« De ta vie et de celle de maman, je retiens ceci : en dépit des espoirs, des illusions, des prières, la folie est irrémédiable. Elle est partout, dans toutes les familles, viols, incestes, meurtres. Hommes et femmes. de vous deux, qui a contaminé l'autre ? Qui a porté le premier coup ? Je crois plutôt à une intoxication mutuelle, à un corps-à-corps tragique, mère et fille, serpents entremêlés se crachant leur venin jusqu'à en crever ».
David le Bailly, grand reporter à Paris-Match et à L Obs et ayant écrit 2 livres avant celui-ci, nous fait part ici de sa propre vie, de celle de sa mère, qu'il n'aimait pas et qu'il n'a jamais appelée maman, et surtout de celle de sa grand-mère, qu'il adorait. Celle-ci l'a pris en charge dès sa naissance et ils ont vécu tous les 3 dans le même appartement. Mais sa mère pique des crises continuellement, est mythomane, et sa grand-mère essaie tant bien que mal de le protéger tout en ayant elle-même une envie continuelle de se suicider. C'est après le suicide « réussi » de celle-ci qu'il cherchera qui elle était vraiment, cette Pia Nerina qu'il a tant aimée. Car elle aussi a semé le doute tout au long, a brouillé les pistes depuis sa jeunesse tumultueuse et mystérieuse.
Le père de David ? le grand absent ! le père de sa mère ? Grand absent également !
Ce livre m'a plu et rebutée selon les parties, d'ailleurs imbriquées l'une dans l'autre.
Lorsque l'auteur recherche les indices concernant sa grand-mère, je n'y ai trouvé qu'une succession de lieux, de dates, de noms, qui pour moi ne m'apportaient rien.
Lorsqu'il parle de sa mère, de sa folie, je n'y ai trouvé que violence.
Lorsqu'il parle de sa relation avec sa grand-mère, c'est là qu'il a fait mouche : c'est tendre, émouvant, vrai, poétique. J'ai eu souvent la gorge serrée.
Donc mon avis est mitigé, et j'ai vogué d'un état d'esprit à l'autre au gré des pages. Je pense que chaque lecteur y trouvera ce qu'il voudra, tout en sachant qu'il s'agit d'un dévoilement intime, et que ce n'est pas à lui de juger, juste de comprendre et puis…de se taire.
Merci aux éditions du Seuil et à Babelio pour cette Masse critique privilégiée sur les livres de la rentrée littéraire.
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Lu d'une traite ou presque, ce livre possède d'indéniables qualités. A la fois investigation, biographie (non autorisée, c'est le moins qu'on puisse dire), mise en perspective historique et approche psychologique d'une assez grande finesse, il se permet en outre des réflexions plutôt profondes sur les notions d'indépendance, de libération de la femme, de liberté.. Autour du couple Anne Pingeot-François Mitterrand, deux fois président de la cinquième république, on voit évoluer les proches, les fidèles, le premier cercle, auquel appartiennent ceux qu'on appellera les morts de Mitterrand.
Sa première femme et unique épouse aussi, qui fut et sera à jamais ladite "Première Dame", présentée comme compagne très proche, épouse parfaite et meilleure amie, dans l'histoire racontée aux Français. Ce peuple républicain et régicide aime en effet que ses chefs d'Etat aient à la fois une vie officielle imposante et une vie conjugale qui les rapproche du Français moyen tel qu'il se rêve peut-être lui même: une chaumière, deux coeurs, pour la vie.
Sauf que là, il y eut deux foyers, le faux, connu de tous, et le vrai, connu de quelques uns. Quant aux coeurs..
La naissance de Mazarine survient après plusieurs années d'une double vie, et juste après des revers politiques importants pour son père..Vingt sept ans d'âge séparent le couple parental.
Lorsque son existence fut révélée une vingtaine d'années plus tard, Mitterrand avait bien entamé son deuxième septennat, et les Français découvraient incrédules les traits de leur chef d'Etat sur le visage d'une très jeune fille à l'air un peu boudeur en couverture de Paris Match. Mais pas un mot ou si peu sur sa mère. Comme si François Mitterrand avait engendré sa fille par parthénogénèse.
