades, Raymond Névil est célèbre dans toute la ville pour courir après tous les jupons qui passent. Longtemps collectionneur d'indigènes, qui préféraient payer les soins du médecin en nature plutôt qu'avec leurs maigres pécules, Raymond Névil, qui est le plus joueur des trois, les néglige désormais pour traquer les épouses des administrateurs coloniaux ou les jeunes femmes européennes en visite touristique. Prédateur cynique et accompli, insensible aux sentiments, il n'est pas rare qu'il échange ses conquêtes avec Jacques de Fierce, le benjamin de la bande, un garçon encore jeune, surtout émoustillé de se retrouver plongé dans un pays où tout est permis, rien n'est immoral, et où il se retrouve délivré du carcan aristocratique dans lequel il a été élevé. Enfin, le troisième larron, Torral, est un homosexuel brutal qui ne consomme que des éphèbes et des garçonnets annamites, sur lesquels il règne en despote autoritaire, faisant de ses favoris du moment des serviteurs dociles et des esclaves sexuels.

Enivrés par le pouvoir dont ils jouissent (dans tous les sens du terme), les trois hommes se sentent en permanence tout en haut d'une Olympe dont nul ne peut les faire descendre. Si les obsessions sexuelles de Raymond Névil sont bien connues, il est cependant indéboulonnable, étant le médecin le plus célèbre et le mieux fourni de Saigon. Torral et Fierce, en revanche, sont des militaires, et en ce sens, doivent donner preuve d'exemplarité en journée. Ils mènent donc eux une véritable double-vie, qui pourrait occasionner leur renvoi de l'armée si leurs supérieurs en étaient informés. Ce risque redouble l'excitation de leurs décadences, mais en réalité, si personne dans leur hiérarchie ne sait ce qu'ils font la nuit, c'est parce que personne ne veut le savoir. Saigon est une ville de tentation, où la solde d'un officier peut aisément faire de lui un "Civilisé", un nabab, un hédoniste.

Toute la première moitié de ce roman consiste en une intense et habile immersion dans les amusements nocturnes et abjects de ces trois amis, où, disons-le, leur décadence et leur cruauté ne connaît pas de limite. Mais tout en consignant les faits et gestes des trois pervers, tout en contant leur longue soirée de débauche improvisée avec Hélène Liseron, une artiste de cabaret française venue faire un tour de chant à Saigon et embarquée par le malin Raymond Névil, Claude Farrère souligne avec beaucoup de subtilité la nature réelle de ces âmes tourmentées, dépendantes de leurs plaisirs fourbes, se gorgeant de condescendance élitiste pour fuir leur véritable bête noire : l'ennui. Un ennui terrible, souverain, qui frappe chacun de ces hommes bloqués loin de chez eux, englués dans cette Indochine étrange et hostile, jamais tout à fait pacifiée, où il n'y a rien à faire ou presque, mais où l'on n'a pas le droit de se plaindre puisque l'on est grassement payés.

Le débarquement inattendu à Saigon de deux jeunes femmes, Selyzette Selva et sa cousine Marthe Abel, l'une fille d'un officier récemment disparu et l'autre cousine de cette dernière, va sonner le glas de la déchéance tranquille de ces trois hommes. Fierce, le premier, tombe éperdument amoureux de Selyzette, dont il est nommé chaperon. Petite blonde écervelée et guindée, profondément chrétienne et vertueuse, Selyzette semble bien peu attrayante, mais sa bêtise pleine de candeur est émouvante, et il se dégage d'elle un parfum virginal et chaste qui reconnecte le jeune comte aux valeurs de son éducation.

De son côté, Raymond Névil est rapidement attiré par Marthe Abel, mais cette jeune femme glaciale aux allures de sphinx est d'une autre trempe que sa cousine. Orgueilleuse et consciente de ses charmes, elle ne cache pas à Raymond Névil tout le mépris qu'il lui inspire, tout son dégoût instinctif pour cet homme précocement vieilli par la débauche, dont les vices suintent comme d'épouvantables faiblesses. Car précisément parce que Raymond tombe amoureux de Marthe, il est sans défense face à cette jeune fille que l'inexpérience n'égare pas, que le statut du médecin n'impressionne pas et qui renvoie à l'homme qui se meurt d'amour pour elle tout le mépris d'une société occidentale dont il n'est plus digne, et dont Marthe demeure une fidèle représentante. Douloureusement atteint, Raymond Névil sombre dans une atroce dépression. Fierce, de son côté, arrive jusqu'à la célébration des fiançailles avec Selyzette, mais sous l'influence de ses deux amis, il décide de passer en leur compagnie une dernière soirée de célibataire avant de se ranger définitivement. Cette bacchanale se poursuit jusqu'au petit matin, avec quelques filles de joie. Mais alors que Fierce sort de la voiture de Névil, aux bras d'une prostituée vietnamienne, un fiacre qui passait au même moment s'arrête brusquement : sur le siège passager, Selyzette et sa mère regardent Fierce avec des yeux épouvantés, avant de redémarrer à toute allure.

