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Citations de Emily St. John Mandel (363)


Au Cap, Olive rencontra un romancier qui était sur les routes depuis un an et demi, avec son mari, pour assurer le service après-vente d’un livre qui s’était vendu quatre ou cinq fois plus que Marienbad.
« Nous essayons de voir combien de temps nous pouvons voyager avant d’être obligés de rentrer à la maison. » L’auteur se prénommait Ibby, diminutif d’Ibrahim, et son mari s’appelait Jack. Ils étaient assis tous les trois, un soir, sur le toit en terrasse de l’hôtel, encombré d’écrivains qui participaient à un festival littéraire.
« Vous cherchez à retarder le moment du retour ? demanda Olive. Ou vous aimez simplement voyager ?
– Les deux, répondit Jack. Ça me plaît d’être sur la route.
– Et notre appartement est assez loche, dit Ibby, mais nous n’avons pas encore décidé ce que nous allonrs faire. Déménager ? Rénover ? L’un ou l’autre. »
Il y avait des dizaines d’arbres sur le toit, dans d’énormes jardinières, avec de petites lumières qui scintillaient dans les branches. On entendait de la musique, un quatuor à cordes. Olive portait sa robe de designer ultrachic, une robe en lamé d’argent qui lui tombait aux chevilles. Ça, c’est l’un des moments glamour, se dit-elle, le mémorisant soigneusement afin de pouvoir y puiser plus tard de quoi se régénérer. La brise diffusait un parfum de jasmin.
« Moi, dit Jack, j’ai entendu une bonne nouvelle aujourd’hui.
– Dis-moi, le pressa Ibby. J’ai passé toute la journée dans une espèce de tunnel festivalier. Blocus sur les nouvelles de l’extérieur.
– La construction vient de commencer sur la première des Colonies Lointaines. »
Olive sourit et faillit parler, mais se trouva provisoirement à court de mots. Les plans pour les Colonies Lointaines avaient débuté quand ses grands-parents étaient enfants. Elle se souviendrait toujours de cet instant précis, pensa-t-elle, de cette réception, de ces gens qu’elle aimait beaucoup et ne reverrait peut-être jamais. Elle serait en mesure de raconter à Sylvie où elle se trouvait exactement quand elle avait appris la nouvelle. Depuis combien de temps n’avait-elle pas éprouvé un authentique émerveillement ? Cela remontait à un moment. Elle fut inondée de bonheur.
« À Alpha du centaure ! » dit-elle en levant son verre.

À Buenos Aires, Olive rencontra une lectrice qui tenait absolument à lui montrer son tatouage. « J’espère que vous ne trouverez pas ça bizarre », dit la femme en remontant sa manche pour révéler sur son épaule gauche une citation du livre – Nous savions que ça allait arriver – tracée d’une belle écriture cursive.
Olive en eut le souffle coupé. Ce n’était pas simplement une réplique de Marienbad, c’était un tatouage qui figurait dans Marienbad. Dans la seconde moitié du roman, son personnage Gaspery-Jacques avait cette phrase tatouée sur le bras gauche. Vous écrivez un livre avec un tatouage fictif et voilà que celui-ci prend corps dans la réalité ; après ça, presque tout semble possible. Elle avait déjà vu cinq tatouages semblables, mais c’était toujours aussi extraordinaire d’observer comment la fiction pouvait déteindre sur le monde et laisser une marque sur la peau de quelqu’un.
– C’est incroyable, dit-elle dans un murmure. C’est incroyable de voir ce tatouage dans le monde réel.
– C’est la phrase de votre livre que j’ai préférée, dit la femme. Elle est vraie dans tellement de domaines, n’est-ce pas ?

Mais est-ce que tout ne paraît pas évident avec le recul ? Dans le dirigeable qui planait à basse altitude vers la République du Dakota, Olive regardait par le hublot le crépuscule bleuté sur les prairies, essayant de trouver une certaine paix dans le paysage. Elle avait reçu une nouvelle invitation pour un festival sur Titan. Elle n’y était pas retournée depuis son enfance et n’en gardait que le vague souvenir du delphinarium bondé, d’un pop-corn curieusement sans saveur, de la brume jaunâtre du ciel diurne – elle était allée dans une colonie dite Réaliste, l’un des avant-postes où les colons avaient opté pour des dômes transparents afin d’expérimenter les véritables couleurs de l’atmosphère titanienne – et aussi le souvenir de pratiques étranges du genre de celle qui consistait pour les ados à peindre sur leurs visages des grands carrés de couleur semblables à des pixels, qui étaient censés déjouer les logiciels de reconnaissance faciale mais qui présentaient l’inconvénient de les faire ressembler à des clowns dérangés. Devait-elle aller sur Titan ? Je veux rentrer à la maison. Où était Sylvie en cet instant ? C’est quand même plus facile que d’avoir un emploi de bureau, ne l’oublie pas.