Et pourtant, Mme Anne Pingeot, qui fut la discrète vraie compagne du président, semble avoir été tout sauf une personne effacée.
Née avec une cuiller d'argent dans la bouche, elle appartient à la riche mais discrète et pieuse bourgeoisie de Clermont-Ferrand. Deux villas mitoyennes à Hossegor, celle des Pingeot et celle du couple Mitterrand, des amitiés qui se lient, une fillette pleine de vie et adorée par son père, qui va "monter" à Paris afin d'étudier les Beaux -Arts et se libérer de la bien pensance corsetée de Clermont, pour finir cloîtrée dans les coulisses d'une vie politique menée jusqu'au plus haut niveau, sa vie est un roman. Mais un roman qui n'est lu par personne, car ignoré de tous, ou presque. Une femme qui veut devenir, selon l'heureuse formule de David Le Bailly, une femme de savoir, et qui sera peut-être aussi une femme de pouvoir, mais au prix de l'effacement de toute publication de sa vie sentimentale et familiale,et du renoncement à faire de sa vie privée un roman public.Mais, direz-vous, n'est-ce pas là une vie très ordinaire, et le lot du plus grand nombre? Non, car vivre sa vie en se montrant, car on est ordinaire et donc protégé des des feux de la célébrité, n'est pas vivre dans l'anonymat.
Vivre sa vie extraordinaire en ne pouvant pas se montrer, si.
Une vie de recluse, de prisonnière, de captive. En vivant aux côtés du personnage qui est au sommet du pouvoir.
Qu'est-ce alors qu'être libre? Posséder le pouvoir? Mais dit-elle à une amie, "Le pouvoir, c'est le savoir, et ce savoir, il faut le partager" Sans illusion donc, sans délire despotique et cohérente avec elle-même, elle exerce jusqu'à la retraite le métier de conservateur de Musée, et enseigne à l'Ecole du Louvre. Même si sa personnalité professionnelle est parfois colorée de traits plus durs, elle est décrite comme un femme qui finalement possède des qualités de discrétion allant jusqu'à l'abnégation. Image quasi sulpicienne que l'auteur rectifie souvent, en soulignant les aspects plus durs et autoritaires chez cette héritière d'une éducation bourgeoise du 19ème siècle, vrai point commun avec F. Mitterrand, dont la mère ressemblait dit Le Bailly, étrangement à Anne Pingeot.
Libre semble-t-il dans l'exercice de son métier (elle fut tout de même aidée dans cette liberté par ses liens avec F.M.), Anne Pingeot le fut beaucoup moins dans sa vie familiale, la jouissance ordinaire de celle-ci lui étant interdite par le non divorce du couple Mitterrand-Gouze.
Une vie à l'envers de l'ordinaire, en quelque sorte. Cette clandestinité forcée, cette captivité, peut-elle être appelée liberté? Si par certains côtés, il y a de la liberté dans la décision d'une très jeune femme de faire fi des conventions et des tabous de sa propre classe sociale, que penser de cette vie "souterraine", dont il apparaît vite qu'elle n'a rien à voir avec les délices des amours naissantes cachées?
Eternel paradoxe et question dont la réponse est indécidable: être libre serait-ce donc savoir se soumettre?
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Finalement ce livre noté roman est une autobiographie. L'auteur raconte son enfance avec sa grand-mère qui va se suicider sous ses yeux. Remontant dans le temps il parle de cette femme étonnante, partie de rien ou presque et vivant dans le luxe et l'oisiveté. Retour à rebours pour écrire l'histoire de cette famille. L'Hôtel de la folie a peu à voir avec David, puisque c'était dans un appartement cossu qu'il a grandi entre deux femmes qui ont fini par se haïr, mais de la folie il y en a. On est avant la guerre de 1939 dans ce Paris de fêtes où les hommes sont peu de choses pour Pia et sa fille.