Dégrisé par l'accident, Fierce tente en vain de s'expliquer, de se justifier, de s'excuser auprès de sa promise, qu'il inonde de lettres d'amour : Selyzette ne veut rien entendre, et ne veut plus le revoir. Pour Fierce, c'est la fin de tous ses rêves de mariage.

Le trio des "Civilisés" est très atteint par ce double échec dans la rédemption. Torral, furieux, brocarde ses amis affligés : il est vrai que lui-même, de par ses moeurs, a renoncé pour toujours à la perspective d'une normalisation sociale, mais surtout, il est logique avec lui-même : des années de décadence font de celui qui les pratique un autre homme, il est vain et infantile d'espérer rentrer dans le droit chemin, et les échecs de ses deux amis lui semblaient prévisibles.

Soudain, une terrible nouvelle tombe : un navire de l'Indochine britannique, voisine envahissante de l'Indochine française, est entré dans la rade de Saigon, et a commencé d'attaquer les troupes françaises. La mobilisation est générale, mais nos trois "Civilisés", amollis par des années de débauche et minés par leurs récents échecs amoureux, se sentent incapables de retourner au front. Raymond Névil, le premier, ne pouvant oublier Marthe, rentre chez lui et met fin à ses jours. Fierce, anéanti par cette mort, décide finalement d'aller se battre, mais avec la volonté déterminée d'y mourir au combat, donnant au moins à sa mort le sens qu'il n'a pas su donner à sa vie. Quant à Torral, il déserte son poste sans états d'âme, et part se forger une nouvelle identité en émigrant au nord du pays. Ainsi se termine le bref destin de ces trois "Civilisés".

Plus d'un siècle après sa publication, et en dépit d'un contexte qui n'est plus d'actualité, « Les Civilisés » reste un roman d'une très grande force, d'une noirceur désespérée, qui donne de la colonisation française une image sordide et sans complaisance. La première partie, indéniablement sublime, est encore aujourd'hui terriblement choquante pour les âmes sensibles. La quête de rédemption amoureuse de deux des "Civilisés" est en revanche bien moins convaincante, d'autant plus que les deux demoiselles correspondent à des critères de pureté virginale aujourd'hui bien désuets, mais qui même à l'époque n'auraient, à mon sens, pas été de nature à perturber profondément des vicelards accomplis. Les romans indochinois qui pulluleront au XXème siècle, soucieux de réalisme, se garderont bien de retomber dans ce genre d'intrigue sentimentale. Mais c'est aussi grâce à cette posture morale, qui a le mérite de ne pas donner outre mesure dans le sermon, que ce roman a sans doute pu obtenir le prix Goncourt, lequel pour la première fois récompensait une oeuvre ouvertement critique de la colonisation française. Claude Farrère avait d'ailleurs sûrement visé la récompense littéraire, tant son roman, en dépit de personnages symbolistes, obéit rigoureusement aux règles du naturalisme cher à Edmond de Goncourt, fondateur posthume du prix qui porte son nom. Par la suite, Claude Farrère ne reviendra jamais au naturalisme, ce qui laisse à penser que sa démarche pour ce roman était réellement intéressée.

Toujours est-il que si « Les Civilisés » n'était peut-être qu'une sorte d'audacieux "coup littéraire", le roman, à défaut d'être forcément sincère, est soigneusement rédigé et conçu, avec un rigueur extrême et une maîtrise impressionnante pour un jeune romancier. « Les Civilisés » reste passionnant de bout en bout, tout en incarnant la pierre fondatrice d'une littérature exotique douloureuse et critique, que l'on gagnerait à redécouvrir.