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« Je voudrais vous montrer quelque chose d’étrange. » Le compositeur – qui a été célèbre dans un cercle extrêmement restreint, une sorte de niche, c’est-à-dire qu’il ne courait aucun danger d’être reconnu dans la rue mais que la plupart des gens appartenant à une ou deux sous-cultures artistiques confidentielles connaissaient son nom – était manifestement mal à l’aise. Il se pencha tout près de son micro, le visage en sueur. « Ma sœur avait l’habitude d’enregistrer des vidéos. Celle-ci, que j’ai trouvée dans ses affaires après sa mort, présente une espèce d’anomalie que je n’arrive pas à expliquer. » Il s’interrompit, occupé à régler un bouton sur son clavier. « J’ai écrit une musique pour l’accompagner, mais le morceau s’arrêtera juste avant l’anomalie pour nous permettre d’apprécier la beauté de l’imperfection technique. La musique se fit d’abord entendre, crescendo de cordes à la tonalité rêveuse, suggestion de parasites affleurant sous la surface, puis vint la vidéo : sa sœur promenait sa caméra le long d’un sentier forestier à peine marqué, en direction d’un érable très ancien. Elle passait sous les branches de l’arbre et braquait sa caméra vers le haut, dans le feuillage vert qui étincelait au soleil, caressé par la brise, et la musique s’interrompit si brusquement que le silence fit l’effet d’être la mesure suivante. Celle d’après fut l’obscurité : l’écran vira au noir pendant une seconde, il y eut une brève confusion de sons qui se chevauchaient – quelques notes de violon, une lointaine cacophonie comme à l’intérieur d’une station de métro, un étrange whoosh évoquant une pression hydraulique – et puis en un clin d’œil ce fut terminé, l’arbre était de nouveau là et la caméra faisait des mouvements chaotiques tandis que la sœur du compositeur, semblait-il, regardait autour d’elle avec affolement, oubliant peut-être la caméra qu’elle avait à la main.
La musique du compositeur reprit, passant en douceur à l’une de ses compositions les plus récentes, laquelle accompagnait cette fois une vidéo qu’il avait tournée lui-même, cinq ou six minutes d’un coin de rue de Toronto d’une laideur agressive, mais avec un orchestre à cordes s’efforçant laborieusement de rendre l’idée d’une beauté cachée. Le compositeur travaillait rapidement, jouant sur ses claviers des séquences de notes qui, une mesure plus tard, émergeaient sous forme d’accords de violon, construisant la musique par couches successives tandis que défilaient sur l’écran, au=dessus de sa tête, les images de la rue de Toronto.
Au premier rang des spectateurs, Mireille Kessler était en larmes. Elle avait été amie avec Vincent, la sœur du compositeur, et n’avait pas su que celle-ci était morte. Elle quitta la salle peu après et passa quelque temps dans les toilettes pour dames, essayant de se ressaisir. Profondes inspirations, couche de maquillage réparatrice. « Du calme, dit-elle tout haut à son reflet dans le miroir. Du calme. »
Elle était venue à ce concert dans l’espoir de parler au compositeur et de découvrir où se trouvait Vincent. Elle avait certaines questions qu’elle aurait voulu poser. Parce que, dans une version de sa vie si lointaine qu’elle s’apparentait aujourd’hui à un conte de fées, Mirella avait eu un mari – Fayçal – et tous deux avaient été amis avec Vincent et le mari de cette dernière, Jonathan. Il y avait eu plusieurs années magnifiques, des années de voyages et d’argent, et puis les lumières s’étaient éteintes. Le fonds d’investissement de Jonathan s’était révélé être une pyramide de Ponzi. Fayçal, incapable de faire face à la ruine financière, s’était donné la mort.