J'ai été un peu gênée par moment, ne sachant plus si l'auteur s'adressait ( dans ses souvenirs) à sa mère où à sa grand-mère. Mais on retrouve vite le fil.
Pia Nerina est au centre de ce roman, celle qui lui avait dit à 14 ans " débrouille-toi , tu es un homme maintenant " avant de disparaitre.
Vie bousculée, vie de violence, vie de drame cette femme a tout vécu.
J'ai bien aimé ce roman qui nous parle d'une époque, de relations difficiles, de familles. L'écriture coule toute seule. Quelques photos - pas très lisibles- sont incrustées dans le texte. Un roman hommage à cette grand-mère fantasque à laquelle l'auteur s'était raccroché, ayant une mère violente qui avait fait peu à peu naufrage.
Un nouveauté de la rentrée 2023 à découvrir. Passionnant.
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1866. "La photo en couverture de ce livre est une des plus célèbres d'Arthur Rimbaud, la plus ancienne aussi : sa première communion, faite avec son frère Frederic."
Qu'a-t-il bien pu se passer pour que l'image de Frédéric soit effacée? Pour qu'Arthur Rimbaud apparaisse seul? S'agit-il d'une raison liée à l'histoire familiale, à ses conflits d'une extreme violence. "Dans les régimes totalitaires, on efface des images les opposants, les résistants, les dissidents. Frédéric Rimbaud a-t-il été un de ceux là?"
Il faudra plus d'un siècle pour savoir qui a falsifié cette photo et découvrir l'entreprise de destruction d'Isabelle, soeur des deux frères, et de Paterne Berrichon, mari d'Isabelle.
Néanmoins, c'est bien Arthur qui a crucifié son frère aux yeux des générations suivantes : ""ça me gênerait assez, par exemple, que l'on sache que j'ai un pareil oiseau pour frère. ça ne m'étonne d'ailleurs pas de ce Frédéric : c'est un parfait idiot, nous l'avons toujours su..""
Certes nombreux sont les artistes qui ont eu une vie dissolue, autocentrée, empreinte de violence et de tyrannie mais Arthur Rimbaud nous apparaît ici plus que despote et antipathique.
Ce roman lève plus que le côté obscur d'un artiste mais celui de toute une famille. En cela il est à saluer. Néanmoins sa lecture reste parfois fastidieuse car les personnages sont peu attachants et le rythme très lent.
Incontournable pour les amoureux du Bateau Ivre et d'Une saison et Enfer.
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On pensait avoir tout lu et tout connaître sur Rimbaud..
Et bien non grâce a David le bailly nous découvrons une face cachée une part d ombre sur cette célèbre photographie.
L histoire du frère de ... persécuté par sa famille toute sa famille.
La plume est belle et éclairante sur le poète et son microcosme.
Un mélange d enquête de roman et d interventions personnelles de l auteur .
Plaisir de lecture 9/10
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Pia Nerina a sauté par la fenêtre de son appartement Place de l’étoile à Paris, son petit fils n’a rien pu éviter, peut-être aurait il pu l’aider à tuer sa fille, sa mère, insupportable. Mais qui était donc cette grand mère venue de Naples, propriétaire de biens immobiliers dans ce beau quartier , qui entretenait une relation détestable avec sa fille, quelle était son histoire ? C’est en 2017, à la mort de sa mère, 30 ans après celle de Pia, sa grand-mère, qu’il va pouvoir commencer son enquête, en fouillant dans les documents, les photos, en se rendant à Naples, en Espagne, car sa mère ne lui a jamais rien révélé malgré ses questions sur l’ hôtel de la Folie à Naples où elle passera son enfance, huitième fille d’une fratrie de 13, jusqu’à cet appartement parisien et ce train de vie luxueux, quel chemin tortueux Pia a t elle emprunté? Qui est ce Pyrrhus, ce bienfaiteur espagnol, homme d’affaires proche des nationalistes en 1936, qui mangeait à la table des notables nazis à Paris? Le père de sa mère? Et lui qui est son père? Il porte un nom certes, mais est ce celui de son géniteur?