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La bataille

Jean-François Felze est un peintre mondain de renom. La cinquantaine élégante, il aime et est aimé des femmes. Il voyage à bord du somptueux yacht de la riche américaine au corps de rêve dont il est épris et qui le traite en esclave. A l’escale de Nagasaki, il accepte de réaliser le portrait de la marquise Yorisaka, jeune épouse du marquis Yorisaka Sadao, officier de la toute récente marine nipponne formé à l’école britannique, un couple tout à fait acquis aux idées modernes de l’occident, et dont l’ami intime est l’officier de liaison anglais Herbert Fergan. Nous sommes en 1905 et on annonce l’arrivée imminente de l’escadre russe qui s’apprête à défier la flotte de l’Empire du Soleil Levant près de l’île de Tshou Shima.

Claude Farrère (1876 – 1957), auteur prolifique membre de l’Académie Française et aujourd’hui bien oublié, est lui aussi Officier de marine. Grand admirateur de Pierre Loti qui fut son Pacha à bord du Vautour, il sait de quoi il parle lorsqu’il décrit une bataille navale. Le Japon qu’il évoque est celui que montrent les merveilleuses estampes d’Hiroshige. Beautés évanescentes au long cou d’ivoire et à la bouche étroite, douceur du climat aux incessantes pluies, jardins délicats étagés sur les hautes collines surplombant les eaux d’acier du fjord. Le court roman qu’il publie en 1911 aura un énorme succès (un million d’exemplaires).

Passé la difficulté que représente pour le lecteur contemporain le côté délicieusement désuet de la langue, on est vite emporté dans l’intrigue qui se noue entre le marquis Yorisaka, avide d’arracher au lieutenant de vaisseau Fergan, aide de camp de Sa Majesté de Roi d’Angleterre, le maximum d’enseignements et de secrets pour que la marine japonaise soit en mesure de vaincre une marine occidentale, son épouse soumise Mitsouko et le vicomte Hirata, opposé à l’imprégnation du Japon par les manières et techniques occidentales.

Le roman nous entraîne sur la tourelle du Nikko, qui pointe ses énormes pièces de 305 sur l’escadre russe. La bataille est vécue en direct, elle ne touche pas seulement deux grandes puissances, mais aussi deux versants de l’âme japonaise, écartelée entre les vertus antiques de l’honneur et les nécessités du progrès. Une tragédie antique, dans le plus pur style des Daïmios.

Curieux tout de même qu’aucun exemplaire d’une édition récente ne soit disponible en librairie : j’ai dû acheter le livre d’occasion, publié en 1957 par la collection « J’ai lu » bien populaire (dont c’est le numéro 8), et affublé d’une horrible couverture ….

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Les civilisés

" Les civilisés" de Claude Farrère ( 323p)

Ed." Les exotiques"



Bonjour les fous de lectures



Lecture effectuée pour le défi "Je lis tous les Goncourt"

Voici celui de 1905 ( 3° Goncourt).



Saïgon

Trois amis... trois "civilisés", trois colons.

Un officier de marine, un médecin qui aime un peu trop les femmes et un ingénieur fou de logique.

Trois gus blasés, cyniques , pessimistes et qui s'adonnent à la débauche.

"Du sexe, des jeux et de l'opium" pourrait être leur devise.

Mais notre marin va rencontrer la belle Selysette, le médecin va dépérir, fou d'amour pour deux femmes qui l'ignorent....

En essayant de contrer leur destin, ils courent à leur perte.

Seul l'ingénieur regarde tout cela avec une certaine indifférence et garde les pieds sur terre.



Ce livre n'est pas anticolonialiste, loin de là... plus une critique morale des moeurs des colons.

L'auteur, en effet, évoque très peu les autochtones ... dommage.



D'une plume alerte, il nous brosse le monde colonial de l'époque avec de jolies descriptions de Saïgon et des personnages à la "Pierre Loti"



Agréablement surprise par ce Goncourt un peu désuet mais qui tient la route et qui m'a plongée dans l'Indochine coloniale sans aucun ennui.



Ce livre a été un petit scandale à l'époque
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Les civilisés

Un grand classique et l'un des meilleurs ouvrages sur l'Indochine coloniale. Très belle écriture, vision aristocratique du monde, très "politiquement incorrecte" pour l'époque.
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Les civilisés

Les civilisés ...et les barbares Claude Farrère , pseudonyme de Charles Bargone, pose la question : qui est le civilisé et qui est le barbare dans ce monde colonial à l’extrémité de la planète l’Indochine ?