Par la suite, Mirella n’avait plus jamais parlé à Vincent, car comment celle-ci aurait-elle pu ne pas être au courant ? Cependant, une décennie après le suicide de Fayçal, elle se trouvait au restaurant avec Louisa, sa petite amie depuis un an, quand le premier doute s’était insinué en elle.
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Et si, au lieu de cela, on voulait disparaître dans ladite nature ? Étrange pensée à bord d’un bateau qui fait route vers le nord, une semaine plus tard, remontant la côte ouest découpée de l’île de Vancouver. Un paysage de plages irrégulières et de forêts, avec des montagnes en toile de fond. Et puis d’un seul coup, aux rochers déchiquetés succède une plage de sable blanc, la plus longue qu’Edwin ait jamais contemplée. Il voit des villages sur le rivage, des volutes de fumée, des poteaux en bois ornés d’ailes et de visages peints – des totems, se souvient-il – érigés çà et là. Il n’en comprend pas la signification et les trouve donc menaçants. Au bout d’un long moment, le sable blanc disparaît et le rivage redevient un mélange de rochers escarpés et de criques. De temps à autre, il aperçoit au loin un canoë. Et si on devait se dissoudre dans la nature sauvage comme le sel dans l’eau ? Edwin veut rentrer chez lui. Pour la première fois, il commence à s’inquiéter pour sa santé mentale.

Les passagers du bateau : trois Chinois allant travailler à la conserverie ; une jeune femme très nerveuse, d’origine norvégienne, qui voyage pour rejoindre son mari ; Thomas et Edwin ; le capitaine et deux hommes d’équipage canadiens, sans compter des tonneaux et des sacs de fournitures. Les Chinois rient et parlent dans leur langue. La Norvégienne reste dans sa cabine, sauf pour les repas, et ne sourit jamais. Le capitaine et les matelots sont cordiaux, mais ça ne les intéresse pas de bavarder avec Thomas et Edwin, si bien que les deux garçons passent le plus clair de leur temps ensemble sur le pont.
« À Victoria, dit Thomas, ce que ces types totalement amorphes ne comprennent pas, c’est que ce territoire entier est là pour qu’on le prenne. » Edwin lui jette un regard en coin et voit dans l’avenir : Thomas ayant été rejeté par la communauté des affaires de Victoria, il passera le restant de ses jours à pester contre eux. « Ils sont engoncés dans leur petite ville bien anglaise et… bon, je comprends que ça puisse séduire, mais nous avons ici des opportunités à saisir. Nous pouvons créer en ce lieu notre propre monde. » Il continue à palabrer sur l’Empire et sur les opportunités pendant qu’Edwin regarde au-delà de l’eau. Les goulets, les criques et les petites îles sont à tribord ; à l’arrière-plan se dresse l’immensité de l’île de Vancouver, avec ses forêts grimpant à flanc de montagnes dont les sommets se perdent dans les nuages bas. Du côté babord, où ils se tiennent, l’océan s’étend sans interruption jusqu’à la côte du Japon – pour autant qu’Edwin puisse l’imaginer. Il éprouve le même sentiment nauséeux de surexposition qu’il a ressenti dans la prairie. C’est un soulagement quand le bateau effectue enfin un lent virage à droite et s’engage dans un goulet.

Ils atteignent le village de Caiette en début de soirée. Celui-ci se compose de peu de chose : un débarcadère, une petite église blanche, sept ou huit maisons, une route rudimentaire qui mène à la conserverie et au chantier forestier. Edwin reste planté à côté du débarcadère, sa malle à ses pieds, désemparé. Cet endroit est précaire, il n’y a pas d’autre mot. C’est une ébauche de civilisation des plus sommaires, coincée entre la forêt et la mer. Sa place n’est pas ici.
« Le bâtiment plus grand, là-bas, est une pension de famille, lui dit le capitaine avec bienveillance, si jamais vous voulez séjourner un peu ici, le temps de trouver vos marques. »
Edwin est troublé de constater que son désarroi est tellement flagrant. Thomas et lui grimpent ensemble la côte jusqu’à la pension et réservent des chambres à l’étage. Dans la matinée, Thomas part pour le camp de bûcherons tandis qu’Edwin retombe dans l’état végétatif qui s’était emparé de lui à Halifax. Ce n’est pas tout à fait de l’apathie. Il procède à un méticuleux inventaire de ses pensées et en conclut qu’il n’est pas malheureux. Il désire simplement ne plus avoir à bouger dans l’immédiat. S’il y a du plaisir dans l’action, il y a de la paix dans la passivité. Il passe ses journées à se promener sur la plage, à dessiner, à contempler la mer depuis la véranda, à lire, à jouer aux échecs avec d’autres pensionnaires. Au bout d’une semaine ou deux, Thomas renonce à essayer de le persuader de l’accompagner au camp.