Du petit garçon qui voit sa grand-mère sauter par la fenêtre à l’adulte qui va tenter de découvrir les secrets familiaux, on suit agréablement cette enquête tortueuse truffée de fausses pistes d’autant que le temps a fait son œuvre et les certitudes sont rares.
Une écriture sèche ponctuée de phrases courtes porte ce livre rapidement avalé. C’est un sujet bien des fois traité et on peut regretter une certaine superficialité dans l’analyse.
On a plaisir à suivre cette enquête presque policière, cette quête d’identité qui ne manque pas de qualité mais à laquelle, selon moi, il manque un véritable souffle, une vraie puissance.
Merci à Babelio pour cet envoi.
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Un remarquable travail de recherche et de documentation pour une biographie reconstituée très intéressante et magnifiquement écrite.
Jusqu'à cette lecture, je ne connaissais rien de l'histoire familiale d'Arthur Rimbaud, celui qui a capté la lumière et les honneurs.
L'histoire est plus complexe et moins élégante que celle que sa mère et sa sœur ont façonnée au fil des années.
Le récit reconstitué par David Le Bailly rend hommage à son frère Frédéric, mal aimé, mal traité, déchu de ses droits et raconte la férocité d'une mère qui n'hésitera pas transformer la réalité pour créer le mythe Arthur Rimbaud au détriment de son fils ainé - frère d'Arthur- qu'elle juge sévèrement : un imbécile, un bon à rien qui fait honte à la famille.
Qu'a t-il fait ce fils ainé pour être ainsi traité ? trop ressembler à son père qui a fui la mère execrable ?, son manque d'ambition alors que sa mère est propriétaire de nombreuses terres dans le village depuis plusieurs générations ?
Arthur Rimbaud ne sort pas grandi de ce récit : on découvre un homme qui a trahi son frère, et a pris soin d'être systématiquement d'accord avec sa mère pour obtenir de quoi vivre.
Une enquête fascinante !
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Frédéric avait un frère: Arthur....
Ce livre est le récit de l'annihilation de Frédéric par sa mère et sa sœur, avec une complicité de fait d'Arthur. En creux, David égratigne (assez sérieusement!) la légende rimbaldienne, la légende du roi Arthur (celle de l'homme, pas de sa poésie). Il esquisse un homme (surtout post années de poésie) avide d'argent, sans compassion, utilitaire.
Mais il s'agit surtout de la difficile quête sur qui fut Frédéric. Plusieurs fois au début de ce livre, je m'interrogeais sur la raison et l'intérêt de cette recherche, aux résultats par ailleurs passablement minces. Elle est à trouver me semble-t-il dans la proximité de l'auteur avec Frédéric, évoquée en milieu d'ouvrage: "Ce "raté" me fascinait et me repoussait à la fois. Il faisait surgir des souvenirs pas toujours heureux. Ma hantise depuis l'enfance de faire les mauvais choix, de prendre les mauvaises directions. Bref, d'être un "raté...... La relation entre Frédéric et sa mère évoquait celle que j'avais eu avec la mienne, faite d'espoirs déçus, d'incompréhensions, de pardons jamais accordés. Comme mon héros, je n'avais pas eu de père. "
Doit on par exemple aux souvenirs de David Le Bailly cette nostalgie de l'enfance de la page 244?: ""avaient ils jamais été plus heureux l'un et l'autre que ces années là , au contact de ces garçonnets, crasseux peut être, bagarreurs, grossiers, mais libres?"
Cela a ravivé mon intérêt, qui s'émoussait devant la modicité des informations sur Frédéric qu'avait pu recueillir l'auteur.
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Dans ce roman, il est question de l'autre Rimbaud. Non pas Arthur Rimbaud, ce poète français, excellent élève, raflant les premiers prix à l'école. Complice à sa jeunesse, de son frère presque jumeau Frédéric de un an son aîné.
Tous deux en relation assez tumultueuse avec une mère stricte, dure, tyrannique et perfide mais qui néanmoins préfére l'un à l'autre.