Rien n’est évident : certains, les militaires, rêvent du passé, honneur des combats et aux conquêtes glorieuses d’antan, d’autres, civils plus mercantiles, rêvent de richesses bien palpables et de leurs jouissantes immédiates et quelques uns profitent honteusement de la vie : les « civilisés »

La lie de l’occident s’est abattue sur l’Asie pour affairisme sans apporter de valeurs réelles occidentales mêlant sa rapacité à celle, déjà foisonnante des asiatiques annamites, chinois, thaïs, tonkinois, malais, japonais

Une Asie très ancienne avec ses traditions brutales qui n’ont rien à envier à l’Europe et sans état d’âme et une Europe plus jeune d’un monde de blancs et conquérante mais sans valeurs que pourtant elle est chargée d’apporter, tournée essentiellement vers le commerce et l’exploitation



Une petite élite désabusée vit dans l’oisiveté et l’aisance ne se refusant aucuns plaisirs dépravés : femmes européennes et asiatiques, jeunes ou vieilles , pédophilie masculine avec des garçonnets , jeux, alcools et opiums. Tout est bon pour être, se disent-ils , des « civilisés » aux cotés de colonisés qui ne sont pas en reste et profitent de la dynamique.

Alors ou sont les barbares ?

Cette lie mercantile qui est le fumier nécessaire à la naissance d’une nation nouvelle ? Les militaires d’antan, guerriers plutôt que soldats, brutaux sans foi ni loi mais avec un code d’honneur ou bons fonctionnaires obéissants ?

Et les civilisés ?

Ces débauchés pessimistes sans morale aucune , des « no futur » avant la lettre, , soi-disant porteur de la civilisation du blanc

Dans ce contexte trois personnages dévoyés à l’extrême évoluent : L’un reste fermement attaché à ses valeurs et assume sa vie éhontée de sybarite , l’autre impénitent séducteur se cristallise sur deux femmes qu’il tente de séduire sans succès à en tomber malade on pourrait parler de romantisme si cette séduction n’était pas entachée d’ amoralité et le dernier qui tombe amoureux à vouloir devenir époux de sa belle mais les années de débauches ont laissé des traces et la pénitence n’est pas aisée.



un livre novateur, à l’époque, mais contrariant car il dresse, dans la France patriotique du moment, un portrait guère flatteur de la colonie, un accros aux valeurs et aux lois par ses personnages dévoyés

La colonie, l’empire colonial plus justement, n’est pas ce qu’elle devrait être !

Farrère ne dénigre pas le monde colonial, le commerce et l’exploitation des richesses , mais la façon dont on pense apporter la civilisation européenne, en sus, à un monde asiatique ancestral qui est une civilisation par elle-même et bien plus ancienne



La vue des peuples soumis est bien celle du dominant, du civilisé sur le dominé et les épithètes, ce sont ceux du moment, attribués aux colonisés sont péjoratifs et très réducteurs Enfin c’est comme cela qu’on voyait les autres, les non européens a cette époque il n’y avait pas d’autre perception Elle était en outre partagé par les colonisés qui avaient exactement la même opinion de leurs colonisateurs mais évitaient de la formuler ouvertement ou alors à petite dose et pas avec n’importe qui.



En relisant des œuvres anciennes telle celle-ci on voit les évolutions de la perception des hommes entre eux Des peuples lointains et inconnus en fait faisaient peur. Avec une meilleure approche surtout et le temps et grâce à la connaissance on arrive à mieux à normaliser les relations pour le meilleur ou le moins pire mais c’est pas gagné !

Livre très accessible malgré son ancienneté
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Les civilisés

Un livre à l'écriture élégante et surannée avec des mots et des expressions d'hier. Une belle découverte que ce prix Goncourt 1905 qui nous fait découvrir le monde des colonies avec ses manières provoquantes et qui a dû faire scandale à l'époque !
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Maîtres du vertige

Si je peux vaguement comprendre le concept de patriotisme, j'ai par contre toujours considéré celui de nationalisme comme particulièrement idiot. Le chauvinisme m'échappe. Pour tout vous dire, même l'invention du minitel n'est pas parvenue à exalter mon sentiment d'appartenance à mon pays. Mais voilà, lorsque Serge Lehmann affirme que c'est à nos concitoyens que peuvent être attribuées les origines de la science-fiction, là, je me lève comme un seul homme et pousse un retentissant cocorico !