Edwin est fasciné par la beauté du lieu. Il aime rester assis sur la plage à regarder au loin les îles, petites touffes d’arbres émergeant de l’eau. Des canoës passent de temps à autre, pour des missions inconnues, et leurs passagers – hommes et femmes – tantôt l’ignorent, tantôt le dévisagent avec curiosité. Des bateaux plus grands arrivent à intervalles réguliers, amenant des hommes et des fournitures pour la conserverie et le chantier. Certains d’entre eux savent jouer aux échecs, ce qui est l’un des grands plaisirs d’Edwin. Il n’a jamais été très doué pour ce jeu, mais il apprécie le sens de l’ordre qui y préside.
« Qu’est-ce que vous faites ici ? lui demande-t-on parfois.
– Oh, je réfléchis à ma prochaine étape », répond-il toujours, ou une formule similaire. Il a le sentiment d’attendre quelque chose. Mais quoi ?
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Edwin St. John Andrew, dix-huit ans, traîne le poids de son nom doublement sanctifié à bord du bateau à vapeur qui traverse l’Atlantique. Les yeux plissés contre le vent qui souffle sur le pont supérieur, il se cramponne au bastingage de ses mains gantées, impatient d’avoir un aperçu de l’inconnu, s’efforçant de discerner quelque chose – quoi que ce soit ! – au-delà de la mer et du ciel, mais il ne voit que des dégradés de gris sans fin. Il est en route vers un monde différent. Il se trouve plus ou moins à mi-chemin entre l’Angleterre et le Canada. J’ai été envoyé en exil, se dit-il, conscient d’être mélodramatique, même s’il y a un fond de vérité dans cette formule.
Edwin compte parmi ses ancêtres Guillaume le Conquérant. Lorsque son grand-père mourra, son père deviendra comte, et Edwin a fait ses études dans deux des meilleures écoles du pays. Cependant, il n’a jamais eu un grand avenir en Angleterre. Il existe bien peu de professions que peut exercer un gentleman, et aucune d’elles n’intéresse Edwin. La propriété familiale étant destinée à son frère aîné, Gilbert, il risque de n’hériter de rien. (Le frère cadet, Niall, est déjà en Australie.) Edwin aurait pu s’accrocher à l’Angleterre un peu plus longtemps, mais il nourrit secrètement des vues révolutionnaires qui sont apparues de manière inattendue au cours d’un dîner, précipitant son destin.
Dans un élan d’optimisme extravagant, Edwin s’est inscrit comme « fermier » sur le manifeste du navire. Il lui vient plus tard à l’esprit, lors d’un moment de contemplation sur le pont, qu’il n’a jamais touché ne serait-ce qu’une bêche.
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J’ai toujours adoré la pluie, et le fait de savoir qu’elle ne vient pas des nuages n’en diminue aucunement l’attrait à mes yeux.
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C'était un homme intelligent, mais il souffrait de cette tendance propre à certains hauts dirigeants de considérer les réceptionnistes comme des meubles de bureau, pas tout à fait au même niveau que les classeurs de rangement, mais pas loin. Peut-être, parce que Simone était non seulement nouvelle à son poste mais aussi nouvelle dans la vie - seulement vingt-trois ans, après tout, malgré son air raffiné de jeune-fille-de-Midtown -, Alkaitis misait-il sur sa naïveté, pensant qu'elle n'était pas nécessairement du genre à savoir que, lorsqu'on vous demande de rester tard pour aider votre patron à "faire de la place dans les armoires à dossiers", cela indique une probable opération camouflage. Ou alors, peut-être que la destruction des documents était une sorte de geste symbolique et que nous avions déjà atteint le stade où, en définitive, peu importait qui voyait quoi.