L'autre, celui qui lui rapelle l'époux militaire, le déserteur du foyer conjugal, Frédéric le raté.
Lui, l'autre à qui on a tout fait pour l'exclure de la famille, de l'héritage et d'une place dans le caveau familial.
Pas assez de documentation, pas de trace du frère. Les recherches sont laborieuses mais
David le Bailly arrive à nous tracer le parcours de vie de cet autre Rimbaud, ce frère trahi, haï et banni des siens.
Il faut dire que j'imaginais un secret autour de Frédéric. J'ai même pensé que lui aussi écrivait, avait la plume facile mais non pas du tout. Donc petite déception quand même mais vite dissipée par la découverte de l'autre face du grand poète, l'autre Arthur Rimbaud.
Plusieurs fugues, un comportement indécent, des relations sulfureuses, un aventurier qui fait plusieurs voyages en afrique, en abyssinie, qui termine sa vie en vagabond, sans le sou.
Bien que tout ça ne soit pas du goût de sa mère et sa soeur Isabelle, elles font tout pour l'élever à la sainteté, au rang d'archange.
Dans son poème ''mauvais sang'' du recueil ''une saison en enfer'' il écrit :
Les gaulois étaient les écorcheurs de bêtes, les brûleurs d'herbes les plus ineptes de leur temps.
D'eux, j'ai: l'idolâtrie et l'amour du sacrilège;-oh! Tous les vices, colère, luxure, -magnifique, la luxure ;- surtout mensonge et paresse.
Un personnage torturé qu'était cet Arthur. Sa vie n'était elle pas finalement aussi ratée ?
Qui des deux frères a finalement réussi ?
Pourquoi cette répugnance familiale envers Frédéric ? Mystère !
On a pas toutes les réponses à nos questions mais j'ai trouvé ce roman riche en informations. Une très belle découverte pour moi.
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Le livre s'ouvre sur un drame : Pia, la grand-mère bien aimée du narrateur vient de se jeter par la fenêtre. Pourquoi ? Son père et son grand-père maternel sont inconnus. Sa mère, visiblement, ne s'est pas occupée de son fils pris en charge par Pia.
Bien des années plus tard, le narrateur (l'auteur?) mène l'enquête. Lettres anciennes, photos, rapports de police l'éclairent peu à peu : Pia est issue d'une famille tourmentée napolitaine. A son arrivée en France Pia n'a qu'une obsession : user de sa beauté pour "se caser" avec un homme, riche, puissant et protecteur qui lui donnera sécurité et lui assurera une vie aisée. « Pyrrhus » sera cet homme. Les indices semés ça et là par l'auteur permettent facilement au lecteur de mettre un nom sur cet homme célèbre en son temps. Mais est-il le père de la mère du narrateur? Mystère.
Sa mère fut élevée avec cette même obsession : trouver le beau parti, l'homme riche. Elle le fera jusqu'à la folie. Pire : déçue, elle se retournera violemment contre Pia, et privera son fils d'amour maternel. Ce fut le drame de celui-ci : sa grand-mère l'avait protégé de sa mère, alors que lui n'a pas su la protéger de sa fille.
Cette enquête sur une folie familiale est menée avec sensibilité et rigueur. On peut trouver dans cette plongée dans un univers parfois trouble et interlope, comme un petit air de Modiano. On peut y voir aussi les conséquences d'un patriarcat porté à ses extrémités : pour certains milieux, il ne pouvait y avoir pour les filles qu'une seule issue dans la vie : trouver l'homme protecteur, et si possible l'homme riche.
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David Le Bailly tente avec ce roman de retracer la vie du frère d'Arthur Rimbaud.
Paria de la famille et effacé de l'histoire du poète, Frédéric Rimbaud voit son destin réparé par ce roman. L'auteur alterne déroulement de son enquête et morceaux de la vie de Frederic. On y découvre aussi l'emprise de la mère Rimbaud sur ses fils. Un roman enquête passionnant qui se déroule au coeur des Ardennes.