C'est dans un manifeste qu'il publie en 1909 que Maurice Renard, le père du Professeur Krantz et précurseur du registre, s'approprie le terme de "merveilleux-scientifique" et en pose les jalons. Notez le tiret, il a son importance. José Moselli, Théo Varlet, Jacques Spitz ou encore Camille Flammarion, les auteurs qui s'y frottent produisent une littérature populaire à la croisée des chemins entre imagination scientifique et rationalisation du surnaturel. Ce genre connait alors de très belles heures. Il faut toutefois être honnête : c'est outre-Atlantique qu'il s'est largement popularisé au fil du vingtième siècle. Dorénavant, sous l'étiquette "science-fiction", il s'est diversifié en une multitude de sous-catégories, de la dystopie au space-opera en passant par le cyberpunk ou le post-apocalyptique. Depuis, les lecteurs les plus ouverts ou les plus avertis tendent même à considérer cette littérature de genre comme de la littérature tout court.



Dans sa riche préface, longue d'une centaine de pages et qui détaille ce que je viens ici de résumer en quelques lignes, Serge Lehman revient sur cet âge d'or et sur ses origines. L'idée est moins de chercher à remonter jusqu'au père du néologisme pour lui en attribuer le mérite que de tracer les contours du concept. Il en dresse donc une définition et se penche sur les auteurs qui s'en revendiquent. De fait, si elle rend hommage à tous ces romanciers et novellistes, parfois familiers des amateurs mais inconnus du grand public, cette préface est un précieux carnet d'inspiration et une mine de patronymes à retenir, parmi lesquels, notamment, ceux dont Serge Lehman a sélectionné les écrits.



En effet, n'oublions pas que derrière la préface se bousculent six nouvelles, chacune précédée d'une superbe illustration de Greg Vezon. Six nouvelles - trois signées d'auteurs plus que confidentiels (Pierre Mille, Renée Dunan, Claude Farrère) et trois autres d'incontournables du genre (J.-H. Rosny aîné, Jean Ray, Jacques Spitz) - dont je ne suis pas sûr qu'il soit utile d'entreprendre les résumés (vous pouvez de toute manière les retrouver sur votre minitel via un 3615 quelconque). Et pour cause, même si les nouvelles ont toutes un intérêt sont sans doute révélatrices d'un genre et d'une époque, il y a fort à parier qu'une fois le recueil refermé, il n'en restera que la préface, qui, au-delà d'introduire ce qui lui fait suite, l'occulte.



Touchez mon blog, Monseigneur...
Lien : https://touchezmonblog.blogs..
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Les civilisés

Décidément en ce moment je collectionne les mauvaises lectures ! J’abandonne à 15%, j’ai juste l’impression de lire une version XIXème siècle de 99 Francs de Beigbeder, et en plus il y a de la violence sur les animaux, ce qui me fait encore plus horreur.
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La gueule de lion

Un récit désuet et suranné autour du thème de la délation, anonyme ou pas. Le titre fait référence aux fameuses Bocca del Leone vénitienne (gueule de lion en français) servant à recevoir lesdites dénonciations.



L’intrigue est linéaire, transparente, et, s’apparente plutôt à une chronique - dans laquelle tous les coups sont permis - de la vie quotidienne de plusieurs personnages ayant vécu pendant le Seconde Guerre Mondiale.



Il n’y a aucun suspense. La lecture est peut-être par moment laborieuse mais l’auteur tente de décrire la vie quotidienne des petites gens pendant l’occupation allemande, avec leurs lots de malheurs, de drames, et, autres jalousies tout en essayant de survivre à la guerre.



A l’heure actuelle - du moins pour moi - Claude Farrere - est peut-être un écrivain passe dans l’oubli, mais, il est à lire avec curiosité.
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Thomas l'Agnelet : Gentilhomme de fortune

un livre d'aventures léger, fluide. Une lecture sympathique qui me laisse un bon souvenir. Cette histoire se passe près de chez moi ce qui m'a beaucoup plu et qui se passe pendant une période de l'histoire que j'adore. Une lecture qui fait du bien. Je suis très surprise
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