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Il y a l'idée de la nature sauvage et puis il y a les contraintes peu glorieuses qui s'y rattachent : la sempiternelle corvée d'aller chercher du bois ; parcourir des distances insensées pour rapporter des provisions ; s'occuper du potager et entretenir les clôtures afin d'empêcher les daims de venir dévorer les légumes ; réparer le groupe électrogène ; penser à aller chercher de l'essence pour le générateur ; composter les déchets, se trouver à court d'eau en été ; toujours manquer d'argent parce que les offres d'emploi dans la cambrousse sont limitées ; gérer la furieuse rancœur de votre fille unique qui ne comprend pas votre amour de la nature sauvage et vous demande toutes les semaines pourquoi vous ne pouvez pas simplement vivre dans un endroit normal.
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Les trois caravanes de la Symphonie ltinérante sont identifiées en tant que telles, le nom inscrit en lettres blanches de chaque côté, mais la caravane de tête arbore une ligne de texte supplémentaire :
Parce que survivre ne suffit pas.
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Elle n’avait jamais complètement abandonné l’idée que, si elle explorait suffisamment loin avec son esprit, elle trouverait peut-être quelqu’un qui l’attendait; que, si deux personnes projetaient en même temps leurs pensées vers l’extérieur, elles pourraient se rencontrer à mi-chemin.
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Il lui arrivait de plus en plus souvent de s’assoupir sans avertissement, et cela lui procurait une troublante impression de répétition générale. On commence par s’endormir pendant de brèves périodes, puis pendant des périodes plus longues, puis pour toujours.
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Edwin est capable d’action mais enclin à l’inertie.
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Si nous vivions dans une simulation, comment saurions-nous qu'il s'agit d'une simulation ?
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Ce soir-là, Walter s’arrêta en chemin à son épicerie habituelle, et la perspective de s’y arrêter de nouveau le lendemain, et encore le surlendemain, et encore le jour d’après, lentes déambulations dans l’allée des surgelés après ses heures de service à l’hôtel où il travaillait depuis dix ans, plus vieux d’un jour à chaque fois, tandis que la ville se resserrait autour de lui… franchement, c’était insupportable.
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Kirsten dormit d'un sommeil agité ; chaque fois qu'elle se réveillait, elle avait conscience du paysage désertique, du manque de gens, d'animaux et de caravanes autour d'elle. L'enfer, c'est l'absence de ceux qu'on voudrait tant avoir auprès de soi.
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Dans ces rues, tous les autres marchaient plus vite que moi; ce qu'ils ne savaient pas, c'est que je m'étais déjà déplacé trop vite, trop loin, et que je ne souhaitais pas voyager davantage. Dernièrement, j'ai beaucoup réfléchi au temps et au mouvement, au fait d'être un point fixe dans le va-et-vient incessant.
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Cela fait un choc de se réveiller dans un monde et de se retrouver dans un autre à la tombée de la nuit, mais en réalité la situation n'est pas tellement inhabituelle. Vous vous réveillez mariée, et votre conjoint meurt dans le courant de la journée; vous vous réveillez en temps de paix, et à midi votre pays est en guerre; vous vous réveillez dans l'ignorance et, le soir venu, il est clair qu'une pandémie est déjà là.
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Dernièrement, j'ai beaucoup réfléchi autant et au mouvement, au fait d'être un point fixe dans le va-et-vient incessant.
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Je suis convaincue que si nous nous tournons vers la fiction post-apocalyptique, ce n'est pas parce que nous sommes attirés par le désastre en soi, mais parce que nous sommes attirés par ce qui, dans notre esprit, risque fort de se produire. Nous aspirons en secret à un monde moins technologique.
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Outre ses diverses qualités dans la construction d'un monde post-pandémie assez crédible, je trouve ce roman vraiment remarquable sur le plan littéraire.

Ce n'est pas ce que j'appellerais un roman d'aventure. Son projet et son découpage narratifs particulièrement originaux peuvent dérouter au départ : il n'y a pas UNE histoire mais des moments de vie et de points de vue de personnages liés, saisis dans des allers et retours dans les temps d'avant et d'après la catastrophe. C'est aussi un bon roman psychologique aux sens où ces personnages ont des personnalités bien marquées et différenciées. Seule «critique», il me semble qu'ils sont presque tous trop résilients. La panique n'est pas à leur ordre du jour, mais il est vrai que ce n'est pas du luxe pour des rescapés ou un lecteur très angoissé par une éventuelle chute du monde que nous connaissons. Bref, un roman à ne pas manquer même si l'on n'est pas fan de dystopies.
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La chambre d'hôtel, ce soir-là, était entièrement noire et blanche. Olive rêva qu'elle jouait aux échecs avec sa mère.
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