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J’avais beaucoup apprécié le dernier roman de David Le Bailly, « L’autre Rimbaud » ,car il faisait sortir de l’ombre envahissante du poète adulé, son frère et le mettait en lumière dans sa vie ordinaire.
Cette fois, le propos est totalement différent car l’auteur se livre, nous offre l’histoire de sa famille et en particulier de sa grand-mère adorée, Pia Nerina. Le récit commence, le 7 décembre 1987, par une scène terrible qui nous pétrifie comme l’a été l’auteur : sa grand-mère octogénaire vient de sauter de la fenêtre de l’appartement où elle vit avec sa fille et son fils. Trente après, à la mort de sa mère, alors qu’il vide l’appartement, il découvre des photos, des lettres, des papiers et il s’aperçoit qu’il ne connaissait ni sa grand-mère ni sa mère.
Sa grand-mère était née en Italie à l’hôtel de la Folie qui donne son titre au livre. C’est bien la folie qui caractérise Pia Nerina mais celle qui fait vivre intensément, en-dehors des chemins balisés, différente de la folie destructrice de la fille de Pia, Victoria qui rend la vie impossible à sa mère et son fils, qui les bat, qui est violente.
Pia Nerina a beaucoup menti et beaucoup caché de choses mais son petit-fils a besoin de découvrir la femme qu’elle était avant d’être sa grand-mère : sa quête le mènera de Naples, à Paris, la Riviera niçoise, l’Espagne mais la vraie Pia Nerina se dérobera, comme elle l’a fait toute sa vie. L’auteur lui en veut de l’avoir laissé sans explications, le dépouillant ainsi d’une partie de son histoire, de son identité.
David Le Bailly a évolué au sein d’une famille dysfonctionnelle, sauvé par l’amour de sa grand-mère qui a suppléé à l’indifférence et au rejet maternels. Ce témoignage se présente comme une longue adresse à sa grand-mère, la tutoyant comme si elle était encore là, à ses côtés. Ce n’est pas l’adulte qui parle mais le petit garçon qui trouvait tendresse, attention, caresses auprès d’elle. Cela rend le texte émouvant, d’autant qu’il est émaillé de photos de Pia Nerina comme un album de famille que l’on feuillette avec nostalgie. Un bel hommage.
Mais je suis restée à la surface de ce texte très personnel, très (trop) intime, noyé sous de trop nombreux détails d’adresses, de noms, de lieux, certainement importants pour l’auteur mais qui ont nui à mon intérêt pour le roman et à sa fluidité.
Il semblerait que les grands-mères inspirent les auteurs en cette rentrée littéraire 2023 puisque Olivia Elkaim rend, elle aussi, hommage à la sienne dans son roman « Fille de Tunis ».
Je remercie Babelio et les éditions Seuil pour m’avoir fait découvrir une facette de l’auteur que je ne connaissais pas.
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De David Le Bailly je ne connaissais que « L’Autre Rimbaud », que j’avais beaucoup aimé. Lorsque Babelio m’a proposé de recevoir son nouvel ouvrage, « Hôtel de la Folie », je n’ai donc pas hésité longtemps !
Il s’agit ici d’une véritable introspection puisque l’auteur plonge dans son passé afin de comprendre qui était vraiment sa grand-mère tant aimée, Pia Nerina, Napolitaine immigrée en France et qui réussit à se constituer un véritable patrimoine dans les beaux quartiers parisiens. La tâche est ardue car Pia Nerina s’est suicidée sous les yeux de son petit-fils, laissant derrière elle un traumatisme mais aucune information sur sa vie.
L’auteur affronte aussi le fantôme de sa propre mère, alcoolique, mythomane et d’une violence inouïe.
Le livre se lit bien mais certaines pages laissent un malaise, notamment lorsqu’ à travers les yeux de l’auteur enfant on assiste aux passages à tabac de « Mémé », rouée de coup par sa propre fille.
Qui était vraiment Pia Nerina ? C’est la question qui traverse tout l’ouvrage. L’auteur essaye de trouver des réponses à la manière parfois d’une véritable enquête policière cependant peu de réponses sont données.
