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Citations de David Bosc (43)


Le corps est un champ de bataille. La nature est un champ de bataille. Le réalisme de Courbet est une riposte à la fable sociale, au fameux modèle de société, à la civilisation, au programme des écoles des classes asservies, au programme des écoles des classes dirigeantes, aux recueils de lecture à l'usage des jeunes filles.
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J'ai de la langue une image qui me tient. Je vois ces cavaliers en déroute, perdus dans la neige, qui durent éventrer leurs chevaux pour retarder le moment de mourir de froid. Le cheval agonisant est encore chaud ; le cavalier s'enfonce par l'ouverture qu'il a tracé d'un grand coup de sabre ; il se glisse dans les entrailles fumantes, entre la panse et les viscères bleues. Dans la déroute, nous pouvons être à la fois le cheval et le cavalier. Nous éventrer pour abriter la langue, la nourrir et la échauffer. Éventrer la langue, inversement, pour faire brèche dans l'empire du froid. (page 97)
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Courbet a exercé sa liberté. Il était opiniâtre. Sa politique ? Pour tous, la liberté, c’est-à-dire le devoir de se gouverner soi-même. Il ne déplorait rien. Il ne s’occupait pas de revendications (il n’était pas question de demander quoi que ce soit). Pour le reste, et jour après jour, ne rien céder de ce qu’on peut tenir. Pied à pied. Ne rien abandonner à cela qui mutile, prive, colonise, retranche, arraisonne, greffe, assujettie, entrave, équipe, ajuste, équarrit. Le corps est un champ de bataille. Le réalisme de Courbet est une riposte à la fable sociale, au fameux modèle de société, à la civilisation, au programme des écoles des classes asservies, au programme des écoles des classes dirigeantes, aux recueils de lecture à l’usage des jeunes filles. Le réalisme de Courbet lacère les décors derrière lesquels on accomplit la sale besogne, il déchire les toiles peintes : les bouquets d’angelots par-dessus les théâtres, les fées clochette, les diables, les allégories en fresque dans les écoles et dans les gares, où l’on voit les déesses de l’industrie et de l’agriculture, les splendeurs des colonies et les prodiges de la science.
Au mur de son atelier, à Paris, Courbet avait affiché une liste de règles ;
1. Ne fais pas ce que je fais
2. Ne fais pas ce que les autres font
3. Si tu faisais ce que faisait Raphaël, tu n’aurais pas d’existence propre. Suicide
4. Fais ce que tu vois et ce que tu ressens, fais ce que tu veux
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Le premier, peut-être, Courbet a peint la jouissance de la femme. On la voit qui monte dans La femme à la vague ; elle y est à la fois vague et ce que l’on perçoit d’emporté, de délivré, d’ouvert sur le visage de celle qui accueille la vague et qui, peut-être la dirige. Il y a surtout une étude pour La femme au perroquet, où c’est le drap, en ébauche fougueuse, qui jaillit blanc comme l’écume et submerge la fille aux seins levés. Elle a les yeux mi-clos. On lui voit des cils étonnamment nombreux et longs, qui ont je ne sais quelle audace végétale. Mais ce n’est pas au bordel qu’on voit jouir les femmes. Si on y a mis le prix, en revanche, on peut les regarder dormir. Combien de ces dormeuses dans l’œuvre de Courbet ?
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Palavas ! C’avait été à Palavas, vingt ans plus tôt, que Courbet avait découvert le cagnard, la grande lumière en Languedoc. Sa palette s’en était trouvée éclaircie : cette réaction chimique ne surprenait plus guère. Le voyage d’Italie, depuis un siècle au moins, était concurrencé par d’autres Sud, plus rudes, plus pauvres, et par l’Orient, sans pour autant que changeât cet afflux soudain, chez les peintres dépaysés, de l’or et du blanc d’Espagne. Davantage de lumière, aussi simplement que s’éclairent les cheveux des enfants au soleil. Point de révolution. Le temps viendrait un peu plus tard des conversions violentes du Midi, de ces artistes transis intérieurement, grelottants, auxquels le bleu du ciel et le miroir d’acier de la mer feraient comme un éden, sous une loi terrible, un Walhalla. Un jour d’octobre 1888, partis d’Arles en chemin de fer, Gauguin et Van Gogh iraient ensemble à Montpellier découvrir les Courbet de la collection Bruyas.
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Ce monde entre les fils qui t'enténèbre, détourne, lance, en des voies où tu ne veux rien que mourir. La direction ne reculant devant aucun sacrifice.
Il y a vraiment cette vie impossible qu'on mène les uns avec les autres, les uns le long des autres, comme au cimetière, toutes ces fadaises qu'on se ressert, le bruit vain, la diversion, l'insincérité démissionnaire et la terrible et mercenaire, la jésuite et sadique sincérité, le tout à coup je suis sincère et je t'écrabouille. Partout les bureaux de l'indifférente singularité, partout les relais intimes de la surveillance bénévole, les coopératives de la confession détraquée, les ateliers pratiques de l'aisance en société. Et la misère, humiliée, bannie, parce qu'elle est laide et vulgaire et parce qu'on lui oppose, abominable une misère poétique, un effondrement sur elle d'images mortes. Et le bâillon de tout soupir, l'écarteur qui vous empêche de vous mordre la langue, ou de l'avaler, ou de mâcher vos dents pour les cracher comme des pierres, c'est l'injonction narquoise, en traquenard, sucre ou knout, d'être libre, d'être soi, de créer ou de s'épanouir. La décoration intérieure et le développement personnel. Le pouvoir est bien cela qui détermine- qui énonce en formules non écrites- la définition et le lieu, et le cadre et la forme de la liberté.