Le flou demeure, et ce livre se veut alors un véritable hommage à celle qui a été la figure maternelle et qu’il a tant aimée.
C’est un roman touchant que j’ai été heureuse de découvrir et je remercie les éditions du Seuil pour l’envoi du livre ainsi que Babelio pour cette opportunité !
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Rentrée littéraire 2023
Avec HOTEL DE LA FOLIE, DAVID LE BAILLY nous invite à l’accompagner dans le récit intime de la vie de sa grand-mère, Pià Nerina, qui fut sa seconde mère, avec une question centrale : pourquoi, au final, a-t-elle choisi de se suicider ? Comment a-t-elle pu en arriver là, en le laissant seul, lui, du haut de ses quatorze ans, témoin direct du drame ?
Mille questions se posent alors à lui. En quête de réponses, il mènera une enquête à la façon de Modiano, date par date, dans tous les lieux qu’elle a pu fréquenter, auprès de toutes les personnes avec qui elle a partagé sa vie. Mais là ou Modiano court après le temps qui passe, DAVID LE BAILLY lui court après sa propre enfance et la seule personne qui l’a vraiment aimé.
Le point de vue du narrateur qui s’adresse à sa grand-mère, le « tu », donne à ce récit une force décuplée, sans doute indispensable à l’auteur pour exprimer son amour mais aussi et surtout sa colère, son incompréhension, sa culpabilité même, sa détresse au final de n’avoir aucune vraie réponse à ses questions, ni sur sa grand-mère à la vie trépidante et mensongère, ni sur sa propre mère, dont la folie fait froid dans le dos.
Une introspection douloureuse de l’auteur, écrite tantôt avec rage, tantôt avec une grande délicatesse qui donne à ce texte bouleversant une profonde humanité.
Un grand merci aux éditions du Seuil et à Babelio pour m’avoir accordé ce privilège de lecture avant l’heure.
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Le Rimbaud de David Le Bailly, c'est l'autre, justement, celui qui n'a pas su (ou voulu) répondre aux attentes de son milieu social, milieu familial, devrais-je dire ! Rien de bien nouveau, me semble t-il, dans une époque où, dans une certaine caste sociale il était de bon ton d'avoir un statut qui prête à considération !De plus, quand on est le frère d'un poète très tôt considéré comme talentueux, seul enfant ayant droit à l'attention maternelle, si tant est qu'elle en fut capable, la Folcoche de la famille Rimbaud...
Roman ou enquête, ou besoin de rétablir une juste réalité ? Quelle que soit cette étude, elle donne un nouvel éclairage à un poète qui a accompagné les lointaines années de mon adolescence, j'en remercie- et félicite- l'auteur.
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David le Bailly livre une autobiographie émouvante et sincère.
La mort de sa grand-mère, et bien plus tard de sa mère, sont les évènements structurants de son enquête pour tenter de découvrir son histoire familiale.
Une grand-mère solaire et aimante. Une mère extravagante, souvent méchante, violente et folle.
Mensonges, secrets, vont envelopper la vie de 3 générations et l'auteur aura bien du mal à démêler le vrai du faux.
Le suicide de sa grand-mère sous ses yeux restera évidemment un traumatisme ineffaçable et cristallisera sa culpabilité.
2 femmes fortes dans la vie de David le Bailly et si peu d'hommes.
Aucune certitude concernant son grand-mère ni son père.
De quoi sa grand-mère a t-elle vécu ? Comment les relations entre la mère et la fille se sont construites, puis déconstruites ?
Comment un jeune garçon peut grandir et se construire dans cette ambiance délétère, malsaine ?
Comme une introspection, l'auteur partage ses interrogations, sa culpabilité, sa souffrance.
C'est magnifiquement écrit. Un hommage à une grand-mère aimée, protectrice et qui n'a pu supporter la dérive violente de sa fille.
Merci à Babelio et aux éditions du Seuil pour l'envoi en avant première de cet ouvrage de la rentrée littéraire.
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