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Courbet Gustave
- finira par boire 12 litres de vin blanc par jour.
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Ces mains semblaient chargées de claques.
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Aucun chemin n'est celui de la liberté.
Les gens quand ils sont libres, vont par tous les chemins.
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Et pour qui, le bûcher ? Pour le tyran, le curé, le facho, le colon. Mais surtout, pour le bourgeois. Pour cet être égoïste, prévaricateur, accapareur et parasite, nourri de la sueur et du sang des opprimés - cet être auquel on doit l'invention de l'individu, le miracle de la solitude, la mélancolie, la floraison et la défense des arts, cet être dont la disparition imminente va nous précipiter dans un vacarme de chenil ou de porcherie. Décidément, ça n'est pas simple.
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Passant ses doigts épais dans les cheveux du gosse, la femme, à voix basse, sans colère, semble dire à la vie ses quatre vérités.
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En écrasant le petit mégot de la troisième cigarette, en me tournant vers la paroi branlante, en remontant mon col contre mes joues, j'ai enfin pu laisser cet homme dans son couloir, celui de sa vie, avec toutes les portes qu'il était libre d'ouvrir ou de laisser fermées, et dont une au moins donnait sur le vide - dans quoi il pouvait sauter après s'être noué, comme une écharpe, tout le couloir autour du cou.
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L’égalité est à la fois le passé et l’avenir de notre histoire. Il finira le temps des caciques, de ceux qui possèdent davantage que leur regard ne peut embrasser, même s’ils montent sur le toit. Il finira le temps de ceux qui font le tour en auto de terres dont ils ne sauront rien, sinon le rendement à l’hectare.
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Devant les murs de Parme, Frédéric a bâti une ville au lieu d’un camp. Il est la Stupeur du Monde et ne doute pas, quand viendra le printemps, de pouvoir écraser ce nouveau nid de Guelfes. Il a cinquante-trois ans, il est heureux, il vient d’échapper à une nouvelle tentative d’assassinat, et qu’elle ait été organisée par le pape ajoute à son plaisir.
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Seul me porte vers les livres le désir d'y trouver ce que je ne soupçonnais pas, et c'est pourquoi je déteste les faiseurs de bouquins, les romances ficelées, cousues d'astuces, farcies de diables à ressort, de pièges à souris.
p. 32
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"À l'aube, les arroseuses mouillent la poussière des rues ; elle reviendra avant midi cet empêchement de voir et de respirer que l'on croyait à demeure chez les porteurs de babouches et de sombrero. Poudre de briques, plâtre des murs et des plafonds ; on dit que trois cent mille bombes sont tombées sur la ville.
Un gamin d'une quinzaine d'années est assis dans la vitrine crevée d'un marchand de livres d'occasion. Le bâtiment menace ruine, il a perdu son toit et son dernier étage, les occupants ont été évacués. Dans son costume de laine, avec une cravate qui ressemble à la ceinture d'un vieux peignoir, le bonhomme est en pleine lecture. Il a le pied sur une pile bien ordonnée - son premier choix - tandis que tous les autres livres, au sol et jusque sur le trottoir, s'étalent, se chevauchent et font les écailles d'un dragon terrassé. Il y a là comme une sécession et la guerre s'en trouve repoussée à mille lieues, au diable.
- Dis, c'est un miroir ou un trou de serrure ?
- Hein ?
- Dans ton bouquin, tu regardes vivre les autres ou tu ne vois partout que toi ?"
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De loin, on dirait une grange. Sous la charpente, ce sont de forts râteliers munis de crochets où pendent les carcasses en attente d'enlèvement. Demi-porcs, demi-génisses demi-moutons sans pieds ni tête. La chaîne de levage pour la mise à mort est à l'entrée, à l'aplomb du portique. Soulevée par une patte, la bête vient d'être frappée au front avec un lourd maillet qui ne l'assomme qu'à demi. Elle tremble, se tord comme un épileptique quand le couteau lui plonge dans la gorge. (Ce maillet, est-ce par dérision que les Français l'ont appelé merlin?) L'œil de l'animal s'imbibe, aspire le plus possible, se révulse et s'éteint. Ca n'est pas la mort qui est abominable ici c'est la moisson. C'est d'avoir fait vivre et se multiplier, c'est d'avoir élevé des êtres-pour-la-mort. Que l'on a portés au monde pour les tuer.
La main ouverte, le bras tendu, j'arrête les hommes qui me regardent vomir : ne me touchez pas.
Une porcherie est un cristal politique. Il n'y a d'avilissement des espèces animales qu'à proportion de celui des hommes. Et c'est à dessein que l'industrie alimentaire nous prive de la prédation, de la dévoration : l'homme est nourri comme sont nourris les animaux de boucherie.
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Le calme. Le calme. Il en cimente toute la maison, avec cette gravité qu'il jette comme du sable sur les départs de feu : fous rires, chagrins, enthousiasmes, trop fortes joies. Que ça puisse déborder, exploser, sortir de ses limites... il veille à l'empêcher avec un savoir-faire d'infirmier des asiles.
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- Dis, c'est un miroir ou un trou de serrure ?
- Hein ?
- Dans ton bouquin, tu regardes vivre les autres ou tu ne vois partout que toi ?
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Ceux qui attendent ne manquent rien , par ce que attendre ce n'est pas différer. C'est jouir non seulement de ce qui est donné ( c'est à dire tout, toujours et simultanement, c'est à dire presque rien ) , mais aussi de ce qui , peut etre, ne le sera jamais , et à quoi l'on ouvre en soi un espace.
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